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Dissolution de la matrice vitreuse, vers des matériaux utilisables in vivo ?

IV.1) Protocole de dissolution

Les luminophores persistants ZnGa2O4 dopés au chrome ont retenu l’attention de nombreuses

équipes de recherche pour leur potentielle utilisation comme sonde pour l’imagerie optique in vivo. Pour ce faire, il faut avoir des matériaux de taille nanométrique. Dans un premier temps, la voie vitrocéramique nous a permis d’étudier le potentiel de ces nano-luminophores mais également d’avoir de nombreuses informations concernant le mécanisme de la luminescence persistante. En parallèle, l’extraction des nanoparticules de ZnGa2O4 :Cr3+ de ces vitrocéramiques a été réalisée. Deux voies de

dissolution de la matrice vitreuse étaient au départ envisageables, la voie acide en utilisant du HF ou la voie basique. Par soucis de sécurité au laboratoire et ne sachant pas si le HF pouvait également attaquer les nano-cristaux, la voie basique a été préférée. De plus, la proportion en matrice vitreuse n’étant pas si importante comparée à la phase cristalline, nous avons pu nous appuyer sur des travaux visant à dissoudre la couche silicatée protectrice utilisée pour limiter le frittage des nanoparticules au cours de la synthèse par voie hydrothermale. Les vitrocéramiques ont alors été broyées finement dans un mortier en agate (voir figure 5.12 ①). Ensuite, étape ②, 100 mg de poudre ainsi obtenue ont été dispersés dans 30 mL de NaOH à 4 mol.L-1. Le mélange est placé dans un bain à ultrasons pendant 10

minutes. Il est ensuite placé sous agitation pendant 24 heures. Enfin, 4 lavages à l’eau successifs ont été réalisés par centrifugation, étape ③ (10000 tours.min-1 à 15 °C) avant de sécher la poudre sous

flux d’air, étape ④.

Figure 5.12 : Illustration des étapes utilisées lors du protocole de dissolution de la matrice vitreuse.

IV.2) Caractérisations structurales des nano-cristaux obtenus

Afin de vérifier de la bonne dissolution de la matrice vitreuse, les échantillons ont été analysés en microscopie électronique en transmission. Les clichés (figure 5.13) présentent des amas de nano- cristaux. Contrairement à l’étape précédant la dissolution, les bords des amas sont bien nets et la partie claire, représentant la phase vitreuse n’est plus observable autour des nano-cristaux. Ceci atteste bien de la bonne dissolution de la matrice vitreuse. Cependant il est possible d’observer quelques résidus de verre comme au centre des amas indiqués par des flèches rouges sur les clichés (a) et (d). Si des tests in vivo sont ensuite réalisés, il faudra au préalable passer les échantillons au bain à ultrasons afin

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de ne récupérer que les particules libérées du verre. Les tailles moyennes des nanoparticules ont été mesurées sur les clichés MET. Les tailles obtenues, 16,5 ± 3,7 nm sont cohérentes avec celles mesurées avant dissolution de la matrice vitreuse.

Figure 5.13 : Clichés de microscopie électronique en transmission des échantillons après dissolution de la matrice vitreuse. Les flèches rouges signalent les résidus de verre au milieu des amas de nano-cristaux.

La structure des nano-cristaux ainsi élaborés a été étudié par DRX. Comme on peut le voir sur la figure 5.14 (a), des diagrammes de DRX superposables sont obtenus avant et après dissolution de la matrice vitreuse. Ils traduisent bien la phase spinelle des nano-cristaux de ZnGa2O4. De plus, l’analyse par la

méthode de Scherrer nous donne une taille moyenne des cristallites de 13,7 ± 0,9 nm avec un paramètre de maille de 8,355 ± 0,001 Å. D’après ces caractérisations structurales, la voie vitrocéramique combinée à la dissolution de la matrice vitreuse par de la soude concentrée nous apparaît comme un moyen efficace d’élaborer des nano-cristaux de ZnGa2O4 de bonne qualité

cristalline. Des études de l’évolution des propriétés optiques corrélées à l’ordre local nous permettrons de tester la faisabilité de ce procédé pour l’élaboration de nanoparticules à luminescence persistante.

