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Différentes conceptions de l’entrepreneuriat

Chapitre II : une approche processuelle de l’entrepreneuriat

2. Différentes conceptions de l’entrepreneuriat

Selon Jean Michel Berthelot, le terme de « paradigme » est utilisé chaque fois qu’aucun terme existant- école, courant, théorie, mode, ne parait adéquat pour décrire un ensemble aux contours flous, simplement formalisé il est néanmoins fortement signifiant, d’attitude et de comportements »120.

Un paradigme est une construction théorique faisant l’objet d’une adhésion d’une partie suffisamment significative des chercheurs qui, au sein de la communauté ainsi constituée, partagent le point de vue proposé par le paradigme (Verstraete et Fayolle, 2004).

Selon Kuhn (1962) un paradigme porte deux caractéristiques indispensables: d’une part, il est constitué de découvertes suffisamment notables pour escamoter un groupe cohérent d'adeptes à d'autres formes d'activités scientifiques concurrentes, d'autre part ouvrant des perspectives suffisamment vastes pour fournir à ce nouveau groupe de chercheurs toutes sortes de problèmes à résoudre.

L’entrepreneuriat étant un phénomène complexe il n’est pas possible de le réduire à un seul paradigme pour en cerner ses différentes facettes (Verstraete, 1999 ; Messeghem 2006)121. «Ces caractéristiques s’explique par la très grande diversité observable dans les situations entrepreneuriales et dans la création d’entreprises». C’est pourquoi Steyaert et Hjorth (2003:5) évoquent non pas un entrepreneuriat, mais « un entrepreneuriat multiple et multipliant »122.

Les auteurs divisent le champ de l’entrepreneuriat en quatre paradigmes principaux :  le paradigme de l’opportunité (Shane, et Venkataraman, 2000).

 le paradigme la création de valeur (Ronstad, 1984 ; Bruyat, 1993),  le paradigme l’émergence organisationnelle (Verstraete, Gartner, 1990),  paradigme de l’innovation (Schumpeter, 1935, Carland et al. 1984).

120 Jean Michel Berthelot, épistémologie des sciences sociales. Puf. Paris 2001. P457. 121 1dem 116

99 2.1Le paradigme de l’opportunité (Shane et Venkataraman, 2000)

L’opportunité est définie classiquement comme le « caractère de ce qui est opportun », c’est-à-dire « ce qui vient à propos » (Dictionnaire Larousse). Elle peut être comprise comme "une occasion favorable". Dans le champ de l’entrepreneuriat, cette définition est largement partagée. Stevenson et Jarillo (1990) proposent par exemple de définir l’opportunité comme « une situation future jugée désirable et faisable. Cette situation peut préexister à l’intervention de l’entrepreneur ou être le fruit de son activité. » (p. 23)123

Cette notion d’opportunité a été partagée par de nombreux auteurs dont Schumpeter (1935), Casson (1982), Knight (1988) et Bygrave et Hofer, pour ne citer que ceux-là, qui se sont intéressés à la perception et l’exploitation des opportunités de marché en tant que fonctions principales caractérisant les entrepreneurs.

Ainsi, pour Schumpeter (1935), l’essence de l’entrepreneuriat se situe dans la perception de l’exploitation de nouvelles opportunités dans le domaine de l’entreprise. C’est aux caractéristiques commerciales des opportunités que s’intéresse Kirzner (1979) et aux possibilités de profit qu’elles permettent, rendues possibles par l’information disponible et la vigilance de l’entrepreneur. Il est essentiellement arbitre.

Bygrave et Hofer (1991, p 14) utilisent la notion d’opportunité pour définir l’entrepreneur et considère que l’entrepreneur est une personne qui perçoit une opportunité et qui crée une organisation pour la poursuivre.

La notion d’opportunité fait l’objet d’un regain d’intérêt dans le domaine de l’entrepreneuriat (Chelly, 2006). Cet engouement conduit certains auteurs à parler de paradigme (Shane et Venkataraman, 2000 ; Verstraete et Fayolle, 2004)124.

