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2.2 Processus et représentations impliqués dans le traitement de

4.1.3 Discussion des résultats

Comme dans les autres études qui utilisent le paradigmeoddball auditif passif (pour une revue de la littérature, Näätänenet al., 2007), nous obser-vons l’émergence de la réponse MMN autour de 100 ms après le point de

Eléments testés Traitement de Table4.3 – Récapitulatif des résultats obtenus au sein des expériences 1 et 2.

divergence. Cependant, contrairement aux études précédentes qui manipu-laient des violations d’accord au sein d’un paradigmeoddball auditif passif (Pulvermüller et Shtyrov, 2003; Shtyrov et al., 2003; Menning et al., 2005;

Hastinget al., 2007; Pulvermülleret al., 2008), nous ne trouvons pas d’effet de l’influence des violations d’accord sur la réponse MMN dans nos deux expériences.

Cependant, nous avons décrit dans notre article portant sur des résul-tats préliminaires de l’expérience 1 que la réponse MMN est influencée par la présence de violations d’accord (Brunellièreet al., 2007). Plus précisément, les résultats présentés dans Brunellièreet al.(2007) montrent des différences significatives entre les réponses évoquées des soustractionsdeviant-standard des phrases grammaticalement incorrectes et celles des phrases grammatica-lement correctes en appliquant le traitement de données de type TD2 avec calcul de l’Identity Mismatch Negativity. Ces différences significatives appa-raissaient plus précocement pour les phrases commençant par le pronomvous (50-90 ms après le point de divergence) que pour les phrases commençant par le pronom nous (80-140 ms après le point de divergence). Cependant, nous avons obtenu ces résultats en comparant les réponses évoquées des soustractionsdeviant-standard des phrases grammaticalement incorrectes à celles des phrases grammaticalement correctes séparément pour les phrases commençant par le pronomvous et pour celles commençant par le pronom nous. Nous comparons donc les réponses évoquées entre des formes verbales différentes qui peuvent avoir fait émerger les différences observées. En effet,

si nous comparons les réponses évoquées sur les mêmes formes verbales, les différences significatives observées liées à la grammaticalité disparaissent.

Comme nous l’avons mentionné dans la partie Résultats (page 74), nous n’observons aucun effet du facteur grammaticalité et ce quelque soit le trai-tement de données utilisé. Par conséquent, les conclusions mentionnées dans notre article sont infirmées par les analyses plus complètes que nous venons de décrire en pages 74 et suivante. D’autre part, on peut observer que les résultats de nos deux expériences vont dans le même sens et indiquent clai-rement une absence d’influence des violations d’accord sur la réponse MMN.

Une cause de l’absence de l’influence de la grammaticalité sur la réponse MMN dans nos études pourrait être liée au fait que les stimuli construits ne sont pas reconnus correctement. Cependant, nous avons vérifié cela avant de réaliser les enregistrements EEG des expériences 1 et 2. Plus précisément, nous avons effectué un pré-test sur 10 participants pendant lequel ils de-vaient indiquer ce qu’ils entendaient et s’ils jugeaient les stimuli entendus comme grammaticalement corrects. Ces participants n’avaient jamais en-tendu au préalable les stimuli et n’avaient pas connaissance de la manière dont les stimuli ont été construits. L’ensemble des participants reconnais-sait correctement les stimuli et leur jugement concernant la grammaticalité était correct. Ainsi, la construction des stimuli ne peut expliquer la diver-gence entre nos résultats et ceux des autres études. On peut constater que la construction des stimuli ainsi que la procédure expérimentale que nous avons utilisées ont d’ailleurs bien permis l’émergence de la composante MMN.

Il est intéressant de noter que lorsque les études qui utilisent le paradigme oddball auditif passif testent si l’amplitude des réponses évoquées diffère entre les stimuli standard des phrases grammaticalement correctes et ceux des phrases grammaticalement incorrectes avec des violations d’accord au-cune différence significative ne se dégage (Shtyrovet al., 2003; Pulvermüller et Assadollahi, 2007). Par conséquent, la sensibilité aux violations d’accord est dépendante du nombre de répétitions des stimuli. On pourrait imagi-ner qu’un effet de la grammaticalité disparaisse au cours du temps pour les stimuli deviant puisque ceux-ci sont répétés au moins 100 fois au sein de chaque liste expérimentale dans nos études. Cependant, jusqu’à présent, les études précédentes ont également utilisé un nombre de répétitions supérieur

à 100 pour les stimuli deviant et n’ont pas montré de disparition de l’effet de la grammaticalité.

