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CHAPITRE 2 : Evolution de la méthodologie de

3 Compréhension des mécanismes de défaillance après test de fiabilité: micro-section de composant dans un

3.2 Description de l’étude de cas

L’un de ces tests, le cyclage de puissance, est typiquement utilisé pour évaluer la durée de vie des composants discrets de puissance. Ce test consiste à contraindre thermiquement le composant par cycles. En raison de l’empilement de divers matériaux dans les assemblages qui ont des coefficients d’expansion thermique différents, ces variations de températures génèrent des contraintes thermo-mécaniques dans le composant qui peuvent le dégrader et limiter sa durée de vie opérationnelle. Ce test peut être soit passif, soit actif. Lorsqu’il est passif, le cyclage thermique est réalisé en générant des variations de températures externes au composant. C’est l’environnement qui change de température. Lorsque le test est actif, des impulsions de courant sont appliquées au composant. L’échauffement est alors généré par la diffusion de puissance à l’intérieur de la zone active du composant. Ce deuxième test se rapproche plus de ce que subit le composant durant sa vie fonctionnelle.

Pour modéliser ce type de test, il est crucial d’avoir une base de données initiale, obtenue par la pratique et la bibliographie, et qui identifie les facteurs principaux d’accélération responsables du vieillissement du produit ainsi que les mécanismes de défaillance. Le travail concernant l’influence des paramètres de tests a été réalisé au cours d’une autre thèse [JAC10]. La modélisation de ce type de test a commencé par un produit en particulier : le TRIAC.

Le TRIAC est un composant utilisé pour contrôler l’énergie électrique afin de piloter des applications domestiques comme les aspirateurs, les machines à café, les fours… Ce composant est équivalent à la mise en parallèle de deux thyristors montés tête-bêche. Sa caractéristique courant-tension est présentée dans la figure 64.

A. B.

Figure 64: A. Symbole du TRIAC B. Caractéristique électrique : avec VDRM la

tension directe maximale à l’état bloqué, IDRM, le courant de fuite à la tension

VDRM, VRRM, la tension inverse maximale à l’état bloqué, IRRM, le courant

de fuite à la tension VRRM, et VBO la tension de retournement

Le TRIAC est utilisé pour contrôler le passage des deux alternances d'un courant alternatif . Un exemple de commande est donné dans la figure 65.

A. B.

Figure 65: Exemple de commande en tout ou rien d’un thyristor (A) et d’un

TRIAC (B)

Comme de nombreux composants de puissance, le TRIAC est assemblé dans deux types de boitiers TO-220 : l’un est isolé, l’autre ne l’est pas. La différence entre ces deux assemblages réside dans la présence ou non d’un matériau d’isolation, la céramique, entre la puce et le dissipateur. La structure des deux types de boitier est présentée en coupe figure 66. Chaque niveau est séparé d’un autre par une couche de brasure.

A. B.

Figure 66: TO-220 A. isolé B. non isolé

La couche de céramique composée d’alumine (Al2O3) à 96% fournit une isolation électrique de la puce. Ceci est utile pour des raisons de sécurité (au cas où l’utilisateur final ait accès au dissipateur dans l’application du produit) mais aussi pour des raisons fonctionnelles (si le dissipateur est connecté à un autre potentiel). En effet, pour un assemblage non isolé, la puce est directement connectée au dissipateur alors que dans le cas du boitier isolé, la puce est soudée sur un substrat de cuivre isolé du dissipateur par la céramique.

Pour mettre en place un modèle pour le cyclage de puissance actif, sur ces deux assemblages, divers tests de vieillissement accéléré ont été réalisés, en faisant varier les paramètres de test. Au cours d’un cycle de puissance, des cycles alternés de chauffe (TON) et de refroidissement (TOFF) sont réalisés. Quatre grandeurs caractéristiques peuvent alors être définies (fig.67) [JAC10]:

- le temps de montée (tr) de la température initiale (Tc_low) à la température maximale (Tc_high),

- le temps de palier (PW) à la température maximale, - la température maximale (Tc_high),

Figure 67: Grandeurs caractéristiques d’un cycle de puissance actif [JAC10]

A l’aide d’un banc de test spécifique, il est possible de faire différents tests en faisant varier chacune de ces grandeurs. Il était ainsi possible d’en déduire l’influence de chaque paramètre sur la durée de vie des TRIAC. Nous avons en particulier évalué l’impact de l’excursion de température. Un premier test a été lancé avec ∆Tcase = 60°C qui correspond aux conditions standards d’utilisation du composant et un second test avec ∆Tcase = 113°C, représentant une condition extrême d’utilisation.