Shane, S.Venkataraman,125 définissent l’entrepreneuriat comme un « processus par lequel, des opportunités à créer des produits et des services futurs sont découvertes, évaluées et exploitées. » (Shane et Venkataraman, 2000, p. 18).

123 K. Messeghem, L’entrepreneuriat en quête de paradigme : apport de l’école autrichienne. L’internationalisation des PME et ses conséquences sur les stratégies entrepreneuriales 25, 26, 27 octobre 2006, Haute école de gestion (HEG) Fribourg, Suisse. P.2.

124 Ibid. 158.p.2.

125 Shane, S., Venkataraman, S. (2000): “The promise of entrepreneurship as a field of research”. Academy of Management Review, vol. 25, n° 1,2000, p. 217-226.Dans J E Hernandez, l’entrepreneur comme initiateur d’un projet complexe. L’harmattan 2001.p.76.

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Pour Shane et Venkataraman (2000) la création d’activités "n’est que" le résultat de la découverte, de l’exploration et l’exploitation d’une opportunité. Ils proposent de ce fait d’inscrire le concept d’opportunités au cœur de toute approche entrepreneuriale.

Cette définition regroupe, en son sein, différentes notions pouvant être abordées séparément. Nous pouvons ainsi la décomposer et traiter séparément. La découverte d’opportunités, la création de nouveaux produits et donc les nouveaux marchés qu’elle induit sous un qui consisterait à étudier l’exploitation de celles-ci. La réunion de ces éléments engendreront naturellement des changements tant au niveau économique que sociale. Selon Verstraete et Fayolle (2005)126, les propositions de Venkataraman (1997) et de Shane et Venkataraman (2000) marquent sans doute une rupture. En proposant de refonder le champ de l’entrepreneuriat dans une perspective gestionnaire autour de « l’analyse académique et de la façon dont sont découvertes, créées et exploitées les opportunités de mettre sur le marché de nouveaux biens et services, par qui et avec quelles conséquences (Venkataraman, 1997, p. 120 ; Shane et Venkataraman, 2000, p. 218).

Le paradigme de l’opportunité d’affaires tient son origine du marketing en vue de répondre à des besoins non encore satisfaits sur le marché (Kirzner, 1973 ; 1979 ; 1997), engendrant un réel regain d’intérêt pour celui-ci dans le domaine de l’entrepreneuriat (Chelly, 2006)127. Venkataraman (1997) a mis l’accent sur deux prémisses : l’un faible et l’autre fort du modèle entrepreneurial qui l’a proposé.

 La première prémisse jugée faible, voie que la plupart des marchés sont inefficients et que ces inefficiences offrent aux individus qui les repèrent et qui les exploitent des opportunités de profit,

 la deuxième prémisse réputée forte affirme que même si le marché s’approche d’un état d’équilibre, la condition humaine de l’entreprise combinée à la tentation du profit et l’avancée des connaissances et des technologies détruira l’équilibre tôt ou tard. Cette prémisse va de pair avec le processus de destruction créatrice décrit par Schumpeter (1979), pour qui, l’opportunité n’est pas à détecter mais à créer. Ainsi, l’opportunité est perçue différemment selon que l’on se situe dans la perspective objective ou subjective. Du premier

126Didier Chabaud, Karim Messeghem. Le paradigme de l'opportunité Des fondements à la refondation. Revue française de gestion. 2010/7 n° 206 | pages 93 à 112. P.94-95.

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point de vue, l’opportunité existe en dehors de l’individu et ce dernier n’aurait plus qu’à la découvrir. Dans la seconde (subjective) cette découverte dépendra des capacités de chaque individu. Chaque personne réagira en fonction de ses connaissances, de sa propre perception et interprétation d’un évènement. Ainsi une opportunité émergera lorsqu’un individu sera capable de la détecter et en manifestera l’intérêt. Le subjectif peut être mis en relation avec une notion importante ; la vigilance (alertness) exprimé par kirzner.

