• Aucun résultat trouvé

Des méthodes qui requièrent un approfondissement

Chapitre 3. Estimation et interpolation spatiale des températures

3.3. Estimation par méthodes stochastiques

3.3.3. Tentatives de comparaison

3.3.3.2. Des méthodes qui requièrent un approfondissement

Les cartes sélectionnées laissent apparaître des structures spatiales plus proches

de la « réalité » attendue. Cette ressemblance n’est pour autant pas suffisante pour une

application directe en zone montagneuse.

Carte 3-5 : Estimation par triangulation Carte 3-6 : Estimation par natural neigbor

Carte 3-7 : Estimation par inverse distance to a

power (inverse de la distance à une

puissance)

Carte 3-8 : Estimation par méthode de Shepard

modifiée

La méthode de triangulation et interpolation linéaire (Carte 3-5) est fondée sur la

triangulation de Delaunay. Des lignes relient les points qui contiennent des données. La

valeur des trois points servant à définir chaque triangle permet le calcul des données à

l’intérieur de ceux-ci. A ses côtés, la méthode natural neighbor (Carte 3-6) utilise

également des polygones de Thiessen, mais rajoute un algorithme fondé sur une

moyenne pondérée des mesures aux stations voisines. Ces deux exemples disposent

d’un inconvénient majeur : par construction, ils ne couvrent pas l’ensemble de la zone

d’étude. L’inverse des distances à une puissance (Carte 3-7) requiert la pondération des

valeurs si bien que l’influence d’un point décline avec l’éloignement à celui-ci. Plus la

puissance est élevée, plus la distance d’influence du point diminue. La carte paraît

vraisemblable mais la présence de bulles (bull’s eye) autour des points de mesure limite

son utilisation. La méthode Shepard modifiée (Carte 3-8) est similaire à celle utilisant

l’inverse des distances à une puissance, mais corrigée par l’usage des moindres carrés

locaux pour enlever l’effet ponctuel des observations (disques bleus sur la carte 3-7).

L’exemple présente ici des valeurs extrêmes (-20°C, + 19°C) très éloignées de la réalité.

Carte 3-9 : Estimation par minimum curvature

(courbure minimale) Carte 3-10 : Estimation par fonction base radiale

Carte 3-11 : Estimation par krigeage Carte 3-12 : Ecart-type du krigeage

La méthode par minimum curvature (Carte 3-9) propose une carte qui serait

vraisemblable si on ne constatait pas un très important effet de bord au sud-ouest

(températures très négatives alors qu’elles devraient être largement positives). En

pratique, la surface interpolée est analogue à une forme fine et élastique passant par tous

les points de mesure avec une courbure minimale : la surface est donc calculée pour être

la plus lisse possible.

Les cartographies obtenues par fonction base radiale (Carte 3-10) et krigeage (Carte

3-11) sont très similaires. L’effet de bord est minime. Ces deux interpolateurs semblent,

visuellement, proposer les résultats les plus proches de la réalité sur l’ensemble du

champ. Ces conclusions sont en conformité avec celles des principaux auteurs dans ce

domaine. Néanmoins, aucune de ces méthodes, dans leur théorie initiale, n’inclue une

prise en compte explicite du relief. La pertinence de leur application en zone de

montagne demeure donc limitée.

Un aspect plaide en faveur de l’utilisation du krigeage : son cadre probabiliste permet

de quantifier l’incertitude associée à la valeur interpolée grâce au calcul de la variance

de krigeage, ou sa racine carrée, écart-type de krigeage (Carte 3-12). Il représente la

dispersion possible autour de la valeur obtenue par krigeage. Plus l’écart-type de

krigeage est faible, plus la valeur interpolée est en moyenne proche de la réalité et donc

plus la carte est précise. Parallèlement, les fortes valeurs d’écart-type de krigeage sont

un indicateur de localisation des zones sous échantillonnées (Peraudin J.-J., 2003). La

significativité des valeurs d’écart-type du krigeage est très dépendante du modèle de

variogramme utilisé et la validité de son application au modèle de données. Cet

écart-type doit donc être interprété avec la plus grande attention, mais il fournit une

information intéressante de la précision des valeurs interpolées (écart-type de l’erreur

d’estimation). La carte de l’écart-type d’estimation reflète l’influence du variogramme

et de la densité d’information sur la précision (De Fouquet C., Prechtel A., Setier J.-C.,

2004) et exprime une mesure de l’incertitude associée à chaque carte, en plus de

l’analyse de la validation croisée (cf. ci-dessous).