Nous avons néanmoins testé l’hypothèse d’atténuation de la sensibilité de la grammaticalité sur l’onde MMN par le nombre de répétitions des stimuli en mesurant la réponse MMN4 sur le premier tiers des essais des listes expé-rimentales. Plus particulièrement, nous avons comparé ces réponses MMN obtenues sur les électrodes frontocentrales après les phrases grammaticale-ment correctes et après des phrases grammaticalegrammaticale-ment incorrectes unique-ment à partir des phrases présentées comme stimuli deviant au sein de la première liste expérimentale. Nous avons trouvé dans l’expérience 1 que la réponse MMN après les phrases incorrectes présentait une amplitude néga-tive plus forte que celle obtenue après les phrases correctes (F(1,13)=6.05, p<0.02). Cependant, nous n’avons pas trouvé cet effet pour l’expérience 2 (F(1,14)=0.19, p>0.2). Cela pourrait s’expliquer par une fréquence plus faible des formes verbales utilisées dans l’expérience 2 (c’est-à-dire vivrons, 3,28, vivras, 3,84) que des formes verbales de l’expérience 1 (c’est-à-dire vivons 12,40, vivez, 15,09). De plus, le nombre de co-occurrences entre les deux mots présents dans les phrases grammaticalement correctes est environ de 200 pour l’expérience 1 (nous vivons, 200, vous vivez, 204) alors que le nombre de co-occurrences est plus faible (autour de 70) pour l’expérience 2 (nous vivrons, 90, tu vivras, 55). Ces valeurs sont toutes tirées de Lexique (http://www.lexique.org), et plus particulièrement d’un corpus constitué à partir de sous-titres de films, comportant 50 millions d’items. Les fréquences des formes verbales expriment leur nombre moyen d’apparition par million d’items dans le corpus considéré. Les co-occurrences expriment le nombre absolu d’apparition de la chaîne de mots considérée dans l’ensemble du cor-pus. Le nombre de co-occurrences des deux mots qui constituent la relation d’accord grammaticalement correcte et/ou la fréquence des items permet-tant la détection de la violation d’accord (ici, les formes verbales) pourraient amener à une disparition de l’effet de la grammaticalité.

4. La réponse MMN est obtenue en appliquant le traitement de données TD1.

Afin de tester si la fréquence5 des items permettant la détection de la violation d’accord peut expliquer les divergences entre nos résultats et ceux des études précédentes, nous avons mesuré à partir du corpus Wort-schatz Lexikon(http://www.wortschatz.uni-leipzig.de) contenant des corpus de différentes langues la fréquence des items permettant la détection de la violation d’accord au sein des études précédentes ainsi que dans nos études.

Comme on peut le voir à partir du tableau 4.4, les items permettant la détec-tion de la violadétec-tion d’accord présentent des fréquences plus faibles dans nos études que les autres études à l’exception de l’étude de Hastinget al.(2007).

En effet, il apparaît que les fréquences des items permettant la détection de la violation d’accord sont relativement comparables entre l’expérience 1 et celle de Hasting et al. (2007). Cependant, l’étude de Hasting et al. (2007) présente une durée de pause de 120 ms entre les deux constituants de la relation contrairement à nos études.

Or, les nombreuses répétitions des stimuli ont pu amener à des reprétations temporaires de succession de phonèmes des stimuli en mémoire sen-sorielle. Ainsi, chaque phrase pourrait être interprétée uniquement comme une seule unité et donc n’amènerait pas au traitement de la relation d’accord.

De plus, ce phénomène pourrait être atténué par la présence d’une pause entre les deux constituants de la phrase, assurant le maintien du traitement des stimuli comme deux unités. Or, dans nos études, il n’y a pas de pause entre le sujet et le verbe alors que la plupart des autres études utilisaient une pause entre les deux constituants à cause des contraintes de leurs sti-muli – par exemple le deuxième constituant commençait par une occlusive sourde (Pulvermüller et Shtyrov, 2003; Shtyrov et al., 2003; Pulvermüller et al., 2008) – ou sans raison écologique – Hastinget al.(2007) ont introduit une pause de 120 ms entre les deux constituants. Par conséquent, une pause entre les deux mots de la phrase pourrait potentiellement avoir influencé la sensibilité de la réponse MMN à la grammaticalité.

Pour finir, il est intéressant de constater que les précédentes études qui ont manipulé des violations d’accord au sein d’un paradigme oddball

audi-5. Nous avons testé uniquement la fréquence des items permettant la détection de la violation d’accord car il ne nous a pas été possible de tester le nombre de co-occurrences entre les mots qui constituent les phrases grammaticalement correctes dans les différentes études.

