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Douglas Hurd a répondu en ces termes à Roland Beix :

« Je répéterai la réponse que j'ai donnée. Nous estimons, comme les douze pays européens à l'exception de l'Irlande, que l'essentiel de

notre défense réside dans son caractère atlantique : c'est la raison pour

laquelle nous pouvons dormir tranquilles. Nous croyons, comme l'a précisé clairement la déclaration américano-allemande, que l'Alliance atlantique doit être maintenue tout en se modifiant. Un sommet a réuni les seize pays membres à Londres en juillet dernier : il a clairement exposé les modalités à suivre pour y parvenir et a assigné aux différents

éléments de l'O.T.A.N. et de l'Alliance des tâches pour mener à bien

cette mission.

« Au cours de la même année, le sommet des Douze a convoqué

deux conférences intergouvernementales – une sur l'union économique et monétaire, l'autre sur l'union politique. Nous avons nous-mêmes,

comme d'autres - parmi lesquels le président Mitterrand et le chancelier Kohl - présenté à cette conférence nos idées sur la politique étrangère

et la sécurité. La France et l'Allemagne ont fait de même en matière de défense. Les discussions se sont déroulées en parallèle. La décision prise la semaine dernière par l'O.T.A.N. correspond exactement au mandat

de juillet denier de la Conférence intergouvemementale ou avec le processus d'harmonisation qui se déroule au sein de la C.S.C.E.

Personne ne met en question le fondement atlantique de la défense dans le débat européen. Au contraire, au cours du mois dernier, de nombreux pays, y compris la France, l'Allemagne et l'Italie, ont insisté sur la nature atlantique de notre politique de défense. Cette décision est entièrement

appropriée.

« Il nous appartiendra d'examiner, à la fois à l'intérieur de

l'O.T.A.N. et à l'extérieur, comment le fondement atlantique de notre

défense peut être concilié avec une identité européenne plus forte. J'ai

formulé des idées concrètes sur la manière d'y parvenir mais je reconnais

que la mise au point des détails exigera beaucoup de travail. Voilà qui est beaucoup plus pragmatique que de répéter l'affirmation selon laquelle l'Europe ne peut être unie à moins de comporter un élément de défense

et d'éviter de répondre à des questions sur le sens de cette affirmation

et sur la manière de la concilier avec le fondement atlantique de la

défense. »

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-SECTION VI

Discours de M. Mitsotakis, Premier ministre de Grèce.

Dans le cadre de la seconde partie de la 37* session ordinaire, le

2 décembre 1991 , M. Mitsotakis. Premier ministre de Grèce, a pro­

noncé devant l'Assemblée le discours suivant :

« Monsieur le Président, honorables membres de l'Assemblée,

Mesdames et Messieurs .

« Mes remerciements s'adressent tout d'abord à votre président,

M. Robert Pontillon, pour son aimable invitation.

« Je constate avec satisfaction, grâce à cette même invitation, que

votre Assemblée, qui s'est depuis longtemps intéressée à la perspective

d'une adhésion de la Grèce à l'U.E.O. , attache une importance particu­

lière aux vues du gouvernement hellénique sur la question de la sécurité

européenne. Cette question est indéniablement au centre de l'intérêt de

cette Assemblée, le seul organe parlementaire européen mandaté par traité pour débattre de tous les aspects de la sécurité, y compris des questions de défense.

« La sécurité est certainement un concept complexe qui peut être

défini à la lumière de plusieurs facteurs. Des phénomènes sociopoliti

­

ques comme les aspirations ethniques, parfois exploitées par des tiers,

les rivalités idéologiques ou religieuses. les inégalités socio-économiques et les pressions démographiques, ou bien les différends politiques entre

nations peuvent mettre en danger la sécurité et, par conséquent, la paix

et la stabilité d'une région .

« Parler de la sécurité en Europe, c'est aussi prendre en considéra

­

tion la situation dans les régions géopolitiquement proches, telles que le

Bassin méditerranéen et le Proche-Orient, et surtout l'influence des

changements actuels dans les pays de l'Europe centrale et de l'Europe

de l'Est et, bien sûr, en Union soviétique. Aujourd'hui , les Balkans,

région particulièrement sensible, subissent les effets de la crise yougos ­ lave, dont les symptômes d'exacerbation nationaliste menacent la stabi ­

lité de toute la région.

« Le mur qui divisait notre vieux continent en deux mondes et

camps adverses est enfin tombé. Sa chute a précipité la fin du système bipolaire de sécurité en Europe, instauré depuis quatre décennies et caractérisé par la confrontation de deux grandes coalitions

politico-militaires, l'O.T.A.N. et le Pacte de Varsovie.

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-« Nous nous réjouissons très justement de la fin de l'ancien ordre

mondial, celui de Yalta. N'oublions pas cependant que les phases de transition historique ont toujours été caractérisées par l'instabilité et

l'incertitude.