Dans les deux cas, cette notion renvoi à un dialogique, au sens de Bruyat, entre individu et opportunité. Que cette dernière soit créée ou découverte, il est impossible de dissocier ces deux éléments. En effet, une opportunité est perçue comme telle que si elle est découverte et exploité. Ainsi, certains auteurs s’intéresseront uniquement à l’une des trois phases cité par Shane à savoir : détection, évaluation et exploitation alors que d’autres au contraire étudieront l’ensemble de ces étapes dans le cadre d’une approche processuelle de l’entrepreneuriat.

Shane et Venkataraman (2000) ont tenté de comprendre pourquoi les individus ne percevaient pas de la même façon les opportunités. Ces auteurs se posent alors la question de l’acquisition des informations réparties non uniformément entre les acteurs et des capacités cognitives propres à chaque individu (pour une utilisation efficiente de l’information). Ils en concluent que cette différence est liée à deux facteurs :

1) l’information permettant la découverte de l’opportunité, 2) la possession de propriétés cognitives.

Dans cette perspective, nous retrouvons la fonction entrepreneuriale décrite par kirzner et qui consiste à découvrir des opportunités déjà existantes qui conduira à l’équilibre des marchés. Nous relevons, que cet auteur ne donne pas de précision quant à l’origine de ces opportunités.

Messeghem et Chabaud (2010) et Messeghem et Sammut (2011)128 proposent de distinguer au sein de ce paradigme cinq principaux courants que nous présentons dans le tableau suivant :

102 Tableau 9 : Paradigme de l’opportunité et courant de la recherche en entrepreneuriat

Courants/Ecole Auteurs Prise en compte de l’opportunité

Ecole économique Schumpeter, kirzner La poursuite d’opportunités réalisées par un entrepreneur dont la fonction est de contribuer à l’équilibre des marchés.

Ecole des traits ou école de psychologie

Mcclelland Certains traits peuvent favoriser la capacité de l’entrepreneure à percevoir l’opportunité et influencent leur proportion à l’exploiter : self efficacy, locus off contol…

Ecole de la décision aux écoles cognitive

Shapero, krueger Quels sont les processus mentaux qui conduisent à identifier ou créé et à exploiter des opportunités ? Ecole du processus ou du

comportement

Gartner Cette école concerne le processus d’émergence organisationnelle qui accompagne la découverte et l’exploitation de l’opportunité

Ecole de l’organisation entrepreneuriale

Stevenson, Burgelman, Miller

Comment des organisations existantes parviennent elles à identifier ou créer et à exploiter des opportunités ?

Source : K. Messeghem, les grands auteurs en entrepreneuriat, 2015, p 6.

T Lebègue129 precise que De Bruin et al, (2007), De Tienne et Chandler (2007), et Anna et al. (2000), ont, séparément, tenté de savoir si les hommes et les femmes se comportaient de façon similaire face à la l’identification d’opportunités. Il s’avère selon De Bruine et al. (2007) que les perceptions de soi des femmes peuvent contribuer à réduire leur perception des opportunités. De Tienne et Chandler (2007) affirment que les hommes et les femmes ont un processus différent d’identification des opportunités. Anna et al. (2000) Suggère que « les femmes se trouvant dans les secteurs traditionnels (secteurs dans lesquels figurent la majorité des entrepreneures) seraient davantage motivé par des opportunités présentées par leur situation personnelle plutôt que par un processus de recherche délibéré.

