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poussière bloque les rayonnements solaires. Ainsi, les variations de températures sont liées à la quantité plus ou moins importante de poussière que contient l’at- mosphère et peut avoir un impact plus ou moins global, sur une échelle de temps très courte. Sous les conditions actuelles de température et de pression, il est impossible d’avoir de l’eau liquide en surface. Cependant des traces géologiques montrent que de l’eau liquide a coulé suffisamment longtemps et en grande quantité à une certaine époque de Mars. Ces traces géologiques sont indicatrices d’importantes variations du climat qui peuvent avoir plusieurs origines. Dans ce chapitre, je me suis plus particulièrement intéressée à la morphologie et la minéralogie de surface pouvant être indicateur d’un changement de climat. Sur le court terme, les observations géologiques montrent une très bonne corrélation avec les variations d’obliquité et la précession. Sur le long terme, la présence de réseaux fluviatiles et la stratigraphie des unités de phyllosilicates et de sulfates montrent que des conditions étaient adéquates pour avoir de l’eau liquide en surface et une altération conduisant à la formation de phyllosilicates. La présence de sulfates, quant à elle, dénote une acidification de l’atmosphère, qui semble postdater la formation des phyllosilicates. La synthèse qui suit permet de replacer les événements dans un ordre chronologique avec les connaissances actuelles et les questions qu’il reste à résoudre.

La période du Noachien est une période très riche, où la planète a connue de grands bouleversements (Fig. 1.17). Tout d’abord suite à l’accrétion, une croûte primitive s’est formée, dont les terrains les plus âgées que l’on retrouve aujour- d’hui sont datés de 4,4 milliards d’années. Pendant ce temps, l’atmosphère mar- tienne s’est enrichie en eau et en éléments volatils par les impacts météoritiques et le volcanisme. De ce fait, l’atmosphère devait avoir une pression plus importante, comme le dénote l’enrichissement de l’atmosphère actuelle en isotopes lourds. Elle étaient donc favorable à la mise en place de tout un système hydrique dans la région équatoriale, comme le confirme les réseaux fluviatiles bien développés. Les poussières ou les cendres résultant d’impact météoritiques et/ou d’éruptions volcaniques ont du conduire à la formation de dépôts importants. L’altération de ces dépôts ont pu former la succession des couches d’argiles que l’on observe au- jourd’hui, c’est à dire les phyllosilicates riches en Fe/Mg puis ceux riches en Al. La progression dans la nature des phyllosilicates peut avoir plusieurs origines. Il se peut que :

1. les dépôts en profondeur aient une composition moins acide, 2. les dépôts en surface aient subi une plus forte altération.

C’est également vers la fin du Noachien que l’atmosphère de Mars commence à voir sa pression diminuer (Fig. 1.17). Les hypothèses avancées pour expliquer cette évolution sont l’important bombardement qui a touché toutes les planètes du Système Solaire aux alentours de 3.9 Ga, des interactions physico-chimiques avec l’atmosphère, la faible gravité martienne qui n’a pu retenir les gaz lors des impacts et/ou l’arrêt de la dynamo. Or la pression diminuant, l’eau devient de moins en moins stable à la surface et l’atmosphère s’assèche. La transition du

Noachien vers l’Hespérien est marqué par la mise en place du réseau fluviatile de transition (Fig. 1.17).

L’Hespérien est quant à lui marqué par la formation des ces immenses che- naux de débâcle se trouvant presque tous sur la dichotomie martienne. Cette période est également marquée par la présence de lacs et de réseaux fluviatiles, dont certain sont aussi développés que ceux du Noachien. La mise en place des grands volcans boucliers du plateau de Tharsis et d’Elysium correspondent à cette période. De ce fait, malgré une tendance à se raréfier et un enrichissement en éléments volatils produit par ces grands volcans, l’atmosphère a pu préserver l’eau de surface à l’état liquide sur de courtes périodes, permettant ainsi la for- mation de sulfates.

L’Amazonien est caractérisé par des conditions de pression et de tempéra- ture semblables à celles que l’on observe aujourd’hui (Fig. 1.17). Cependant, des traces de réseaux fluviatiles suggèrent qu’épisodiquement de l’eau liquide a coulé en surface. Cette période est marquée par la formation des glaciers

tropicaux qui ont pour seule cause une obliquité non pas de 25 ◦ comme celle

d’aujourd’hui, mais dépassant les 60◦. Cette augmentation de l’obliquité pourrait

être également à l’origine des traces de coulées d’eau récentes, que l’on observe dans les flancs des dunes et des cratères. Les dépôts stratifiés des calottes datent également de l’Amazonien. Ces deux structures ont pour origine la précession de Mars. L’altération sous une atmosphère sèche et de faible pression a conduit à la formation d’oxydes de fer en surface et éventuellement, l’altération peut se poursuivre en profondeur.