Au cours de ces tests, plusieurs paramètres thermiques et électriques ont été contrôlés : Vtm, Irrm et Idrm, Rth(j-c). Parmi ceux-ci, seule la résistance thermique de la jonction au boitier (« junction-to-case thermal resistance »), symbolisée par Rth(j-c), a subi une variation significative. Ce paramètre mesure la résistance qu’offre un composant à l’évacuation des calories entre deux points qui servent de référence de température et qui sont la jonction et un point extérieur au boitier. Dans un boitier type TO-220, c’est le fond du boitier qui est pris comme référence. Cette résistance thermique est déterminée par :

Rthj-c = (Tj-Tc)/Pj-c

avec Tj la température de jonction définie comme la température maximale à la surface de la puce

Tc la température du fond du boitier

Pj-c la puissance totale dissipée de la puce vers le boitier

Le critère de défaillance d’un TRIAC a été défini comme une augmentation de Rth(j-c) de 20% par rapport à la valeur initiale [HEL97]. Ce critère s’appuie sur des normes. En effet, la norme JESD22A105 pour les tests de cyclage de puissance précise qu’un composant est défaillant dans les deux cas suivants :

- le paramètre mesuré évolue de +/- 20 % par rapport à sa valeur initiale - le paramètre mesuré a une valeur supérieure à celle spécifiée par le

constructeur.

Le résultat des tests, avec les deux excursions de température, est donné dans la figure 68. Ce graphe représente le pourcentage cumulé de TRIAC défaillants

(c’est-à-dire dont la Rth(j-c) a augmenté de plus de 20%) en fonction du nombre de cycles réalisés.

Figure 68: Impact de la température d’excursion sur les TRIAC

en boitier TO-220 isolé [AUB11]

Pour pouvoir développer le modèle, il était nécessaire de réaliser les analyses de défaillance dans toutes les configurations de tests de manière à valider le mécanisme généré et son évolution dans la pièce. L’objectif final est de corréler

l’évolution de la résistance thermique Rth(j-c) à une évolution physique du défaut.

3.3 Méthodologie standard et limite

Pour l’analyse de défaillance de ces pièces, la préparation de l’analyse a consisté à comprendre de manière théorique ce qui pouvait se produire dans le composant lors de ces tests.

Les tests standards de cyclage de puissance n’affectent pas les TRIAC au niveau de la puce mais dans l’assemblage. Il est connu que la faiblesse de ces structures vient des joints de brasure, principalement en raison de la différence de coefficient d’expansion thermique entre les différentes couches de la structure, créant des contraintes de cisaillement dans la brasure pouvant mener à la génération de fissures dans cette couche [LIE09].

Un boitier non isolé ne contient qu’un niveau de brasure (entre la puce et le dissipateur), ce qui signifie que les fissures sont attendues dans cette couche.

Un boitier isolé est composé de quatre niveaux de joint. Chacun d’entre eux est sujet à des contraintes de cisaillement pendant le test de cyclage en puissance. D’un point de vue théorique, la contrainte est proportionnelle au gradient thermique dans la structure, à la différence de CTE des matériaux, et à la diagonale de l’épaisseur de la brasure [CIA02].

