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Description de la population bénéficiant de l’AME

En 2006, près de 200 000 personnes bénéficient de l’AME (16). Les dépenses par un bénéficiaire de l’AME est quasiment superposable à celles des assurés sociaux : entre 1800 et 2300 euros pour les premiers contre un peu moins de 1800 euros pour les seconds. L’écart peut être expliqué par un recours plus prononcé aux soins hospitaliers par les bénéficiaires de l’AME, en raison d’un accès limité aux soins de médecine libérale et également par une durée

d’hospitalisation plus longue, un nombre d’accouchement plus important.

L’évolution de son nombre de bénéficiaire suit une courbe ascendante depuis 2000 (17). La hausse récente peut aussi bien s’expliquer par un recours accru aux soins dû à une meilleure information de la population éligible, par l’aggravation de l’état de santé général de la population en situation irrégulière (d’où un recours aux soins par un nombre plus élevé d’étrangers irréguliers) ou encore par une augmentation du nombre de personnes en situation irrégulière sur le territoire.

Evolution du nombre de bénéficiaire de l’AME entre 2000 et 2006

Si le nombre de bénéficiaires et leur consommation médicale sont connus, on ne sait en revanche pas grand-chose de leurs caractéristiques sociodémographiques ou de leur condition d’existence. C’est pour cela que la DREES a réalisé en 2007 une enquête auprès des bénéficiaires de l’AME en contact avec le système de soins en Ile de France, région qui concentre ¾ des bénéficiaires. Celle-ci n’est pas représentative des patients dans leur ensemble mais des bénéficiaires de l’AME dans les structures de soin étudiées. Les résultats sont présentés ci-dessous :

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Caractéristiques sociodémographiques des bénéficiaires de l’AME en contac avec une structure de soins ou un médecin libéral

La population de cette étude est majoritairement féminine (mais biais de recrutement important car les femmes consultent majoritairement pour leur suivi de grossesse) et se compose de jeunes adultes âgés de 20 à 39 ans, de la même manière que l’ensemble des bénéficiaires de l’AME. Un bénéficiaire sur deux est originaire d’Afrique hors Maghreb et un sur cinq du Maghreb. Six personnes sur dix résident en France depuis moins de cinq ans. Le niveau scolaire approché à partir de l’âge de fin d’étude est relativement élevé et correspond à un niveau de secondaire pour une personne sur deux. 17% n’ont jamais été scolarisé. La majorité des hommes et des femmes travaillent ou ont travaillé en France. Les conditions de migration sont différentes pour les hommes et les femmes : les femmes rejoignent le plus souvent leur conjoint et vivent rarement

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seules, contrairement aux hommes qui cohabitent le plus souvent ou vivent en foyer ou en centre d’accueil. 55% d’entre eux déclarent se sentir très ou plutôt seuls.

En consultation, un patient sur cinq se déclare en mauvaise santé et un patient sur quatre avoir renoncé aux soins pour des raisons financières ces douze derniers mois. Les médecins estiment que 15% des recours concernaient des motifs urgents avec un retard dans l’accès aux soins signalé dans 5% des cas.

La Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) possède quant à elle des informations datant de 2005 sur l’accès à la médecine de ville pour les patients bénéficiaires de l’AME :

 64% des généralistes voient au moins un patient couvert par l’AME dans l’année.  5,5% des médecins parisiens ont réalisé plus de 100 actes pour un patient couvert par l’AME en une année.

L’accès à la médecine ambulatoire reste problématique pour cette population.

Le test de discrimination effectué récemment par Médecins du monde indique un taux de refus global de 37%, soit près de quatre fois supérieur au refus de soins pour les patients bénéficiaires de la CMU. Ce taux atteint 59% pour les généralistes de secteur 2. Les enquêtes par entretien expliquent ces refus par des modalités administratives très lourdes et des retards de paiement par la CPAM.

Au sein de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris, les patients bénéficiaires de l’AME représentent moins de 3% de l’ensemble des patients hospitalisés.

Il reste un nombre de personnes éligibles à l’AME qui ne font pas valoir leurs droits, très difficile à chiffrer et donc pour lequel peu de données existent. Ceci constitue un obstacle à l’évaluation et l’analyse des mesures.

