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PATRIMOINE MONUMENTAL CLASSIQUE ET PATRIMOINE VERNACULAIRE

DANS LES DOUKKALA

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NE HISTOIRE RICHE AYANT ENGENDRE UN PATRIMOINE BATI TRES DIVERSIFIE

Jusqu’au 15ème siècle, les Doukkala s’étendaient de l’Oum Er- Rbia au nord à l’oued Tensift au sud. Aujourd’hui, le territoire des Doukkal s’étend entre l’océan Atlantique, L’oum- Er-Rbia et l’Oued El Abid. La découverte d’un outillage de l’époque néolithique au Cap Blanc dans les grottes du site d’El – Khenzira prouve que cette région a été occupée dès la Préhistoire.

Les récits des voyageurs antiques ainsi que les vestiges de sépultures et la mise à jour de pièces de monnaie attestent de la présence d’une civilisation punique notamment à Rusibis ( El-Jadida), Tit et Azama ( Azemmour). (Voir encadrés 4 et 5 ci-après). Plus tard, avec la venue de l’Islam, la région connaît un essor économique et social qui se traduit par un commerce prospère, l’établissement d’une population nombreuse et la fondation de villes telles que Tit ( XIIème Siècle) El-Medina ( Azemmour) etc…

Cette richesse a nourri les visées expansionnistes des Portugais qui se mirent à occuper des territoires sur les côtes marocaines, d’abord par des accords de représentation, ensuite, par l’annexion pure et simple. C’est ainsi que le Portugal installa une factorerie en 1486 à Azemmour.

Mazagan-premier nom d’El Jadida –fut construite entre 1510 et 1520 pour jouer essentiellement les rôles de port et de caserne militaire au sud de l’Oum er Rbia. Des conditions naturelles favorables, des abris sûrs, furent à l’origine de la décision des Portugais de construire un port au sud d’Azemmour à partir duquel ils pourraient exporter les produits de Doukkala au Nord et dominer le Royaume de Marrakech. La construction de la cité, appelée aujourd’hui « la cité portugaise », a été achevée en 1541 après l’édification d’une grande enceinte, au centre de laquelle se trouvait une importante salle d’armes transformée plus tard en citerne d’eau pour affronter un siège continu. Mais, la présence lusitanienne devient insupportable pour les dynasties saâdienne et alaouite qui récupèrent après de nombreuses luttes leurs territoires : Azemmour en 1541 et El-Jadida en 1769. Les Saâdiens, puis les Alaouites, vont reconstruire et restaurer les possessions portugaises abîmées ou détruites. Ils vont aussi édifier des places – fortes afin de maintenir la paix et la sécurité. C’est ainsi que le sultan saâdien El –Oualid, en 1634, fait élever une kasba à Qualidia et Moulay Ismaïl, une citadelle à Boulaouane en 1710.

Ces différentes occupations de la Province d’El –Jadida ont laissé de nombreux témoins historiques dont plusieurs ont bénéficié de la législation sur la protection des monuments et des sites.

Encadré n°5 : Bref historique de la ville d’El Jadi da.

L’un des premiers documents sur la région d’El Jadida date d’il y a plus de 2600 ans. En effet, pendant la première moitié du sixième siècle av. J.-C., l’amiral carthaginois Hannon a mené un long voyage le long de la côte ouest du continent africain. Dans son journal de voyage, Hannon parle de sa visite du Cap Soleis qui est probablement Cap Mazagan, constitué par les plateaux en face de la ville d’Azemmour. Ensuite, il parle de son exploration d’Oum Er Rbia ( le fleuve ) et des lacs qui caractérisent sa vallée. Après cette visite, Hannon décrit sa rencontre avec des tribus locales. Ensuite, le convoi poursuivit son périple en visitant les villes dont les noms tels que cités par des traductions grecques sont : Karikon Teichos, Gytte, Akra, Mellita et Arambys. Ces villes correspondent probablement à Azemmour, El Jadida, Cap Beddouza, Oualidia et Mogador.

