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Chapitre I : Étude bibliographique

IX. Principes physico-chimiques de la teinture

4. Diffusion des colorants dans les fibres textiles

IX.4.1. Généralités

La diffusion est un phénomène d’autorégulation de concentration dans une phase donnée ou entre deux phases différentes. En effet, le phénomène de diffusion continue tant que l’équilibre n’est pas encore atteint (gradC=0) Les autres paramètres physico-chimiques (température, pH milieu, volume…) sont maintenus constants. La 1ère loi de Fick décrit le processus de diffusion dans les conditions constantes du cœfficient de diffusion et du gradient de concentration (Régime stationnaire). Pourtant, ces conditions ne peuvent exister que dans des expériences spécifiques de laboratoire.

Dans les conditions réelles du processus de teintures et d’impression, le cœfficient de diffusion et le gradient de concentration dépendent des paramètres du temps et de l’espace. Ce qui est bien exprimé par l’équation :

∂C/∂t = div (Dgrad C) (6)

Dans le but de simplifier la solution de l’équation précitée, on considère la forme géométrique des fibres textiles similaire à la forme cylindrique. En fait, la longueur des fibrilles est beaucoup plus grande (10µm) que leur diamètre (0.02µm), ce qui mène à négliger ce dernier devant la longueur [20]

.

On peut, alors, se ramener à la 2ème loi de Fick :

∂C/∂t = D (∂²C/∂r² + (1/r) ∂C/∂r ) (7)

Où, C : concentration du colorant à un point r de la fibre textile et à un temps t.

D : cœfficient de diffusion apparent/expérimental de la molécule du colorant dans les micropores de la fibre en tenant compte des forces d’attractions de ses centres actifs.

Il faut signaler qu’au début de l’imprégnation des fibres textiles dans le bain de teinture, les colorants ne pénètrent pas instantanément à l’intérieur des fibres, mais ils se regroupent entre eux formant des agrégations plus au moins grandes. Le gonflement des fibres imprégnées dans le bain de teinture nécessite un certains temps, qui dépend de leurs propriétés physico-chimiques.

Cependant, pour caractériser d’une manière simple et pratique la diffusion en question, on utilise le demi-temps cinétique de l’adsorption des molécules de colorants qui correspond à la moitié de la quantité adsorbée dans les fibres. On distingue alors deux types d’équation qui diffèrent par la concentration du bain de teinture (Cb) [57]. La figure 30 illustre les deux types de diffusion du colorant.

D = 0.063 r²/t1/2 Cb = cst (8)

D = 0.063 r²/t1/2 (1-( E/100))1.68 Cb # cst (9)

Où, E: taux d’épuisement en %.

D (1) Cb=cst (2) Cb #cst r

Fig. 30. Diffusion du colorant à l’intérieur des fibres dans le cas de la stabilité de la concentration du bain de teinture (1) et dans le cas de sa variation (2).

Suite à ce qui précède, la diffusion du colorant à l’intérieur des fibres est retardée par les interactions électrostatiques causées par les sites actifs. La grandeur de ces interactions est mesurée par la constante d’adsorption à l’équilibre.

Afin de caractériser ces interactions ainsi que l’empêchement stérique provoqué par la nature et la structure des sites actifs des fibres textiles, souvent on utilise l’équation suivante

[58]:

D = D0 (P/δ) (1/k+1) (10)

Où, D : coefficient de diffusion apparent ;

D0 : coefficient de diffusion moléculaire du colorant à l’intérieur des pores et micropores des fibres ;

P : porosité des fibres textiles ;

δ : coefficient de régularité des pores ; K : constante d’adsorption à l’équilibre.

Pour évaluer l’effet de ces deux forces de retardation. On procède à l’étude de la diffusion dans les fibres inertes qui n’exerce qu’un empêchement stérique sur les molécules du colorant. On évalue alors cet effet stérique par la détermination du rapport D0/D, il est de 100 à 1000 [58].

Si on rajoute à cet effet stérique l’effet d’attraction des sites actifs, le rapport D0/D devient alors égal à 100 000 ou 1 000 000 [58]. Ou si on diminue la constante d’adsorption à l’équilibre K, en abaissant les forces d’attraction fibre-colorant, le coefficient de diffusion apparent D augmente sensiblement. Il se rapproche du coefficient de diffusion moléculaire D0.

Puisque la réaction d’adsorption du colorant sur les fibres textiles est une réaction d’équilibre exothermique, les forces d’interactions peuvent être affaiblies soit en augmentant la température de teinture ou par solvatation des molécules du colorant, ou aussi par solvatation des centres actifs des fibres sous l’action des solvants organiques.