En effet lors d’un entretien avec l’une des femmes que nous avons rencontré, la décision de créer son entreprise est liée à une anecdote sur le lieu de travail que nous décrivons dans l’encadré suivant :

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- 0pportunité et entrepreneuriat féminin

Cette femme ingénieure en génie civil, employée dans une entreprise étatique dans le bâtiment et travaux publics depuis plus de cinq ans, travaille avec un collègue dans un même bureau. Un jour ils reçoivent un homme venu régulariser un dossier de construction pour le compte d’un client. Ils prennent en charge le dossier et une fois cette personne partie son collègue se tourne spontanément vers elle et lui dit :

Tu as vu cet homme, quand il est rentré tu pensais qu’il était responsable d’un bureau d’étude…. Il ne parle même pas correctement. tu penses que nous, on ne serait pas capable de monter notre propre bureau d’étude ? Elle rit et lui répond :

- j’ai pensé la même chose… avec notre diplôme, notre expérience et nos relations c’est largement faisable ! on a besoin d’un local et du courage pour quitter notre travail et nous lancer à notre compte. J’ai dit çà mais je ne pensais pas qu’il était sérieux. il me regarde et me dit :

- on s’associe et on crée notre propre agence ? Je lui réponds : tu es sérieux ? - très sérieux,

- je me suis dit pourquoi pas, c’est le moment opportun de créer sa propre entreprise. Cette femme à crée, en s’associant, sa propre entreprise en saisissant une opportunité et c’est orienté vers une nouvelle carrière dans laquelle elle excelle jusqu’à présent. Identifier une opportunité, la saisir et la concevoir en projet qui à son tour conduira à l’émergence d’une entreprise et permettra la création de valeurs nouvelles. Ce n’est qu’au terme de ces étapes que "l’opportunité" acquière toute sa "valeur". Si tel n’est pas le cas alors elle cesse d’exister. Une opportunité saisie peut dans un premier temps conduire à la création de nouvelle valeur, mais l’évolution des besoins des consommateurs et l’existence d’une concurrence farouche peut au bout d’un certain temps lui faire perdre tout son intérêt. La modifier et l’adapter ou l’abandonner tel sera le choix auquel sera confronté l’entrepreneur.

Il devra faire appel à sa perspicacité et/ou son imagination pour se maintenir sinon il disparaitra.

2.2Le paradigme d’émergence organisationnelle

Le processus d’émergence d’une organisation focalise essentiellement le processus d’apparition d’une organisation. Au départ, l’organisation existe en pensée et lorsque les conditions nécessaires à son

104 démarrage sont réunies, le processus d’émergence organisationnel est réalisé. L’émergence organisationnelle ou la naissance d’une nouvelle organisation renvoi à l’ensemble des activités qui conduisent à la création d’une entreprise nouvelle. Gardner en est le précurseur et fédère de nombreux auteurs atour de ce paradigme dont verstraete (2000), (Hernandez, 2001).

 WB. Gartner : la création d’une nouvelle organisation.

La première approche est celle William B. Gartner (1985)130 qui définit l’entrepreneuriat par la création d’une nouvelle organisation.

On doit à B. Gartner (1988) d’avoir totalement renouvelé cette approche. Celle-ci se dessine suite à une enquête qu’il réalise auprès d’expert portant sur la définition du mot entrepreneuriat. Deux groupes en ressortent :

 ceux qui mettent l'accent sur les caractéristiques de l'entrepreneur,  et ceux qui se préoccupent du résultat de leur action.

La création d’organisation est le thème qui fédère les deux groupes. Les réflexions de cet auteur, avec le texte s’intitulant : « whos is an entrepreneur ? Is the wrong question », constituent les prémisses de l’approche processuelle. Il critique de l’approche par les traits, qui stipule que les entrepreneurs ont des caractéristiques, principalement psychologiques, les distinguant du reste de la population. Il propose de cesser de focaliser sur la personne de l’entrepreneur pour s’intéresser à son comportement (Behavioral approach)131 et aux activités lui permettant de créer une nouvelle organisation.

Partant du postulat selon lequel « Nous sommes ce que nous faisons » (Gartner 1993, p 238), l’auteur montre que ceux qui créent une organisation sont des entrepreneurs et ceux qui n’en créent pas, ne le sont pas. La réponse a le mérite d’être sans ambiguïté.