Fréquence des items permettant la détec-tion de la violadétec-tion d’accord

Pause entre les constituants

Pulvermüller et Shtyrov,

2003 come: 7 50 ms

comes: 8

Shtyrovet al., 2003 tuot: 15 50 ms

tuon: 10

Menninget al., 2005 rosen: 12 Aucune information donnée

Hastinget al., 2007 flatet : 15 120 ms

flatest : 15 Pulvermüller et

Assadol-lahi, 2007 Mut : 10 Aucune information donnée

Pulvermülleret al., 2008 come: 7 50 ms

comes: 8

Nos études vivons : 13 Pas de pause

vivez : 16 vivrons: 18 vivras: 20

Table4.4 – Points de divergence entre nos études et les études antérieures (Pulvermül-ler et Shtyrov, 2003; Shtyrov et al., 2003; Menning et al., 2005; Hasting et al., 2007;

Pulvermüller et Assadollahi, 2007; Pulvermüller et al., 2008). Les fréquences des items indiquées correspondent au rang de la fréquence relative des items à travers les corpus de différentes langues allant du rang 1 (très fréquent) au rang 20 (pas fréquent).

tif passif ont utilisé le calcul Classic Mismatch Negativity (Pulvermüller et Shtyrov, 2003; Shtyrov et al., 2003; Menning et al., 2005; Hasting et al., 2007; Pulvermüller et al., 2008) alors que ce calcul peut amener à une ré-ponse MMN affectée par les différences acoustiques entre les stimulideviant et les stimuli standard (Pulvermüller et Shtyrov, 2006). Plus précisément, le calcul Classic Mismatch Negativity qui consiste à réaliser une soustrac-tion des réponses évoquées des stimuli deviant à celles des stimuli stan-dard au sein de la même liste expérimentale (par exemple, C(nous vivons) = [D(nous vivons)−ST(nous vivez)]) pourrait également provoquer que la réponse MMN soit affectée par l’état cognitif spécifique des participants au sein d’une liste expérimentale particulière. De plus, les répétitions nombreuses des sti-muli créent un rythme monotone qui tend à endormir les participants comme nous avons pu l’observer durant nos expériences. Ainsi, il apparaît important également de faire attention à ce facteur pouvant affecter potentiellement l’effet de la grammaticalité sur la réponse MMN.

A propos des deux buts visés par nos deux études, on peut constater que le fait que la réponse MMN obtenue sur l’analyse de l’ensemble des essais des deux expériences ne soit pas influencée par les violations d’accord amène à penser que le traitement de l’accord ne se fait pas par des processus automatiques. De plus, le fait que l’amplitude des réponses évoquées ne diffère pas entre les stimulistandarddes phrases grammaticalement correctes et ceux des phrases grammaticalement incorrectes indique que l’habituation créée par la répétition des stimuli amène à ce que le traitement de l’accord ne se fasse plus (Shtyrovet al., 2003; Pulvermüller et Assadollahi, 2007). Ainsi, le traitement de l’accord n’apparaît pas comme un processus obligatoire et automatique.

Cependant, le nombre de répétitions des stimuli présents dans un para-digme oddball auditif passif peut amener à un stockage en mémoire senso-rielle des stimuli et/ou une atténuation d’activation des stimuli au niveau de leurs représentations lexicales et grammaticales établies en mémoire à long terme. A ce sujet, il est intéressant de constater que dans l’expérience 2, nous observons au sein de la fenêtre de la MMN un effet principal du Pho-nème final pour les stimuli deviant etstandard (D F(1,15)=10.47, p<0.01, ST F(1,15)=13.71, p<0.01) où les stimuli finissant par le phonème[˜O] pré-sentent des valeurs plus négatives que les stimuli finissant par le phonème [a]. Nous ne trouvons pas un effet du Phonème final pour l’expérience 1 et une analyse additionnelle en introduisant le facteur expérience 1 vs. ex-périence 2 indique une interaction Phonème final*Exex-périence1-2 pour les stimuli deviant et standard (D F(1,29)=11.47, p<0.01, ST F(1,29)=12.83, p<0.01). L’effet du phonème final pour l’expérience 2 sur les stimulideviant etstandard pourrait suggérer que seul un niveau acoustique est accédé dans cette expérience.

Par conséquent, le paradigme oddball auditif passif utilisé présente des problèmes méthodologiques liés au nombre de répétitions des stimuli qui rend difficile de conclure avec nos deux études sur la nature automatique du traitement de l’accord. D’autre part, les études que nous avons me-nées ne nous permettent pas non plus d’identifier si les traits morphosyn-taxiques sont représentés. Cependant, le fait d’observer que seule l’expé-rience 1 montre une sensibilité de la violation d’accord en début d’expél’expé-rience

pourrait tendre contre l’hypothèse de représentations de traits morphosyn-taxiques abstraits.

A ce stade, il nous a semblé opportun de clarifier si des processus de nature automatique sont impliqués dans le traitement de l’accord. Ainsi, nous avons réalisé deux expériences complémentaires.

4.2 Etudes complémentaires : expériences