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Diversité des minéralisations talqueuses et implications

I. Le talc naturel

1.2. Diversité des minéralisations talqueuses et implications

a. Production mondiale

Les gisements de talc sont largement répandus à la surface de la Terre. En 2017, plus de 8.1 milliers de tonnes de talc ont été produites par la force de huit acteurs économiques principaux à savoir la Chine, l’Inde, le Brésil, le Mexique, la Corée du Sud, les Etats-Unis, la France et le Japon. (USGC, 2018) (Tableau 3). Fait rare, la France renferme actuellement le plus grand gisement de talc en exploitation dans le monde qui fournit à lui seul environ 470 milliers de tonnes de talc par an. Ce gisement qui se situe à Luzenac dans les Pyrénées ariégeoises est aujourd’hui exploité par la société française IMERYS, et est exceptionnel par son volume et sa qualité.

Tableau 3 : Production mondiale de talc durant l’année 2017.

b. Modes de formation

Trois modes de formation sont à l’origine des gisements de talc sur Terre. Dans chaque cas, la formation de la minéralisation nécessite une rencontre entre les éléments chimiques majeurs composant le minéral, à savoir du silicium et du magnésium. Une partie de ces éléments est apportée par la roche mère mise en place (roche magnésienne ou siliceuse) tandis que l’autre partie est apportée par des fluides hydrothermaux riches en l’élément complémentaire (MgO ou SiO2). Le tout cristallise dans un contexte métamorphique de relativement basse température et pression. Ces trois modes de formation ont été décrits de la manière suivante (Boutin, 2016) :

Les gisements de type 1 impliquent une roche mère magnésienne carbonatée de type dolomie qui, par réaction avec des fluides hydrothermaux riches en silice, va précipiter du talc. Ces minéralisations se forment dans un contexte de métamorphisme de faciès schistes verts à environ 250°C-350°C et 2.5 kbar (De Parseval, 1992). L’équation de la réaction est la suivante :

3CaMg(CO3)2 + 4SiO2 (aq) + 6H+ = Mg3Si4O10(OH)2 + 3Ca+ + 6CO2 + 6H2O Dolomite talc

Le second type de gisement implique une roche mère magnésienne non carbonatée ultrabasique de type serpentine qui va précipiter du talc soit par apport de silice, soit par apport de dioxyde de carbone. Les conditions de températures sont ici un peu plus élevées (jusqu’à 500°C) avec des pressions

Mg3Si2O5(OH)4 + SiO2 = Mg3Si4O10(OH)2 + H2O (Deer et al., 2009) Serpentine talc

2Mg3Si2O5(OH)4 + 3CO2 = Mg3Si4O10(OH)2 + 3MgCO3 + 3H2O (Turner, 1948) Serpentine talc

Enfin, le gisement de type 3 implique cette fois-ci des roches siliceuses qui vont libérer de la silice dans des fluides minéralisateurs, qui va alors à son tour interagir avec du magnésium pour former du talc. L’équation de la réaction est la suivante :

4SiO2 (aq) + 3Mg2+ + 4H2O = Mg3Si4O10(OH)2 + 6H+ (De Parseval et al., 2004). Silice talc

Ces trois modes de formation sont primordiaux car ils sont à l’origine de la grande diversité des minéralisations talqueuses sur Terre. Ainsi, du fait d’une histoire géologique différente et d’une lithologie de la roche mère différente, les nombreux gisements de talcs présentent des caractéristiques très variées que ce soit en terme de couleurs, de compositions chimiques, de cristallinités, de douceurs, de lamellarités ou bien encore de minéraux associés (Claverie et al., 2018; Martin et al., 2019). L’évaluation de ces différents critères est indispensable car elle déterminera la qualité du gisement, et de ce fait les applications industrielles qui seront envisagées. Un tel exemple de caractérisation de particules de talc naturel issues du gisement de Minzanzala au Gabon est présenté en annexes (Poirier

et al., 2019).

c. Applications

Par ses nombreuses propriétés physico-chimiques et son prix très attractif (environ 50 à 200 euros la tonne), le talc est aujourd’hui devenu un produit phare de notre quotidien. Lamellarité, douceur, blancheur, hydrophobie, pouvoir lubrifiant, lipophilie, inertie chimique, stabilité thermique, propriétés barrières sont autant de termes qui le qualifient et qui témoignent de son large panel d’applications. En fonction de certains critères (couleur, taille des particules, pureté chimique, associations minéralogiques), le minerai de talc sera privilégié dans telle ou telle application. Ici, nous allons illustrer ce propos au travers de différents objets communément rencontrés dans notre quotidien.