4) Patients sans couverture maladie

La loi du 11 mai 1998 (18) relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d’asile prévoit la délivrance d’une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » pour l’étranger « résidant habituellement en France dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve qu’il ne puisse effectivement bénéficier d’un traitement dans le pays dont il est originaire ». Cette disposition permet ainsi à certaines personnes éligibles à l’AME de voir leur situation régularisée du fait de leur état de santé. Cependant, une loi promulguée en juin 2011 a vidé de

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son contenu le droit au séjour pour raison médicale en conditionnant son obtention à l’absence du traitement dans son pays d’origine et non plus à son accès effectif.

En 2003, a été mis en place un dispositif qui concerne les soins délivrés en urgence, uniquement à l’hôpital, à des personnes qui ne remplissent pas les conditions d’obtention de l’AME

(notamment celle de résidence ininterrompue de trois mois) : il couvre les soins « dont l’absence mettait en jeu le pronostic vital ou pourrait conduire à une altération grave et durable de l’état de santé de la personne ou de l’enfant à naître » (19).

Pour ces personnes dépourvues de couverture sociales ou qui n’ont aucun droit, les urgences hospitalières ou certaines structures (Protection maternelle et infantile, Médecins du monde, Médecins sans frontière, COMEDE) leur assurent une prise en charge médico-sociale. Il convient aussi de préciser que plusieurs médecins libéraux reçoivent des patients sans

couverture sociale et donc soignent gratuitement des patients en situation précaire. L’ampleur de cette pratique n’a pas été évaluée.

Dans cette situation, les actions d’information et l’accompagnement des personnes dans les démarches de reconnaissance de leurs droits sont déterminantes : c’est souvent l’ignorance du droit de la protection maladie qui alimente le recours aux dispositifs de « soins gratuits ». Or en l’absence d’une protection maladie intégrale, ces dispositifs ne peuvent assurer une continuité au-delà des premiers soins.

D- Les structures d’accueil des soins

1) Les consultations de permanences d’accès aux soins de santé

Présentation

La loi de lutte contre les exclusions, du 29 juillet 1998, définit le caractère « prioritaire de la politique d’accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies » (9). La traduction

opérationnelle de cette loi a été la mise en place d’un programme régional d’accès à la prévention et aux soins (PRAPS). C’est dans ce cadre qu’ont vu le jour les consultations de permanences d’accès aux soins de santé (PASS). Elles répondent à l’application de l’article L6112-6 du code de

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santé publique qui dispose que « les établissements publics de santé [...] mettent en place les Permanences d’accès aux soins de Santé, qui comprennent notamment des permanences d’orthogénie adaptées aux personnes en situation de précarité, visant à faciliter leur accès au système de santé et à les accompagner dans les démarches nécessaires à la reconnaissance de leurs droits. Ils concluent avec l’État des conventions prévoyant, en cas de nécessité, la prise en charge des consultations externes, des actes diagnostiques et thérapeutiques ainsi que des traitements qui sont délivrés gratuitement à ces personnes » (20).Ces cellules de prise en charge médicale et sociale sont destinées au public en situation de précarité. Elles permettent de faciliter l’accès aux soins, assurent un travail d’information, d’orientation, d’aide dans les démarches nécessaires à la reconnaissance de leurs droits.

Le fil moteur de cette organisation est de garantir un accès de soins à tous quel que soit le niveau social et la complexité des problèmes. Les objectifs sont nombreux :

 Proposer une orientation adaptée aux patients dans le parcours de soins.

 Proposer des solutions aux situations complexes grâce à une approche globale des patients et à une gestion au cas par cas.

 Limiter les dépenses de santé en privilégiant une prise en charge ambulatoire des patients.  Proposer une alternative pertinente à l’accès souvent injustifié aux urgences.

 Missions de prévention et de dépistage.

 Remettre les patients dans un circuit de soins de droit commun.

La circulaire met en garde contre la création d’un dispositif discriminatoire : « Les PASS pourront être situées à proximité ou dans les services d’urgence pour lesquelles elles serviront de relais. Il ne s’agit, en aucun cas, de créer au sein de l’hôpital des filières spécifiques pour les plus démunis. Au contraire, ceux-ci doivent avoir accès aux soins dans les mêmes conditions que l’ensemble de la population, notamment dans le cadre de consultations de médecine générale à horaires élargis ».

Il existe au moins une PASS par département et on en compte environ 400 en France.