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Chapitre 4 La conduite et l’accompagnement du changement

1) Les différentes dimensions de la conduite du changement :

1.1) Le diagnostic du contexte du changement :

La conduite du changement organisationnel est davantage importante dans sa réussite que la stratégie élaborée (Desreumaux, 1992). La première étape de cette conduite est, pour beaucoup d’auteurs, celle qui reflète le diagnostic de la capacité de l’organisation et des acteurs à accepter le changement.

Pour les tenants du courant du «Développement Organisationnel», il est important d’établir un diagnostic de l’état psychosociologique et culturel de l’organisation afin de pouvoir analyser les modes de fonctionnement du système et son aptitude à accepter et à exécuter le changement souhaité. Pour Autissier & Moutot (2003), le diagnostic permet d’établir les frontières du changement, de reconnaître les acteurs concernés et de mesurer la réceptivité de l’organisation au changement escompté ainsi que sa capacité à changer. Cela étant fait, les dirigeants peuvent alors déployer les leviers propices à augmenter cette capacité. Ainsi, selon ces derniers auteurs, il est nécessaire pour le promoteur du changement de choisir la forme de gestion du changement et le type de structure qui permettrait d’atteindre les comportements souhaités et leur institutionnalisation.

Kotter & Schlesinger (1983), pour leur part, insistent sur l’importance d’analyser préalablement au changement la culture existante et ses fondements. Dans une ligne de pensée similaire, Johnson & al. (2005) soutiennent l’idée que «le tissu culturel» serait propice au diagnostic du contexte. En effet, ces auteurs définissent le tissu culturel comme étant «une représentation des croyances implicites d’une organisation, son paradigme, et des manifestations physiques de sa culture» (Johnson & al, 2005, p240). Ainsi, partant d’une explicitation de ce tissu culturel, les dirigeants ou les protagonistes du changement peuvent expliquer la culture organisationnelle et identifier les enjeux et les nécessités du changement c'est-à-dire envisager les actions de modification à mettre en œuvre. En outre, selon les mêmes auteurs, ce diagnostic en amont du processus du changement, permet d’analyser les forces qui facilitent le changement et celles qui peuvent le bloquer. Aussi, l’approche contextualiste de Pettigrew (1987) clame l’importance de la prise en compte des composantes du contexte dans la conduite du changement.

1.2) La vision du changement :

Un véritable changement ne peut s’effectuer facilement et naturellement dans la mesure où il vient bouleverser un équilibre aux yeux des acteurs en remettant en cause parfois leurs référents habituels. Il importe alors que ces derniers disposent d’une vision claire concernant le fait que la situation de départ avec laquelle ils sont si familiarisés n’est plus possible afin qu’ils acceptent de s’engager dans le changement organisationnel.

Il s’avère alors que l’une des nécessités dans la conduite du changement organisationnel est l’élaboration d’une vision partagée du changement (Collins & Porras, 2000) comme faisant partie de la préparation du système à la transformation escomptée (Kotter, 2000).

1.2.1) Les caractéristiques de la vision

Le concept de la vision a été traité par les chercheurs d’une manière abondante. Lipton (1996), par exemple, pense qu’elle «doit se concentrer sur le futur». Kotter (1990) quant à lui, élargit cette idée en stipulant que la vision est une description d’un métier, d’une technologie ou d’une culture d’entreprise souhaitée à long terme.

La vision reflète alors un état futur désiré par l’organisation (Bass, 1987) qui doit être attractif (Bennis & Namus, 1985). Toutefois, bien que la vision présente un état organisationnel futur, elle ne doit pas être déconnectée du présent (Snyder & Graves, 94), mais plutôt fixée par rapport à l’état organisationnel actuel et les ressources existantes (Hamel & Prahalad, 1994). Par ailleurs, plusieurs auteurs comme Raimbault & Saussois (1981) ou encore Kotter (2000) insistent sur le fait que la vision du changement et sa stratégie doivent être visibles, explicitant à la fois ses origines et sa nécessité.