Conductivité thermique (W.m-1.K-1) @300K CTE (ppm/K-1) Silicium 124 2,6 Céramique 27 6,2 Cuivre (dissipateur) 330 16,8

Cuivre (substrat puce) 436 16,8

Tableau 11. Coefficient d’expansion thermique des différents matériaux de la structure [JAC10]

Comme peut le souligner le tableau 11, la céramique présente une faible conductivité thermique comparativement au cuivre, ce qui génère un fort gradient thermique entre les deux matériaux. De plus, leurs coefficients de dilatation sont différents ce qui crée de fortes contraintes de cisaillement dans les niveaux de brasure entre le cuivre (substrat ou dissipateur) et la céramique. Enfin, si en théorie les deux couches de brasure en contact avec la céramique doivent avoir la même dimension (même épaisseur et largeur), en pratique, la couche située entre le dissipateur et la céramique est plus large et moins épaisse que celle située entre la céramique et le substrat de cuivre de la puce. Cela signifie que la couche de soudure la plus contrainte est celle située entre la céramique et le dissipateur en cuivre [CIA02]. Ainsi, cette couche est la plus faible et sera a priori la plus impactée par les fissures.

Dans le cas du TO-220 non isolé, l’analyse de défaillance va se tourner vers l’étude de la brasure située entre la puce et le dissipateur ; alors que pour le TO-220 isolé, l’analyse se fera sur la brasure située entre le dissipateur thermique et la céramique.

D’après la méthodologie standard présentée au chapitre 1 (fig.12), la première étape de l’analyse consiste à réaliser des contrôles non destructifs. En raison de la théorie expliquée ci-dessus, le microscope acoustique a été utilisé en réflexion par la face arrière du composant. Cette inspection permet d’analyser la couche de brasure située entre le dissipateur et la céramique pour le boitier isolé et la couche entre le dissipateur et la puce pour le boitier non isolé. Les ondes ont alors à traverser moins d’interfaces que par la face avant pour atteindre la zone d’intérêt. De plus, pour un gros boitier comme le TO-220, les ondes n’arrivent pas à traverser toutes les interfaces par la face avant.

Un exemple de résultat de l’imagerie acoustique est donné dans la figure 69 pour un TO-220 isolé. Les divers niveaux de gris de l’image acoustique révèlent un aspect hétérogène du joint de soudure et donc une suspicion de fissures (fig.69).

A. B.

Figure 69: Microscopie acoustique sur un TO220 isolé

A. Sens de l’observation

B. Image acoustique obtenue avec divers niveaux de gris : dans la zone plus claire (entourée en rouge), des fissures sont suspectées

D’après la méthodologie standard (fig.12 chapitre 1), à cette étape (Q2), une micro-section du composant doit être réalisée pour observer le défaut physique à l’origine de ce dégradé de gris présent au niveau de la brasure. De manière standard, cette micro-section est réalisée par polissage mécanique. Cela ne pose aucun problème sur les produits encapsulés dans le boitier non isolé (fig. 70) ce qui permet de conclure rapidement sur ces analyses.

Figure 70: Observation, après polissage mécanique, d’une fissure dans la brasure d’un TO220 non isolé ayant été soumis à un cyclage thermique.

Cependant, dans les assemblages isolés, cette approche s’est avérée non appropriée car aucune fissure n’a pu être observée dans la brasure. Dans cet empilement complexe, les propriétés mécaniques de chacun des matériaux sont très différentes. Ceci génère un vrai défi technique en polissage pour obtenir un aspect correct de la brasure permettant son observation optique.

La couche de brasure à inspecter est située entre le dissipateur en cuivre et la céramique. Or, ces trois matériaux ont une différence importante de dureté (tableau 12), ce qui crée systématiquement des artefacts de polissage (relief, grains insérés), chacun d’eux empêchant l’observation correcte de la couche de brasure.

Puce

Dissipateur thermique en cuivre

Fissure dans la brasure

Matériau Dureté Vickers

Silicium >750 HV

Céramique De l’ordre de 2000 HV

Soudure (PbSb10Sn5) <50 HV

Cuivre 100 HV

Tableau 12. Dureté des matériaux utilisés dans un TO220 isolé

Ainsi, la méthode standard de préparation ne permet pas de caractériser le défaut correctement dans les TRIAC encapsulés dans un TO-220 isolé et c’est pourquoi le développement d’une méthode alternative a été nécessaire.