« Durant plus de quarante ans, nous avons vécu sur notre continent

avec la menace militaire concrète d'une offensive de grande envergure venant de l'Est. Aujourd'hui, nous avons des perspectives de paix devant nous, mais aussi des situations conflictuelles qui peuvent dégénérer en menaces sérieuses. Ces nouveaux dangers pour la sécurité sont d'une nature différente. Ils ont un caractère régional ou local et proviennent de la résurgence des nationalismes tenus en tutelle pendant des décen ­

nies.

« Pour faire face à cette nouvelle réalité, un effort soutenu et

beaucoup d'imagination s'imposent pour tracer le plan architectural du nouveau système européen de sécurité. Actuellement, les risques de

conflits, même s'ils sont sans doute militairement d'une envergure limitée, sont en revanche plus nombreux, plus variés et moins prévisibles

pour être perçus et maîtrisés d'avance.

« De ce fait, les différentes institutions de sécurité, devant la fluidité

qui caractérise la nouvelle scène politico-militaire de l'Europe, se trou ­ vent obligées de s'y adapter et de redéfinir leur mission. Le premier pas dans cette direction est la définition concrète du rôle de ces organisa ­

tions en vue d'une meilleure harmonisation et coordination respectives,

afin d'éviter les risques de dédoublement ou de chevauchement. Une tâche bien délicate à cause de la constante évolution de la situation car,

depuis la révolution pacifique de 1989, nous vivons une époque d'accé ­

lération de l'histoire européenne.

« Vu cette nouvelle réalité en Europe, la nouvelle architecture

européenne de sécurité s'articule sur trois niveaux : le niveau transatlan­

tique, le niveau européen et le niveau paneuropéen.

« Au niveau transatlantique, la pierre angulaire d'une architecture

européenne de sécurité est sans aucun doute l'O.T.A.N. L'Alliance

atlantique reste la plus importante organisation de défense et de sécurité,

parce qu'elle dispose de mécanismes de consultation politique et de

gestion des crises, ainsi que de structures militaires intégrées efficaces.

De plus, elle maintient et rend crédible le lien transatlantique entre

l'Europe, les États-Unis et le Canada. élément nécessaire pour la sécurité

et la stabilité de notre continent.

« Les changements radicaux survenus avec une rapidité vertigineuse

ces derniers temps, les événements historiques des deux dernières

années en Union soviétique et dans les pays de l'Europe centrale et

orientale imposent une révision du rôle et du concept stratégique de

l'Alliance. Ainsi , nous avons un déplacement du centre de gravité de

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-l'Alliance. Nous passons de la notion de défense vers un concept global

de la sécurité, et nous entrevoyons en même temps un renforcement de sa mission politique dans la direction du dialogue.

« La réduction des forces militaires de l'Alliance, qui est en train

de s'opérer, ne lui enlève pas pour autant sa capacité de protéger ses

membres de toute agression éventuelle. À ce propos, la restructuration

des forces conventionnelles dans des formations de réaction rapide,

auxquelles la Grèce a offert sa contribution, et la réduction du rôle des armes nucléaires à un moyen de dissuasion de dernier recours sont des

mesures d'importance par lesquelles un nouveau concept de défense

vient d'être inauguré. Les décisions que l'O.T.A.N. vient de prendre au

sommet de Rome reflètent la nouvelle situation en Europe et le nouveau concept stratégique de l'Alliance va dans la bonne direction pour trouver des réponses adéquates aux problèmes engendrés.

« L'existence de risques multiples en Europe centrale et orientale et l'importance que revêt, pour la sécurité de l'Alliance, la stabilité dans les pays de la région Sud-méditerranéenne et du Moyen-Orient sont reconnues par l'O.T.A.N. Il en est de même de l'existence dans cette dernière zone de potentiels militaires et de la prolifération des technolo­ gies d'armes de destruction massive. Tout cela fait de la Grèce, pays clé dans la zone, un maillon sensible et important de tout système de sécurité européen et notamment de celui de l'Alliance.

« Au sein de ce système de défense qui lie les deux rivages de l'Atlantique, un pilier européen est en train de s'affirmer ces dernières années par la réanimation de l'Union de l' Europe occidentale.

« Le Traité de Bruxelles, qui liait depuis 1948 les six pays de la Communauté européenne, avec des liens plus spécifiques au sein de l'Alliance atlantique, revêt aujourd'hui une importance toute particulière pour les pays européens.

« Enrichi de trois nouveaux membres de la C.E.E. appartenant aussi à l'O.T.A.N. , il aspire à jouer un rôle plus important dans la sécurité européenne, un rôle complémentaire et non pas concurrentiel,

vis-à-vis de l'O.T.A.N.