Plusieurs siècles plus tard, Ptolémée, l’astronome, mathématicien et géographe du deuxième siècle ap. J.-C., décrit la côte ouest africaine. Il parle du port de Rusibis qui se situait au niveau 6° 40 en latitude dans son système de coordonnées qui correspond à la ville d’El Jadida actuelle(32°10). Rusibis est probablement le nom que les Romains ont donné à la localité qui existait à l’emplacement de la ville d’El Jadida actuelle. Ce nom signifierait probablement le chemin des fermes ou de la campagne.

A cause de son emplacement stratégique sur la côte ouest du Maroc, les Portugais fondaient la ville en construisant une forteresse vers 1506. Ils l’ont baptisée Mazagan. Cette nouvelle ville devint très vite un port commercial de première importance grâce aux produits agricoles de la région de Doukkala. Chassés d’Azemmour et d’Agadir, les Portugais affluèrent dans la ville qui fut fortifiée dès 1542.

Le Maroc a essayé de libérer la ville pendant plus de deux siècles. Les Portugais ont dû transformer le grenier en citerne pour stocker l’eau potable afin de tenir longtemps face aux assauts. La présence portugaise a duré jusqu’en 1769, date à laquelle la ville fut libérée par le Sultan marocain Sidi Mohamed Ben Abdellah.

Quand l’assaut ultime devint imminent, le général commandant la place reçut l’ordre d’évacuer la ville. Les habitants ne devaient emporter que leurs vêtements: les Portugais brûlèrent les meubles, tuèrent les chevaux et autres bêtes et brisèrent les armes.

De la date de libération de la ville jusqu’au début du XIXè siècle, la ville était détruite et portait le nom de Mahdouma ( en ruine). Le Sultan Moulay Abderrahman décida de restaurer la forteresse en 1832 et de reconstruire ce qui a été détruit. Il la baptisa El Jadida ou la Nouvelle.

Dès les premières années du Protectorat ( 1912), les Français ont été charmés par cette belle ville. Elle devint ainsi un centre balnéaire du fait de son climat doux et de ses plages. Le Gouverneur général Liautey l’appelait la « Deauville du Maroc » en faisant référence à la ville de Deauville en France.

Le 30 juin 2004, lors de la 28ème session du comité du patrimoine mondial, tenue à Suzhou en Chine, la ville portugaise de Mazagan (El Jadida) est proclamée patrimoine mondial.

En cadré n°6 : Bref historique de la ville d’Azemmo ur

* Comme pour beaucoup d’anciennes villes atlantiques marocaines, les origines d’Azammour remontent probablement à l’époque carthaginoise ou romaine. Cependant ; les sources sont souvent imprécises ou muettes sur cette phase de la ville. Certes, des données archéologiques tendent à confirmer cette hypothèse, mais elles sont rares et fragmentaires.

Certains auteurs affirment qu’Azemmour fût un comptoir carthaginois connu sous le nom « d’Asama ». C’est un vieux site antique sur les bords d’Oum Er -Rbia, comme en témoignent les fûts de colonnes de marbre qui semblent appartenir à l’époque punique. Il fût connu à la fin de l’époque romaine car au 3ème siècle de l’ère chrétienne, les Romains l’auraient occupé et y construisirent un temple ainsi que des murs et des fortifications, dont les vestiges existent encore à Azemmour Ahdar, ( Duteil J. Azemmour »).

En tout cas, il n’est pas impossible que les Romains aient une station, jouant le rôle d’un poste de surveillance et d’un poste de douane en même temps à l’embouchure de l’Oued Oum Er-Rbia .

* Avec l’avènement de l’Islam, le site a suscité l’intérêt des Arabes dès les premières années de l’introduction de l’Islam en Afrique du Nord. On rapporte qu’Oqba Ibn Nafii sur sa route, de Ceuta à Souss, aurait traversé Azemmour ; et ce serait à cet endroit qu’il aurait déclaré vouloir porter la gloire de Dieu plus loin si l’Océan ne l’avait arrêté. Cela se confirme quand on sait que , par la suite , Moussa ibn Nouceir y aurait construit une mosquée et désigné , lors de son passage, des Imams de Médine (Abderrahman Ben Ali, Jaber ibn Zaid, etc.) pour enseigner et veiller à la diffusion des préceptes de l’islam.

