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De la Terre aux étoiles

1.4 L’approche numérique

1.4.3 De la Terre aux étoiles

Toute tentative de simulation directe de la convection solaire se heurte inévi-tablement à une difficulté inhérente aux valeurs des paramètres de contrôle : la table 1.4 donne une estimation de ces paramètres respectivement à la base et au sommet de la zone convective (photosphère). Indépendamment de ce problème, la question reste de savoir, d’une part, dans quelle mesure les résultats de géodynamo peuvent être pertinents pour l’étude des dynamos stellaires, et, d’autre part, com-ment le modèle développé pour le noyau terrestre peut être simplecom-ment adapté à la zone convective d’une étoile, en dépit des différences extrêmes entre ces corps. La réponse à cette question n’est sûrement pas unique, et nous mentionnerons seulement quelques tentatives dans cette direction dont nos travaux constituent en quelque sorte le prolongement.

Taille de la zone convective

De ce point de vue, une première différence notable entre la Terre et le Soleil réside au niveau des facteurs de forme de la zone convective, beaucoup plus fine dans le cas du Soleil. Goudard & Dormy (2008) ont ainsi montré que ce facteur purement géométrique pouvait être responsable d’une transition d’un dipôle à une solution oscillante.

Les conditions aux limites

Une autre modification relativement simple consiste à remplacer les conditions d’adhérence aux parois par des conditions de glissement, lesquelles ont été aussi proposées dans un premier temps pour les intérieurs planétaires (Simitev & Busse 2009). Schrinner et al. (2012) ont ainsi généralisé le critère de Christensen & Aubert (2006) séparant les différentes branches dynamos. Le principal changement dû à l’utilisation des conditions aux limites de glissement est l’apparition d’une transi-tion hystérétique entre les branches dynamos. La saturatransi-tion de la dynamo devient en effet sensible aux conditions initiales et l’on observe ainsi une zone bistable entre dipôles et multipôles : si le champ magnétique initial est faible, un fort vent zonal se développe du fait des conditions aux limites, ce qui favorise les dynamos multipolaires. En revanche, si le champ initial est un dipôle de forte amplitude, la rotation différentielle reste contrôlée par le champ magnétique ; le dipôle est donc une solution également stable.

Le profil de gravité

Dans les modèles de géodynamo, le noyau est assimilé à un corps homogène à symétrie sphérique, de telle sorte que le champ gravitationnel est de la forme g = g (r )er. Le théorème de Gauss appliqué à une sphère de rayon r ∈ [ri, ro] s’écrit

Z

Srg · ndS = −4πG Z

Vr%dV , (1.15)

où G représente la constante de gravitation universelle et n le vecteur normal sortant à la sphère. On obtient donc

g 4πr2= 4πG%4

3πr3 =⇒ g ∝ r . (1.16)

La variation linéaire de la gravité dans le noyau est en bon accord avec les modèles d’intérieur terrestre (modèle PREM, Dziewonski & Anderson 1981).

En revanche, on peut également considérer que la masse totale M est entière-ment contenue dans la sphère interne, ce qui est une hypothèse raisonnable dans le cas du Soleil où la masse de la zone convective est de l’ordre de 0,02 M¯. On obtient alors toujours avec le théorème de Gauss

g = −G M

r2 . (1.17)

Les profils de gravité (1.16) et (1.17) sont, évidemment, des cas limites idéalisés. Le cas plus complexe auto-gravitant19dans lequel g peut varier à cause des mouve-ments convectifs n’est pas pris en compte, de même que la non sphéricité de l’objet

ou la force d’inertie d’entraînement due à la rotation. L’estimation de l’oblicité20 du Soleil due à la rotation est de l’ordre de 0,001 %. En pratique, les déviations mesurées sont légèrement plus importantes et révèlent une corrélation avec les variations du champ magnétique solaire (Fivian et al. 2008). Par la suite, nous adop-terons toujours l’hypothèse simplificatrice d’une distribution de masse centrale, indépendamment de la taille de la zone convective.

L’approximation convective

Enfin, la compressibilité d’un gaz n’étant pas comparable à celle d’un métal liquide, les zones convectives stellaires se présentent donc comme des milieux dans lesquels la stratification du fluide sous son propre poids est a priori moins négligeable que dans le noyau terrestre. Comme l’indique la table 1.1 page 10, la masse volumique du plasma solaire varie en effet de plusieurs ordres de grandeur entre le bas de la zone convective et la surface. En conséquence, la contrainte d’in-compressibilité qui découle de l’approximation Boussinesq ne peut être satisfaite dans un tel système.