La comparaison directe entre grille de températures interpolées souligne les analogies et

les dissemblances entre les techniques. Cette comparaison est effectuée par soustraction

entre les grilles de valeurs. Triangulation et natural neighbor proposent ainsi des cartes

relativement similaires (l’intervalle des écarts est compris entre +1°C et -1°C), ce qui

apparaît logique de par l’architecture employée (Carte 3-17). Ensuite, la méthode

d’interpolation de référence (krigeage) est comparée aux quatre autres sélectionnées, là

encore par soustraction. Le résultat proposé par fonction base radiale (Carte 3-14) est le

plus similaire à celui obtenu par krigeage : les différences observées sont de l’ordre du

degré. Au contraire, La méthode de Shépard (Carte 3-15) et celle par minimum

curvature (Carte 3-16) entraînent des écarts très prononcés (plus de dix degrés pour la

première, plus de vingt degrés pour la seconde), essentiellement près des bordures, mais

qui sont néanmoins inacceptables. La méthode par inverse distance (Carte 3-13)

contraste plus modérément (écart de l’ordre de trois degrés). Les bulles construites

autour des sites sont toujours visibles après la soustraction avec la carte réalisée par

krigeage, ce qui souligne le caractère persistant de celles-ci.

Carte 3-13 : Différence entre l’estimation par

krigeage et celle par inverse

distance

Carte 3-14 : Différence entre l’estimation par

krigeage et celle par fonction base

radiale

Carte 3-15 : Différence entre l’estimation par

krigeage et celle par méthode de

Shépard

Carte 3-16 : Différence entre l’estimation par

krigeage et celle par minimum

curvature

Carte 3-17 : Différence entre l’estimation par

triangulation et celle par natural

neighbor

Une dernière technique de comparaison des estimations réalisées consiste en l’étude des

erreurs d’estimation, c'est-à-dire la différence entre valeurs mesurées et valeurs

interpolées. Ces valeurs résiduelles ont été calculées pour dix méthodes d’interpolation

sur l’échantillon des températures minimales sur la période 1990-1995 en 69 stations.

Le tableau reprenant les résultats est disponible en Annexe 3-1. Les coordonnées des

points pour lesquels sont calculées les erreurs étant connues, il devient possible de les

cartographier, après une éventuelle interpolation pour l’obtention de champs d’erreurs

d’estimation (Figure 3-4). Plus la méthode est fiable, moins la valeur absolue des

erreurs doit être forte. La méthode par moyenne mobile procure les erreurs les plus

grandes : par construction, les résidus négatifs sont disposés à l’ouest, les résidus

positifs à l’est. Le krigeage se distingue par son appartenance aux cartes faisait

apparaître les erreurs les plus faibles.

La méthode par courbure minimale (minimum curvature) est de loin celle qui produit la

carte la moins contrastée, au prix de calculs beaucoup plus longs que la moyenne (plus

de dix fois plus de temps pour l’interpolation et la génération des résidus). L’apparente

pertinence des résultats nous conduit à ne pas exclure cette méthode, qui sera testée aux

côtés du krigeage dans le Chapitre 8. La génération des erreurs par validation croisée est

peut-être bénéfique à la technique. De plus, l’interpolateur n’étant pas exact, les valeurs

utilisées pour l’interpolation ne se retrouvent pas obligatoirement au point de mesure, ce

qui constitue bien évidemment un problème contraignant et ennuyeux.

Malgré ces tentatives d’estimation par méthodes géostatistiques, la difficulté à

interpoler des variables climatiques grâce à des méthodes purement spatiales demeure.

Par conséquent, quelques autres voies de modélisation émergent, avec plus ou moins de

réussite.

Figure 3-4 : Cartographie des résidus obtenus par validation croisée pour dix méthodes d’interpolation, correspondant à une visualisation de l’erreur d’estimation.

Démarche suivie : les températures minimales moyennes sur la période 1990-1995 mesurées dans 69 stations sont interpolées grâce à chacune des méthodes listées

ci-dessus. Les estimations sont testées par validation croisée pour chacune des méthodes : les résidus (différence entre mesure et estimation) sont relevés aux points

de coordonnées des stations puis interpolés par krigeage de manière à obtenir des champs d’erreur d’estimation.