Sous les Idrissides, Azemmour revint au prince Aïssa Ibn Idriss lors d’un partage du Royaume en principautés. La présence Idrisside dura jusqu’en 1067, date à laquelle la ville passa sous la domination almoravide.

Sous le règne des Almoravides, le port d’Azemmour fut réaménagé et devint très prospère. C’est de là que furent envoyés une trentaine de navires pour prendre part à l’expédition de l’Andalousie en 1095.

C’est également pendant le règne almoravide que le Cheikh Moulay Bouchaib vint s’installer dans le Ribat d’Azemmour.

* En 1120, Ibn Toumert l’almohade vint prêcher pendant un mois environ à Azemmour. Puis, en 1147, Abdelmoumen occupa les Doukkala et Azemmour.

conquête définitive de la ville par les Merinides vers 1252, elle fut le théâtre d’une succession de révoltes et de batailles qui avaient vite succédé à une courte période de prospérité vers 1178 aux plans commercial et artisanal.

* Comme pour l’époque almohade, les sources historiques concernant l’ère mérinide ne nous renseignent pas suffisamment sur ce pan de l’histoire de la ville. Nous savons cependant que c’est en 1264 que les Beni Merine devinrent les maîtres de la cité. Puis ce fut de nouveau une longue période d’anarchie.

La ville, ruinée vers 1434, suite à de longues années d’anarchie, fut abandonnée par ses habitants qui construisirent par la suite une nouvelle cité sur le site actuel. En 1451, le Calife Abou Inane y fit édifier trois mosquées et y envoya des Fqihs et des Oulemas. Dix ans plus tard, il la fit fortifier.

* Toujours est il qu’Azemmour constitua jusqu’à la fin du 15ème siècle (9ème siècle de l’Hégire ) une des plus grandes et des plus actives cités des Doukkala dont le sort était étroitement lié à l’oued Oum Er Rbia, son port étant en mesure de recevoir les bateaux de l’époque. A cela s’ajoute le fait que la ville bénéficiait énormément de l’abondance des poissons dans l’Oued, particulièrement l’alose.

De même, la Médina des Doukkala a beaucoup profité de la richesse agricole de son arrière –pays et de la plaine de la Chaouia. * Les Portugais a Azemmour :

Deux étapes bien distinctes caractérisent la période portugaise à Azemmour. Au cours de la première ( 1486 à 1513), les Portugais se sont limités à imposer une sorte de protectorat à la ville. Dans la seconde ( 1513 – 1541), par contre, ils y sont intervenus militairement.

Dès qu’Azemmour fut conquise, le duc de Paragance la fit fortifier et y fit résider une garnison qui eut constamment à lutter contre les incursions des forces armées d’Ahmed El Ouattassi, sultan de Fès.

La lutte contre les Portugais s’intensifia avec l’évènement des Saadiens, et l’un de leurs dignitaires, Ahmed El Ayyachi, disciple de Abdelleh Ben Hassoune de Salé, fut envoyé à Azemmour pour y maintenir la flamme du Jihad ; il devint plus tard caïd de la ville et fut un intransigeant ennemi des Portugais. Ceux-ci évacuèrent finalement la ville, « mais ils continueront à fréquenter ces parages : ils auraient obtenu le droit de pêche à l’embouchure de l’Oum Er Rbia, mais ils ne devaient pas quitter leurs navires ni pénétrer dans la ville ». ( Encyclopédie de l’Islam. Azemmour).

arabes ne mentionnent plus Azemmour que pour signaler la présence de sa délégation à chaque avènement de Sultan. Et ce ne fut qu’en 1876 que le sultan Alaouite Moulay Hassan, de retour du sud, visita la cité déchue et donna ordre de restaurer ses fortifications.

* Sous le Protectorat, Azemmour fût marginalisée et reléguée à un rôle local très limité, et ce, suite à l’importance accordée, d’abord, à Casablanca choisie pour jouer le rôle de capitale économique du pays, et ensuite, à El Jadida ( Mazagan) promue, en raison de sa situation géographique, au rang de principale ville des Doukkala.

Photo n°3 : Azemour aujourd’hui

LES MONUMENTS HISTORIQUES DES DOUKKALA