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3.5 La dégradation vue par microscope optique

3.5.4 Discussion

Cette particularité qu’ont les lasers organiques solides de ne pas avoir des intensités (et donc des courbes de dégradation) très reproductibles est une signature du fait que les processus photophysiques et chimiques qui entrent en jeu lors de la photodégradation sont nombreux, variés et complexes. Ce point a déjà été mentionnée par Popov au cours d’une étude de dégradation suivie d’une observation au microscope de la zone dégradée d’un la-ser en MPMMA (PMMA modifié) massif dopé en Rh6G [Popov, 1998]. Cette étude est la seule à notre connaissance avec imagerie sur la zone photoblanchie par le laser de pompe. L’article est intéressant, mais ses explications sur les raisons du photoblanchiment sont purement thermiques bien qu’aucune mesure de température n’a été relevée. Voyons ce que son expérience peut nous apporter de plus sur la connaissance des processus de photo-dégradation. Son étude a consisté à dégrader le laser en pompant avec un laser Nd :YAG doublé, d’une durée d’impulsion de 8 ns, à une densité de puissance de 1 MW.cm−2 et avec deux cadences de pompe : 4 Hz et 10 Hz. Tout d’abord, par rapport à nos conditions de travail, nous pouvons noter que le laser diffère : notre laser est organique en couche mince, tandis que le sien est un laser organique massif. Par conséquent, les mécanismes de photodégradation mis en jeu pourraient être différents dans les deux cas. De plus, il travaille avec une densité de puissance plus faible que la notre. Plusieurs observations ont pu être faites. Premièrement, il a noté que l’efficacité de conversion décroissait plus vite à 10 Hz qu’à 4 Hz. C’est aussi notre cas lorsque nous pompons avec des durées d’impulsions longues comme 20 ns (et 8 ns serait une durée d’impulsion assez longue). Cependant, l’explication du photoblanchiment fournie par l’auteur n’est pas due aux triplets, mais est purement thermique. L’accumulation de la chaleur au niveau de la zone pompée est plus grande à 10 Hz qu’à 4 Hz et serait responsable d’une mobilité plus grande des molécules de colorant, et donc d’une probabilité plus importante pour des réactions qui détruiraient les molécules de se réaliser. Le microscope révèle la présence de carbone sur la surface de la zone dégradée. L’auteur explique que la chaleur accumulée peut servir à casser cer-taines liaisons hydrogènes dans le polymère avant que la chaleur ne se soit totalement dissipée vers l’extérieur de la zone de pompage, c’est ce qui expliquerait la formation de carbone à la surface de l’échantillon. Sur la couche inférieure examinée au microscope, il y a également une modification de l’aspect initial du matériau, mais à cette profondeur, la chaleur n’est pas assez élevée pour casser des liaisons, elle peut néanmoins ramolir le polymère (melting temperature). La densité locale est alors modifiée. Ce changement de

Chapitre 3. Dégradation des lasers organiques solides

densité optique pourrait être expliqué par une diffusion des molécules de colorant sous un gradient de température causé par une faible dissipation de la chaleur. Ces diffusions sans réactions chimiques avec les autres molécules contribuent à une augmentation de la concentration en colorant autour de la zone pompée. L’augmentation de la chaleur peut être par ailleurs responsable d’une augmentation de la distance entre les chaînes de poly-mères. Les molécules de colorant ont donc plus de chance de se faufiler dans ces espaces vides et d’interagir avec d’autres molécules qui sont également dans le même cas, condui-sant alors à leur destruction. L’explication concernant la migration des molécules vers les régions autour de la zone pompée est très intéressante, mais il est très peu probable que ce soit notre cas, car nous avons vu que l’augmentation de la température dans les VECSOLs était négligeable. Le faisceau qui devient annulaire au cours de la dégrada-tion est probablement simplement la conséquence de la destrucdégrada-tion des molécules par la photodégradation.

Sur notre étude de dégradation, les points communs pour les deux matériaux sont : – un photoblanchiment qui apparaît avant le changement de mode du faisceau laser. – un changement de mode qui apparaît à peu près au moment où l’intensité laser

initiale est diminuée de moitié.

Ce qui les différencie est la durée de dégradation : sans aucun doute, le PM650 a une durée de dégradation « globale » plus grande que le DCM, puisque dans ces conditions de fonctionnement avec le laser de pompe Teem Photonics, à 532 nm, à 400 Hz et avec une densité de puissance crête absorbée de 8 MW.cm−2, la durée de dégradation est de 600 000 impulsions (ou 25 min) pour le PM650 et 25 000 impulsions (ou 1 min) pour le DCM. Le mot « global » est ici utilisé pour désigner la durée de dégradation obtenue avec un ajustement de la courbe de dégradation par un fonction exponentielle simple. Cependant, ce n’est pas la fonction la mieux adaptée comme nous pouvons le voir sur la Fig.3.21.

Une fonction exponentielle double donne un meilleur ajustement, voir Fig.3.22. Dans la littérature, une explication est proposée. Pour des concentrations en colorant importantes dans le polymère, c’est-à-dire pour que la distance intramoléculaire soit assez faible pour autoriser une part substantielle d’interaction entre les molécule telle est le cas pour une concentration de 1 %, les molécules ne peuvent plus être considérées comme isolées. L’in-tensité de fluorescence en fonction du temps pour les hautes concentration fait apparaître deux comportements (et donc deux exponentielles) : un premier lié à la présence d’inter-actions intermoléculaires (à haute concentration), puis un second lié aux molécules isolées

3.5. La dégradation vue par microscope optique

(à faible concentration) [Talhavini and Atvars, 1998]. Pour vérifier cette hypothèse, nous pourrions par exemple dégrader des échantillons à différentes concentrations en colorant dans le PMMA et calculer pour chaque cas, la durée de dégradation. Si elle est juste alors pour de faibles concentrations, nous devrions pouvoir ajuster la courbe de dégradation simplement avec une exponentielle simple. Ces expériences n’ont pas encore été réalisées, mais pourraient devenir une étude dans les perspectives.

Figure 3.21 – Courbes de dégradation des VECSOLs a) PM650 et b) DCM (1%) :

PMMA ajustées avec une fonction exponentielle simple.

Figure 3.22 – Courbes de dégradation des VECSOLs a) PM650 et b) DCM (1%) :

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