Pour Gartner, l'apparition d'une nouvelle organisation est la conséquence d'un processus d'émergence organisationnelle. Il signale par ailleurs qu'il n'y a pas un processus mais des processus d'émergence du fait de l'extrême diversité des situations amenant à la création de nouvelles organisations.

Quatre pôles servent de points cardinaux à ce cadre conceptuel : l’individu, l’organisation, l’environnement, le processus, décrits dans le schéma suivant.

130 B. Gartner In : E.M.Hernandez, L’entrepreneuriat comme processus d’émergence organisationnelle. , Revue française de gestion 2008/5 (n° 185), p. 90.

131E.M.Hernandez, L’entrepreneuriat comme processus d’émergence organisationnelle. , Revue française de gestion 2008/5 (n° 185), p. 90-92.

105 Graphe 4 : Description de la création d’entreprise132

Ce schéma regroupe le ou les individus auteurs de la création, l’environnement agissant sur la création d’entreprise, l’organisation étant que résultat auquel aboutit le processus entrepreneurial. (Un schéma détaillant chacune des dimensions est présenté en annexes le détail de chaque dimension).

Ce modèle d’entrepreneuriat s’inscrit dans le cadre de la théorie la contingence. En effet Gartner insiste sur la diversité des situations entrepreneuriales ; « la création de nouvelles entreprises est un phénomène complexe : les entrepreneurs et les firmes sont très différentes ; les actions qu’ils mettent en œuvre ou non et les environnements dans lequel ils évoluent sont également divers-et tous ces éléments forment des combinaisons complexes et unique pour la création de chaque nouvelle entreprise ». (…) il estime que la différence entre entrepreneurs est supérieure à celles existant entre entrepreneurs et non entrepreneurs (Gardner 1985, p 697)133.

L’entrepreneuriat comme un processus complexe, contextualisé, soumis à l’influence de nombreux facteurs nécessite la mobilisation de ressources et de compétences afin de concrétiser une opportunité. L’idée se transforme en projet puis le projet se concrétise donnant naissance à l’organisation, entité juridique indépendante. L’acte de création d’entreprise cesse d’être perçu comme un moment figé dans le temps. Les chercheurs utilisent, désormais, des notions qui font références à la dynamique de l’action telle que

132B. Gartner, (1985, p698), dans : E.Garcia, F.Hernandez, T. Verstraete, les grands auteurs en entrepreneuriat, EMS, 2015, p 275.

133 Gartner, 1985, dans : Emil Michel Hernandez, Entrepreneuriat approche théorique. L’harmattan, 2001.p75.

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‘’émergence de l’organisation’’ ou ‘’impulsion’’ avec Verstraete (2001) que nous présenterons dans ce chapitre.

Toute fois nous constatons que la réflexion de Gartner ne s’étend pas au-delà de l’acte de création d’une entreprise, ce qui ne nous permet pas de traiter dans son cadre de la pérennité de celle-ci.

 T Verstraete (2001)134 :

La dialectique entrepreneur /organisation une approche du phénomène entrepreneurial que l’organisation ne peut exister sans celui qui l’a créée, et inversement, un individu ne peut être qualifié d’entrepreneur que lorsqu’il crée son entreprise.

« Le terme «organisation» est polysémique. L'organisation intègre une dimension dynamique : elle peut être comprise comme l'action d'organiser et de structurer les éléments qui nous entourent (et dont nous faisons partie), ou alors comme le résultat de cette action »135. La dynamique se manifeste par une succession d’actes ou d’actions donnant naissance à l’organisation, et ce, dans un intervalle de temps qui dépendra des contraintes rencontrées et des aptitudes de chaque entrepreneur. L’ensemble de ces actions induiront des changements (économiques et/ou sociaux) pour l’entrepreneur et son environnement.

