4.4 Expériences d’oxydation du silicium sous lévitation
4.4.1 Description du dispositif de lévitation électromagnétique de silicium
Dans cette partie, nous décrivons les grandes lignes sur le principe de fonctionnement et les principales
caractéristiques du dispositif SPYCE. Pour une étude détaillée, nous recommandons la thèse de Mickael
Beaudhuin. [Bea09] entièrement dédiée à ce dispositif.
4.4.1.1 La lévitation électromagnétique
Préalablement à la lévitation, il faut que la température de la bille en silicium soit suffisamment
élevée pour que la bille devienne suffisamment conductrice et puisse léviter. Le chauffage de la bille de
silicium se fait par un suscepteur en quartz dans lequel est encapsulée une pastille en graphite chauffée
par induction par les spires inférieures de la bobine. La capsule en graphite va alors chauffer la bille par
rayonnement et par conduction (voir figure 4.5). Notons que la bille n’est pas directement posée sur le
suscepteur mais sur un support en quartz posé sur le suscepteur pour le protéger.
4.4. Expériences d’oxydation du silicium sous lévitation
Figure4.5 – Schéma du montage de lévitation
Le courant alternatif qui circule dans la spire crée un champ magnétique alternatif suivant l’équation
de Maxwell-Ampère :
5 ×B=µ
0j+µ
00
∂E
∂t (4.1)
Un champ électrique est alors créé au niveau de la bille suivant la loi de Maxwell-Faraday :
5 ×E=−∂B
∂t (4.2)
L’expression de la force électromagnétique est la suivante :
F=qE+qv×B (4.3)
Figure4.6 – Evolution de la conductivité thermique (1) et électrique (2) du silicium (source Magomedov
et al. [Mag])
induit dans la bille qui s’oppose aux variations du champ électromagnétique primaire créé par la
bo-bine suivant les équations de Maxwell. La bille en silicium préalablement chauffée va alors monter en
température par effet joule et devenir de plus en plus conductrice puis léviter (voir graphique 4.6).
On voit dans la figure 4.7 que deux séries en sens opposés de spires créent deux champs magnétiques
opposés. La force électromagnétique Fm créée par les spires inférieures compense la force
électroma-gnétique Fm créée par les spires supérieures et la force gravitationnelle Fg ce qui stabilise la bille en
lévitation.
Encore solide au début de la lévitation, la montée en température et en conductivité va se poursuivre
et la bille va ensuite passer à l’état liquide. C’est alors que commence le brassage électromagnétique, effet
mécanique provoqué par les forces électromagnétiques en plus de la lévitation (figure 4.8).
La vitesse maximale en surface de la bille est d’environ 0.5 à 2 m/s selon Mickael Beaudhuin pour
uen vitesse moyenne de l’ordre de 0.2-0.3 m/s [Bea09] (p102), ce qui pour une bille d’environ 1 cm de
diamètre conduit à un temps caractéristique de brassage supérieur à 10
−2set de l’ordre de 5.10
−2s.
Notons que les spires sont faites à partir d’un tube en cuivre à l’intérieur duquel circule de l’eau pour
refroidir les spires sinon les spires fondraient.
4.4. Expériences d’oxydation du silicium sous lévitation
Figure4.7 – Coupe transversale d’une spire avec lignes de courant électrique et lignes de champ
magné-tique, (image faite à partir d’une image de la thèse de Beaudhuin [Bea09])
Figure4.8 – Illustration du brassage électromagnétique à l’oeuvre dans la bille ([Sch09] in [Bea09])
4.4.1.2 Schéma du montage
Le montage de lévitation électromagnétique du silicium est présenté à la figure 4.5.Le mélange gazeux
est injecté par un tube en quartz qui traverse le centre de l’enceinte supérieure jusque vers le haut de la
bobine, et au-dessus de la bille, à environ 1cm de la bille en lévitation, près de l’orifice supérieur de la
bobine. Le quartz a été choisi parce qu’il est non contaminant (il est fait uniquement d’atomes de Si et
de O ce qui dans une atmosphère oxydante n’est pas un problème) et résistant à haute température, ce
qui le protège d’une fonte due au rayonnement de la bille. Le quartz a aussi été choisi parce que c’est un
matériau isolant qui ne sera donc pas affecté par le champ magnétique induit par la bobine (figure 4.5).
Le gaz d’injection passe sous le hublot et disperse les éventuels aérosols au-dessus de la bille. Ainsi le
hublot est protégé de la pollution par des aérosols et la mesure par le pyromètre est permise par l’absence
Générateur CELES, 50KW max, 135kHz, 500A
Pyromètre IRCON 5R1810
Silicium silicium électronique "Wacker polysilicon"
"N>100 Ohm/cm, P>1000 Ohm/cm",qualité 6N
Hublot hublot CF 40 en sapphire , fenêtre 23.8 mm
Débitmètre Ar Brooks SLA 5850S, echelle : 0-1 Nm3/H
précision de la mesure : 1 % de 10% - 100 % échelle
Débitmètre O2 Brooks SLA 5850S, echelle : 0-1 Nm3/H
précision de la mesure : 1 % de 10% - 100 % échelle
Table 4.16 – Liste du matériel utilisé pour les expériences SPYCE
4.4.1.3 Mesure de température par pyromètre bichromatique
Le pyromètre bichromatique IRCON 5R1810 mesure les intensités de rayonnement infrarouge pour
deux bandes : [0.85µm,1.05µm] et [1.0µm,1.10µm].
