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3.3 Génération d’impulsions attosecondes uniques par un faisceau carré

4.1.3 Dynamique électronique

4.1.3.1 Approche classique

Comme nous l’avons précisé au paragraphe 4.1.1, le modèle semi-classique per- met de retrouver qualitativement la plupart des caractéristiques de la génération d’harmoniques. Aussi dans un premier temps nous allons étudier brièvement la dynamique des électrons lors du processus de génération en nous plaçant dans ce cadre. L’électron dans le continuum n’est alors soumis qu’à l’influence du champ électrique du laser. De ce fait, les équations du Principe Fondamental de la Dyna- mique permettent de décrire son mouvement. On suppose de plus que la barrière de potentiel est infiniment mince (ce qui implique que l’électron est placé dans le continuum à l’origine) et que la vitesse de l’électron à l’instant de l’ionisation est nulle (il a perdu toute son énergie cinétique pour passer la barrière par effet

CHAPITRE 4. THÉORIE DE LA GÉNÉRATION D’HARMONIQUES À L’ÉCHELLE ATOMIQUE ET MOLÉCULAIRE

tunnel). Si x(t) représente la position d’un électron en fonction du temps dans le continuum, on a donc :      d2x dt2(t) ∝ −E0cos(ω0t) dx dt(t 0) = 0 x(t0) = 0 (4.5) où t0 représente l’instant d’ionisation. La résolution de l’équation (4.5) nous donne pour x(t) l’expression suivante :

x(t) = E0 ω2 0 (cos(ω0t) − cos(ω0t0)) + E0 ω0 sin(ω0t0)(t − t0) (4.6)

En fonction de leur instant d’ionisation, les électrons peuvent suivre différentes trajectoires dans le continuum : un électron ionisé au moins 500 as après un maximum du champ laser ne reviendra pas vers le noyau mais s’en éloignera en oscillant. Au contraire, s’il est ionisé entre un maximum du champ et le délai pré- cédent, il pourra se recombiner avec l’ion. Il aura alors lors de son excursion gagné une énergie cinétique Ec. La figure 4.2 montre que si l’on considère uniquement

les trajectoires qui croisent le noyau en moins d’une période, l’énergie cinétique maximale que peut gagner un électron est de Ec,max ≈ 3.2Up. On retrouve ainsi

la loi de la coupure. Lors de la recombinaison, l’énergie cinétique sera restituée sous forme d’un photon harmonique d’énergie Eq = Ec+ Ip, Ip étant le poten-

tiel d’ionisation du gaz de génération. Dans le cas de la figure 4.2, la coupure se situe à l’ordre 21 (les calculs ont été effectués pour un éclairement de 1 1014

W/cm2 dans l’argon). La figure4.2(b) montre que pour émettre des photons cor-

respondant à un ordre harmonique q, un électron peut suivre deux trajectoires différentes donnant la même énergie cinétique finale, représentées ici en rouge et en bleu (Kazamias and Balcou, 2004). Ces deux trajectoires sont tradition- nellement regroupées en deux groupes, les trajectoires courtes et les trajectoires longues.

Les harmoniques émises par chacune des trajectoires ont des propriétés sensi- blement différentes. Tout d’abord, la figure (b) met en évidence le fait qu’au sein d’une même famille, toutes les harmoniques ne sont pas émises en même temps. En effet, si l’on ne considère par exemple que les trajectoires courtes (les courbes bleues), les temps d’émission de chaque harmonique sont décalés les uns par rapport aux autres d’une centaine d’attosecondes environ pour l’éclairement de génération que nous avons utilisé ici. Cette dérive de fréquence linéaire joue un rôle primordial lorsque l’on s’intéresse à l’optimisation de la durée des impulsions attosecondes (Mairesse et al., 2003). Elle dépend de plus de l’éclairement de fa- çon différente selon la trajectoire observée (Corsi et al.,2006). Enfin, les émissions

4.1. LA GÉNÉRATION D’HARMONIQUE À L’ÉCHELLE ATOMIQUE ET MOLÉCULAIRE

Fig. 4.2: (a) Trajectoires classiques des électrons en fonction du continuum. La courbe en pointillée représente l’évolution de la valeur absolue du champ infrarouge en fonction du temps. (b) Énergie cinétique des électrons (en unité de Up) en fonction de l’instant de recombinaison. Dans les deux cas, les courbes bleues (noires) repré- sentent les trajectoires courtes, les courbes rouges (grises) les trajectoires longues. Les calculs ont été effectués pour un éclairement de 1 1014 W/cm2 dans l’argon.

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des deux familles de trajectoires ont des caractéristiques spatiales et spectrales différentes (Salieres et al., 1995; Salières et al., 2001; Merdji et al.,2006).

4.1.3.2 Approche quantique

Toutes ces observations découlent du calcul des trajectoires classiques. Le modèle de Lewenstein permet cependant de retrouver de façon plus rigoureuse ces résul- tats par un calcul quantique. Salières et al. (2001) ont donné une interprétation de la formule (4.4) en s’appuyant sur la théorie des intégrales de Feynman. L’am- plitude du dipôle est alors vue comme la somme cohérente des contributions de tous les chemins quantiques reliant l’état initial et l’état final. Bien que le cal- cul du dipôle fasse intervenir une somme sur une infinité de chemins quantiques, dans l’approximation du champ fort l’action classique S(p, t0, t) varie en général très rapidement le long d’une trajectoire quantique. Le poids de l’ensemble de ces chemins sera alors négligeable, et les trajectoires dont la phase est stationnaire vont dominer l’intégrale.

La condition de stationnarité de la phase, δ(S[p, t0, t] + ωqt) = 0 permet de sim-

plifier le calcul en réduisant le nombre de trajectoires à considérer. Cette condi- tion permet de retrouver les conditions initiales imposées lors de la résolution du modèle semi-classique, ainsi que les deux principales familles de trajectoires (Lewenstein et al.,1995;Antoine et al.,1996a). La figure4.3représente les temps d’ionisation et d’émission en fonction de l’ordre harmonique obtenus par les cal- culs quantiques et classiques. Les temps d’émission des familles de trajectoires sont remarquablement similaires entre les deux calculs. La principale différence tient en l’apparition de la coupure lors du calcul quantique. Classiquement, l’émis- sion d’harmoniques d’énergie supérieure à Ip+ 3.2Up est interdite. Le modèle de

Lewenstein montre lui que lorsque l’ordre harmonique augmente, les deux trajec- toires se rapprochent l’une de l’autre pour devenir une trajectoire unique dans la coupure, zone dans laquelle les énergies émises sont supérieures à Ip+ 3.2Up.

Concrètement, cela signifie que les différents ordres harmoniques ne sont pas émis en phase dans le plateau mais que l’émission de toutes les harmoniques de la cou- pure a lieu à un même instant (environ 1800 as après le maximum du champ infrarouge dans l’exemple présenté ici) (Mairesse et al., 2004).

Il est remarquable qu’un modèle aussi simplifié que le modèle en trois étapes permette de retrouver qualitativement la plupart des propriétés de la génération d’harmoniques d’ordres élevés prédites par le calcul quantique. De plus, il a été possible grâce aux travaux de nombreux groupes de recherche de vérifier expéri-