Ce chapitre, avec l’étude des indices géologiques et minéralogiques a per- mis de faire le lien entre l’évolution du climat, la morphologie et l’altération des roches. Durant l’Amazonien, les observations ont clairement définis les pa- ramètres orbitaux comme cause des changements observés en surface. Les varia- tions du climat qui ont marqué l’Hespérien et l’Amazonien semblent avoir un lien avec des phénomènes comme l’arrêt de sa dynamo et l’évolution du volcanisme. Cependant, il est important de garder en mémoire que l’enchaînement des faits n’est pas encore bien compris. En effet, beaucoup de questions essentielles restent encore en suspens. Quel fût l’impact du volcanisme ancien dans l’enrichissement de l’atmosphère et en quelle proportion ? En contre-partie, ce volcanisme a-t- il joué un rôle dans l’acidification de l’atmosphère ? Quelle est l’impact réel de l’interaction atmosphère-surface, du grand bombardement météoritique qui a tou- ché Mars et l’arrêt de la dynamo sur l’échappement de l’atmosphère ? Combien de temps l’atmosphère primitive a-t-elle mis pour atteindre sa pression actuelle ? Le volcanisme de l’Hespérien a-t-il pu relâcher des volatils dans l’atmosphère ? Si oui, peut-on quantifier leur nature et leur quantité ? Egalement la formation de ces grands chenaux de débâcle suggère que Mars a un système connecté très perméable, ce qui est sans commune mesure avec ce que nous connaissons sur Terre. Parmi ces questions, nous nous sommes focalisés sur deux problèmes. L’un

1.5. Discussion et conclusion 55 N oa chi en H es pé ri en A m az oni en P ré -N oa chi en P hyl los ie n T hé ii ki en S idé ri ki en - 4500 - 4000 - 3500 - 3000 - 2500 - 2000 - 1500 - 1000 - 500 0

Echelles de temps Morphologie Minéralogie Climat

P T Chimie Acide Aqueuse, Non -acide Sec - Croûte primitive, - Volcanisme,

- Grand bombardement primitif, - Réseaux fluviatiles,

- Erosion des bordures de cratères - Dépôts ou altération in situ de pous- sières ou de cendre volcanique mafique. - Mise en place du réseau fluviatile de transi- tion.

- Formation des vallées de débâcle, - Développement des lacs et des réseaux fluviatiles tardifs,

- Formation des grands volcans bou- cliers.

- Formation des glaciers tropicaux, - Dépôts de glace d’eau aux hautes-lati- tudes,

- Formation possible de réseaux fluvia- tiles,

- Formation des calottes polaires, - Formation des coulées récentes.

- Formation des phyllosilicates de Fe/Mg,

- Formation des phyllosilicates d’Al.

- Dépôts ou altération in situ aboutissant à un enrichissement en sulfates.

- Altération majoritaire par oxydation > Fe2O3.

FIGURE1.17. Echelle des temps (en millions d’années) de Hartmann et Neukum (2001)

et une échelle basée sur la minéralogie proposée par Bibring et al. (2006). Pour chaque période, sont reporté les différentes morphologies observées, la minéralogie et les conditions de pression, de température et chimiques de l’atmosphère.

concerne Mars, actuellement, avec l’étude d’une circulation d’air dans les flancs d’une fracture de Cerberus Fossae et d’Arsia Mons. L’autre concerne l’histoire ancienne avec le problème de la compaction des dépôts sédimentaires Noachien et leur relation avec le développement des terrains chaotiques et des chenaux de débâcle à l’Hespérien. Les relations de ces deux processus avec le climat fera l’objet de discussions où les différents points évoqués dans ce chapitre seront utilisés.

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IMAGERIE ET PROPRIÉTÉS

THERMIQUES DES SURFACES

PLANÉTAIRES

2.1

INTRODUCTION

La télédétection joue un rôle crucial dans l’étude, depuis l’orbite, des dif- férents corps du système solaire car c’est le principal moyen de recueillir en quelques mois ou années des informations sur l’ensemble de la surface du corps étudié. Lorsque de l’énergie arrive à la surface d’un corps, elle est soit réfléchie, absorbée ou transmise. Ces interactions avec la matière doivent respecter le bilan suivant : la somme des quantités réfléchies, absorbées et/ou transmises est égale à la quantité de l’énergie incidente. Elles dépendent des propriétés physiques des matériaux traversés, de la longueur d’onde du rayonnement de la source et de la température de surface. Cette dernière, spécifique à un corps du système solaire, dépend au premier ordre de sa distance par rapport au Soleil (Fig. 2.1).

L’évolution des instruments dans le thermique (et aussi dans le domaine vi- sible) est surtout caractérisée par une augmentation de la résolution spatiale. L’instrument Infrared Thermal Mapper (IRTM) à bord de la sonde Viking (1975) avait une résolution spatiale entre 8 et 170 km selon la configuration de l’orbite de la sonde (Kieffer et al. 1972). Puis fût lancée la mission Mars Global Surveyor avec à son bord l’instrument Thermal Emission Spectrometer (TES) qui avait une résolution de 3 km (Christensen et al. 1992). Le dernier instrument est Thermal Emission Imaging System (THEMIS) qui a une résolution spatiale de 100 m/pixel (Christensen et al. 2004), à bord de la sonde Mars Odyssey.

FIGURE2.1. Graphique représentant le flux des planètes dans le domaine de la réflexion

et dans le domaine de l’infrarouge (d’après Encrenaz et al. (2003)).

Selon les longueurs d’ondes utilisées, les informations de la surface obte- nues sont différentes. En effet, dans le domaine visible, la réflexion de la lumière solaire est la principale source de radiation. Il est alors possible d’avoir une in- formation sur la minéralogie mais aussi de recueillir des informations concernant l’histoire géologique (Tab. 2.1).