Outre la visibilité, la vision doit être légitime, fondée et rationnelle. Selon Rondeau (1999, p 152), «cette légitimité renvoie à la pertinence perçue de la transformation annoncée en égard à la performance de l’organisation». Ce sont donc les acteurs qui doivent percevoir la vision du changement comme légitime, c'est-à-dire que le changement qu’elle véhicule est nécessaire et qu’il génèrerait des incidences positives sur le plan individuel et organisationnel.

Pour certains auteurs, l’élaboration de cette vision est dévolue au leader qui l’impose au reste des acteurs (Mintzberg & al. 1998). Ce leader « intuitif » (Lebraty, 1996) définit la vision par un processus semi-conscient (Mintzberg & Westley, 1989), semblable à une sorte d’ « illumination » (Koenig, 1996b). Pour ce faire, le leader se base sur sa propre expérience et sur ses connaissances du métier et de la vie organisationnelle (Mintzberg & al, 1998 ; Nanus, 1992 ; Koenig, 1996b).

Toutefois, d’autres travaux, tout en admettant l’influence et le pouvoir du leader sur le reste des acteurs (Hegarty & Hoffman, 1987), ont critiqué l’idée que ce leader «visionnaire» soit le seul acteur détenteur du droit de la construction de la vision (Grefeuille, 1994). A cet égard, Cyert & March (1963) expliquent que l’entreprise est composée d’autres acteurs aussi importants que le leader et les coalitions dominantes et que la vision établie par «le leader visionnaire» ne garantit en rien sa pertinence. En effet, selon March & Simon (1991), les capacités mentales des individus ne sont guère illimitées et leurs perceptions peuvent être entachées d’un risque de biais non négligeable. Il est alors possible de limiter ce risque par un travail collectif de collecte d’informations (Lesca & Caron, 1995). Selon cette perspective, la vision serait alors construite par l’intermédiaire d’une coopération entre les acteurs et la Direction. Ce qui permet aux dirigeants de nourrir leur réflexion concernant le projet du changement et de partager la vision avec le reste des acteurs (Romelar, 1997). En outre, l’élaboration de la vision peut se baser sur les liens existants entre cette dernière et les valeurs fondamentales de l’organisation (Kotter, 1990 ; Lipton, 1996). Ces valeurs constituent la base de l’édifice de la culture d’entreprise (Pettigrew, 1979) et regroupent les normes, les mythes et les tabous construits par un corps social (Reitter, 1996). Leur importance tient au fait qu’elles régissent les comportements et constituent un référentiel commun d’action et de perception pour les individus.

De plus, la construction de la vision peut se fonder sur les liens qu’elle entretient avec la raison d’être de l’organisation (Campbell & Yeung, 1991a et b ; Schmidt, 1993). En effet, selon ces auteurs, l’engagement des individus autour de la vision ne suit pas toujours un processus rationnel, dès lors qu’ils ont besoin de percevoir l’intérêt de la vision pour l’organisation et pour eux-mêmes (Nanus, 1992).

Nous retiendrons donc que la création de la vision est inéluctablement primordiale dans l’amorce et l’évolution du processus du changement dans la mesure où elle le provoque et le justifie (Kotter, 2000). Ainsi, la vision du changement constitue un socle, un guide et une référence pour sa mise en œuvre en focalisant les énergies et en assurant la cohérence dans les actions.

1.2.2) La vision comme facteur créateur de tension et de changement

La vision fixe des ambitions dans le long terme qui sont disproportionnées au regard des moyens existants (Hamel & Prahalad, 1989). Par conséquent, l’écart entre la vision et les ressources disponibles favorise «une tension créatrice» (Senge, 1990). Hamel (1991, p21) stipule à cet égard, que «la tension, ainsi que la créativité qu'elle engendre, sont le moteur et l'énergie de la croissance et de la vitalité de l'entreprise». En fait, l’existence de cette tension pousse les acteurs à rechercher des solutions permettant de la «relâcher» (Schmidt, 1993, p7) et donc de limiter l’écart entre la réalité et les ambitions. En outre, la tension est en fonction de l’organisation, elle est donc relative (Métais & Roux-Dufort, 1997). Ces deux derniers auteurs considèrent qu’une organisation «apprenante», ayant introduit des changements dans le passé, dispose d’une capacité pour supporter la tension qui est supérieure à une organisation «statique». Ainsi, la vision ne serait pas uniquement une image du futur, mais une manière de faire fonctionner le système organisationnel de façon à l’amener à une situation «loin de l’équilibre» et cela en maintenant la tension créatrice (Martinet, 1990).

