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molécules analogues

III.1. Etude préliminaire

III.1.3. Dimères : le problème de l’oxydation

Le dioxyde de carbone

La réaction entre un complexe d’uranium III et CO2 peut aussi mener à la formation d’un dimère d’uranium IV pour lequel CO2 a été réduit en CO22-. A cause de la taille d’un tel système, il est impossible d’optimiser un dimère d’uranium IV en utilisant le pseudopotentiel

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relativiste à petit cœur pour décrire les atomes d’uranium. Nous avons donc réalisé l’optimisation avec le pseudopotentiel relativiste à grand cœur. Puisque les deux centres métalliques deviennent des pseudo-couches fermées, deux états de spin sont possibles pour ce complexe dinucléaire : singulet (les deux électrons de CO22- sont appariés) et triplet. L’état singulet est trouvé beaucoup plus stable que l’état triplet de 46,8 kcal/mol. Sa géométrie est présentée dans la figure 12. Elle présente de longues distances C-O de 1,27 et 1,34 Å et un angle O-C-O de 116°, rappelant le dianion CO22-. Les charges NPA calculées pour ce complexe sont +1,76 pour l’uranium en interaction avec le carbone, +1,90 pour l’autre uranium, +0,46 pour le carbone, -0,78 pour l’oxygène pontant et -0,71 pour l’autre oxygène.

Figure 12. Structure optimisée du complexe [(COT)CpUIV]2(μ-η 2

-η2-CO2).

Un problème se pose concernant l’estimation de l’énergie de formation de ce dimère. En effet, l’équation chimique qui nous intéresse implique deux complexes d’uranium III et CO2 réagissant ensemble pour former le dimère d’uranium IV :

2[(COT)(Cp)UIII] + CO2 [(COT)(Cp)UIV]2(μ-η2-η2-CO2)

Or, le dimère d’uranium a été optimisé avec le pseudopotentiel relativiste à grand cœur adapté au degré d’oxydation IV. Ce pseudopotentiel ne peut pas être utilisé pour optimiser le réactif d’uranium III. C’est là son principal défaut : il ne peut être utilisé que pour des réactions n’impliquant aucune oxydation ou réduction du métal, telles que des métathèses de liaison. Une solution consiste à passer par le calcul du monomère d’uranium IV décrit dans la partie III.1.2. En effet, il est possible de calculer l’énergie de ce monomère à l’aide du pseudopotentiel à grand cœur afin de placer énergétiquement le dimère par rapport à celui-ci. Puisque nous avons déjà calculé l’énergie de formation du monomère d’uranium IV à l’aide du pseudopotentiel à petit cœur, il n’y a plus qu’à faire une addition pour estimer l’énergie de

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formation du dimère par rapport aux réactifs. Un résumé de la méthode est présenté grâce à aux équations suivantes :

L’énergie de formation du complexe d’uranium IV [(COT)(Cp)UIV

(CO2)] (dans le mode de coordination η2

-CO) a été calculée égale à +8,3 kcal/mol grâce au pseudopotentiel à petit cœur. Ce complexe a aussi été optimisé avec le pseudopotentiel à grand cœur de façon à obtenir ΔG°form(2), qui est calculée égale à -43,8 kcal/mol. Il suffit d’additionner ces deux valeurs pour obtenir l’énergie de formation du dimère par rapport à [(COT)(Cp)UIII] et CO2, qui est donc ici égale à -35,5 kcal/mol. La formation de ce complexe est ainsi trouvée très favorable. La perte d’énergie due à la rupture des liaisons C-O de CO2 est compensée par la formation de trois interactions U-O stabilisantes et du passage de UIII à UIV pour deux atomes d’uranium.

Le sulfure de carbone

Un complexe analogue a été calculé pour CS2 et est présenté dans la figure 13. L’état singulet est trouvé beaucoup plus stable que l’état triplet de -32,5 kcal/mol. Elle présente de longues distances C-S de 1,69 et 1,74 Å et un angle S-C-S de 122°, rappelant le dianion CS22-. Les charges NPA calculées pour ce complexe sont +1,73 pour l’uranium en interaction avec le carbone, +1,55 pour l’autre uranium, -0,75 pour le carbone, 0,00 pour le soufre pontant et +0,02 pour l’autre soufre. La répartition des charges est ainsi très différente de son homologue en CO2. Le carbone est ici chargé négativement et peut agir comme un centre nucléophile. L’énergie de formation de ce complexe est estimée de la même manière que pour le dimère de CO2 à -30,7 kcal/mol. Cette énergie est un peu plus faible en valeur absolue que pour CO2, car bien que CS2 soit un meilleur accepteur d’électrons que CO2, la formation des trois interactions U-S reste bien moins favorable que celle des trois interactions U-O.

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Figure 13.Structure optimisée du complexe [(COT)(Cp)UIV]2(μ-η 2

-η2-CS2).

Le sulfure de carbonyle

Deux isomères dimériques existent pour COS. Les deux ont été optimisés et sont présentés dans la figure 14. Ils sont tous deux bien plus stables dans leurs états de spin singulet que triplet. Le complexe de gauche est calculé plus favorable de 4 kcal/mol que celui de droite. Ceci peut se comprendre par le fait que la liaison C-S est ainsi en interaction avec un atome d’uranium et favorise le transfert de charge de ce dernier vers l’orbitale * de COS. Celà a tendance à allonger grandement la liaison C-S (1,87 Å) et ainsi tendre vers la formation de la très stable molécule CO. Le double transfert électronique ne rompt pas la liaison C-S comme c’est le cas dans le monomère d’uranium V mais s’en approche. Les charges NPA calculées pour ce complexe sont +1,62 pour l’uranium en interaction avec le carbone, +1,74 pour l’autre uranium, +0,05 pour le carbone, -0,22 pour le soufre et -0,65 pour l’oxygène. L’énergie de formation de ce complexe est calculée égale à -31,0 kcal/mol.

Figure 14. Structures optimisées des deux isomères du complexe [(COT)(Cp)UIV]2(μ-η 2

109 Conclusion

Les valeurs énergétiques calculées montrent que les formations des dimères d’uranium IV pour CO2, CS2 et COS sont bien plus favorables que les formations des monomères correspondants. Il est ainsi raisonnable de penser qu’une réaction entre un complexe d’uranium III et une de ces molécules débutera toujours par la formation d’un complexe bimétallique de ce type.

Un point important de cette partie est la manière dont nous avons calculé l’étape d’oxydation. En effet, le calcul de mécanismes réactionnels impliquant des dimères d’uranium IV ne peut pas être réalisé à l’aide du pseudopotentiel à petit cœur, car ceci rend les calculs d’optimisation impossibles à effectuer. Seule l’utilisation du pseudopotentiel à grand cœur permet de réaliser ce genre de calculs, mais celle-ci empêche le calcul rigoureux de l’étape d’oxydation de l’uranium III vers l’uranium IV. Notre méthode, qui utilise les deux types de pseudopotentiels, permet d’estimer cette étape d’oxydation en passant par le calcul d’un monomère d’uranium IV. Ceci peut être réalisé avec d’autres types de métaux et d’autres substrats. C’est une méthode générale qui permet une utilisation plus large des pseudopotentiels à grand cœur adaptés à certains degrés d’oxydation.