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Figure 5.14 : (a) Diagrammes de diffraction des rayons X des échantillons ZnGa2O4 :Cr3+ avant (noir) et après

(rouge) dissolution de la matrice vitreuse. (b) Distribution des tailles des nanoparticules mesurées sur les clichés MET après dissolution de la matrice vitreuse.

IV.3) Propriétés optiques des nanoparticules ainsi élaborées

IV.3.1) Photoluminescence

Les spectres de photoluminescence des échantillons avant et après dissolution de la matrice vitreuse sont présentés sur la figure 5.15. Le spectre après dissolution est parfaitement superposable à celui avant. On retrouve bien toutes les raies correspondant aux transitions du Cr3+ : 2E → 4A

2 dans

différents environnements. Les intensités relatives des différentes raies sont de plus identiques pour les deux spectres. Cela signifie que les chromes responsables des propriétés optiques n’ont pas leur environnement perturbé par la dissolution de la matrice vitreuse. Les ions Cr3+ impliqués dans les

processus de luminescence ne sont alors très certainement pas en surface des nanoparticules. On peut alors s’attendre à des propriétés de luminescence persistante conservées.

Figure 5.15 : Spectres de photoluminescence des nano-vitrocéramiques de ZnGa2O4 :Cr3+ avant et après

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IV.3.2) Luminescence persistante des nanoparticules

La comparaison des propriétés de luminescence persistante a ensuite été réalisée (figure 5.16 (a)). L’intensité de luminescence persistante après dissolution de la matrice vitreuse est légèrement supérieure à celle obtenue sur les vitrocéramiques broyées. Ce résultat peut premièrement paraître surprenant mais sachant que les mesures ont été réalisées dans des portes échantillons avec une même masse et surface d’échantillon, on peut en déduire la quantité d’ions Cr3+ présents pour la

vitrocéramique est moindre du fait de la présence de la matrice vitreuse. Par ailleurs, les déclins avant et après dissolution de la matrice vitreuse possèdent des profils similaires. Or, le fait d’ôter la matrice vitreuse pourrait intuitivement mener à la création de défauts de surface pouvant avoir des effets sur la luminescence. Connaissant les excellentes propriétés de luminescence persistante de nos vitrocéramiques (de l’ordre du matériau massif pour les vitrocéramiques non broyées), ces résultats indiquent une intense luminescence persistante des nanoparticules élaborées par cette voie. Les profils de thermoluminescence normalisés avant et après dissolution de la matrice vitreuse (sur la partie (b) de la figure 5.16) sont quasiment superposables. Cela sous-entend que la dissolution de la matrice vitreuse ne conduit pas à la formation de défauts néfastes à l’émission persistante. La présence d’une fine couche de silice amorphe résiduelle pouvant protéger la surface pourrait expliquer ces observations. On remarque tout de même que le profil de thermoluminescence de l’échantillon après dissolution est légèrement plus large. La surface pourrait alors potentiellement avoir un effet conduisant à une augmentation de la distribution des pièges.

Figure 5.16: (a) Déclins de la luminescence persistante des échantillons avant et après dissolution de la matrice vitreuse. (b) Profils de thermoluminescence de ces mêmes échantillons. Ces mesures ont été effectuées après 5 minutes d’excitation UV (λexc = 254 nm).

Si nous comparons le profil de thermoluminescence des nanoparticules de gallate de zinc élaborées par voie vitrocéramique suivie de la dissolution du verre avec celui des nanoparticules obtenues par des méthodes de chimie douce précédemment illustrées, on remarque qu’il est bien moins large. Or, les profils de thermoluminescence sélectionnés ont été obtenus sur des échantillons présentant des tailles de nanoparticules similaires. Les qualités cristallines ou de surface ne sont sans doute pas équivalentes. De plus, bien que les nanoparticules élaborées par chimie douce sont entourées d’une fine couche de silice, l’effet de la surface est certainement différent dans les deux cas. Dans le cas de

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la synthèse par chimie douce, la couche de silice est introduite après les étapes de nucléation et croissance et il est alors possible que la couche soit présente autour d’agrégats de nanoparticules tandis que pour les vitrocéramiques la couche de silice est déjà présente avant les étapes de nucléation croissance. L’effet de la qualité cristalline et effet de surface sur les propriétés de luminescence persistante apparait alors d’une importance cruciale sur l’évolution des propriétés recherchées.