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Les difficultés éprouvées par les PES durant les stages en enseignement demeurent mal documentées malgré l’accroissement de la durée des stages au Québec et le rôle central de ces derniers dans le développement des compétences professionnelles. Il en est de même des échecs vécus en stage sur lesquels il demeure très difficile d’obtenir des données fiables. La documentation consiste surtout en des études institutionnelles, des enquêtes internes et des études

de cas. Ces recherches sont limitées et imprécises. Comme signalé dans la section précédente, les taux d’échec rapportés varient entre 0 % et 10 % (Harwood, Collins et Sudzina, 2000; Raths et Lyman, 2003; Siebert, Clark, Kilbridge et Peterson, 2006).

Une recension des écrits scientifiques12 nous a permis d’identifier des confusions

terminologiques (Bullock et Russell, 2010; Musset, 2010; Patrick, 2013) qui rendent la comparaison des résultats pratiquement impossible. Nous avons également noté une sous- représentation des points de vue des PSU. De plus, la majorité des études s’attardent à identifier des difficultés en association avec les acteurs de la triade, principalement les PES, bien que certaines font ressortir l’importance des rôles des structures qui à première vue, peuvent sembler éloignées de la classe (Danyluk, Luhanga, Gwekwerere, MacEwan et Larocque, 2015). Les deux sections suivantes mettent en évidence ces deux lacunes constatées dans les études scientifiques consultées, et ce, au niveau des terminologies employées et des points de vue considérés.

5.1 Imprécisions terminologiques

Les documents recensés font preuve d’un manque de précision quant aux définitions des notions d’échec et de difficulté. En effet, signalons, en tout premier lieu, la confusion qui entoure le mot difficulté. Celui-ci représente parfois la nature, parfois les objets des écueils rencontrés en situation de stage ou leurs qualificatifs. Il est souvent employé pour illustrer la nature d’un problème en exprimant un manque, un niveau ou une quantité insatisfaisante ou encore des causes

et des effets imputés à ces manques. Par exemple, un manque de planification, une déficience de la gestion ou encore une désorganisation de la classe sont qualifiés de difficultés associées aux PES (Hall et Serna, 1992). Le même mot est utilisé pour nommer des objets de difficultés en référant à une compétence, à un comportement, à une attitude ou à une catégorie de ceux-ci; à un mode d’organisation; à des ressources ou à des actions, par exemple: matière à enseigner, connaissances, gestion de classe ou habillement (Wilkins Rickman et Hollowell, 1981). Le même vocable sert de qualificatif en référant à divers degrés d’intensité, d’occurrence, de fréquence, de maîtrise, de contrôle, d’efficacité ou d’efficience (p. ex.: retards fréquents, faible estime de soi) (Darling-Hammond, 2006; Harwood et al., 2000; Proulx, 1997).

Le mot difficulté est aussi employé pour identifier des acteurs ou des composantes du stage comme sources de problèmes. Il est relié au travail et à la compétence des PEA, des PSU (Bullock et Russell, 2010; Hensler et Baillauquès, 1993) ou des autres intervenants (Desbiens et al., 2015; Wyss, Siebert et Dowling, 2012). Enfin, le mot difficulté renvoie à des composantes des stages telles l’organisation ou la qualité des cours ou des stages (Allen, Ambrosetti et Turner, 2013; Graham, 2006; Morrison, 2013).

Les documents contiennent un éventail de définitions de l’échec. Dans leur étude, Sudzina et Knowles (1993) rapportent que certaines institutions inscrivent des mentions de retrait ou de non-complétude de stage dans des cas où les PES n’ont pas satisfait aux exigences du stage. Avec ces mentions, l’institution évite la comptabilisation d’un échec. Ailleurs, des PES étaient réputées avoir échoué si elles décidaient d’arrêter leur stage ou si elles en étaient retirées par des responsables universitaires ou scolaires. Au point trois de ce chapitre, nous avons présenté les

notions d’échec objectif et subjectif. À titre d’exemple, l’étude de Tracy et al. (1998) combine les deux types d’échecs et en définit quatre niveaux13 : 1- recevoir une note sous le seuil acceptable;

2- recevoir une note qui accorde la certification, mais qui est en deçà des attentes de la PES; 3- ne pas recevoir de lettres de recommandation; 4- avoir un sentiment d’inefficacité comme enseignant.

Nous constatons que l’absence de langage commun entre les établissements ou les chercheurs en ce qui a trait à l'utilisation des notions de difficulté et d’échec pose de sérieux problèmes à la collecte, à la compréhension, à l’interprétation et au classement des données institutionnelles et des résultats des différentes recherches. Une clarification de la terminologie employée nous semble s’imposer.

5.2 Points de vue restreints

Parmi les 60 documents recensés qui présentent spécifiquement des résultats empiriques, 48 (80 %) études rapportent le point de vue des PES comme celle de Castañeda-Peña, Rodríguez- Uribe, Salazar-Sierra et Chala-Bejarano (2016). Celui des PEA arrive au second rang avec 26 (43 %) recherches qui s’y attardent. Par contre, il est questionnant de réaliser le faible intérêt porté au point de vue des PSU avec seulement 12 (20 %) recherches, ainsi qu’à celui des autres acteurs des milieux scolaires et universitaires abordé par neuf recherches (15 %). À cela, ajoutons que contrairement aux influences des PEA, des structures et des organismes sur la situation de stage, l’influence des PSU semble faire l’objet de peu d’études. Sans oublier le manque d’études qui

considèrent le point de vue des élèves ou l’influence potentielle de leurs interactions avec les stagiaires (Malo, 2014). Ceci nous porte à penser que les documents recensés adoptent une vue parcellaire de la situation des stages. Or cela s’avère incompatible avec la position adoptée par Crahay (2006) selon qui « le phénomène scolaire échappe au moins partiellement à l’intelligibilité si on ne lui applique pas une grille d’analyse écosystémique » (p. 51). Aussi, il nous paraît pertinent d’opter pour une approche portant un regard large sur le développement des stagiaires tout en respectant les ressources limitées associées à un projet doctoral. Bien que notre choix du modèle bioécologique de Bronfenbrenner (1979) soit présenté et justifié au chapitre deux, la section suivante résume le raisonnement sous-jacent à ce choix.