Dans la salle de bain

Les produits de beauté renferment de nombreux produits à base de talc comme les déodorants. Le minéral est ici utilisé comme remède anti-odeurs du fait de son caractère lipophile, c’est-à-dire de son affinité pour les composés organiques. Le talc se retrouve également dans les fonds de teint, les vernis à ongles, les fards à paupières du fait de sa douceur et de ses propriétés matifiantes et lubrifiantes. Pour de telles applications en cosmétique, le minerai doit être d’une grande pureté minéralogique et chimique

aujourd’hui un minerai composé d’au moins 90% de particules de talc dont les 10% restants excluent toute trace d’amiante, et doit renfermer des teneurs inférieures à 20 ppm en Pb et 3 ppm en As.

Dans la voiture

Le talc entre dans la composition de tous les pneus (caoutchouc), les volants, les tableaux de bord et les pare-chocs. Il est ici ajouté en tant que charge minérale ou agent nucléant dans les polymères pour abaisser le coût de revient du matériau. De plus, sa haute stabilité thermique (850°C-900°C) facilite l’usinage de certaines pièces qui nécessitent un passage à haute température. D’après IMERYS, une voiture peut contenir jusqu’à 15 kg de talc dans son ensemble. Dans ce type d’application, les gisements présentant des particules de petite taille seront privilégiés car ils améliorent les propriétés mécaniques et thermiques des matériaux du fait d’une meilleure dispersion du minéral dans les matrices polymères (Yousfi et al., 2013).

Dans notre assiette

Grâce à sa biocompatibilité, son onctuosité et son inertie chimique, le talc peut être ingéré facilement et sans danger par l’Homme. Il est ainsi fréquemment utilisé dans l’alimentation humaine comme agent anti-agglomérant grâce à ses propriétés lubrifiantes. Il se retrouve par exemple dans tous nos sachets de riz où il empêche l’agglutination des grains, ou bien encore dans nos chewing-gum où il apparait sous la forme d’une fine poudre blanche anti-collante de revêtement. Ici un talc blanc chimiquement et minéralogiquement pur sera privilégié.

De même, en plus de l’alimentation humaine, le talc est aussi utilisé pour ces mêmes propriétés dans l’alimentation animale pour la préparation des granulés.

Au bureau

Au bureau, le talc se retrouve massivement dans tous les documents de travail car il est l’un des composants majeurs des feuilles de papier. Il est utilisé ici comme charge minérale pour combler les vides entre les fibres de cellulose, et peut représenter ainsi jusqu’à 20 % de la masse totale des feuilles. En plus de son coût bon marché, sa forme lamellaire, sa blancheur et sa douceur permettent d’améliorer la brillance, l’opacité et les propriétés d’impression des feuilles (Chauhan et al., 2013; Lin et al., 2016). Il évite par ailleurs l’apparition de défauts lors de la fabrication de la pâte à papier en empêchant les résines du bois de s’agglomérer entre elles (Tijero et al., 2012). Dans ce type d’application, les gisements présentant des grandes particules les plus blanches possibles seront bien évidemment privilégiés. Les peintures satinées et mates de nos bureaux sont elles aussi emplies de talc (de 1 à 5% masse). L’affinité du minéral pour les produits organiques tels que les huiles et les pigments (lipophilie) facilite en effet la confection des peintures et leur apporte brillance, opacité, et stabilité face aux agressions UV (Karakaş et al., 2010). Par ailleurs, la lamellarité et les propriétés barrières du talc notamment contre

l’eau, le CO2 et l’O2 augmentent la résistance des peintures face aux intempéries et à la corrosion (Dumas, 2013). Le talc améliore également les propriétés d’application et d’écoulement des peintures, leur flexibilité et leur viscosité, ainsi que leur adhérence sur les substrats (Bulletin Technique 1206, Mondo Minerals). Dans ce type d’application, le minerai ne doit pas être nécessairement blanc ou pur puisque son caractère lamellaire est le critère principalement recherché.

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