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Chapitre III : Oxydation de l’alliage Ti6242S sous air de laboratoire

III.1. Oxydation isotherme de l’alliage Ti6242S sous air de laboratoire

III.1.3. Dissolution d’oxygène dans l’alliage Ti6242S

Plusieurs études [26–30] ont montré l’intérêt d’utiliser la microdureté pour suivre la dissolution d’oxygène dans les alliages de titane, puisque celle-ci augmente linéairement

avec la concentration en oxygène en solution solide dans le Ti-α jusqu’à la composition

Ti0,66O0,34. Pour cette raison, la dissolution d’oxygène dans le substrat de l’alliage Ti6242S a

été suivie par mesures de microdureté réalisées sur les coupes transverses des échantillons oxydés. Des profils en oxygène ont également été réalisés par MEB-EDX en partant de l’interface externe de l’alliage oxydé vers le cœur de l’échantillon. Les profils de microdureté et d’oxygène obtenus sur les échantillons oxydés à 560°C jusqu’à 10 000 h sont présentés sur la Figure III-10. La profondeur de dissolution d’oxygène dans le métal pour les différentes durées d’oxydation a été déterminée à partir de ces profils.

Figure III-10 : Profils de microdureté et d’oxygène après (a) 1 000 h, (b) 3 000 h, (c) 6 000 h et (d) 10 000 h d’oxydation à 560°C sous air de laboratoire

Les valeurs de dureté obtenues proche de l’interface métal/oxyde sont très élevées comparées à la dureté de l’alliage non oxydé. Après 1 000 h d’oxydation, la dureté vaut

620 HV0,025 à 5 µm de profondeur, et elle vaut 810 HV0,025 à 5 µm de profondeur après

10 000 h d’oxydation. La dureté diminue rapidement dans la profondeur de l’alliage pour toutes les durées d’oxydation étudiées, jusqu’à atteindre un palier qui correspond environ à

la dureté de l’alliage Ti6242S non oxydé (375 HV0,025). La profondeur pour laquelle ce palier

est atteint augmente avec la durée d’oxydation.

La concentration en oxygène évolue de manière similaire avec la profondeur. La concentration maximale mesurée proche de l’interface métal/oxyde est de 27 % at. Cette valeur décroît rapidement dans la profondeur de l’alliage pour atteindre un plateau avec une concentration résiduelle de 4 à 6 % at. selon les profils. Ce taux non nul dans le cœur de l’alliage est dû à une pollution de surface à l’oxygène (adsorption d’oxygène à la surface de

La profondeur de dissolution d’oxygène a pu être évaluée en combinant les profils de dureté et de concentration en oxygène pour chaque échantillon. Les résultats sont donnés dans le Tableau III-3.

Durée d’oxydation (h) Profondeur de dissolution d’oxygène (µm)

1 000 22

3 000 30

6 000 39

10 000 50

Tableau III-3 : Profondeurs de dissolution d'oxygène

Ces valeurs obtenues à 560°C sont comparables à celles obtenues dans d’autres études réalisées sous air. Gaddam et al. [1,2] ont mesuré une profondeur de dissolution de 10 µm après 500 h d’oxydation à 500°C et de 30 µm après 500 h d’oxydation à 593°C.

Baillieux et al. [27] ont mesuré une profondeur de dissolution d’oxygène de 50 µm après

oxydation de l’alliage Ti6242S pendant 1 000 h à 600°C.

L’évolution de la profondeur de dissolution semble parabolique avec le temps. Le tracé de 𝐺𝐺𝑃𝑃𝑃𝑃𝑓𝑓.𝑑𝑑𝑇𝑇𝑑𝑑𝑑𝑑𝑃𝑃𝑑𝑑𝑑𝑑𝑡𝑡𝑇𝑇𝑃𝑃𝑑𝑑=𝑓𝑓(𝑡𝑡12) présenté sur la Figure III-11 confirme cette observation. Ces résultats sont cohérents avec la cinétique parabolique de dissolution d’oxygène mise en

avant à partir des prises de masse dans la partie III.1.1. (Figure III-2) et sont en accord avec

la littérature [1–3,13,29].

