1-‐ Forces et faiblesses
1-‐1-‐ Forces de cette étude
La grande force de cette étude est son originalité. Il existe peu d’études ayant évalué les déterminants cliniques dans la prescription antibiotique dans l’OMA. Un autre travail de thèse avait recherché ces déterminants (23) , mais la méthode était basée sur des entretiens collectifs avec les médecins, et non sur une évaluation de ce qui se passe réellement en consultation.
D’autres travaux ont étudiés les déterminants cliniques dans la prescription antibiotique en général (24), ou dans certaines indications particulières comme l’angine (25), les affections respiratoires hautes et basses (26), …
Or la compréhension des facteurs influant sur la sur-‐prescription antibiotique dans l’OMA est essentiel car il s’agit d’une pathologie responsable d’environ 8 % des antibiotiques consommés en France en 2013 (1).
Par ailleurs, nous n’avons pas trouvé dans la littérature d’évaluation portant sur le respect des doses recommandées dans l’OMA. En revanche, plusieurs études montrent les conséquences de prescriptions d’amoxicilline à doses faibles sur l’émergence de souches de pneumocoques de sensibilité diminuée à la pénicilline (cf. infra).
1-‐2-‐ Les biais de l’étude 1-‐2-‐1-‐ Biais de sélection
L’échantillon de population n’a pas été randomisé. La sélection a été faite sur 2 groupes de médecins particuliers : le groupe des médecins maîtres de stages en Aquitaine, ainsi que le groupe des médecins remplaçants du sud-‐ouest.
1-‐2-‐2-‐ Biais d’observation
Les médecins MDS se savaient observés, puisqu’ils avaient été prévenus de cette étude. Néanmoins, nous avons préféré les prévenir afin d’augmenter le nombre de réponses.
Les MR aussi étaient au courant puisque c’est eux même qui remplissaient le questionnaire.
Ce biais peut en effet modifier le comportement de prescription des médecins.
1-‐2-‐3-‐ Biais de mesure
Bien que cela soit marginal, on note un biais de mesure avec un résultat ininterprétable.
En effet, la rubrique posologie constituait une réponse à texte libre. Un médecin du groupe MR a prescrit de l’amoxicilline à la posologie de 750 mg sans renseigner le poids. Nous n’avons donc pas pu interpréter ce résultat.
Par ailleurs, en ce qui concerne les posologies, les réponses ont été arrondies ou approximatives, avec par exemple des réponses de type « 80-‐90 mg/kg/j », sans que l’on sache exactement la dose en mg/kg/j effectivement délivrée.
1-‐3-‐ Faiblesse de l’effectif
Les taux de réponse varient de 17,3 % dans le groupe MR (95 réponses sur 548 envois) à 20,2 % dans le groupe MDS (48 réponses sur 238 envois).
Pour arriver à ce taux de réponse, le groupe MDS a nécessité un nombre de relance nettement supérieur au groupe MR (3 relances pour les MDS et 3 relances pour les internes, contre 1 seule pour les MR).
A la suite de ces relances, 2 internes et 3 MDS nous ont rapporté qu’ils ne voyaient pas de cas d’OMA, certains incriminant la vaccination par le vaccin anti-‐ pneumococcique comme responsable de la faible prévalence des cas d’OMA.
Au regard de la littérature, nous avons remarqué que cette affirmation n’était pas forcément exacte et que le lien entre diminution de la prévalence des OMA et vaccin anti-‐pneumococcique reste à démontrer.
Le vaccin pneumococcique conjugué à 7 valences a été progressivement remplacé par celui à 13 valences. Ce dernier est censé couvrir 80 % des cas d’infections invasives à Pneumocoque en Europe (27) , mais des études épidémiologiques doivent le vérifier.
En France, l’utilisation du vaccin à 7 valences s’est accompagnée d’une diminution de 32 % des infections invasives à Pneumocoques chez les nourrissons et les enfants âgés de moins de 2 ans. Dans cette tranche d’âge, la diminution des méningites à sérotypes contenus dans le vaccin a été compensée par l’augmentation des méningites à sérotypes non contenus dans le vaccin : 19A surtout, mais aussi 15B et 24F.
En prévention des otites moyennes aiguës ou récidivantes, l’efficacité du vaccin à 7 valences semble minime voire nulle.