Aussi, et pour mieux expliquer cette tension, nous pouvons emprunter l’image de Senge (1991) qui assimile l’écart entre la vision et les ressources organisationnelles existantes à un élastique tendu entre le présent et le futur. Ainsi, cet écart doit être suffisamment important pour que l’élastique ne relâche pas. En revanche si cet écart est très important, alors la vision est trop irréaliste et par conséquent la tension est trop forte d’où le relâchement de l’élastique. Cette métaphore nous amène à dire que la vision doit être compatible et en rapport avec les ressources disponibles car si les acteurs se sentent incapables de réaliser des objectifs dans le futur, cela peut provoquer chez eux un sentiment d’anxiété. Selon Schein (1993), cette anxiété peut recouvrir deux natures :

! si la vision suppose un écart trop grand entre les possibilités et l’ambition, les acteurs peuvent ressentir un sentiment d’impuissance qui génère une frustration. Dans ce cas, la tension est inhibitrice,

! si à l'opposé, l'objectif est ambitieux avec un aspect séduisant ou attrayant, les acteurs auront tendance à sous-estimer leur incompétence et à ne pas la considérer comme insurmontable. Ce sentiment crée chez ces acteurs une envie de dépasser leurs capacités et de changer leurs modes d’action afin d’améliorer leurs aptitudes et leurs performances. Il s’agit donc, selon l’auteur, d’un cas d’anxiété positive qui pousse à changer les modes d’action et de raisonnement afin de poursuivre la vision.

1.2.3) Une vision partagée :

Dans le cadre du changement organisationnel, outre la nature même de la vision, et pour qu’elle génère «une tension créatrice», il est nécessaire qu’elle soit partagée. Cette nécessité implique alors la recherche par l’ensemble des acteurs d’une interprétation commune de la vision (Pettigrew, 1987 ; Pascale, 1990). C’est ce qui pousse Midler (1995, p252) à expliquer qu’il est important de construire «une intelligence largement partagée de la situation de l’organisation». Et il ajoute que «le modèle du leader visionnaire, où le problème est celui de l’adhésion à la solution, cède ici la place à celui d’une ingénierie de la compréhension, de la vigilance et de la lucidité collective».

Selon cette perspective, le changement «devient un processus d’interprétation, c’est-à-dire un processus interactif de création de sens» (Demers, 1991, p23). Aussi, cet auteur explique que la diffusion de la vision du changement peut se faire autour de deux dynamiques. La première est horizontale, qui consiste en la définition du rôle de chacun dans la mise en œuvre de la vision. La seconde dynamique est de nature verticale qui traduit, quant à elle, la «redéfinition de la gestion», le partage des tâches, la spécification des responsabilités et la marge de manœuvre accordée à chacun. Ainsi, ces deux dynamiques permettent la définition de la nouvelle organisation et spécifient le positionnement de chaque acteur en son sein.

Cette conception de la vision du changement a été complétée par Rondeau (1999, p150-151) avec le concept de scénario qui, «pour qu’il soit utile, doit clarifier au moins quatre facettes distinctes de la conduite du changement, c'est-à-dire le plan d’action à suivre, l’encadrement à donner à cette action, les cibles à atteindre et le rythme à respecter dans le déroulement de l’action». Une telle clarification permet aux acteurs qu’on tente de réformer de bien traduire le changement en fonction du contexte de leurs actions.

Ainsi, dans la conduite du changement, la clarté et la visibilité du chemin à suivre semblent indispensables (Morin, 1988). Kotter (2002) a même montré que l’absence d’une vision de changement claire et simple, même avec l’existence de plans et de programmes de changement, serait un des principaux facteurs expliquant l’échec de plusieurs projets de changement. En effet, selon l’auteur, les acteurs ont besoin de sentir qu'ils apportent une contribution utile et c’est la vision qui permet de répondre à ce besoin en leur donnant la possibilité de percevoir leurs apports dans la réalisation de l’état escompté (Lipton, 1996).

