• Aucun résultat trouvé

Distribution de taille d’agrégats de cobalt en vol

1.2 Synthèse d’agrégats de cobalt nanométriques

1.2.3 Distribution de taille d’agrégats de cobalt en vol

Les paramètres de contrôle de la source d’agrégats sont nombreux : les débits d’argon et d’hé- lium, la puissance du magnétron, la pression totale et la longueur de la zone de nucléation et croissance (distance entre le magnétron et le diaphragme de sortie de la source d’agrégats). La taille des agrégats dépend essentiellement de la pression d’argon et de la longueur de la zone de nucléation et croissance. Les autres paramètres sont en général utilisés pour modifier la forme de la distribution et l’intensité du faisceau d’agrégats.

Dans cette partie, nous présentons la forme des distributions de taille typiquement obtenues avec le bâti d’agrégats décrit plus haut, tailles allant de quelques atomes jusqu’à environ 8 nm.

Distribution de taille d’agrégats de cobalt de quelques dizaines d’atomes (diam. < 1 nm)

Au spectromètre de masse à temps de vol, on détecte uniquement les agrégats de quelques dizaines d’atomes lorsque la zone de nucléation et croissance (zone ➀) est petite (jusqu’à∼ 10 cm).

Comme nous l’avons vu plus haut, pour ces tailles d’agrégats nous obtenons des spectres avec une résolution atomique.

La figure1.11a illustre un spectre typique, obtenu pour les paramètres de la source suivants

(dans la zone ➀) :

– pression P= 0.6 mbar,

– débit d’argon Ar= 80 cm3standard par minute (sccm),

– puissance du magnétron Pw= 50 W,

– distance entre le magnétron et le diaphragme de sortie L= 8 cm.

Nous avons représenté en abscisse le nombre d’atomes de cobalt. Autrement dit un atome de cobalt, de masse molaire 58.93 g.mol−1, aura pour abscisse 1, un atome d’argon, de masse molaire 39.95 g.mol−1, sera porté à l’abscisse 0.68, et ainsi de suite pour les multiples ou les combinaisons

d’atomes. Cela suppose que les agrégats de cobalt soient monochargés, ce que l’on pourra vérifier par ailleurs lors de l’indexation du spectre. Grâce à cette représentation, on peut indexer chacun des pics du spectre, à quelques exceptions près, comme par exemple le pic correspondant à deux atomes de Co, qui peut aussi correspondre à trois atomes d’argon. Pour indexer ces pics, on fera l’hypothèse que dans les agrégats le nombre d’atomes d’argon est faible par rapport au nombre d’atomes de cobalt.

On distingue deux régimes dont la transition se situe autour d’une quinzaine d’atomes. Dans un premier régime (zoom du spectre, indexé à la figure1.11b), on observe un mélange d’agrégats

de cobalt Co+n, d’ions argon Ar+, Ar+2, et d’agrégats mixtes ArCo+n et Ar2Co+n monochargés. On constate que l’intensité des pics de ce premier régime est plus ou moins grande et irrégulière jusqu’à l’agrégat de cobalt de 12 atomes Co+12. Pour l’instant, nous n’avons pas d’interprétation pour ces variations brutales de l’intensité des pics. À partir de 12 atomes de cobalt, l’intensité des pics correspondant aux agrégats mixtes Co-Ar décroît. Cela indique que lorsque la taille des agrégats augmente, les atomes d’argon sont de moins en moins présents dans les agrégats. Ce phénomène, qui marque la transition vers le second régime, est observé jusqu’aux agrégats de 17 atomes environ.

À partir de 18 atomes, seuls les agrégats de cobalt purs sont présents. Ce deuxième régime se traduit par une croissance régulière des agrégats de cobalt, par adjonction successive d’un atome de cobalt, symbolisé par l’espacement régulier entre les pics, visible sur la figure1.11a.

La mesure de ces spectres montre que si on laisse peu de temps aux agrégats pour croître, les plus petits ont encore des atomes d’argon incorporés, alors que les plus gros ont éjecté les atomes d’argon avant d’entrer dans le spectromètre. Dans la littérature, la structure de moindre énergie pour une taille donnée est décrite par des calculs de structures pour de petits agrégats de cobalt CoN (4≤ N ≥ 60) [47]. Ces calculs n’envisagent pas la formation d’agrégats mixtes Co-Ar.

On peut noter enfin que les spectres obtenus ici ne permettent pas de mettre en évidence la structure des agrégats, comme c’est le cas dans certaines études. Par exemple Pellarin et coll. ont réalisé des expériences de photoionisation au voisinage du seuil d’ionisation du cobalt [48]. Ils ont observé des oscillations dans le spectre de masse, qui reflètent la structure des agrégats. Ils ont ainsi prouvé que les agrégats de cobalt en vol sont icosaédriques. Ne disposant pas de laser, nous n’avons pas étudié cet aspect.