L’étude finlandaise FinOM (28), a testé l’efficacité du vaccin pneumococcique 7 valences dans la prévention de l’OMA. Cette étude, randomisée, en double aveugle, chez 1662 nourrissons, comparait ce vaccin à un vaccin témoin (contre l’hépatite B). Les résultats sont une diminution non statistiquement significative de 6 % des OMA dans le groupe contrôle. Les diminutions d’OMA à sérotypes contenus dans le vaccin étaient en parti compensées par les augmentations d’OMA à sérotypes non contenus dans le vaccin.
Cependant, une autre étude rapportait que les 7 sérotypes contenus dans ce vaccin, correspondaient aux sérotypes responsables de 60 à 80 % des OMA à
Pneumocoque. Il avait été estimé que PREVENAR 7 pourrait prévenir 6 à 13 % de
l’ensemble des épisodes cliniques d’OMA (29).
Le vaccin pneumococcique à 13 valences conserve l’absence d’amélioration du service médical rendu en prévention des OMA et semble donc ne pas avoir d’influence importante sur la prévalence des OMA, même si
d’autres études doivent être menées.
2-‐ Résultats observés
2-‐1-‐ Les déterminants cliniques de la prescription antibiotique dans l’OMA 2-‐1-‐1-‐ Facteurs déterminants mis en évidence et significatifs
Dans le groupe MDS :
Le caractère d’exercice en milieu rural est apparu comme statistiquement significatif et influant au regard de la prescription antibiotique. En effet, 48% des médecins exerçant en milieu urbain contre 82 % des médecins exerçant en milieu rural ont prescrit une antibiothérapie à l’issue de la consultation (p=0,012).
Une étude canadienne effectuée en 2001, (30) évaluant la prescription antibiotique dans les rhinopharyngites, retrouvait une sur-‐prescription antibiotique dans les zones où la densité médicale était moindre. Dans cette étude, les zones où la densité moyenne était supérieure à 135 généralistes/100 000 habitants voyaient leurs médecins prescrire moins d’antibiotiques. Le temps et la charge de travail peuvent être mis en avant pour expliquer ces phénomènes.
La fièvre a elle aussi influencée positivement la prescription antibiotique des MDS. Parmi les patients ne présentant pas de fièvre, 48,8 % ont reçu une antibiothérapie immédiate, contre 83,3 % des patients présentant de la fièvre au moment de la consultation (p=0,006). Cette prescription semble augmenter avec l’augmentation de la température : 1 patient présentait une température > 39°C et il a bénéficié d’une antibiothérapie immédiate (100 %), 12 des 14 patients présentant une température comprise entre 38 et 39°C ont eu une antibiothérapie immédiate (85 ,7 %), 6 des 7 patients ayant un fébricule (85,7 %) et 1 des 2 patients dont la fièvre avait été ressentie par le praticien mais non mesurée (50 %) ont également eu une antibiothérapie immédiate. La présence d’un syndrome inflammatoire important, notamment de la fièvre, est fréquemment retrouvé dans les études comme facteur influençant la prescription antibiotique (31).
Dans le groupe MR :
Le nombre de consultations supérieur à 15 actes par jour est apparu comme un facteur déterminant influençant positivement la prescription antibiotique. Les patients vu dans une demi-‐journée dont le nombre d’actes est inférieur ou égal à 15 ont reçu une antibiothérapie dans 75 % des cas, contre 91,5 % des patients vus au cours d’une demi-‐journée dont le nombre d’actes est supérieur ou égal à 15 (p=0,031).
L’étude canadienne citée ci dessus montrait également cette tendance à une sur-‐prescription antibiotique en rapport avec la charge de travail (30). L’hypothèse avancée peut être celle de dire que la prescription antibiotique est la solution la moins chronophage. En effet, le médecin n’a pas besoin de fournir une argumentation à sa « non prescription ». Cette hypothèse est confirmée par une étude suédoise portant sur 6734 patients, qui montrait que les médecins qui passaient du temps à écouter, et à expliquer leurs prescriptions à leurs patients pouvaient réduire le nombre de prescriptions antibiotiques (32).
Le caractère bombé du tympan s’est accompagné d’une sur-‐prescription antibiotique. En effet, 91,7 % des patients présentant un tympan bombé ont reçu une antibiothérapie, contre 68,8 % des patients présentant un tympan congestif (p=0,025). Ce résultat n’est pas étonnant au vu des dernières recommandations de l’AFFSAPS de 2011 (2). Le résultat qui peut être étonnant en revanche est le fort taux de prescriptions antibiotiques dans les OMA avec tympans congestifs (cf. infra).