D’une manière plus générale, si les propriétés du fluide diffèrent significative-ment d’une extrémité à l’autre de la zone convective, il est légitime de s’attendre à une asymétrie entre les écoulements ascendants et descendants, telle qu’on l’observe par exemple au niveau de la granulation solaire, mais aussi dans des expériences de laboratoire (Dubois et al. 1978). Cette asymétrie ne peut être captu-rée par l’approximation de Boussinesq, laquelle revient à négliger les variations de la densité, except in so far as they modify the action of gravity (Rayleigh 1916), autrement dit, partout à l’exception du terme de poussée d’Archimède. Spiegel & Veronis (1960) ont montré que cette approximation permettait également de décrire, sous certaines conditions, la convection d’un gaz parfait.

It has been shown that the equations governing convection in a perfect gas are formally equivalent to those for an incompressible fluid if the static temperature gradient is replaced by its excess over the adiabatic, cvis replaced by cp, and the following approximations are valid: (a) the vertical dimension of the fluid is much less than any scale height, and (b) the motion-induced fluctuations in density and pressure do not exceed, in order of magnitude, the total static

variations of the quantities. Spiegel & Veronis (1960)

L’approximation de Boussinesq présente un double avantage : d’une part, d’un point de vue théorique, elle permet de simplifier les équations de manière à captu-rer le mécanisme d’instabilité avec une complexité minimale ; d’autre part, d’un point de vue pratique, le jeu d’équations est plus simple à intégrer car il filtre les

ondes sonores, qui ne sont a priori pas essentielles pour comprendre la dynamique d’un écoulement pour lequel la vitesse du fluide est nettement inférieure à la vitesse du son.

Aussi l’un des enjeux consistait-t-il à dériver une autre approximation ca-pable de décrire les écoulements convectifs à faible nombre de Mach dans des systèmes stratifiés. C’est ainsi que l’approximation anélastique a été dévelop-pée en premier lieu pour décrire la convection atmosphérique (Ogura & Phillips 1962, Gough 1969) et a été reprise, par la suite, dans un modèle de convection thermo-compositionnelle du noyau terrestre (Braginsky & Roberts 1995). Lantz & Fan (1999) ont redérivé un modèle semblable pour les zones convectives solaires et stellaires. Jones et al. (2011) ont ensuite définis des cas tests numériques à partir de ce même modèle qui est parfois désigné dans la littérature sous le terme de

LBR anelastic approximation (d’après les noms de Lantz, Branginsky et Roberts),

afin de le distinguer d’autres variantes de l’approximation anélastique (Gilman & Glatzmaier 1981, Drew et al. 1995, Brun et al. 2004).

Dans cette thèse, nous étudierons les effets sur la génération du champ ma-gnétique induits par le passage de l’approximation Boussinesq à l’approximation anélastique. Cela se traduit principalement par les conséquences suivantes :

— le choix d’une distribution de masse centrale ; — l’introduction d’un profil de référence stratifié.

L’approximation anélastique et son implémentation numérique sont décrites dans le chapitre 2 et les résultats obtenus sont présentés au chapitre 3. Enfin, le chapitre 4 traite de l’apparition de différentes formes d’intermittence dans la dynamique temporelle de différents modèles de dynamos.

Chapitre 2

Modélisation

On a former occasion I have shewn, that we have great reason to look upon the sun as a most magnificent habitable globe; and, from the observations which will be related in this Paper, it will now be seen, that all the arguments we have used before are not only confirmed, but that we are encouraged to go a considerable step farther, in the investigation of the physical and planetary construction of the sun. [. . . ] But, if the Egyptians could avail themselves of the indications of a good Nilometer, what should inder us from drawing as profitable consequences from solar observations ?

Herschel (1801)

D

ANS CE CHAPITRE, nous introduisons le système d’équations que nous avons

utilisé pour modéliser la génération du champ magnétique par la convec-tion stellaire. Ce système est naturellement composé du couplage de l’équaconvec-tion d’induction et de l’équation de Navier-Stokes dans le régime de l’approximation anélastique. Nous discuterons les points qui nous semblent les plus importants, sans procéder à une dérivation mathématique exhaustive de ces modèles, dériva-tion que l’on peut retrouver dans les ouvrages de référence.