Verstraete mobilise la notion "d’impulsion" quand il fait référence à l’acte entrepreneurial. S’il choisit ce terme, c’est que « dans son essence, l’entrepreneuriat apparaît inséparable de la création d’une dynamique »136. Lorsque l’entrepreneur n’impulse plus son organisation (quel que soit la forme et la taille de celle-ci), la dynamique disparait, « la dialectique individu/organisation ne relève alors plus de l'entrepreneuriat »137. Ce qui fait dire à verstraete que l’entrepreneuriat ne peut être réduit à l’entrepreneur.

Verstraete définit l’entrepreneuriat par la relation dialectique entre trois dimensions indissociables mais irréductibles les unes aux autres :

 La première est cognitive (C) : elle renvoie à l’entrepreneur et à ses processus mentaux, à la vision que l’entrepreneur a de l’organisation qu’il envisage de créer. Cette dimension tient compte de ses capacités d’apprentissage, de ses motivations, de ses

134Thierry Verstraete, Entrepreneuriat : Modélisation du phénomène. De Boeck Supérieur | Revue de l’Entrepreneuriat 2001/1 - Vol. 1 p. 5- 23.

135Ibid. 135. p 8.

136T Verstraete, 2001.p.8. 137 T Verstraete, 2001.p.8

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intuitions, de ses attitudes, et de sa trajectoire etc. « Celle-ci découle d’un exercice réflexif permanent des situations d’apprentissage dans lequel l’individu a été placé et de la vision que ce dernier possède de ses affaires (vision stratégique) »138.

 La seconde est praxéologique (P) : elle porte sur l’action. l'entrepreneur impulse ce phénomène en agissant. « celle –ci relève, d’une part, des multiples positionnements de l’entrepreneur et de l’organisation vis-à-vis des concurrents et des parties prenantes diverses et d’autre part de la configuration formée afin de produire les éléments qui permettront l’échange. »

 la troisième structurale (S) : la structure dans laquelle émerge l’organisation, et dont elle fait partie, est composée de variables multidimensionnelles matérielles et immatérielles (machines, évènements, acteurs, normes etc.). « il est important d’appréhender les bastions du système, qu’il s’agisse de règles, convention, représentation, ou encore insertion définissant, en partie, le jeu avec lequel l’entrepreneur doit composer pour emporter l’adhésion des partie prenante et pérenniser l’organisation impulsé »139.

Ces niveaux s’exprimer de façon singulière dans le cas de la relation liant l’entrepreneur (E) et l’organisation (O) que cet entrepreneur impulse. Un individu est donc considéré comme entrepreneur dès qu’il mobilise les trois dimensions citées auparavant. Leur combinaison renvoie à la «vision entrepreneuriale» de l'individu. Celle-ci peut être définie comme une représentation que l'entrepreneur se fait de l'organisation qu'il impulse.

Verstraete propose un modèle composé de trois dimensions suscitées, caractérisant la dialectique entrepreneur/ organisation ; à préciser que pour verstraete une organisation peut être créée par un individu ou un groupe d’individu s’étant associés pour l’occasion.

Ce modèle140 est synthétisé dans le schéma suivant :

138Propositions d’un cas théorique pour la recherche en entreprenariat. Les éditions de l’ADREG. Décembre 2003.p14.

139 Ibid.

108 Figure1 : Modélisation du phénomène entrepreneurial141

Ce model met en relation pour chaque dimension deux niveaux d’analyse l’une théorique, l’autre empirique qui en en explique sa manifestation.

« L’entrepreneur impulse ce phénomène en agissant (dimension praxéologique du phénomène) au sein de la structure dans laquelle il évolue (dimension structurale), pour tenter de concrétiser et de matérialiser la vision (dimension cognitive) qu'il se fait de l'organisation ».142

« A ce titre, les économistes éprouvent désormais davantage la « nécessité d’étendre leur compréhension de l’interaction pour y intégrer le rôle central que jouent les éléments contextuels (…) (affectifs, sociaux) (…). Ces données mettent à jour des évidences issues de réalités extérieures à la logique marchande telles que l’irrationalité, la confiance, la structure

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