La loi de Planck donne pour un corps noir, l’intensité radiative enW/m
3I
cn(λ, T) = 2hc
2λ
51
e
λkThc−1. (4.4)
avec h = 6.63
−34J s la constante de Planck, c la vitesse de la lumière, λ la longueur d’onde en m,
k= 1.38×10
−23J/K la constante de Boltzmann, T la température en K.
Pour un corps quelconque, avecl’émissivité :
I(λ, T) =(λ)I
cn(λ, T) (4.5)
Ainsi, en combinant la pente d’émissivité E entre les deux bandes en fonction de la longueur d’onde, qui
correspond au paramètre E-slope de l’appareil, et le rapport de signaux entre les deux bandes, l’appareil
calcule la température.
Notons que le paramètre est rentré par calibration expérimentale, et prend en compte également le
chemin optique à travers le hublot en sapphire dont les propriétés sont décrites à la figure 4.9. On voit
que le sapphire, aux longueurs d’onde données, est largement transparent et que la pente est faible.
Figure 4.9 – Caractéristiques optiques de transmissivité en % du hublot en saphire CF40 en fonction
de la longueur d’onde. Dessus on superpose les deux bandes de mesure d’intensité du pyromètre IRCON
5R1810 : 1 [0.85µm,1.05µm] et 2 [1.0µm,1.10µm]
4.4. Expériences d’oxydation du silicium sous lévitation
4.4.1.4 Dispositif de contrôle des pressions partielles
Le contrôle des pressions partielles d’oxydant dans l’enceinte nécessitent un dispositif étanche dans
lequel on fait au préalable un vide de qualité suffisante avant d’injecter des gaz suffisamment purs à débit
contrôlé.
Afin d’éviter des contaminations par l’air extérieur, il est nécessaire au préalable de faire un vide
suffisant dans l’enceinte. La connaissance de la pression obtenue par pompage à vide permet de plus de
vérifier l’étanchéité du dispositif.
Nous avons utilisé une pompe à membrane pour amener la pression en-dessous de 10mbar. Ensuite
la pompe turbomoléculaire permet de créer un vide de l’ordre de 10
−2−10
−3mbar, valeurs élevées pour
un vide secondaire mais qui suffisent pour l’application dont nous avons besoin. Il suffit en effet que ces
pressions partielles soient faibles devant les pressions partielles de gaz réactifs à l’injection.
La pompe à membrane fonctionne avec des membranes qui oscillent, aspirant l’air dans une chambre
puis le comprimant et l’expulsant. Une pompe turbomoléculaire fonctionne avec des disques à ailettes
en rotation qui entrainent les molécules de gaz par paliers successifs jusqu’à expulsion. La pompe
tur-bomoléculaire ne peut commencer à fonctionner que lorsque la molécule a le temps d’être entrainée par
les ailettes avant d’entrer en collision avec une autre molécule, donc uniquement à pression suffisamment
basse.
Ensuite, une fois un vide préalablement établi, on injecte le mélange de gaz immédiatement après
avoir coupé la pompe turbomoléculaire ainsi que les instruments manométriques adaptés aux mesures
de vide afin de les protéger. C’est quand la pression dans l’enceinte approche la pression atmosphérique
qu’on coupe ensuite la pompe à membranes. Le contrôle des pressions partielles des gaz respectifs autour
de la bille se fait par le contrôle des débits à l’injection à travers de débitmètres Brooks SLA 5850S pour
l’argon et Brooks SLA 5850S pour O2 (voir tableau 4.16 pour les détails concernant la précision).
4.4.1.5 Le refroidissement de la bille
Le refroidissement de la bille peut se faire de plusieurs manières. Lorsque la bille lévite dans du
vide (pour des types d’expérience précédant l’étude actuelle), on va injecter de l’hélium pour refroidir
rapidement la bille. Le choix de l’hélium se fait du fait de sa très grande diffusivité (gaz monoatomique de
très faible masse molaire), de sa très faible densité (gaz parfait de faible masse molaire )pour une capacité
calorifique (C
p=
∂H ∂T
P
=
52
nR) proche de celle des gaz parfaits diatomiques (C
p=
∂H ∂T
P
=
72
nR) qui
permet des transferts thermiques rapides sans déséquilibrer la bille hors de sa zone de lévitation. Ainsi la
bille peut se solidifier lorsqu’elle est encore en lévitation, ce qui aide à la récupérer entière, sans qu’elle
se colle à des parois si sa chute se produisait à l’état liquide.
Toutefois , pour les expériences de lévitation de la bille sous jet oxydant, nous verrons plus loin que
si on n’augmente pas la puissance, la température de la bille diminue d’elle-même. Baisser la puissance
ou cesser l’injection d’oxydant (qui produit une réaction exothermique) peut suffire à refroidir la bille en
lévitation , bille refroidie de surcroit par le jet d’argon.
Dans le document
Extraction de bore par oxydation du silicium liquide pour applications photovoltaïques
(Page 73-79)