2-‐1-‐2-‐ Facteurs de prescription antibiotique systématique
Bien que les effectifs soient faibles, certains éléments cliniques étaient associés à une prescription antibiotique systématique. Dans les 2 groupes étudiés, la présence d’une otalgie sévère (12 cas), d’une température supérieure à 39°C (5 cas), et l’existence d’une otorrhée (9 cas) se sont accompagnées d’une prescription immédiate d’antibiotique. Même si les résultats statistiques n’étaient pas significatifs, cela montre que certains éléments cliniques influencent la prescription antibiotique. Ces résultats sont comparables à ceux d’une étude hollandaise, qui montrait que les patients ayant des signes cliniques plus sévères, ou ressentis comme tels par le prescripteur avaient un risque plus important de se voir prescrire un antibiotique à tort. Cette étude portait sur 1469 patients atteint de pathologies respiratoires (angine, bronchite, sinusite) (31).
Dans le groupe MDS, le refus de l’alimentation a également était suivi d’une prescription systématique d’antibiotique. Seulement 2 parents rapportaient un refus de l’alimentation. Ces 2 enfants ont reçus une antibiothérapie immédiate.
Cet élément, signe de gravité, va dans le sens de ceux cités précédemment.
2-‐1-‐3-‐ Facteurs non significatifs
Beaucoup d’éléments attendus n’ont pas été identifiés comme influençant la prescription antibiotique.
Tout d’abord, nous n’avons pas mis en évidence de lien entre le moment de la journée et la décision de prescrire ou non une antibiothérapie.
Une étude américaine, à Boston, Massachusetts, a cependant mis en évidence que la fin de matinée ou la fin d’après-‐midi s’accompagnaient d’une augmentation du nombre de prescriptions antibiotiques. Cette étude a été effectuée sur un effectif bien supérieur au nôtre, comprenant 21867 cas, et montrant que l’odds ratio de prescription antibiotique, comparant la 1ère heure de consultation aux 2ème, 3ème et
4ème heures de consultation était respectivement de 1,01 (95 % IC, 0.91-‐1.13), 1,14
(95 % IC, 1.02-‐1.27) et 1,26 (IC 95 % ; 1.13-‐1,41) avec p<0.001 (33). L’argument avancé est que la prescription antibiotique augmente avec la fatigue du médecin, croissante au fur et à mesure de la demi-‐journée.
De plus, bien que ces résultats ne soient pas significatifs, dans le groupe MDS, les médecins âgés de plus de 60 ans prescrivaient plus d’antibiotiques que les autres (76,9 % contre 60 %). Cette constatation, que les médecins plus âgés prescriraient davantage, a déjà était mise en évidence plusieurs fois dans la littérature (34-‐35).
Par ailleurs, la présence d’un antécédent d’OMA, ou d’une consultation
pour un motif similaire n’est pas apparue comme un facteur de prescription
antibiotique. L’étude PAAIR 2 (24) avait pourtant mis en avant que le fait de consulter une seconde ou une troisième fois pour un même motif s’accompagnait d’un risque de prescription non conforme.
Dans notre étude, et dans le groupe MR, 92,9 % des patients ayant déjà consultés reçoivent une antibiothérapie, contre 81,5 % des patients n’ayant pas consultés. Cette différence aurait pu être significative sur un échantillon de taille supérieure. De même, dans le groupe MR, la fièvre semblait intervenir dans la prescription antibiotique (75,9 % des patients sans fièvre contre 86,4 % de ceux avec fièvre recevaient une antibiothérapie), mais le manque de puissance de l’étude, à fortiori lorsque la prescription est importante, a probablement masqué des différences d’éléments influençant la prescription.
De surcroit, l’âge, par exemple, n’est pas ressorti dans notre étude comme un facteur influençant la prescription antibiotique. Cependant, dans le groupe MDS, les différences sont presque significatives (p=0,087). Or les recommandations sont claires et préconisent une prescription adaptée à l’âge, systématique chez l’enfant de moins de 2 ans, plus aléatoire et fonction des signes de gravité au-‐delà de 2 ans.
Ces constatations nous montrent que les médecins ne respectent pas, ou respectent mal les recommandations.
Bien que cela soit non significatif, on note une différence de prescription antibiotique, dans le groupe MDS, suivant que l’enfant pleure ou non au moment de la consultation. Sur les 12 patients pleurant au moment de la consultation, 10 ont reçu une antibiothérapie immédiate (83,3 %) contre 21 des 36 patients ne pleurant pas (58,3 %). Cet élément peut être assimilé par le médecin à un facteur de
mauvaise tolérance des symptômes par le patient. Comme le rapporte l’étude PAAIR 1, la perception par le médecin d’un patient fatigué peut conduire à la prescription d’une antibiothérapie inappropriée (24).