FIG. 1.11 – a) Spectre de temps de vol d’agrégats de cobalt. b) Zoom et indexation des premiers pics du spectre complet en a).

Distribution de taille d’agrégats de cobalt (diam. > 1 nm)

Lorsque l’on augmente progressivement la longueur L de la zone de nucléation et croissance, la distribution de taille se modifie, et l’on voit apparaître de plus gros agrégats. Trois exemples de distributions de tailles, obtenues pour des longueurs L différentes, sont représentées à la figure

1.12. Les paramètres de la source sont précisés sur chacun des graphiques.

On peut remarquer que la taille des agrégats augmente avec la longueur de la zone nucléation et de croissance. Plus les agrégats passent de temps dans cette zone (L grand), plus ils grossissent. Les distributions de taille sont relativement étroites (largeur à mi-hauteur 0.4 nm) à l’image de

celle représentée sur le spectre1.12a. Cependant, la variation de la taille des agrégats n’est pas ré-

gulière et l’on voit apparaître très rapidement d’autres populations d’agrégats (de taille souvent très différente) qui coexistent. Le spectre1.12b illustre ce type de distribution. La flèche représente une

population d’agrégats de 4.7 nm de diamètre qui croît indépendamment de celle de 2 nm lorsque

l’on modifie légèrement des paramètres de la source. Une autre particularité de ce régime vient du fait que le seul moyen d’isoler l’une ces deux populations est d’injecter de l’hélium pendant la croissance des agrégats, qui va empêcher la formation des plus gros (thermalisation plus lente avec un gaz léger).

Enfin, un troisième régime caractérisé par une distribution de taille assez large et irrégulière est illustré à la figure 1.12c. Cette distribution résulte en fait de la superposition de trois popu-

lations d’agrégats de tailles très proches. Bien qu’elles évoluent indépendamment les unes des autres lorsque l’on modifie des paramètres de la source, il ne semble pas possible de les dissocier, même avec des valeurs extrêmes des paramètres. Seul un dispositif de tri en masse des agrégats permettrait de les séparer.

Cette description de la croissance des agrégats est extrêmement simplifiée, et n’est plus valable lorsque l’hélium est mélangé à l’argon dans la zone de nucléation et croissance. Au regard de ces résultats, nous ne pouvons pas proposer de modèle unique de nucléation et de croissance des agré- gats, permettant de décrire le comportement de cette source. Il semble exister plusieurs «chemins» de croissance donnant lieu à différents régimes qu’il serait intéressant d’analyser individuellement, mais dont ce n’est pas l’objet ici.

Les trois distributions de taille présentées ici peuvent être ajustées avec une ou plusieurs distri- butions log-normal de la forme :

f(D) = √ 1 2πσ2exp −  ln  D Dmoyen 2 1 2σ2 ! (1.24)

où D est le diamètre des agrégats, Dmoyen leur diamètre moyen etσla dispersion.

La loi log-normale est souvent invoquée pour décrire un mode de croissance par coalescence d’agrégats en vol. Un modèle, basé sur le temps de résidence dans la zone de nucléation et crois- sance des agrégats, permet aussi d’expliquer la forme en log-normale [49]. Les auteurs ont montré qu’une distribution de taille log-normale provient d’une distribution des temps de croissance des agrégats.

FIG. 1.12 – Distributions de taille d’agrégats de cobalt en vol, mesurées au spectromètre de masse à temps de vol. P, Ar et L sont respectivement la pression, le débit de gaz (ici l’argon) et la longueur entre le magnétron et le diaphragme de sortie de la source dans la zone de nucléation et croissance (la puissance du magnétron reste fixe à 50 W).

Ces trois distributions sont typiques pour les trois gammes de tailles que l’on a étudiées. En pratique, d’un dépôt à l’autre, il n’est pas toujours possible de déposer des agrégats de tailles stric- tement identiques, le comportement de la source n’étant pas toujours reproductible : à longueur, débit de gaz et puissance du magnétron constants, la forme de la distribution de taille peut évoluer notamment à cause de fluctuations de température ou de pression dans la zone de nucléation et croissance d’agrégats. De ce fait, ce que l’on privilégie c’est la forme de la distribution de taille et la vitesse de dépôt des agrégats, que l’on cherche à garder très proches entre différents dépôts d’agrégats d’une même gamme de taille, au détriment de la position du pic principal de la distri- bution. En général, la variation de la position de ce pic reste inférieure à la largeur à mi-hauteur du pic principal de la distribution (respectivement 0.4, 0.6 et 1.2 nm pour les distributions a, b et c de

la figure1.12).