Figure III-11 : Profondeur de dissolution d’oxygène en fonction de la durée d’oxydation et en fonction de la racine carrée du temps d’oxydation

La dissolution d’oxygène a également été mise en évidence par diffraction des rayons X. La Figure III-12 montre les diffractogrammes enregistrés à faible angle d’incidence (2°) sur les échantillons Ti6242S avant oxydation et après oxydation de différentes durées (1 000, 3 000 et 10 000 h) sous air à 560°C.

Figure III-12 : Diffractogrammes de l'alliage Ti6242S avant et après oxydation sous air à 560°C pour différents temps de maintien

Un décalage des pics correspondant à la phase α du Ti6242S est observé. Ce

déplacement traduit une augmentation du volume de la maille HCP, causée par la dissolution d’oxygène dans le métal. En effet, la dissolution d’oxygène a lieu par insertion

dans les sites interstitiels octaédriques de la maille HCP [31–34]. De ce fait, la phase β,

toujours présente après oxydation, se retrouve dans le pied du pic de la phase α du Ti6242S

après oxydation. De plus, le décalage augmente avec la durée d’oxydation, ce qui suggère que la quantité d’oxygène présente à la surface du métal augmente avec la durée d’oxydation.

La dissolution d’oxygène dans l’alliage et dans le temps a été suivie par la mesure des

paramètres des mailles α (HCP) et β (CC) du Ti6242S en fonction de la durée d’oxydation.

Une précédente étude de Baillieux et al. [31] réalisée par diffraction synchrotron a permis de

montrer l’existence d’une relation linéaire entre le rapport c/a de la maille hexagonale du

titane et la concentration en oxygène ainsi que la microdureté, pour une température et un temps donnés. L’approche utilisée dans ce travail de thèse apporte des informations complémentaires à celles collectées par Baillieux. L’affinement Rietveld des diffractogrammes obtenus à partir des échantillons oxydés pendant différentes durées jusqu’à 10 000 h a été réalisé à l’aide du logiciel MAUD [35]. La résolution du diffractomètre

a été calibrée sur une poudre standard LaB6 NIST. Le modèle de Popa [36] a été utilisé pour

représenter les cristallites anisotropiques et les microcontraintes présentes dans les échantillons. La texture de l’échantillon a été prise en compte en utilisant un modèle aux

à une dilatation du paramètre c. Une variation importante est observée pour les plus courtes durées d’oxydation, inférieure à 1 000 heures, et les valeurs semblent atteindre un palier ensuite.

Comme la solubilité de l’oxygène dans la maille CC du titane β est faible [31,32,34], on

peut supposer que la modification de la maille CC est négligeable. L’affinement Rietveld des

diffractogrammes précédents n’a montré aucune variation importante du paramètre a de la

phase β de l’alliage Ti6242S.

Figure III-13 : Evolution des paramètres de maille moyens de la phase α en surface de l’alliage Ti6242S avec la durée d’oxydation

La technique de diffraction des rayons X utilisée à faible angle d’incidence fournit des informations à la surface de l’alliage, ce qui correspond ici à la partie externe de la zone de dissolution d’oxygène (environ 2 µm). C’est dans cette zone que la concentration en oxygène

est la plus élevée. La dilatation de la maille HCP a lieu principalement selon le paramètre c,

en accord avec la littérature selon laquelle l’oxygène interstitiel occupe les sites octaédriques

disponibles dans la maille α du titane [31–34]. La limite de solubilité de l’oxygène dans le

titane α est atteinte lorsque tous les sites octaédriques sont occupés par un atome

d’oxygène. Au-delà d’une durée d’oxydation de 1 000 heures, le paramètre c et le rapport

c/a n’évoluent plus que très peu à la surface du métal. Cette durée correspond donc à la

durée nécessaire pour saturer en oxygène la partie externe de la zone de dissolution d’oxygène, ce qui se traduit par une fragilisation maximale de l’alliage en surface.

De plus, si l’on tient compte du fait que le paramètre c de la phase HCP de l’alliage

Ti6242S est très similaire à celui du titane pur (comme montré en II.1.), alors la

concentration correspondant à la plus grande valeur de c obtenue sur la Figure III-13

correspond à une concentration à saturation de 25 % at. d’oxygène pour l’alliage Ti6242S, au lieu de 34 % at. pour le titane pur. Cette observation est en accord avec les analyses élémentaires effectuées par EDX-MEB et avec l’étude de Shenoy et al. [37] sur l’alliage Ti6242.