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Chapitre 2 : Variable biologique de la féminité faciale : le contraste facial

5 Etude 2 : La relation entre modification du contraste de la bouche par la couleur du rouge à lèvres

5.4 Discussion

Dans ce chapitre, nous avons exploré l’impact de la modification du CF par le maquillage sur la perception de la féminité faciale.

Tout d’abord, le maquillage est un élément important dans les jugements de féminité. Plus les femmes sont maquillées plus elles sont jugées féminines. Que ce soit en fonction du nombre de zones maquillées (étude 1) ou en fonction de l’intensité (études 1 et 2).

L’âge des femmes est également un critère fort pour la féminité car, tous maquillages confondus, les femmes plus jeunes sont perçues plus féminines que les femmes plus âgées. Ce résultat peut s’expliquer par la diminution naturelle du CF avec l’âge chez les femmes caucasiennes (Porcheron et al., 2013).

Si la zone des yeux en termes de luminance est décisive pour la catégorisation des visages par sexes (Dupuis-Roy et al., 2009 ; Nestor & Tarr, 2008), la relation avec la féminité faciale des femmes est plus incertaine. En effet, sans maquillage, il n’existe qu’une tendance entre le contraste de luminance des yeux et les jugements de féminité. Ce n’est qu’avec le maquillage intense, que le contraste de L* des yeux impacte la perception de féminité et cela différemment selon l’âge des femmes. Pour les plus jeunes, la relation entre contraste de L* des yeux et note de féminité est linéaire et positive, plus les jeunes femmes ont les yeux foncés par le maquillage par rapport à peau nue plus elles gagnent en féminité. Pour les femmes plus âgées, bien qu’elles gagnent en féminité avec le maquillage, elles ne gagnent pas autant que les jeunes femmes si les yeux sont trop foncés. Le maquillage trop foncé accentue potentiellement un ensemble de signes liés au vieillissement au niveau des yeux (rides, relâchement des paupières, poches ou creux sous les yeux, …), ce qui pourrait être perçu comme étant moins féminin. Le contraste de luminance de la zone de la bouche pourrait également être soumis à un minimum d’augmentation du contraste de L*. Si, dans les études 1 et 2, aucun lien n’est établi entre le contraste de L* sans maquillage et les notes de féminité, les résultats de l’étude 2 concernant le RàL rouge, montre un lien entre l’augmentation du contraste de L* et l’augmentation des jugements de féminité. Il semblerait donc qu’il soit nécessaire d’augmenter fortement la luminance de la bouche par rapport à la peau pour que ce paramètre soit pertinent pour le jugement de féminité.

Le contraste de b* diminué par le RàL (étude 2) fait paraître les femmes plus féminines. Ce résultat a déjà été démontré par l’étude de Stephen et McKeegan (2010), lorsque les participant.e.s, pour tenter de rendre des visages de femmes le plus féminin possible, diminuent le bleu des lèvres. Dans l’étude 2, seul le RàL rouge diminue le contraste de b*, dans l’étude 1 peu de femmes portaient un RàL intense ce qui expliquerait que ce résultat n’est pas été répliqué dans un premier temps.

Concernant le contraste de a* de la bouche, il semble que ce soit une variable très pertinente pour l’évaluation de la féminité. Si, dans la condition sans maquillage, l’étude 1 ne démontre qu’un lien tendanciel entre l’augmentation du contraste de a* et l’augmentation de la féminité, l’étude 2, quant à elle, montre un lien positif significatif entre ces deux variables. Lorsque le maquillage augmente le contraste de rouge de la bouche, les résultats des études 1 et 2 s’accordent avec la littérature (Stephen & McKeegan, 2010) : plus le maquillage augmente le contraste de a* plus les femmes sont jugées féminines. Suivant ce résultat, les femmes avec un maquillage diminuant leur contraste de rouge de la bouche devraient perdre en féminité par rapport à peau nue. Cependant, un résultat apparaît comme surprenant : même lorsque le maquillage (étude 1) ou le RàL beige (étude 2) diminue le contraste de a*, les femmes sont tout de même perçues plus féminines que sans maquillage.

La seule présence du maquillage permettrait donc aux femmes d’être perçues plus féminine. La variable biologique du CF, bien que pertinente, ne semble pas suffisante pour comprendre la relation entre le maquillage et la féminité. Il a été démontré que le maquillage fait paraître les femmes plus attirantes (Cox & Glick, 1986 ; Etcoff et al., 2011 ; Graham & Jouhar, 1981 ; Russell, 2009 ; Workam & Johnson, 1991) et nos résultats affirment que le maquillage fait paraître physiquement plus féminine. Dans notre société, pour les femmes, prendre soin de son apparence est, semble-t-il, une nécessité (Chollet, 2015 ; Mahalik, Morray, Coonerty- Femiano, Ludlow, Slattery, & Smiler, 2005).

Lorsque Le Breton (1992), parle de la fonction facilitatrice des relations sociales du maquillage, c’est bien parce que les femmes, en se maquillant, répondent au « diktat » des apparences. Elles correspondent alors au rôle social attendu. Les femmes, en se conformant aux rôles prescrits par la société dans laquelle elles vivent, s’assurent l’acceptation de leurs pairs.

Il semblerait donc que des variables sociales et culturelles pourraient intervenir dans les jugements de féminité. C’est ce que nous nous proposons de d’explorer dans la suite de ce travail de thèse.

Chap. 2 Féminité et contraste facial

Résumé

Le maquillage augmente le contraste facial (Etcoff et al., 2010 ; Russell 2009) et les femmes avec un fort CF sont jugées plus attirantes (Russell, 2003, 2009). Augmenter le contraste de rouge de la bouche rend les femmes plus attirantes et plus féminines (Stephen & McKeegan, 2010). Ce chapitre, à travers deux études à la méthodologie similaire, a pour objectif de démontrer la pertinence d’une variable biologique de la féminité, le CF et d’approfondir sa variation dûe au maquillage sur la perception de la féminité faciale. Les participant.e.s évaluent la féminité de séries de photographies de visages de femmes maquillées selon différentes conditions (e.g., étude 1 : sans / lèvres /yeux/ naturel / intense ; étude 2 : sans / RàL beige / RàL rose/ RàL rouge) dont le CF a été préalablement mesuré (L*a*b* sur yeux/ bouche/ sourcils). Les résultats montrent que même lorsque le maquillage (étude 1) ou le RàL beige (étude 2) diminue le contraste de a*, les femmes sont tout de même plus féminines que sans maquillage. La seule présence du maquillage permettrait aux femmes d'être perçues plus féminine. La variable biologique du CF bien que pertinente n'est pas suffisante pour comprendre la relation entre le maquillage et la féminité. Il semble alors que des variables sociales et culturelles sont à prendre en compte pour aborder la féminité de façon globale.

Chapitre 3 : Variables sociales de la féminité : Représentation et