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Les différences de fardeau fiscal

1.8 Le fardeau fiscal

1.8.3 Les différences de fardeau fiscal

En regardant, au tableau 5 ci-après, les valeurs du Taux global de taxation uniformisé (TGTU)51, on constate qu’il existe un écart important entre les municipalités de la MRC : entre

Saint-Pierre à 0,67 et Notre-Dame-des-Prairies à 1,87, il y a plus que du simple au double. Par contre, cet écart est beaucoup moins prononcé entre les trois municipalités du cœur de l’agglomération : en effet, pour le trio central, les variations autour du taux de Joliette (100) vont de plus 7 % pour Notre-Dame-des-Prairies (107) à moins 14 % pour Saint-Charles- Borromée (86).

Tableau 5

Le taux global de taxation uniformisé

des municipalités de la MRC de Joliette pour 2002

TGTU TGTU relatif, avec comme base, Joliette = 100 Joliette 1,74 100 Saint-Charles-Borromée 1,49 86 Notre-Dame-des-Prairies 1,87 107 Saint-Paul 1,27 73 Saint-Ambroise-de-Kildare 0,97 56 Crabtree 1,45 83 Saint-Thomas 1,09 63 Sainte-Mélanie 1,16 67 Notre-Dame-de-Lourdes 1,15 66 Saint-Pierre 0,67 39

Qu’est-ce que cela signifie en soi ? Que peut-on en conclure ? Pas grand-chose.

Tout d’abord le TGTU tient compte notamment des sommes que perçoit la municipalité pour rembourser un emprunt; donc, ce taux fait bien paraître les municipalités qui empruntent peu parce qu’elle reportent directement sur les propriétaires la responsabilité de financer les infrastructures, au détriment de l’image des municipalités qui procèdent de façon traditionnelle et qui empruntent en remboursant au fil des ans à même des impôts de secteur (améliorations locales) ou des impôts généraux.

Or, la mode est à un endettement municipal de plus en plus limité. C’est au goût du jour même si, pour cela, il faut recourir à toutes sortes de stratégies pas nécessairement plus avantageuses pour le contribuable. Ainsi, lorsque la municipalité oblige le promoteur ou le constructeur d’une maison à assumer le coût de nouvelles infrastructures, ce coût sera incorporé au prix payé par l’acheteur; celui-ci devra donc financer le coût des infrastructures de la même façon qu’il finance les autres coûts plus directs. On s’entend : peu importe comment, c’est toujours le même acheteur de maison neuve qui finit par payer. Mais c’est tout de même différent si c’est via un impôt ou si c’est en intégrant le coût des infrastructures à la somme déboursée à l’achat et, en fin de compte, en augmentant d’autant la mise de

fonds ainsi que, éventuellement, le montant de l’emprunt hypothécaire52.

Certains consommateurs, qui en ont les moyens, préfèreront payer le maximum tout de suite pour réduire ensuite les déboursés annuels, sans que cela ne soit financièrement plus avantageux. On comprend que des retraités, par exemple, estiment que la meilleure utilisation possible pour leur argent, c’est d’éliminer toutes leurs dettes.

Mais il faut se rappeler que, du point de vue du calcul financier à moyen et long terme, il importe assez peu que l’achat soit reporté sur un prêt hypothécaire ou payé comptant; en effet, le prêt implique un paiement d’intérêts sur le capital mais, dans le second cas, l’argent déboursé tout de suite n’est pas « gratuit » non plus (et, à moyen terme, les différences de « coûts » ne sont pas énormes); car, en utilisant ses économies pour payer un investissement comptant comme une maison, on se prive de pouvoir faire d’autres investissements qui auraient éventuellement été rentables, renonçant ainsi à autant de dividendes, d’intérêts et de gain en capital. Mais ce qui est crucial ici, c’est de constater que le loyer de l’argent sera toujours plus cher pour un individu que pour une municipalité, car, du point de vue du prêteur, il y aura toujours un moins grand risque à prêter à une collectivité qui a le pouvoir de lever des impôts pour rembourser ses emprunts : quand chacun des propriétaires se présente individuellement pour financer l’achat de sa maison, y compris le coût des infrastructures, il est assuré que le taux d’intérêt exigé de chacun sera plus élevé que le taux d’intérêt si l’emprunt est collectif et que c’est la municipalité qui contracte un emprunt sous sa responsabilité. Mais si la municipalité emprunte et lève ensuite des impôts pour le remboursement, son TGTU augmente et, du coup, elle paraît plus rapace que sa

52 Soit dit en passant, lorsque cette pratique – de l’incorporation du coût des infrastructures au prix de la maison

– est adoptée par certaines municipalités et non par d’autres, ou encore pour certains secteurs en construction et non pour d’autres, elle pourrait avoir le même effet que certaines stratégies discrètes de zoning out; en effet, dans la mesure où cela renchérit le prix payé à l’achat, dans la mesure où cela fait augmenter le montant emprunté, cela revient à écarter certains acheteurs de maison neuve qui ne disposent que de la mise de fonds minimale, calculée en pourcentage du prix payé, et qui empruntent déjà au maximum de leur capacité de remboursement : qu’ils aillent se faire bâtir ailleurs ! Les choses sont un peu différentes aux États-Unis et en Ontario, par exemple, dans la mesure où cette pratique est généralisée : on y trouve donc parfois des quartiers de maisons modestes construits sur ce mode, mais la conséquence générale est qu’on oriente l’implantation de familles modestes dans les quartiers centraux ou dans les maisons existantes de quartiers de banlieue relativement plus anciens.

voisine qui lève moins d’impôts, mais qui oblige tout un chacun à se débrouiller seul avec sa part à financer53.

Comme on l’a vu, la variabilité de la gamme des services assurés par la municipalité et payés par les impôts d’une part et, d’autre part, les grandes différences quant à la composition de l’assiette foncière, font en sorte que presque toutes les comparaisons ne mènent à rien d’autre qu’à constater un fait : les municipalités sont toutes différentes et difficilement comparables. Saint-Pierre peut compter sur une entreprise dont les impôts fonciers couvrent à eux seuls une très importante part du budget municipal et la municipalité offre par ailleurs bien peu de services : oh surprise ! peu importe comment on le calcule, son effort fiscal est très faible.

Généralement, les municipalités plus rurales n’offrent pas – certainement pas sur tout leur territoire – les mêmes services que les plus urbaines. La plus grande similitude dans les offres de services des trois municipalités du cœur de l’agglomération explique peut-être leur relatif rapprochement; encore que cette similitude est loin d’être parfaite (trottoirs, éclairage de rue, déneigement, etc.) et le rapprochement entre les trois plus urbaines représente plutôt un éloignement commun du groupe des sept municipalités plus rurales.

Mais comment expliquer la différence entre deux municipalités assez semblables comme Notre-Dame-des-Prairies et Saint-Charles-Borromée ? Le plus faible taux de la seconde s’explique en très grande partie par la compensation tenant lieu de taxes versée pour le compte de l’hôpital : à lui seul, il procure à la municipalité un beau million, soit près du sixième des dépenses de fonctionnement. Est-il bien nécessaire de poursuivre l’explication de l’écart entre les deux municipalités plutôt semblables sur bien d’autres plans ?