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1. Autres éléments de discussion

Dans cette étude, nous avons démontré que l’utilisation des informations issues du génotypage des femelles permet d’améliorer les conseils en accouplement donnés aux éleveurs notamment en limitant l’apparentement réel des couples et en limitant les risques de conception d’embryons atteints d’anomalies génétiques délétères. Nous avons également montré que la méthode d’optimisation linéaire donne de meilleurs résultats que la méthode d’accouplement séquentielle. De plus, elle traite simultanément l’ensemble des informations (fonction objectif et contraintes) essentielles à la planification des accouplements et renvoie une solution unique quel que soit l’ordre des paramètres en entrée de l’algorithme ce qui n’est pas le cas des autres méthodes d’optimisations comme les accouplements séquentiels.

De plus, cet article met en avant l’importance du paramètre « type de semence » (sexée ou conventionnelle) dans la phase d’optimisation des plans d’accouplement. D’ordinaire, dans les plans d’accouplements, la semence sexée est uniquement considérée comme un moyen d’augmenter le nombre de femelles de renouvellement et de choisir les mères des futures femelles (Pryce et al., 2011; Sun et al., 2013; Cole, 2015; Carthy et al., 2019). Or, il faut également être plus vigilant sur le choix du taureau et du couple (apparentement, anomalie génétique ou gène d’intérêt) lors d’un accouplement en semence sexée par rapport à un accouplement en semence conventionnelle car la probabilité que l’insémination conduise à la naissance d’une femelle de renouvellement est presque doublée dans le premier cas par rapport au second. Il en est de même pour l’effet de ce choix de couple pour le futur du troupeau. Conformément aux attentes de l’entreprise MO3, les méthodes d’accouplement proposées dans cette étude sont rapides (moins de 5 secondes par élevage) et nécessitent peu de paramètres d’entrée :

- Le type de semence avec lequel on souhaite accoupler chaque femelle du troupeau, - Le nombre de paillettes d’insémination disponibles par type de semence (sexée ou

conventionnelle) pour chaque taureau proposé,

- Les index génomiques (ou polygéniques, à défaut) des femelles du troupeau et des mâles reproducteurs,

- L’apparentement génomique, co-produit de l’évaluation génomique, (ou à défaut, issu du pedigree) entre ces mêmes mâles et femelles (calculés en routine par GenEval depuis juillet 2019),

- La probabilité que ces mêmes mâles et femelles donnent des embryons qui exprimeront un phénotype délétère ou favorable issu d’anomalies génétiques ou de gènes d’intérêt.

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Les trois premiers de ces cinq paramètres d’entrée sont déjà utilisés dans les plans d’accouplement actuels et ne nécessitent pas de modification des logiciels d’accouplement en ce sens. En revanche, l’apparentement génomique et la probabilité que la descendance exprime un phénotype dû à un gène à effet majeur sont des données « non-additives » qui ne sont pas prises en compte dans les fonctions objectifs d’optimisation des plans d’accouplement actuels et qui nécessiteront une adaptation de ces logiciels. Cet investissement dans la reconstruction ou l’adaptation des logiciels d’accouplement actuels ne sera pas remise en cause à chaque découverte de nouvelles anomalies génétiques ou de gènes majeurs puisque la formule de calcul du score économique proposée ici est souple et permet d’intégrer facilement ces nouvelles données (dès lors qu’un poids économique peut leur être associé). Il faut noter que la méthode proposée ici n’est valable que dans le cas de gènes d’intérêt récessifs ou dominants non pris en compte dans les index génomiques (ou très mal) afin de limiter les risques de double comptage des effets évoqués par Cole (2015). Dans le cas de QTL compris dans l’évaluation génomique, leur effet devra être ôté au préalable du calcul des valeurs génétiques si l’on souhaite les intégrer dans le membre « gène d’intérêt » du calcul du score économique de chaque couple, à la manière proposée par Sun et al. (2013) pour exclure la dépression de consanguinité (incluse dans les index génomiques aux Etats-Unis) afin de la prendre en compte dans le score économique global.

2. Etude complémentaire : comparaison aux choix réels des éleveurs

Cette étude complémentaire a été réalisée lors d’un stage de fin d’étude d’ingénieur de six mois, réalisé par Elisa Molliex au sein de MO3 (Molliex, 2019). Ce stage, intitulé « Analyse des plans d’accouplement « génomiques » en race Montbéliarde - Comparaison de cette nouvelle méthode face aux conseils actuels donnés en race Montbéliarde », a permis de comparer les accouplements proposés par la méthode gLP€_coa8.5 de l’article (accouplements choisis par optimisation linéaire à partir d’informations génomiques et avec un seuil maximal d’apparentement par couple de 8,5%) avec les plans d’accouplement réalisés par les éleveurs avec les conseils de leur technicien d’accouplement sur la même période (août-décembre 2018). A cette date, les techniciens n’avaient pas accès à l’apparentement calculé à partir des informations génomiques et avaient un accès limité aux probabilité de conception d’un embryon atteint d’une anomalie génétique. De plus, les éleveurs avaient accès à un panel de taureaux plus large que les 54 taureaux considérés dans l’étude ci-dessus puisque les coopératives d’inséminations ont dans leurs réserves des taureaux qui ne sont plus mis en avant dans le catalogue mais qui peuvent présenter un intérêt pour certains éleveurs.

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Les grandes conclusions de cette étude sont résumées au Tableau 5. Ces résultats confirment ceux de l’étude du IV.B. et notre conclusion affirmant que l’utilisation des informations génomiques permet d’améliorer les conseils d’accouplement en élevage.

Tableau 5. Scores économiques moyens, ISU attendu de la descendance moyen, apparentement moyen et risque moyen de conception d’embryons atteints d’une anomalie génétique (MH1, MH2 ou MTP) dans les plans d'accouplement réalisés par les éleveurs (PAA) et proposés par l’optimisation linéaire à partir des informations génomiques (PAG10). A partir de Molliex (2019) Score (€) ISU Apparen- tement (%) Risque MH1/MH1 Risque MH2/MH2 Risque MTCP/MTCP PAA 175,5 132,1 6,3 a 0,5 a 0,08 a 0,5 a PAG10 221,5 135,1 4,9 b 0,09 b 0,06 b 0,006 b a calculé à partir des informations de généalogie

b calculé à partir des informations issues du génotypage des individus

De plus, cette étude complémentaire a mis en évidence un choix privilégié des éleveurs pour des taureaux ayant un bon niveau génétique pour 4 caractères spécifiques au-delà de l’ISU : la production laitière, la morphologie, la santé de la mamelle et la reproduction. Ces résultats soulignent le fait que l’objectif de sélection de chaque éleveur peut s’écarter de celui de la race Montbéliarde (qui est traduit par l’ISU) pour se rapprocher des besoins spécifiques à son troupeau. Dans l’étude du IV.B., nous avons considéré que tous les éleveurs ont le même objectif de sélection que la race Montbéliarde (ISU). L’influence d’un objectif de sélection différent de la race sera abordée dans la suite de la thèse (chapitre V).