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Dynamique membranaire au cours du cycle parasitaire érythrocytaire

Données bibliographiques

C. Dynamique membranaire au cours du cycle parasitaire érythrocytaire

1. Au cours de l’invasion

Le processus d’invasion du globule rouge par le parasite commence par la reconnaissance et l’identification de la cellule hôte et son attachement irréversible par des molécules du manteau du mérozoïte. Il se poursuit par la réorientation du mérozoïte qui aligne son pôle apical avec la

membrane érythrocytaire, l’adhésion irréversible des membranes par jonction serrée (Figure 9 c) et l’extrusion des organites apicaux du mérozoïte.

C’est alors que commence la phase d’entrée du parasite, au cours de laquelle le mérozoïte (de façon similaire au sporozoïte lors de l’invasion des cellules hépatiques) transfère du matériel sécrétoire de son complexe apical vers le globule rouge. Cette étape consiste en la décharge séquentielle de vésicules situées dans la région de la proéminence apicale du parasite : les micronèmes, les rhoptries puis les granules denses. Elle se poursuit par l’évolution de la jonction serrée en jonction mobile (Figure 12 d). Cette jonction mobile forme un anneau en circonférence du parasite, qui se déplace par un mouvement antéro-postérieur depuis le pôle apical vers le pôle basal le long de la membrane plasmique du mérozoïte (Figure 12 e) (Aikawa et al., 1978). Conjointement au mouvement de la jonction, l’invagination de la membrane de la cellule hôte a lieu et se poursuit au fur et à mesure de l’avancée du parasite, autorisant son entrée dans le globule rouge (Figure 12 f et g). Cette invagination épouse la forme du mérozoïte et résulte dans la formation progressive de la vacuole parasitophore, qui est délimitée par la jonction mobile, en regard du pôle apical de celui-ci. Il est à noter qu’au cours de l’invasion, le mérozoïte perd son manteau de surface (partie I A 1).

Suite à l’entrée du mérozoïte dans le globule rouge, la jonction avance (Figure 12 h) jusqu'à ne laisser qu’un orifice correspondant au point d’entrée du parasite (Figure 12 i). Lorsque le parasite est complètement entré au sein du globule rouge, la jonction semble fusionner à l’extrémité postérieure de celui-ci, scellant l’orifice en une jonction serrée unique (Figure 12 j). À ce stade, la membrane parasitaire est encore en relation étroite avec la membrane érythrocytaire. La continuité de la vacuole parasitophore, au sein de laquelle va se développer le parasite, est ensuite assurée.

Au long de l’invasion, le pôle apical du parasite reste apposé à la membrane du globule rouge, en continuité avec un canal, formant une embouchure commune à l’extrémité des rhoptries, facilitant leur extrusion.

La membrane parasitophore relève donc à la fois de la membrane plasmique globulaire et des membranes ou éléments membranaires apicaux du parasite (Haldar, 1996). Les lipides de la cellule hôte sont incorporés dans la membrane de la vacuole parasitophore (et dans la membrane plasmique du parasite). Il en résulte une différence de composition de ces membranes par rapport aux membranes internes du parasite (Dluzewski et al., 1995).

Figure 12 : Évolution de la jonction mobile observée en microscopie électronique entre un globule rouge et un mérozoïte de l’espèce Plasmodium knowlesi. (1) Contact irréversible entre le pôle apical du mérozoïte et

la membrane d’un globule rouge. La simple flèche indique le point de contact. (2) Épaississement de la membrane du globule rouge correspondant à l’établissement de la jonction serrée. (3) Entrée du mérozoïte avec invagination de la membrane érythrocytaire. En (c), on observe les points d’ancrage visibles en coupe que constitue la jonction mobile. (4) Stade avancé d’entrée du mérozoïte dans le globule rouge : l’invagination du globule rouge s’accroît et sa forme épouse celle du globule rouge. Une plaque dense aux électrons, indiquée par simple flèche semble connecter le pôle apical du mérozoïte à la membrane érythrocytaire. (5) Agrandissement de la jonction. (6) La jonction (c) est à l’orifice d’entrée dans le globule rouge, au niveau de la région postérieure du mérozoïte. (7) Phase terminale du processus d’invasion : un petit orifice est observé à l’extrémité postérieure du mérozoïte. (8) À l’issue de l’invasion, le mérozoïte est intégralement internalisé dans le globule rouge. Sa partie postérieure adhère encore par jonction serrée à la membrane du globule rouge comme l’indique la flèche, tandis que le reste du mérozoïte se trouve en regard de la lumière de la vacuole parasitophore non achevée. E, érythrocyte; A, pôle apical; R, rhoptrie; M, mitochondrie; Mz, mérozoïte; N, noyau (Aikawa et al., 1978).

2. Au cours du développement en stade anneau

Le parasite en stade anneau se présente initialement sous la forme d’un disque biconcave qui se replie sur lui-même, emprisonnant ainsi du cytoplasme érythrocytaire, qui constitue la « première gorgée » d’hémoglobine et donne sa forme caractéristique d’anneau (Elliott et al., 2008). À ce stade qui fait directement suite à l’invasion du globule rouge par le mérozoïte, le parasite poursuit son développement au sein de la membrane parasitophore. Lors des premières 24 h post-invasion, le parasite en stade anneau, confiné dans la membrane parasitophore, induit l’élaboration d’un réseau tubulo-vésiculaire au sein du cytoplasme de la cellule hôte (absent chez les globules rouges non infectés).

