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Diagnostic

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Chapitre 1 : Les hyperoxaluries primitives

D. Diagnostic

A cause de la rareté de la pathologie, les cliniciens ne rencontrent que peu de patients (voire aucun) atteints d’hyperoxalurie primitive au cours de leur exercice professionnel. A cela s’ajoute la présentation clinique hétérogène d’une atteinte du système urinaire peu caractéristique, le tout ayant pour conséquence une absence ou un retard de diagnostic de l’hyperoxalurie primitive, et une sous-estimation de l’incidence de ce type de pathologie. Pourtant, un diagnostic précoce de la PH1, nécessaire à la mise en place de solutions thérapeutiques adaptées, est crucial pour préserver la fonction rénale des patients. D’après les cliniciens, les hyperoxaluries primitives devraient être investiguées chez tous les patients présentant une néphrocalcinose et des calculs rénaux répétés, après avoir écarté les causes les plus fréquentes de ces manifestations. Elles devraient également être envisagées dans toutes les formes familiales de calculs et dommages rénaux de cause inconnue2,31,71.

Un algorithme décisionnel a été publié par Edvardsson et al. en 201371 pour

guider le diagnostic des différentes formes d’hyperoxalurie primitive (Figure 8). Les analyses évoquées seront ensuite détaillées individuellement.

Figure 8. Algorithme décisionnel pour le diagnostic des hyperoxaluries primitives (d’après Edvardsson et al., 2013)71.

1. La pathologie rénale chronique est définie par un DFG inférieur à 50mL/min/1,73m², ou une concentration sérique en créatinine supérieure ou égale au double de sa valeur normale pour un âge

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déterminé.

2. Cet algorithme ne s’adresse pas au diagnostic prénatal.

3. Les valeurs des ratios urinaires oxalate/créatinine (UOx/Cr) varient avec l’âge. Les valeurs de référence doivent être consultées avant toute interprétation

4. Les mesures des taux d’oxalate urinaire et plasmatique, et de glycolate urinaire devraient être réalisées avant toute administration de pyridoxine ou autres suppléments vitaminiques.

5. Une augmentation du taux de glycolate et de L-glycérate urinaire est évocatrice, mais non diagnostique de la PH1 et de la PH2, respectivement.

6. Les ratios urinaires UOx/Cr sont plus élevés chez les nourrissons prématurés que chez ceux nés à terme, en particulier lorsque les prématurés reçoivent une nutrition parentérale contenant des acides aminés.

7. Lorsqu’un régime très riche en oxalate ou carencé en calcium est suspecté en tant que cause de l’hyperoxalurie, le régime devrait être corrigé avant de réaliser une nouvelle mesure du taux d’oxalate urinaire, pour vérification.

Abréviations : CaOx, calcium-oxalate ; UOx, taux d’oxalate urinaire ; UOx/Cr, ratio urinaire oxalate/créatinine.

Analyse de l’urine

Une élévation du taux d’excrétion urinaire d’oxalate > 0,5 mmol/1,73 m²/24h, soit typiquement > 45 mg/24h, est caractéristique des hyperoxaluries primitives5,10.

Chez les patients atteints de PH1, la surproduction d’oxalate par le foie est telle que des taux d’excrétion urinaire > 1 mmol/1,73 m²/24h sont atteints, tandis que des taux plus faibles sont retrouvés chez les patients souffrant de PH2 et PH3. Chez les enfants, où il est plus difficile de réaliser une collecte d’urine sur 24h, le calcul du ratio oxalate/créatinine peut être utile pour estimer l’excrétion d’oxalate sur des échantillons d’urine prélevés au hasard dans la journée. Une augmentation de l’excrétion urinaire du glycolate peut également être détectée chez environ 2/3 des patients atteints de PH1 ; la mesure d’un taux urinaire normal de glycolate ne constitue donc pas un critère d’exclusion du diagnostic de la PH1. Des valeurs de référence ont été établies pour les taux d’excrétion urinaire d’oxalate, de glycolate et de L-glycérate, en fonction de l’âge des individus (Tableau 1).

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Tableau 1. Valeurs de référence des taux d’excrétion d’oxalate, de glycolate et de L-glycérate en fonction de l’âge des patients (d’après Harambat et al., 2011)11. Un taux urinaire de L-glycérate

supérieur à la normale est indicatif de l’hyperoxalurie primitive de type 2.

Mesure de l’oxalate plasmatique

L’excrétion urinaire d’oxalate peut être faible chez les patients dont le DFG est diminué : l’oxalate non filtré est retenu dans les reins puis dispersé dans les autres organes. Dans ce cas, le diagnostic peut être renforcé par une mesure du taux d’oxalate plasmatique, dont une valeur > 50 μmol/L est très évocatrice de la PH12,72.

Analyse des cristaux

La cristallurie et la spectroscopie infrarouge présentent un intérêt majeur pour l’identification et l’analyse quantitative des cristaux et des calculs (whewellites de sous-type Ic) (Figure 9), qui sont presque exclusivement constitués d’oxalate de calcium monohydraté11. Une échographie et une biopsie rénales peuvent également

être indicatives, révélant la présence d’une néphrocalcinose et de granulomes macrophagiques entourant les dépôts d’oxalate de calcium73. Dans les cas les plus

sévères, la détection de granulomes osseux et de cristaux d’oxalate de calcium répartis dans la rétine peuvent permettre d’établir un diagnostic définitif.

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Figure 9. Analyse des cristaux oxalo-calciques (d’après Harambat et al., 2011)11. (A) Examen

microscopique de l’urine montrant des cristaux d’oxalate de calcium monohydratés. (B) Le sous-type Ic de whewellite, de couleur claire, est caractéristique des hyperoxaluries primitives.

Mesure de l’activité enzymatique

La mesure de l’activité catalytique de l’AGT à partir d’un échantillon de biopsie hépatique a longtemps été considérée comme le diagnostic de référence de la PH1. Elle se caractérise en effet par une sensibilité >95%74 bien que la détection de faux négatifs

soit envisageable, notamment dans le cas de protéines AGT présentant une activité intrinsèque significative mais qui s’avèrent non fonctionnelles in vivo à cause d’un adressage erroné vers la mitochondrie47. Une partie de la biopsie de foie peut alors être

utilisée au cours d’analyses d’immunohistochimie, afin de vérifier la localisation subcellulaire de la protéine AGT.

Analyse génétique

Actuellement, une approche alternative moins invasive que la biopsie hépatique, consistant en un séquençage du génome des patients, est en développement constant et supplante la biopsie en tant que diagnostic de référence. Cette approche permet de détecter les éventuels polymorphismes et mutations des gènes responsables de la survenue des hyperoxaluries primitives (AGXT pour la PH1, GRHPR pour la PH2 et

HOGA1 pour la PH3) chez les cas cliniques suspectés. Elle est également utilisée pour

le diagnostic prénatal de ces pathologies, ainsi que chez les membres de la famille d’un patient diagnostiqué. Chez les patients pour lesquels cette analyse ne permet pas d’identifier la mutation causale (environ 11% des cas suspectés d’hyperoxalurie primitive, d’après une étude de 201515), la mesure de l’activité enzymatique à partir

d’une biopsie hépatique est requise pour poser le diagnostic définitif, en pouvant toutefois être complétée par un séquençage étendu du génome pour tenter d’identifier le variant génique morbide.

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