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Partie 1 : Cadre de référence

3. Chapitre 3 : Structure de la rencontre parent-professionnel

3.4. Une deuxième orientation : le soutien à la parentalité

3.4.1. Historique et émergence d’une préoccupation

Le soutien à la parentalité trouve ses racines dans des actions liées au fonctionnement des

pouponnières, à partir des années 1970. Ces actions étaient formalisées sur le plan local dans

un premier temps. Il y a ensuite eu une volonté de l’Etat de sensibiliser les professionnels du

secteur social aux carences que peuvent développer les enfants ainsi qu’aux troubles de

l’attachement. Le soutien à la parentalité s’institue dans une visée préventive

et a pour but de soutenir non pas les parents mais leur accession à la parentalité : « on soutient les parents dans leur distance plus ou moins grande à l’égard de la parentalité qu’ils sont censés réaliser » (Karsz, 2004, p. 117). Pour Pioli (2006), le soutien à la parentalité a émergé dans les années 1980 en se rattachant

aux réseaux administratifs en charge des pouponnières. En 1988, et dans le même cadre de

recherche des « journées techniques nationales », la thématique abordée est celle des parents.

Parallèlement, un groupe de recherche de la Direction Générale de l’Action Sociale (DGAS) se

crée et s’intéresse aux parents et aux jeunes enfants « en situation de rupture et d’isolement ».

Le soutien à la parentalité s’institutionnalise peu à peu mais de manière sectorielle : il n’est

abordé que dans des lois relatives à un lieu donné (crèche, hôpital, PMI, etc.). Les

représentations des parents évoluent et passent d’un parent "fautif" à un parent "victime", qu’il

faut aider. C’est ainsi que les pratiques de suppléance deviennent des pratiques de coopération

qui mobilisent davantage les parents. En 1994, un autre groupe dirigé par Houzel effectue des

recherches sur la parentalité et publie leurs résultats

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. Cette même année, grâce à une volonté

interministérielle, apparaissent les Réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents

(REAAP). Il regroupe un réseau départemental d’acteurs et d’institutions concernés par la

thématique de la parentalité.

Le soutien à la parentalité qui était alors inclus dans des préoccupations spécifiques à un

contexte donné devient, à la fin des années 1990, une thématique à part entière. Selon la FNARS

(2009), le soutien à la parentalité représente « toute forme d’aide ou d’intervention émanant des

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pouvoirs publics et des associations mandatées, visant à accompagner/aider les parents à

éduquer leurs enfants et à subvenir à l’ensemble de leurs besoins éducatifs, affectifs, scolaires,

culturels, sociaux et sanitaires ». Cette définition met en avant l’implication de l’Etat dans le

soutien à la parentalité. Nous retrouvons cette évolution à travers la législation en faveur de la

parentalité : il y a une pluralité de textes législatifs faisant référence à ce concept (FNARS,

2009). Cependant, le soutien à la parentalité en tant que tel n’est pas clairement explicité dans

une loi.

3.4.2. Le soutien à la parentalité : une politique publique ?

Une politique publique se traduit par des actions contextualisées qui vont freiner, transformer

ou adapter un domaine de la société en particulier. Mény et Thoenig (1989) définissent cinq

éléments qui, selon eux, déterminent l’existence d’une politique publique : elle est constituée

d’un ensemble de mesures concrètes, a un aspect coercitif, s’inscrit dans un cadre général

d’action, s’adresse à des publics (individus, groupes, organisations…) et a des buts ou des

objectifs à atteindre. En termes de fondements, la visée de la politique de soutien à la parentalité

est universaliste et au bénéfice de tous les parents en difficulté durable ou passagère et leurs

enfants. On dénombre six dispositifs d’action en faveur du soutien à la parentalité

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:

- les réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents (REAPP) ;

- les lieux d’accueil enfants/parents (LAEP) ;

- les points info famille (PIF) ;

- les contrats locaux d’accompagnement à la scolarité (CLAS) ;

- la médiation familiale ;

- les espaces de rencontre ;

En ce qui concerne le budget, il y a une évolution notable des fonds accordés au soutien à la

parentalité (cf. figure 15). Sur la période 2008-2012, les fonds nationaux et les fonds locaux en

direction des actions de soutien à la parentalité ont augmenté respectivement de 67,7% et de

2,5%

22

.

21 Sur le site édité par la direction de l'information légale et administrative : www.vie-publique.fr

22 D’après le rapport « Evaluation de la politique de soutien à la parentalité » réalisé par l’inspection générale des affaires sociales en 2013.

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Figure 15 : Evolution des fonds nationaux et locaux pour les actions de soutien à la parentalité entre 2008 et 201223.

De plus en 2013, l’Etat et la CNAF signent une Convention d’Objectifs et de Gestion (COG)

qui a pour objectif de prioriser l’accompagnement des parents dans la politique familiale.

Ces éléments semblent montrer que le soutien à la parentalité s’instaure comme une catégorie

à part entière des politiques publiques. Cependant, Pioli (2006) relève une contradiction dans

les logiques d’action de cette politique. Le soutien à la parentalité peut se traduire par la

valorisation des compétences parentales mais aussi par une logique disciplinaire où le bien-être

recherché n’est pas tant celui de l’enfant mais plutôt la sécurité publique de manière préventive.

Il y a donc une divergence liée au fondement du soutien à la parentalité. Cela indique par

conséquent une incohérence qui est à l’origine des actions de soutien à la parentalité. Aussi, en

étant dans une logique de valorisation des compétences parentales, il est difficile

d’institutionnaliser et d’homogénéiser les pratiques. En effet, la volonté d’individualiser les

pratiques en tenant compte des spécificités des familles implique que les moyens d’actions ainsi

que les finalités ne peuvent être définis globalement. Il y a également une méconnaissance des

actions par le grand public du fait du grand nombre de structures qui lui est dédié et de la

difficile lisibilité de leur rôle. Un rapport du Haut Conseil de la famille (2016) revendique des

efforts en direction d’une meilleure coordination entre les acteurs. Si le soutien à la parentalité

est présent dans la législation française, depuis les années 1980, sa présence est éparse et il n’est

pas institutionnalisé en tant que tel. Des éléments en faveur de la parentalité, se retrouvent à la

fois dans les politiques familiales et les politiques sociales. Les initiatives en faveur de la

parentalité sont encore fortement locales même si elles sont fréquemment, financées par les

institutions étatiques.

23Idem. 0 20000000 40000000 60000000 80000000 2008 2009 2010 2011 2012

Evolution des fonds nationaux et locaux pour les actions

de soutien à la parentalité

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Le soutien à la parentalité est passé d’une préoccupation publique à une politique publique

encore en construction. C’est d’ailleurs ce que relève le rapport du Haut conseil de la Famille

(2016) sur les politique de soutien à la parentalité qui recommande une gouvernance et une

lisibilité plus claire.

L’appellation "soutien à la parentalité" se voit de plus en plus reléguée au second plan au profit

de l’accompagnement des parents. C’est un constat qui apparaît dans la littérature mais

également dans les textes officiels. Malgré une évolution quantitative de l’utilisation du terme

accompagnement dans les textes officiels, ces deux appellations sont utilisées conjointement et

apparemment sans distinction conceptuelle apparente.