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Les statistiques descriptives révèlent que les deux traitements expérimentaux sont accompagnés des hausses de productivité. En revanche, une analyse économétrique plus rigoureuse démontre que le coefficient de la prime salariale est positif, mais insignificatif. Similairement, le coefficient du traitement de bienfaisance est insignificatif et négatif. Selon le modèle présenté, quelques effets observés peuvent expliquer la différence observée. L’objectif de cette section est d’expliquer les facteurs de l’expérience-même qui auront pu influencer les résultats obtenus.

Premièrement, le changement dans les effets des traitements expérimentaux par rapport aux résultats des statistiques descriptives s’expliquerait par le fait que la température a un fort effet sur la productivité. L’état des effets expérimentaux passe d’un écart négatif de la prime salariale et positif du traitement de bienfaisance à un écart positif de la prime salariale et négatif du traitement de bienfaisance quand les variables de température sont incluses. Dans les deux cas, les changements de productivité sont non significatifs. En revanche, les coefficients des variables de température sont très grands et significatifs. Les formes estimées ne sont pas linéaires, mais les effets marginaux commencent à -286,95, -596,27 et 1142,87 tandis que les variables expérimentales ont des effets marginaux de 32,35 et -24,71. La température a beaucoup varié au cours de l’expérience, étant très élevée durant les jours où les traitements expérimentaux ont été en vigueur. La chaleur extrême de ces jours est possiblement la cause de la faiblesse des résultats obtenus. Il est à noter que ces effets sont non significatifs et sont donc difficiles de comparer, mais il est clair que les conditions climatiques portent une grande influence sur la productivité des planteurs d’arbres. Un test de Wald indique que la signifiance jointe de ces variables ne peut être rejetée à aucun niveau de significativité. Par contraste, tel n’est pas le cas pour les variables expérimentales.

Deuxièmement la fiabilité du coefficient de la prime salariale est douteux. Ce traitement a été appliqué uniquement au cours du 1 et 2 juin pour tous les travailleurs. Alors contrairement au traitement de bienfaisance, le coefficient ne provient pas du résultat d’une différence en différence, mais d’une simple différence sans groupe de contrôle. Il est alors beaucoup plus difficile de séparer l’effet du traitement expérimental des caractéristiques des deux jours. En outre, les conditions observées durant ces deux jours ne sont pas ordinaires. Les températures minimale, maximale et moyenne sont toutes bien au dessus de la période de contrôle. Le coefficient est alors probablement biaisé négativement. L’expérience analysée par ce mémoire est donc possiblement capable de démontrer moins que si les conditions confondantes avaient été optimales. Une expérience plus sophistiquée peut être conçue afin de corriger ou considérer les effets confondants trouvés. Des suggestions à cet effet sont présentées dans la section suivante.

Conclusions

Les dons de bienfaisance de la part des firmes sont très souvent observés en réalité et semblent initialement paradoxaux puisque l’unique objectif des firmes est de générer des profits. Par contre, comme toute activité d’une firme, il est possible que les dons de bienfaisance aient des retombées financières sous forme de stimulation des recettes ou de suppression des dépenses. Une expérience avec des planteurs d’arbres en Colombie-Britannique est conçue afin d’étudier l’influence de la bienfaisance d’une entreprise sur la productivité de ses travailleurs. En contrôlant pour les variables confondantes; dont la température et les jours de la semaine, aucune différence n’est observée entre le comportement des travailleurs sous conditions ordinaires et le comportement quand l’employeur promet de faire des dons de bienfaisance. Tandis que ce résultat est différent de nos attentes et ceux des recherches antérieures, il y a plusieurs raisons qui peuvent expliquer cette différence.

Le signe non significatif du coefficient de la prime salariale serait possiblement causé par la présence des effets de richesse en effort. Normalement quand le nombre d’heures travaillées est fixe, un individu ne perd rien en travaillant plus fort et en gagnant un salaire plus élevé. Une augmentation du salaire à la pièce, affectant l’utilité marginale du travail, est accompagnée d’une hausse de la quantité de travail effectuée afin de maintenir l’égalité avec le coût marginal. Pourtant, si des effets de richesse sont importants les travailleurs exerceraient moins d’effort. Le travailleur n’a pas le choix entre la somme du travail et loisir au travail, mais est capable de choisir son niveau de travail (ou effort) par son niveau de loisir au travail. Si cet effet est permis, une augmentation salariale permettrait aux travailleurs de gagner plus en travaillant moins par la consommation du loisir au travail.