Dans les deux figures 31 et 32, nous prenons comme exemple la variation de la diffusion des colorants directs dans les fibres cellulosiques en fonction de la température et de la concentration de triéthanolamine [59].

D (10 -11cm²/s) 5.0 4.0 3.0 2.0 1.0 60 80 100 120 Température de teinture

Fig. 31. Diffusion du colorant direct dans les fibres cellulosiques en fonction de la température.

D (10-11 cm²/s) 1.5 1.0 0.5 10 20 30 40 Concentration (mg/l)

Fig. 32. Diffusion du colorant direct dans les fibres en fonction de la concentration du triéthanolamine.

En analysant les données de ces courbes, nous constatons que la température et le solvant organique (type triéthanolamine) n’agissent pas seulement sur l’effet stérique et sur les interactions fibre-colorant mais diminue considérablement l’effet d’agrégation des molécules du colorant dans le bain de teinture.

Il faut signaler que l’influence de température sur la vitesse de diffusion des colorants dans les fibres se manifeste plus clairement après la valeur 100°C.

Pratiquement, ceci est bien exploité dans les procédures de teinture et d’impression des fibres synthétiques et artificielles (en polyester, triacétate de cellulose, polyacrylonitrile…)

Pour caractériser l’influence de température sur la vitesse de diffusion des colorants dans les fibres textiles, on utilise souvent l’équation d’Arrinus 59 :

D = N exp(-E/RT) (11)

Où, D : coefficient de diffusion à la température T (en kelvin)

N : constante englobant toutes les constantes existant avant l’exponentiel. E : énergie d’activation de la diffusion.

R : constante des gaz parfait.

On peut tirer de l’équation que seules les molécules ayant une énergie supérieure à l’énergie d’activation peuvent pénétrer à l’intérieur des fibres. En effet, cette réserve d’énergie est essentielle pour passer d’un état d’équilibre fibre-colorant à un autre.

L’augmentation de température accroit cette réserve d’énergie mais aussi agit sur la mobilité des chaînes macromoléculaires des fibres textiles, en particulier sur les fibres synthétiques qui ne possèdent pas un système de pores suffisamment développé comme le cas des fibres naturelles.

IX.4.3. L’effet de l’électrolyte sur l’adsorption du colorant dans les fibres hydrophiles.

Les fibres hydrophiles possèdent un caractère anionique (fibres cellulosiques) répulsif en présence des colorants anioniques (réactifs, acides, directs). Cet effet électrostatique empêche le rapprochement des deux couches interactives (fibre-colorant) pour pouvoir accéder à l’intérieur des fibres. Pour cela, on fait introduire un électrolyte qui permet la compensation des charges négatives en diminuant, ainsi, le potentiel électrocinétique (ξ).

Pourtant le dépassement de la quantité optimale de l’électrolyte provoque des agrégations des colorants dans le bain de teinture et oriente l’équilibre d’adsorption, vers une formation précoce des liaisons entre les groupements hydroxyles de la cellulose et les molécules du colorant.

D’après ce qui précède, le coefficient de diffusion du colorant à l’intérieur des fibres naturelles (cellulosiques et protéiniques) dépend essentiellement de la constante d’adsorption à l’équilibre, c.à.d. de la quantité du colorant adsorbé à un temps d’équilibre. Ce qui mène à dire que le coefficient de diffusion augmente avec l’augmentation de la concentration du colorant dans les fibres naturelles.

Dans le cas simple on peut exprimer cette relation par l’équation [59] :

D = D0 (1+nCa) (12)

Ca : concentration du colorant adsorbé sur les fibres. n : constante numérique.

IX.5. Affinité du colorant aux fibres textiles ( Substantivité)

IX.5.1. Cas de l’isotherme d’adsorption linéaire (Colorants non ioniques)

Indépendamment de l’isotherme d’adsorption du colorant à la surface des fibres textiles. La diffusion du colorant à partir du bain de teinture vers la surface des fibres s’exprime principalement par la différence du potentiel chimique entre les fibres et le bain de teinture dans les conditions standards [60].

-∆

µ

0 =RTlnK (13) Où, ∆

µ

0 : affinité du colorant aux fibres, Kj/mols R : constante des gaz parfait.

T : température absolue

K : constante d’adsorption à l’équilibre

Dans le cas général, K caractérise la distribution du colorant entre les fibres et le bain de teinture :

K= Af /Ab (14)

Où, Af et As : activités du colorant respectivement dans les fibres et dans le bain de teinture.