Explications :
Plusieurs paramètres peuvent être avancés pour expliquer l’impact relatif, dans notre étude, des caractéristiques cliniques dans la prescription antibiotique.
Tout d’abord, le faible effectif de notre échantillon a pu masquer des différences qui auraient pu être significatives sur des effectifs plus grands. Quelques facteurs néanmoins semblaient être liés bien qu’ils ne furent pas retrouvés dans les deux groupes observés.
Ensuite, le taux de prescription antibiotique, a probablement masqué des différences qui auraient pu être plus marquées si on avait eu des taux de prescription plus faibles. En effet, on note des pourcentages de prescriptions plutôt élevés : 64,6 % de prescription immédiate dans le groupe MDS, contre 83,2 % dans le groupe MR.
Cependant, certains éléments cliniques de gravité se sont accompagnés d’une prescription systématique d’antibiotique, ce qui montre bien, que le médecin est influencé par les paramètres cliniques lors de la prescription antibiotique.
En revanche, bien que notre étude se soit intéressée surtout aux éléments cliniques, il est apparu que certains éléments plus subjectifs, comme l’âge du prescripteur, le nombre de consultations dans la journée, influencent également la décision du médecin. Les paramètres cliniques ne sont donc pas les seuls facteurs influençant la prescription, sommation et intégration complexe de plusieurs éléments objectifs et subjectifs portés à la lumière du prescripteur.
2-‐2-‐ Analyse de la prescription antibiotique dans l’OMA 2-‐2-‐1-‐ Une forte prescription antibiotique
Nous comptabilisons dans les groupes maîtres de stages et médecins remplaçants respectivement 64,6 % et 83,2 % de prescriptions antibiotiques immédiates, sans compter les prescriptions différées. Cette étude ne nous a pas permis de comptabiliser in fine le nombre total de cas recevant réellement une antibiothérapie. Les prescriptions différées représentaient respectivement 14,6 % (7/48) et 12,6 % (12/95) des consultations dans les groupes MDS et MR.
Certaines études ont montré que la prescription différée permettait de réduire le nombre de prises effectives d’antibiotiques. En effet, un essai randomisé anglais a comparé deux stratégies : administration précoce d’antibiotique versus administration retardée à 72 heures chez 315 enfants âgés de 6 mois à 10 ans ayant une otite moyenne aiguë (36). Dans le second groupe, l’antibiothérapie était débutée seulement si l’otalgie ou la fièvre persistaient.
Ce groupe était constitué de 164 enfants, et 36 ont pris un antibiotique (24 %). L’administration précoce d’antibiotiques a diminué légèrement, mais de manière statistiquement significative, la durée des symptômes ; la valeur clinique de cette différence reste cependant modeste : 1,69 dose de paracétamol dans le groupe antibiothérapie d’emblée, contre 2,28 doses dans le groupe antibiothérapie retardée.
Cet essai montre surtout que dans la plupart des cas, chez les enfants de plus de 6 mois, on peut facilement retarder la prise d’antibiotique de 48 à 72 heures sans grand dommage. Il montre également qu’avec cette méthode, la prise effective d’antibiotiques diminue considérablement avec en réalité une personne sur quatre qui reçoit réellement le traitement (100 % dans le groupe antibiotique d’emblée, et 24 % dans le second groupe).
Dans notre étude, si on considère qu’un quart des enfants ayant eu une prescription différée a réellement reçu un antibiotique, nous atteignons environ le pourcentage de 70 pour le groupe MDS et 88 pour le groupe MR de consultations s’achevant par une prise antibiotique.
On se rend compte que l’OMA est une pathologie à fort taux de prescriptions antibiotiques. Williamson I. et all, ont montré au cours d’une étude que les taux de prescriptions antibiotiques dans l’OMA étaient assez constants et se situaient autour de 80-‐84% des consultations (37).
A titre comparatif, une étude sur les déterminants de prescriptions antibiotiques, dans 3 pathologies courantes de médecine générale que sont l’angine, la bronchite aigue et l’exacerbation de bronchite chronique, retrouvait des taux de prescriptions respectifs de 61, 64, 83.7 % (38). Ces chiffres sont déjà élevés, puisque 80 % des angines sont virales, et que les recommandations dans la bronchite aiguë sont bien souvent l’abstention d’antibiotique.
