• Aucun résultat trouvé

Sophie SALMON,Secrétaire générale de la Commission de liaison interprofessionnelle du livre

Je vais essayer de vous présenter le plus clairement possible le schéma Prisme. Prisme est une plateforme interprofessionnelle qui a été mise en place à l’initiative de la commission de liaison interprofessionnelle du livre (CLIL). C’est une association loi 1901, créée en 1971, interprofessionnelle, composée d’un collège « distributeurs » et d’un collège « libraires ». La réflexion sur les transports pour les libraires de province a abouti en 1993 à la création de la plateforme Prisme. Les deux collèges exercent la présidence de l’association, en alternance, tous les deux ans. En ce moment, ce sont les libraires qui assument la présidence. Une des missions de l’association est la gestion de la plateforme Prisme. En effet, des indicateurs qualitatifs ont été déterminés dans le contrat avec la plateforme et doivent donc faire l’objet d’un suivi. Les autres missions sont l’achat du transport de manière massifiée, l’accompagnement des libraires dans le choix d’un transport approprié, le conseil et la gestion du fichier exhaustif du livre qui est la base commerciale alimentée par les distributeurs. L’un des objectifs de l’association est aussi de travailler aux bonnes pratiques de la chaîne du livre. Prisme est donc une plateforme de massification. Son objectif est de gérer physiquement et informatiquement les flux des libraires. Les distributeurs livrent chaque jour l’ensemble des commandes préparées pour les libraires sur la plateforme, jusqu’à 15 heures. Celle-ci va répartir tous les colis vers les transporteurs référencés. La plateforme gère aussi l’ensemble des retours, également massifiés, pour les distributeurs qui les récupèrent. Le tarif négocié pour les libraires est valable sur l’aller comme sur le retour. L’utilisation de la plateforme relève du choix du libraire. En 2017, environ 2 400 libraires utilisaient la plateforme.

L’avantage pour les libraires consiste en des tarifs négociés. La massification leur permet d’avoir une baisse du prix moyen de leurs expéditions. En effet, dans le transport, plus le poids est important, plus le rapport au kilo baisse. La plateforme propose également aux petits libraires des systèmes de rétention. Dès lors, le libraire peut choisir d’être livré une ou deux fois par semaine. La plateforme conserve les colis et les remet au transporteur la veille de la livraison. L’autre gain est opérationnel, puisque le libraire n’a ainsi qu’une seule livraison. La plateforme lui met à disposition un outil de suivi. Dans l’équilibre de la plateforme, sur le

66

« flux aller », les distributeurs prennent en charge une part plus importante proportionnellement, puisque leur participation aux frais de plateforme est plus élevée que celle des libraires. À l’inverse, sur le « flux retour », le libraire a une participation aux frais de plateforme beaucoup plus importante qu’à l’aller. Au final, l’équilibre économique de la plateforme repose sur ces deux flux. En 2017, il y a eu 6 six millions de colis pour 59 000 tonnes.

Le plan de transport actuellement en place date de 2010. Il a été conçu de manière à proposer aux libraires un choix entre trois transporteurs, ce qui permet de mieux négocier le coût du transport. Sept transporteurs sont actuellement référencés dont deux au niveau national. La France est ensuite découpée par zone où il est proposé un transporteur plus régional. Le choix des transporteurs a été effectué suite à un appel d’offre. Ils sont liés à la CLIL pour les principes généraux et à la plateforme Prisme pour des détails opérationnels (échanges, flux d’échanges, mise à disposition des moyens).

On s’aperçoit de plus en plus que le système est vertueux, parce qu’il permet de remplir les camions. On est également sur un principe de messagerie. Il n’y a pas que des livres dans les tournées. Une réflexion devra d’ailleurs s’instaurer sur ce principe. En effet, dans le cadre des politiques de ville et afin de diminuer la pollution, notamment, les restrictions sont de plus en plus nombreuses. Le principe de messagerie, grâce auquel le transporteur organise sa tournée de manière optimum, ne vaut plus dans de nombreux cas. La question des livraisons de nuit ou très tôt le matin devra être abordée.

Il existe également une pression concernant le délai de livraison et cela afin de concurrencer Amazon. Or, lorsqu’on livre dans le Grand Sud, le temps d’acheminement des livres est incompressible. Les commandes sont de plus en plus fractionnées, ce qui signifie que le poids moyen des colis baisse. Cela aura un impact sur le calcul du coût du transport. Cette question environnementale va forcément devoir être prise en compte.

Question de la salle :

j’imagine des livraisons qui se feraient avec des camions plus petits.

Sophie SALMON :

ce système existe déjà. Cela s’appelle un flux « monocoliste » avec des plus petites livraisons. Toutefois, cela implique aussi d’aller plusieurs fois chez le libraire. Le principe de massification se perd un peu dans ce cas. Par contre, ce système répond à une demande des libraires, celle d’être livrés rapidement sans attendre un réassort une ou deux fois par semaine.

Question de la salle :

Est-ce qu’on peut imaginer aussi des livraisons qui s’arrêteraient à la frontière des villes et qui seraient effectuées ensuite en vélo-cargo ?

67

Sophie SALMON :

Il existe déjà des expériences. C’est le cas à Bordeaux ou Montpellier. Il faut travailler avec les transporteurs pour que l’on ait cette livraison vertueuse. Par ailleurs, notre transporteur du sud-est mène une réflexion écologique soutenue. Toutes ses livraisons finales se font au Gaz naturel pour véhicules (GNV). Par contre, cela générera un coût supplémentaire. Si la démarche est vertueuse écologiquement, y présidait aussi au départ une volonté économique. Il fallait que les libraires aient un gain économique sur les frais de transport.

Question de la salle :

en 2017, il y avait 2 400 libraires. Comment déployer encore plus largement ce service auprès des libraires ? Qu’est-ce qui freineraient les autres libraires à adhérer à Prisme ?

Sophie SALMON :

Parfois la méconnaissance. Il est parfois expliqué aux libraires que leurs livraisons sont gratuites au-dessus d’un certain montant de commandes. Ils n’ont donc pas l’impression de payer le transport. Dans ce cas, quel est intérêt de transiter par une plateforme où ils vont certes reprendre la main sur leur transport, mais où ils auront une facture à la fin du mois ? Pour élargir le spectre, on a besoin des diffuseurs et des distributeurs.

Durabilité, patrimoine et temps long : la conservation et le développement