L’activité du colorant dans les deux phases est déterminée suivant les conditions de la teinture. Dans le cas le plus simple où la concentration du colorant dans le bain de teinture n’est pas élevée, on peut considérer l’activité comme la concentration :

-∆

µ

0 =RT (ln[Col]f – ln[Col]b) (15)

Où, [Col]f et [Col]b : concentration du colorant à l’équilibre respectivement sur les fibres et dans le bain de teinture (mols/l).

En pratique, ce model d’adsorption est beaucoup plus proche de la teinture des fibres hydrophobes (fibres synthétiques). L’isotherme d’adsorptions dans ce cas est linéaire et répond à l’équilibre de Nernst cité précédemment.

On peut considérer que l’adsorption dans ce cas répond à la théorie du solvant solide. En effet, les fibres synthétiques jouent le rôle d’un solvant solide quand le degré de saturation n’est pas très élevé et les liaisons formées entre eux sont de type Van-der-Walls et liaisons hydrogènes.

IX.5.2. Cas de l’isotherme d’adsorption hyperbolique (Colorants anioniques)

Le cas des colorants anioniques (type colorants réactifs et colorants de cuve) de forme Col- Naz,les ions Col-z et (Na+)z se répartirent par le mécanisme de diffusion entre le bain de teinture et les fibres. Alors l’activité du colorant peut être exprimée par l’équation suivante [60]:

Af = ( [Na+]f / V)z ([ Col-z]f / V) = [Na+]fz [Col-z]f / Vz+1 (16)

et Ab = [Na+]bz [Col-z]b (17)

Où : [Col-z]f, [Na+]fz : concentration des ions du colorant et du sodium dans les fibres textiles en g.eq/kg.

[Col-z]b, [Na+]bz : concentration des ions du colorant et du sodium dans le bain de teinture en g.eq/l.

z : charge du colorant anionique ;

V : volume effectif de la fibre textile, c.à.d. le volume accessible pour les ions du colorant et du sodium en l/kg. Il est de 0.3 pour le coton ; 0.45 pour le viscose et le coton mercerisé et 0.65 pour les fibres cuproammoniacal.

Ainsi la force motrice responsable du transport des ions du colorant du bain de teinture au volume effectif des fibres textiles est exprimée par l’équation du potentiel chimique :

-∆

µ

0 = RT (Ln[Na+]fz [Col-z]f) /Vz+1) – Ln[Na+]bz [Col-z]b) (18)

L’équation (18) caractérise entièrement l’étape d’adsorption de la plupart des colorants anioniques aux différentes fibres cellulosiques, à conditions que l’adsorption soit réversible. Dans le cas des colorants réactifs et de cuve, cette condition n’est pas toujours remplie, elle n’est pas valable dans la phase de la formation de liaison covalente des colorants réactifs et dans la phase de l’oxydation de leuco-dérivé du colorant de cuve.

Le calcul de l’affinité du colorant à la fibre textile dépend de deux forces opposées : d’une part, les forces d’attraction caractérisées par les liaisons Van-der-Walls et liaisons hydrogènes et d’autre part, les forces de répulsion électrostatique dues à la même charge négative des ions du colorant et de la surface de la fibre. Pour éliminer ces forces de répulsion, les ions de sodium se localisent dans le volume effectif de la fibre et compensent ainsi les charges négatives existant entre les deux couches interactives fibre-colorant.

Alors, la concentration nécessaire et suffisante des ions de sodium qui doit traverser les fibres, pour que les colorants de concentration [Col-z]

f puissent se localiser prés des sites actifs de ces fibres, est souvent exprimée par la relation suivante [60] :

[Na+]f = [ Col-z]f { (Z/2+ (Z²/4 +[Na+]b[Cl-]b V²) / [Col-z]²f)½} (19)

Où, [Na+]b ,[Cl-]b : concentration initiales des ions de sodium et de chlore introduites dans le bain de teinture ;

z ou Z : charge du colorant.

Si le bain de teinture contient d’autres ions (types S2O4²-, OH-) provenant de la teinture des colorants de cuve par exemple, il est nécessaire de les introduire dans l’équation (19). A la place de la concentration du chlore, on met la concentration de tous les ions, autres que les molécules du colorant, existant dans le bain de teinture ( [Cl-] +2[S2O42-]b+ [OH-]b ).