2-‐2-‐2-‐ Explications de cette forte prescription
Une des explications est que, contrairement à l’angine et la bronchite aiguë dont l’origine est le plus souvent virale, l’OMA constitue une pathologie bactérienne, ou du moins elle est considérée comme telle par les médecins, aux vues de leurs prescriptions antibiotiques conséquentes.
En réalité, l’OMA ne diffère pas des autres infections aiguës de la sphère ORL (39). Cette perception bactérienne de l’OMA, pourrait être un frein à la non prescription antibiotique par les médecins, expliquant des taux de prescriptions antibiotiques élevés. Une étude finlandaise a pourtant montré que 41% des OMA chez les enfants de moins de 2 ans étaient associées à une infection des voies aériennes supérieurs par un rhinovirus (40). On considère que l’OMA est en général une surinfection bactérienne d’une infection virale, mais une infection virale isolée peut également donner des signes d’OMA (41). La peur des complications de la part des médecins peut également être une hypothèse avancée sur le nombre important des prescriptions antibiotiques (23).
Cette prescription importante s’explique également par un possible sur-‐ diagnostic des cas d’OMA. Dans notre étude, il existe probablement un diagnostic par excès d'OMA, notamment dans les cas où les médecins retrouvent un ou des tympans congestifs. Il n’est pas recommandé de prescrire un traitement antibiotique sur la seule rougeur du tympan, contrairement à l’association rougeur-‐bombement. Dans notre étude, 24 cas dans le groupe MR et 15 cas dans le groupe MDS ont reçu un traitement antibiotique, alors que les critères otoscopiques ne le justifiaient pas. Cela représente dans les 2 groupes respectivement 30 et 39 % des prescriptions
totales immédiates d’antibiotiques, soit environ 1/3 de prescriptions non
justifiées sur le seul critère otoscopique et indépendamment de tous les autres (âge, signes de gravité, tolérance de la symptomatologie,…).
Une équipe du CHU d’Angers a évalué la qualité du diagnostic d’OMA établi par les médecins généralistes et comparé au diagnostic de l’ORL. Les résultats ont montré un diagnostic par excès global de 21,9 % et de 25 % lorsque l’otoscopie avait été rendue difficile par la présence de cérumen ou lorsque les tympans étaient seulement inflammatoires (42). Dans notre étude, les tympans n’ont pas été visualisés chez 2 patients dans le groupe MDS et 6 patients dans le groupe MR.
Cette étude préconise un enseignement post universitaire sur l’apprentissage des diverses techniques d’ablation du cérumen et l’utilisation de l’otoscopie pneumatique par les médecins généralistes.
Dans notre étude, 2 des 38 médecins du groupe MDS (5,3 %) et 10 des 91 médecins du groupe MR (11 %) ayant prescrit une antibiothérapie disent avoir été influencé par le patient ou son parent. Un travail de thèse s’était intéressé aux freins des parents à la non-‐prescription antibiotique dans l’OMA (43). Ce travail rapportait que les parents attendaient de l’antibiothérapie un soulagement de leur enfant face à leur impuissance. L’antibiothérapie était assimilée à un « remède miracle ». Il faisait état également de l’inadéquation entre la crainte de ces parents centrés sur les douleurs de leurs enfants, et la peur des complications de la maladie de la part du médecin.
Enfin, une étude canadienne avait montré que les médecins payés à l’acte prescrivaient plus d’antibiotiques (34). Cet argument remet en question tout le système français, dont la médecine générale est pour l’essentiel libérale.
L’abstention thérapeutique, ou la demande au patient de reconsulter dans 48-‐72 heures peut en effet être un frein dans une logique libérale. Il est important de corriger cette forte prescription, et de la recentrer au plus près des recommandations. Car la prescription favorise la consultation. En d’autres termes, la prescription d’antibiotique systématique dans l’OMA génère une attente des patients ou de leurs parents lors d’un cas ultérieur, comme si une fausse prescription suscitait de faux besoins (44-‐45).
2-‐2-‐3-‐ Solutions pour diminuer la prescription antibiotique dans l’OMA
Il est intéressant de noter que ces tympans congestifs souvent rapportés dans nos diagnostics d’OMA posent la question des limites sémiologiques et nosologiques du diagnostic d’OMA. Ainsi la redéfinition des critères diagnostiques de l’OMA, en excluant le seul caractère congestif du tympan comme critère diagnostique, pourrait favoriser la non prescription d’antibiotique dans cette pathologie. Prenons l’exemple d’un enfant consultant pour rhinorrhée et légère otalgie. A l’examen le médecin trouve un tympan congestif. Le diagnostic, de la part du médecin, peut être formulé