Par ailleurs, la vision doit clarifier aux acteurs leur place dans le nouveau système qu’elle projette, faute de quoi les protagonistes du changement peuvent s’attendre à la formation de coalitions opposées au changement, voulant défendre l’ancienne organisation avec ce qu’elle apporte comme stabilité (Rowe, 1999).

Apres avoir définit et partagé la vision du changement, il incombe aux promoteurs du changement de choisir un mode de mise œuvre adéquat au contexte organisationnel. C’est ce que nous allons tenter de mettre en exergue dans la prochaine section.

1.3) La mise en ouvre du changement : construit ou prescrit ?

La littérature reflète deux grandes stratégies de mise en œuvre du changement organisationnel, à savoir, une forme imposée du changement et une forme négociée (Morin, 1988) ou ce que Vandangeon (2000) appelle par le changement «prescrit» contre le changement «construit».

1.3.1) Le changement prescrit :

Le changement imposé est décrété par le réformateur (le leader) et subit par les autres acteurs, leur laissant des marges de manœuvre réduites. Selon cette perspective, le leader est capable de conduire la démarche du changement en supposant que certaines conditions, souvent utopiques, soient réunies telles que l’absence d’opposition ou encore l’existence de rapports de pouvoir totalement à l’avantage du protagoniste du changement (Vandangeon, 2000).

Le changement prescrit suppose donc un processus enclenché par le leader qui définit l’état souhaité, donc la vision du changement, et cela par rapport à l’existant dont les déterminants seront à la base du changement. S’agissant d’une action intentionnelle, le protagoniste du changement, établit un diagnostic stratégique (Andrews, 1971 ; Child, 1972) lui permettant de reconnaître, d’isoler les problèmes (Dutton & Duncan, 1987) et d’identifier les opportunités. À ce niveau du processus, il est important pour le leader de s’intéresser à une multitude d’informations dans le diagnostic stratégique (Thomas & al, 1993). A cet égard, Dutton & Duncan (1987) expliquent que l’engagement vers l’action de changement est déterminé par le «niveau de définition du problème» et «la capacité perçue d’une solution».

Par ailleurs, du fait qu’il soit imposé par le sommet de la hiérarchie, ce changement confère un rôle important au leader. En effet, pour plusieurs auteurs comme Weick (1969), Beer (1976), Beckard (1975), Daft & Weick (1984) et Isabella (1990), la manière avec laquelle le leader perçoit et interprète l’environnement est très significative de ses actions. Ce leader agit alors selon une démarche analytique. Il identifie les forces et les faiblesses de l’organisation tout en clarifiant les contraintes et les opportunités de l’environnement (Martinet, 1984). Cette démarche lui permet ainsi de réduire la complexité de la réalité environnementale (Johnson, 1987). Ensuite, l’analyse ainsi faite, permet au leader d’envisager les solutions et les nouveaux choix stratégiques. Il s’agit là d’un processus de création du sens de la nouvelle organisation (Weick, 1969), fait par le dirigeant qui se base aussi bien sur ses croyances que sur son expérience passée. Le sens, ainsi construit, est ensuite transmis aux autres acteurs qui tentent de se l’approprier et de développer leur propre vision de l’organisation. Ce faisant, ces acteurs créent un nouveau sens venant enrichir la vision élaborée par le meneur. Par conséquent, la transmission du sens aux autres acteurs organisationnels favorise les échanges de points de vue et l’expérimentation de nouveaux modes de fonctionnement locaux qui peuvent être généralisés ultérieurement (Vandangeon, 2000).

La vision, ainsi créée, est implantée dans l’organisation en deuxième temps suivant un mode brutal de diffusion et confinant les autres acteurs dans un rôle passif dès lors qu’ils subissent le changement. Ces derniers tentent alors de trouver leur place dans le nouveau cadre organisationnel imposé et planifié au départ (Vandangeon, 2000). Les initiatives qui peuvent émerger des acteurs sont ensuite sélectionnées par le leader et cela à travers des mécanismes qui peuvent être de type administratif (planification stratégique, système de récompenses, règles d’allocation des ressources) ou culturel (rituels sociaux et normes de comportements) et qui permettent d’établir un cadre de cohérence (Burgelman, 1983). Ce cadre de cohérence permet de limiter les actions isolées et d’assurer ainsi leur convergence vers le développement de l’ensemble (Martinet, 1983).