« Dans toute l'histoire de son existence. l'U.E.O. n'était qu'une

alliance plus spécifique entre les pays de la Communauté européenne au

sein de la grande alliance transatlantique. Et il est tout à fait naturel

qu'elle veuille garder ce rôle spécifique au sein de l'Alliance en s'élargis

­ sant pour inclure tous les pays membres de la Communauté européenne qui désireraient y participer.

« Ces réflexions, Mesdames et Messieurs, m'amènent au deuxième

niveau : celui de l'Europe communautaire des Douze et le grand dessein

de ces pays pour l'union politique. Force est de constater que la pierre

angulaire de la nouvelle architecture européenne est la Communauté

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-européenne, qui a été un point de référence pour les peuples de l'Europe orientale et a joué un rôle de catalyseur dans la crise qui a précipité la

chute des totalitarismes. C'est encore la Communauté des Douze.

transformée en union politique, qui formera le nouveau fondement de

l' Europe et qui devrait avoir les moyens, les institutions et les pouvoirs

pour prendre des décisions, tracer les orientations politiques, gérer les crises. Cela implique une volonté politique fondée sur une conscience

des intérêts essentiels que les États membres ont en commun.

« Au moment où elle attire les demandes d'adhésion d'autres pays européens, la Communauté, pour faire face aux grands défis de notre temps, s'achemine inexorablement vers l'union politique. Qui dit union politique pense politique étrangère commune et qui dit politique exté­ rieure en commun ne peut qu'associer cette notion à une politique

couvrant les domaines de la sécurité et de la défense.

« La Communauté, qui ne peut être le géant économique et le nain politique de la famille internationale, jouera sans doute, en se dotant d'une identité de sécurité et de défense, un rôle décisif pour la stabilité et la paix de l'Europe et du monde. Nous sommes en train de travailler sur ce projet pour un nouveau Traité d'union politique depuis presque deux ans à tous les niveaux. Des progrès substantiels ont déjà été enregistrés et l'on peut espérer qu'a Maastricht nous nous montrerons assez sages pour doter l' Europe du nouveau cadre institutionnel dont elle a absolument besoin pour faire face au défi de l'Histoire.

« Encore dernièrement , au sommet de Rome , un consensus s'est

dégagé autour de deux idées complémentaires : premièrement, l'idée que l'O.T.A.N. constitue une donnée essentielle de la sécurité européenne ;

deuxièmement , le principe d'une politique de sécurité et de défense propre aux Européens que personne ne conteste plus. Le principe d'une identité européenne de sécurité et de défense fait déjà l'unanimité parmi les membres de l'Alliance atlantique.

« Cela, loi d'affaiblir l'O.T.A.N. et les liens de solidarité transatlan­

tique, renforcerait au contraire la composante européenne de l'Alliance.

Je voudrais ici rappeler les termes de la Plate-forme de La Haye, que la Grèce accepte, d'après lesquels une Europe occidentale libre, indépen­

dante et de plus en plus unie est essentielle pour la sécurité de l'Améri­ que du Nord.

« Comme vous le savez . la Grèce a manifesté officiellement, et

depuis 1987 , son désir d'adhérer comme membre à part entière à l'Union de l'Europe occidentale. Cette adhésion devrait trouver aujour­

d'hui sa maturité et aller de soi . Car. au moment où l'U.E.O. est en train

d' se convertir en institution qui incarnera la politique européenne de

défense, il est évident que l'adhésion des pays communautaires qui le

désirent devient toute naturelle. Forts de ce principe, nous sommes sûrs

que la Grèce, membre de la Communauté européenne et de l'O.T.A.N.

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-et ayant accepte pleinement la Plate-forme de La Haye, trouvera la place qui lui revient dans cette institution à vocation européenne par excel ­

lence.

« Ayant parlé de ces deux piliers, l'O.T.A.N. et la Communauté, je voudrais maintenant me référer au troisième, celui de la C.S.C.E.

« Au niveau paneuropéen, la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe constitue le seul forum où. pour la première fois

dans l'Histoire, tous les pays européens traitent les questions de leur

sécurité en coopération étroite avec les États-Unis et le Canada. Nous

attachons une importance particulière à la promotion et au développe ­

ment du rôle de la C.S.C.E. , notamment dans le domaine de la gestion

des crises, de la dissuasion des conflits et de la solution pacifique des

différends.

« Nous concevons la C.S.C.E. comme le principal cadre institu­

tionnel pour le contrôle et la réduction des armements sur notre

continent et pour l'établissement de mesures de confiance et de sécurité.

Afin que l'efficacité de ces mesures puisse être assurée et qu'aucun pays ne puisse se sentir menacé par l'accumulation excessive d'armes et la

création d'un potentiel offensif dans son propre voisinage, leur champ

d'application devrait être le plus large possible.

« C'est ainsi que le processus post-Helsinki de sécurité pourra

servir de nouveau point de départ vers la création d'un système de coopération, de stabilité et de sécurité. Le fait que tous les Etats de la

C.S.C.E. fassent déjà partie de ce processus comme participants à part