Dans le cas de l’adsorption des ions de colorant sous la forme d’une couche monomoléculaire, c.à.d par l’isotherme d’adsorption de Langmuir, l’activité du colorant dans la fibre s’exprime comme suit :

Af = θc / (1- θc) (20)

Où, θc : le nombre des sites actifs de la fibre occupés par les ions de colorant (θc = C0f/C0 où C0f : concentrations du colorant à l’équilibre dans les fibres. C0 : concentration de saturation des sites actifs des fibres).

Dans ce cas l’équation (18) devient [60]

Le calcul de l’affinité du colorant à la fibre dans le cas de l’isotherme de Langmuir (équation 2) nécessite la connaissance de la concentration de saturation des sites actifs pour déterminer le nombre des sites actifs (θc) occupés par les ions du colorant et suivant la relation décrite ci-dessus. Pourtant la détermination de cette concentration de saturation présente encore des problèmes non résolus, ce qui délimite l’utilisation de cette équation pour le calcul de l’affinité du colorant aux fibres naturelles [60].

Pendant la présence d’un mélange de colorant dans le même bain de teinture, on procède par la détermination individuelle du mécanisme d’adsorption pour chaque colorant. Afin de déterminer l’affinité de chaque colorant à la fibre, on utilise soit l’équation (18) ou (21).

L’influence des paramètres mises en jeu dans l’opération d’adsorption du colorant est considérée dans le cadre d’une équation d’équilibre :

Fibre + Col. Fibre-Col.

L’effet de ces paramètres peut orienter l’équilibre soit dans le sens d’adsorption ou desadsorption.

La réaction d’adsorption se fait par dégagement de chaleur. Cela signifie que l’augmentation de température provoque un déplacement d’équilibre vers le sens de desadsorption, c.à.d. l’augmentation de température est toujours accompagnée d’une diminution du potentiel chimique ∆µ0. Ceci est valable bien entendu, dans le cas de teinture par procédé d’épuisement de bain, mais loin d’être réalisable dans le cas de procédé de teinture à la continue. L’augmentation de la température provoque une diminution de la quantité du colorant adsorbée dans les fibres mais accélère sensiblement sa diffusion à l’intérieur des fibres.

Ayant le même effet de la température, les solvants et les adjuvants chimiques solubilisent les colorants dans le bain de teinture et dans les fibres, en diminuant ainsi les forces d’adsorption et facilitant la diffusion des colorants dans les fibres.

Contrairement à l’effet provoqué par la température et les solvants organiques, l’ajout des électrolytes dans le bain de teinture, provoque un rapprochement des fonctions actives des deux couches interactives fibre-colorant, et oriente l’équilibre de la réaction d’adsorption dans le sens de l’augmentation de la quantité des colorants dans les fibres.

Il faut signaler que malgré la diffusion des colorants vers les sites actifs des fibres sous l’effet de l’électrolyte, la différence du potentiel chimique ne change pratiquement pas (Loi de Donan) [61,62].

IX.5.3. Influence de la forme hydrolysée du colorant sur son affinité

Tableau 6 : Affinité de la forme hydrolysée pour quelques types de colorants réactifs [63]

Partie chromophore du colorant Partie active (T-X)

Affinité ou taux d’épuisem ent (%) N=N OCH3 X OH SO3Na -SO2CH2CH2OSO3Na 20 -SO2CH=CH2 80 -SO2CH2CH2OH 38 N=N X OH NaO3S SO3Na X H3CO N N N Cl NH SO3N 75 N N N HO NH SO3Na 76 N=N X OH NaO3S SO3Na SO3H X N N N HO H N SO3Na 43 N N N Cl NH SO2CH=CH2 82 N N N Cl NH SO2CH2CH2-OH 63

On déduit du Tableau 6 que, l’affinité du colorant type sulphatoéthylsulfone envers la fibre cellulosique augmente sensiblement quand il passe à la forme active : vinylsufone (VS). Pourtant, cette affinité se remet à la baisse lorsque la forme active s’hydrolyse et devient un

hydroxyéthylsulfone, ce qui lui affère une meilleure lavabilité. En revanche, les colorants type dichlortriazines ne présentent pratiquement pas une différence d’affinité entre la forme active et la forme hydrolysée, ce qui est traduit par la grande difficulté de l’élimination de ces formes hydrolysées pendant l’opération de lavage.

Alors, la différence aperçue dans l’affinité, entre la forme hydrolysée et active du colorant VS seul ou sous forme d’un colorant hétérobifonctionnel, présente la principale raison de l’utilisation de ces types de colorant, non seulement dans le procédé d’épuisement mais aussi dans le procédé de teinture semi-continue et à la continue.

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