Le réseau tubulo-vésiculaire est composé d’extensions et de replis membranaires issus de la vacuole parasitophore. L’inhibition de la sphingomyéline synthase (protéine exportée depuis l’appareil de Golgi à l’intérieur du parasite vers le réseau tubulo-vésiculaire à l’extérieur du parasite au cours des stades anneau et trophozoïte) affecte la formation du réseau tubulo-vésiculaire (Lauer et al., 1995) et montre de ce fait l’importance de la sphingomyéline dans l’établissement de ce compartiment membranaire extra-parasitaire.

Au cours du stade anneau, le réticulum endoplasmique granuleux, tapissé de ribosomes prolifère du fait de la synthèse accrue de protéines associées aux membranes en formation.

Les structures de Maurer sont observées dans le cytoplasme de globules rouges infectés par des parasites à partir du stade anneau. La biogenèse des structures de Maurer n’a pas été élucidée (Spycher et al., 2006) et leur origine tubulo-vésiculaire n’a pas pu être établie. Des études récentes semblent indiquer une composition membranaire distincte du réseau tubulo-vésiculaire ainsi que l’absence de toute continuité entre ces deux compartiments (Tilley et al., 2008).

Le réseau tubulo-vésiculaire et les structures de Maurer persistent jusqu’à la différenciation des mérozoïtes (Haldar et al., 2002), c’est à dire jusqu’au stade schizonte.

3. Au cours du développement en stade trophozoïte

Le parasite en anneau poursuit son cycle en évoluant en trophozoïte dont l’activité principale est la digestion d’hémoglobine et la biosynthèse de macromolécules. À ce stade le réseau tubulo- vésiculaire se développe et se complexifie. Il en résulte une teneurimportante de phospholipides au

sein du globule rouge infecté par le trophozoïte (six fois la quantité habituelle de phospholipides contenus dans les membranes érythrocytaires).

Au stade trophozoïte, la vacuole digestive apparaît dans le cytoplasme du parasite (Elliott et

al., 2008). Cette vacuole digestive s’est constituée suite à l’emprisonnement de cytoplasme

érythrocytaire lors du repliement du parasite sur lui-même, alors que commence le processus de digestion de l’hémoglobine par des protéases. Le réseau tubulo-vésiculaire autorise l’import de divers nutriments (dont les nucléosides et les acides aminés) ainsi que de protéines et de cholestérol (Lauer

et al., 1997; Lauer et al., 2000). Il apparaît donc comme un compartiment charnière entre le parasite

et le milieu extracellulaire. Le stade trophozoïte est aussi un stade de remaniement spectaculaire au niveau de la membrane plasmique du globule rouge. On observe notamment les protrusions membranaires (knobs) qui correspondent à des îlots protéiques en surface de la membrane érythrocytaire (voir plus haut).

4. Au cours du développement au stade schizonte

Le parasite passe d‘une activité trophique à une activité de synthèse et d’assemblage des composants du mérozoïte. Le noyau subit 4 cycles de divisions, produisant 16 noyaux de mérozoïtes en développement. Les organites du complexe apical sont formés à partir du Golgi. Au cours de ce stade schizonte (lors des 10-12 dernières heures de développement du parasite), la biogenèse des organites apicaux nécessaires à la prochaine invasion, a lieu chez les mérozoïtes en développement (Margos et al., 2004). L’apicoplaste puis la mitochondrie se divisent (van Dooren et al., 2005). La segmentation des 16 mérozoïtes par cytodiérèse est tardive dans le schizonte : ces processus nécessitent eux aussi une forte biosynthèse de lipides.

Les acides gras libres, résultant de la dégradation progressive du triacylglycérol au cours de la division schizogonique joueraient un rôle dans le processus de rupture du schizonte libérant ses mérozoïtes infectieux (Palacpac et al., 2004). Le processus de rupture aboutit à la libération de 16 mérozoïtes d’une remarquable simplicité, de tailles minimales et possédant des organites réduits. Le corps résiduel, qui correspond à la vacuole digestive chargée de cristaux d’hémozoïne, est libéré, lui aussi, dans le milieu.

5. Au cours du développement au stade gamétocyte

Au cours du développement du gamétocyte, des changements morphologiques s’opèrent dont la formation de la pellicule semblable à celle observée chez le mérozoïte, mais naturellement plus développée (voir partie I A 1 b). Son développement est asymétrique, ce qui donne une forme en D au gamétocyte au stade II-III. La symétrie est restaurée en stade IV lorsque la pellicule entoure complètement le parasite. Celle-ci est constituée de trois membranes : la membrane plasmique, et la membrane (coté cytoplasmique et côté membrane plasmique) de vésicules aplaties situées longitudinalement sous la membrane plasmique. Elle est sous-tendue de microtubules dont le développement est concomitant au développement de la pellicule, mais qui disparaissent du fait de leur dépolymérisation en stade V. Il est à noter que le gamétocyte femelle contient plus de mitochondries, plus de ribosomes et un réticulum endoplasmique plus développé que le mâle. Le

noyau du gamétocyte mâle se différencie de celui du gamétocyte femelle au cours du développement : il est plus gros et plurilobé. L’hémozoïne produite par le parasite n’est pas contenue dans une unique vacuole digestive mais dans de nombreuses vésicules.