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La Convention scolaire romande (CSR) prévoit, en plus du PER (mais aussi de la forma-tion initiale et continue, des épreuves communes romandes et de profils de connais-sances et de compétences des élèves), la coordination des moyens d’enseignement et des ressources didactiques. Afin de donner des outils d’appréciation et de choix des moyens existants, une commission de spécialistes de la didactique du français (Groupe

de référence pour l’enseignement du français [GREF], mandaté par la CIIP/SR-TI) a établi une grille de critères. Plusieurs moyens (la plupart provenant de France) pour les différents cycles de l’école obligatoire ont été retenus par les responsables politiques et mis à la disposition des cantons. Certains ont nécessité des adaptations à la réalité scolaire romande. Cette sélection illustre la volonté politique de construire un ensei-gnement-apprentissage continué de la lecture en Suisse romande.

Nous nous demandons dans quelle mesure ces moyens promeuvent une approche de la lecture centrée sur l’interprétation de textes de genres divers, selon des visées à la fois communicative, fonctionnelle, esthétique et culturelle (comme le prône le PER). Par rapport à PISA, peut-on voir développée, au sein de ces moyens, une perspective littéracique ? En particulier, est-il prévu des activités en lien avec les MITIC ?

Examinons tout d’abord les moyens prévus dès le cycle 2 de l’école primaire. Deux séries de moyens ont été retenus, l’une pour l’enseignement primaire (deuxième cycle)19, l’autre pour le secondaire. En voici quelques caractéristiques, en particulier par rapport à la lecture et à la compréhension des textes. Nous dirons également quelques mots sur les moyens officiellement retenus pour les degrés 1 à 4 de HarmoS.

19 Nous ne mentionnerons pas les nombreux manuels et matériels qui existent pour les premiers appren-Pour le primaire (cycle 2)

Mon Manuel de français

– Des activités dans les domaines dire, lire écrire et fonctionnement de la langue. – Visée intégrative de l’enseignement-apprentissage du français.

– Interdisciplinarité. – Travail sur l’image (BD).

– Des étapes de travail récurrentes : – un rapide échange à partir des questions du manuel de l’élève – un travail individuel sur fiche – une mise en commun avec le corrigé – la synthèse de la séance.

L’Ile aux mots

– Étude du fonctionnement de la langue séparément des autres activités.

– Passerelles établies entre le fonctionnement de la langue et les autres domaines de la discipline.

– Modèle structuré et répétitif de leçon, identique tout au long de l’apprentissage : lire le texte et répondre aux questions de compréhension (la lecture à haute voix est sollicitée) – lire en réseau (intertextualité) – expression orale et écrite.

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LaLittératieensuisseromandepisa 2009

Dans l’ensemble, ces moyens privilégient une entrée par les textes. Toutefois, il n’est pas toujours clairement établi si ces textes sont classés en genres, en genres littéraires, voire en regroupements de genres (narrer, argumenter, etc.) ; dans la plupart de ces manuels, ce sont des extraits de texte qui sont proposés (Mon Manuel de français, l’Ile

aux mots) et rarement il est recommandé de lire des textes intégraux. Le plus souvent,

dans l’ensemble de ces moyens, le texte narratif prédomine, littéraire au secondaire (en particulier dans le Livre unique).

Une autre caractéristique de ces manuels est la visée intégrative des activités ; ils garantissent ainsi le lien entre oral, écrit, compréhension et production. De même, le fonctionnement de la langue est vu au service des activités d’expression.

Les manuels explicitent-ils une approche favorisant la construction de compétences chez les élèves ? C’est le cas dans Mon Manuel de français qui propose, au fil des acti-vités, une synthèse des acquisitions que doivent faire les élèves (elle est établie avec les élèves). Pour les autres manuels, une telle explicitation n’apparait pas.

Pour l’enseignement-apprentissage de la lecture, on constate l’importance du ques-tionnaire. Resterait à examiner plus à fond le contenu de ces questionnaires pour en apprécier la réelle portée pour les élèves et comprendre ce qui est véritablement visé au travers des questions posées. Il semble que dans Mon Manuel de français, quelques stratégies soient développées, du type de celles de Lector & Lectrix (voir ci-dessous). Dans le Livre unique, un travail sur les procédés stylistiques est préconisé ; dans l’ensemble, c’est essentiellement une lecture de compréhension des contenus, une lecture référentielle qui apparait prédominante.

Ces quelques lignes descriptives, le choix de ces moyens d’enseignement vont-ils dans le sens d’un développement non seulement de la compréhension de l’écrit (PER) mais de la littératie au sens de PISA ?

La visée intégrative que nous avons soulignée plus haut constitue certainement un élément positif, menant dans cette direction. En ce qui concerne un travail sur les

Pour le secondaire Atelier du langage

– La lecture : outil pour exercer les domaines de la grammaire, du vocabulaire, de l’ortho-graphe et de la conjugaison.

– La compréhension de « texte » limitée à quelques questions de la rubrique « Comment lire les questions ? » équivalant à des évaluations en lien avec les exercices faits en structuration de la langue (centrale dans ce moyen).

Livre unique

– La lecture : lecture d’un texte puis réponse à des questionnaires de compréhension – analyse du texte en classe.

– Les outils de la langue : aides à la compréhension. – « Textes et images » : travail proposé dans chaque chapitre.

Complémentarité de ces deux collections de manuels, à travailler de préférence conjointement dans les classes.

stratégies de lecture, certains cantons recourent aux manuels Lector & Lectrix, qui, pour le texte narratif, proposent des activités à même de développer chez les élèves de véritables stratégies de lecture. Nous pensons toutefois que ces stratégies devraient être davantage différenciées selon les genres de texte et les visées de la lecture. Ces ouvrages viennent ainsi compléter les quelques propositions des manuels officiels. Par ailleurs, dans le contexte actuel, les MITIC méritent de tenir une place importante, comme le préconise avec force le PER. La littératie électronique organisée dans le cadre de PISA va également dans ce sens et montre les spécificités de ces médias pour la lecture notamment. Sont-ils suffisamment présents et exploités dans les nouveaux moyens d’enseignement ?

Il resterait à examiner plus en profondeur les contenus de ces manuels, et, surtout, à observer soigneusement comment les enseignants les utilisent dans leur classe afin de comprendre mieux ce qui se joue dans l’enseignement-apprentissage de la lecture à l’école obligatoire. Le recours aux MITIC devrait aussi donner lieu à des observations en classe.

Comme le précisent les auteures de Dire, écrire, lire, « les enquêtes internationales ont poussé l’école, depuis une dizaine d’années, à s’interroger sur la dimension de la compréhension en lecture. Concernant l’entrée dans l’écrit, la compréhension de textes doit et peut être considérée comme un réel objet d’enseignement, à prendre en compte tout comme les autres composantes de la langue orale et écrite » (p. 71). Cette démarche nous semble donc aller dans le sens d’une construction de compé-tences en littératie dès l’entrée à l’école.