La faible valeur du coefficient du traitement de la prime salariale pourrait également indiquer que la fonction du coût d’effort est mal spécifiée. La fonction 𝑐(𝑒) à l’équation (IV.3) suppose que les travailleurs puissent facilement ajuster leur effort de façon continue. Pourtant, à un certain point, ce coût marginal du travail serait tellement élevé que même une forte hausse salariale ne peut inciter une hausse d’effort. Ceci serait le point d’épuisement du travailleur. Puisque la fonction du coût d’effort est impossible à observer directement, il est difficile de savoir si les travailleurs observés se trouvent à ce point. Pourtant, la faible variance du comportement des travailleurs sous différentes conditions salariales est cohérente avec une telle situation.

Le modèle présenté ne permet pas la possibilité d’une dépendance dynamique du coût d’effort. Une telle dépendance dynamique impliquerait que le coût d’effort d’une journée est également influencé par l’effort exercé la journée précédente. Selon les démarches de la Section IV, les travailleurs exerceraient plus d’effort lorsque les traitements expérimentaux sont en vigueur (autres choses étant égales). La non-inclusion d’une

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dépendance dynamique pourrait influencer les résultats de deux façons. Un travailleur qui exerce un grand effort la veille d’un traitement expérimental travaillerait moins fort que prévu. D’autre part, le traitement expérimental dure deux jours, alors un travailleur qui exerce un grand effort le premier jour exercerait moins le lendemain. À cet égard, l’écart moyen entre le nombre d’arbres plantés le premier et le deuxième jour du traitement expérimental est très faible. La faiblesse de l’écart pourrait suggérer que cette dépendance dynamique ne biaise pas les résultats présentés, mais l’analyse statistique de cet énoncé n’est pas l’objectif du présent document. Cette possibilité serait un sujet d’étude intéressant pour de futures recherches.

Le but du coefficient de la prime salariale est d’agir comme point de référence pour le traitement de bienfaisance. Les travailleurs exercent normalement plus d’effort en présence d’incitatifs financiers, comme documenté par Paarsch et Shearer (1999 & 2009) dans le même environnement que celle étudiée par ce mémoire. Selon les données analysées, une hausse de productivité n’est pas observée. Les deux raisons énumérées – les effets de richesse et l’épuisement des travailleurs – peuvent expliquer cet écart. La divergence des résultats obtenus de ceux qui étaient anticipés est expliquée également par les limites des données expérimentales qui comptent plusieurs faiblesses qui empêchent que ceux-ci puissent être statistiquement significatifs.

Finalement, il se peut que le montant donné par arbre ne soit pas suffisant pour déclencher une réaction. La section V a précisé que lorsque le travailleur se comporte normalement, 20 cents par arbre équivaut à environ 250 $ par jour. Pourtant, le travailleur ne reçoit que trois cents par arbre planté à la marge pour les traitements expérimentaux, un montant possiblement imperceptible par le travailleur. La nature ardue du travail peut impliquer que le coût marginal des hausses d’effort nécessaires est simplement trop élevé par rapport au salaire ou don marginal.

La première faiblesse de l’expérience demeure dans le petit nombre d’observations. Durant deux semaines, 36 ouvriers ont été observés. Un échantillon plus grand permettrait des estimateurs plus précis. En outre, au cours du fonctionnement habituel de l’environnement du travail, plusieurs des travailleurs ne sont pas observés durant une journée donnée, ce qui réduit le nombre d’observations total à 293.

La deuxième faiblesse est la nature non aléatoire de l’application des traitements. Puisque la prime salariale a été appliquée durant les mêmes deux jours pour tous les travailleurs, il est impossible d’isoler définitivement un groupe de contrôle. Cette tâche est facilitée par la division de l’échantillon en cohortes pour le traitement de bienfaisance, mais une application véritablement aléatoire assurerait l’exogénéité du traitement, ainsi que la séparation de celles-ci des conditions journalières.

Pour ces raisons, il est possible que les résultats obtenus par ce mémoire soient différents de ceux qui sont observés par d’autres études. Il est à noter que les données obtenues ne permettent pas une conclusion robuste et qu’une expérience améliorée serait nécessaire afin de quantifier véritablement l’importance de cette relation. Par contre, selon les données observées il est possible conclure qu’un faible don de bienfaisance, égal à 15 % du salaire, n’est pas suffisant pour surmonter les chocs quotidiens de l’environnement du travail.

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