A la fin du processus, le leader fait le choix d’opter pour la voie de la stabilité ou au contraire pour celle des transformations, de l’expérimentation continue (Smith, 1986) et de la recherche de comportements plus autonomes. Selon Burgelman (1983), ces comportements sont de nature à augmenter les capacités organisationnelles et la découverte de nouvelles ressources. La dynamique est donc relancée par de nouveaux projets visant à favoriser les initiatives prises par la base ou à élargir la vision de l’organisation. Il s’agit d’une progression de l’action d’un niveau global à un niveau local (Vandangeon, 2000).

Toutefois, les acteurs peuvent ne pas accepter le cadre imposé au départ par le réformateur et constituer ainsi une résistance de groupes contre le changement. Pour Ansoff (1984, 1991), ces résistances peuvent être générées par le fait que le changement ne coïncide pas avec la perception des acteurs à son égard ou que ces derniers ne soient pas prédisposés à changer. Aussi, les acteurs peuvent résister s’ils considèrent que le changement aura des impacts négatifs sur leur pouvoir actuel ou que les avantages qu’il génèrerait sont perçus comme inférieurs aux inconvénients de l’ancien système (Crozier & Friedberg, 1977).

Dans la même ligne de pensée, les auteurs Probst & al. (1992, p249-250)expliquent le rejet du changement par les acteurs par un mode de diffusion inadapté, tel que le mode imposé. Ils stipulent alors, que «le fonctionnement de l’individu et son comportement sont fonctions d’un

stimulus (...) qui génère, comme une réaction, une réponse de l’organisme». Ainsi, les acteurs résistent au changement quand ils sont confinés dans un rôle passif, leur accordant tout juste le droit d’écouter et d’exécuter les ordres alors que «toute personne doit être considérée comme étant intrinsèquement une source de changement» (Willett, 1992, p6).

Kotter (2000), pour sa part, affirme qu’un mode de diffusion de la vision du type «top down» accentué qui négligerait la participation des acteurs concernés, aurait comme résultantes, l’inhibition de leur motivation et leur implication, la peur de la prise de l’initiative et par conséquent, une énergie limitée en faveur du changement.

1.3.2) Le changement négocié :

Le changement négocié ou construit, comme son nom l’indique, est basé sur un ajustement entre «le réformateur» et les «réformés» (Vandangeon, 2000), considérant que la réussite dépend «du bon vouloir des exécutants, de l’assentiment d’acteurs de plus en plus nombreux» (Morin, 1988, p57). Cette vision du changement suppose donc l’implication des acteurs dans le diagnostic du problème et la définition du programme du changement. Une implication qui doit être réelle car «elle ne se réduit pas à une «ficelle» empruntable indifféremment du contexte, par les dirigeants, pour éliminer ce conflit et ranger une fois pour toute l’ensemble des salariés derrière la bannière de l’entreprise, qu’il leur appartiendrait seul d’agiter» (Rojot, 1992, pp93-94).

Selon cette perspective de mise en œuvre, l’action de changement est alors émergente qui naît pour montrer que «le changement est difficilement programmable» et «que le management réside moins dans une planification stricte que dans une mobilisation circonstancielle des ressources» (Wacheux & Autissier, 2000, p42).

Le changement du type émergent est implanté dans l’organisation chemin faisant de sa construction, suivant un processus synchronisé. Ce qui rejoint les caractéristiques des systèmes «auto-organisés», présentées par Weick (1977), où l’élaboration du nouveau système organisationnel ne peut être séparée de son implantation. Il s’agit selon l’auteur, d’un ajout de nouveaux éléments à l’ancien design et cela d’une manière arbitraire ou progressive. L’interaction entre ces éléments génère de nouvelles formes organisationnelles et le nouveau cadre organisationnel se formalise progressivement.

Nous retrouvons cette idée d’interaction entre les éléments organisationnels comme étant source de changement dans les travaux de Morgan (1989) qui a pensé l’organisation comme un cerveau humain. L’usage de cette métaphore par l’auteur s’explique par les caractéristiques du cerveau et surtout par ses composantes. En effet, Morgan (1989, pp102-104) avance l’idée selon laquelle