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Du coté des candidates pour un don d’ovocytes

B. Comment se déroule le don d’ovocytes en France

3) Du coté des candidates pour un don d’ovocytes

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La femme consentant à donner ses ovocytes doit être jeune Ŕ un accord implicite pour de nombreux centres est moins de 35 ans Ŕ fertile, et en bonne santé. La version de la loi de 2004 prolongeant celle de 1994 exige qu’elle ait déjà procréé (point qui vient de changer depuis juillet 2011) et que si elle vit en couple, elle obtienne le consentement de son partenaire recueilli par l’équipe médicale à l’issue d’entretiens spécifiques53

.

Elle accepte une stimulation ovarienne sous forme d’injections journalières de FSH en sous cutanée et une ponction des ovocytes dans un bloc opératoire le plus souvent sous anesthésie locale. Cette femme est communément nommée la donneuse (on aurait pu dire « donatrice ») et la femme qui se prépare à recevoir l’embryon issu de la fécondation in vitro ou de l’ICSI, la receveuse (on aurait pu l’appeler la « destinataire »).

L’interdit de toute publicité pour le don de gamètes 54

(article L.665-12) conduit l’ensemble des centres d’AMP à inciter les couples solliciteurs à venir accompagnés d’une donneuse. Cette dernière sera stimulée et ponctionnée après validation de son dossier. Presque la moitié des donneuses candidates seront refusées. Ce chiffre a été confirmé par une étude55 menée au sein du centre d’AMP de Cochin qui s’est appuyée sur une enquête menée auprès de 142 femmes candidates pour un don de leurs ovules durant l’année 2005, 2006, 2007. Sur ces 142 femmes volontaires, seulement 73 d’entre-elles ont été ponctionnées (52%).

- 49 femmes n’ont pas été retenues par le corps médical (35%). - 15 femmes ont abandonné en cours de parcours (10%) ; raison

invoquée : manque de temps, peur, couple receveur parrainé refusé, manque de motivation.

- 4 femmes étaient en attente de validation au moment étude. - 1 nd

Si on ajoute les femmes ponctionnées à celles qui étaient en attente, on obtient un groupe de 77 femmes qui, au mieux, donneront leurs ovocytes, soit seulement 55% des candidates.

53 Art. L. 1244-2 du code de la santé publique

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Art. L. 665612 du code de la santé publique : Est interdite la publicité en faveur d‟un don d‟éléments ou de produits du corps humain au profit d‟une personne déterminée ou au profit d‟un établissement ou organisme déterminé.

55 Typologie de 142 candidates pour un don d‟ovocytes dans le cadre légal du volontariat, de l‟anonymat et de la gratuité. B. Chevallier, C. Davy, V. Blanchet, V. Gillet, JM. Kunstmann, C. Chalas, JC. Juillard, P. Jouannet, article en cours.

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Dans le sens contraire, si on ajoute le nombre de femmes annulées à celui des abandons en cours de démarche, on obtient 64 femmes non ponctionnées sur 141 soit 45%. On peut donc conclure, que dans le centre d’AMP de Cochin, durant les années 2005 à 2007, presque une candidate sur deux n’est pas allée jusqu’au bout de sa demande.

Les causes des 49 annulations médicales sont résumées dans le tableau ci-dessous.

Raison génétique: 17 Anomalie caryotype, Atcd cancer sein, DID, surdité, maladies cœliaques, retards mentaux dans famille, famille non connue.

Insuffisance ovarienne: 9 Après bilan

Raison médicale: 7 Surpoids, pb thyroïdien Raison gynécologique : 6

Sérologie positive : 5 HBS+

Autre : 1 Début de grossesse Tableau 1: Les causes des 49 refus médicaux

La démarche de la donneuse rendra service au couple qui l’a contactée en lui diminuant son temps d’attente. La réponse de l’hôpital Cochin est de 6 mois d’attente après la ponction de la donneuse. C’est ce qu’on appelle pudiquement la règle de la double liste ou du don croisé. Cela signifie qu’en aucun cas les ovocytes de la donneuse constitueront une réserve patrimoniale privée pour celle qu’elle connaît. Pourtant, lors de l’examen du projet de loi relatif à la bioéthique en 2003, le ministre de la santé de l’époque avait été très ferme sur le rappel de cette règle qui veut que le bénéfice d’un don de gamètes ne puisse en aucune manière dépendre de la désignation par le couple demandeur d’un donneur. Jean-François Mattei s’était même « engagé à demander à l‟Agence

de la biomédecine d‟exercer une vigilance particulière sur ce point56

». Il n’y a pas eu d’effet, suite à cet avertissement.

Le docteur Patrick Fénichel, endocrinologue gynécologue à Nice, a confirmé la mise en place de ce cercle vicieux devant les députés57 :

« En principe, la loi nous interdit de subordonner notre réponse à la présentation d‟une donneuse, mais aucun des douze centres qui

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Compte-rendu de la séance du Sénat du 10 novembre 2003.

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fonctionnent actuellement n‟applique ce principe, car dans l‟état actuel des choses, il est inapplicable ! »

Reste à savoir de quelle façon est vécue cette manière de faire par les femmes et l’étude qui va suivre s’attachera à cette question. Par son choix, le donneur ou la donneuse engage donc son entourage familial, au premier chef sa femme ou son mari. C’est pourquoi nous nous interrogerons aussi, lors de notre enquête sur les réactions du mari et des enfants du couple donneur.

Dans cette course à la donneuse, les femmes futures receveuses vont, dans un premier temps, faire appel à leurs proches à savoir : famille, amies, collègues de travail. Il s’agit donc, dans la majorité des cas, d’un don relationnel.

Toutefois, si la source principale d’approvisionnement des donneuses provient d’un contact amical ou familial, il ne faut pas déconsidérer le rôle grandissant d’Internet.

De plus, l’Agence de la Biomédecine a pour mission de lancer des campagnes d’information nationales, ce qui a été fait en mai 2008, en collaboration avec les professionnels de la santé, les centres de dons et en partenariat avec les gynécologues. Malheureusement, nous ne disposons d’aucune évaluation de l’impact qu’a pu avoir cette campagne de sensibilisation.