• Aucun résultat trouvé

D’UNE AUTORITÉ SOUVERAINE

FONDEMENT DU POUVOIR POLITIQUE

D’UNE AUTORITÉ SOUVERAINE

Les dispositions législatives figurant dans le livre premier du Code Napoléon transcrivent un intérêt certain pour l’ordre au sein des familles. Le tribun GOUPIL-PRÉFELN rappelle, à ce sujet, qu’elles n’ont pour unique intérêt que la traduction d’une certaine uniformité étatique219. Cet idéal est essentiel pour

éveiller les consciences en vue de préserver l’ordre public. En faisant des concessions aux pensées révolutionnaires, la nouvelle organisation politique a pour finalité de préserver le pouvoir en place accepté par tous, finalement, même si elle a été bien souvent contestée, dans certaines parties de l’Europe220. Chaque

219 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome XI, p. 42.

220 C. G. GANILH, De la Contre-révolution en France, Béchet ainé, Paris, Tome I, 1823, p. 102 : « Les

principes de la Révolution française ne furent repoussés et proscrits en Europe que parce qu’ils menaçaient son état social, et pouvaient, s’ils s’affermissaient, produire une révolution générale dans l’ordre politique et dans la société civile ».

78

individu est cantonné à un rôle bien précis et ne peut dépasser les limites de son statut221.

L’alliance entre l’ordre public et l’ordre familial devient l’élément central des rapports entre humains. Et le noyau familial sert, de ce fait, de prototype parfait pour cette organisation gouvernementale222. La liberté de chacun est alors

transférée dans les mains du gouvernement223. En contrepartie, celui-ci apporte

une certaine protection. La soumission de chacun garantit la prospérité de l’État, en quelque sorte.

La famille légitime, modèle d’exemplarité pour le gouvernement de la nation, est régie par un homme détenteur de la puissance paternelle. Il aura pour fonction d’y préserver l’ordre afin que sa famille puisse avec les autres noyaux familiaux qui composent la nation française être un modèle d’exemplarité au service de ce gouvernement224. L’autorité paternelle est donc assimilable à un titre

honorifique glorifié225.

La fonction liminaire de la puissance paternelle est de servir implicitement les intérêts de l’État et explicitement ceux des membres qui composent le noyau familial. Cependant, les codificateurs ont créé une fonction support sans réel contre-pouvoir. Le père de famille devient un agent au service

221 V° notamment I. ALOYSIUS ORJINTA, L’insurrection bretonne, un épisode tragique de la

Révolution française, Grin Verlag, Auflage, Tome I, 2011, p. 3.

222 J. GODECHOT, Les institutions de la France sous la Révolution et l’Empire, PUF, 1989, t. 1., p. 437. 223 V° B. SCHNAPPER, « Liberté, égalité, autorité : la famille devant les assemblées

révolutionnaires 1790-1800 » in L’enfant, la famille et la Révolution française, t. 1, p. 336.

224 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome X, p. 512 : « La puissance paternelle maintient

l’ordre pour unir plus étroitement entre eux les membres de toutes ces petites sociétés naturelles dont l’agrégation civile forme la grande famille… elle est la plus sacrée de toutes les magistratures ».

225 G. SICARD, « Révolution politique et mutation de la famille », in Annales Université des Sciences

79

de l’État capable de s’autogérer226. On peut donc supposer que les codificateurs

sont persuadés que le père de famille dispose d’une aptitude naturelle à gérer son foyer, tout comme le gouvernement organise la société.

Mais pour se démarquer des législations très anciennes, le pouvoir en place a décidé d’impliquer la mère de famille dans la gestion domestique. Cependant, pour ne pas contredire l’ordre naturel, le père de famille doit exercer le pouvoir de manière solitaire227. Le pouvoir paternel, s’exerçant sans réel contre-

pouvoir, confère en outre à son titulaire la jouissance et l’administration des biens de ses enfants. Ces prérogatives ne s’exercent évidemment que vis-à-vis des enfants légitimes ou naturellement reconnus. Le mariage demeure, à l’évidence, le fondement essentiel de cette nouvelle doctrine.

La puissance paternelle, dans l’esprit des codificateurs, a un but très précis vis-à-vis des enfants. Ce rôle de bon père de famille a pour objectif essentiel d’apporter tous les soins nécessaires à la survie de l’enfant228 et donc, on peut le

supposer corrélativement, d’après cet auteur, les outils nécessaires à son intégration dans le milieu social où il vit.

226 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Livre Ier, Tome I, p. 486 : « La puissance paternelle est la

providence des familles, comme le gouvernement est la providence de la société : eh ! quel ressort, quelle tension ne faudrait-il pas dans un gouvernement qui serait obligé de surveiller tout par lui-même, et qui ne pourrait pas se reposer sur l’autorité des pères de famille pour suppléer les lois, corriger les mœurs et préparer l’obéissance ».

227 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Livre Ier, Tome I, p. 536 : « La raison dicte qu’un tel

partage ne saurait subsister sans détruire le pouvoir…la nature a résolu la question en donnant à l’homme des moyens de supériorité et de prééminence qui ne peuvent lui être contestés ».

228 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome X, p. 513. RÉAL utilise, ici, une périphrase :

80

Les missions octroyées au père de famille sont le droit de garde229 et le

droit d’éducation230, deux principales fonctions dévolues au chef de famille qui

lui permettent d’acquérir un véritable pouvoir sur ses enfants. Les codificateurs ont ainsi créé une puissance paternelle qui ne doit rendre de comptes à personne sauf à elle-même. Le droit de correction ressurgit en ce début du XIXe siècle, ce

qui accroît sensiblement les pouvoirs du père de famille. Cependant, l’enfant va commencer à intéresser le pouvoir judiciaire qui va le considérer comme un être faible qu’il faut protéger. Les magistrats prennent alors en considération le plus grand intérêt de l’enfant lorsque le père et la mère entament une séparation de corps. Mais si l’enfant a fait l’objet d’un intérêt de la part des juges, c’est en réponse à la prééminence de l’autocratie induit par le Code Napoléon (Section 1) et la pratique de l’autoritarisme résultant de l’exercice de la puissance paternelle (Section 2).

229 Le droit de garde est assimilé à un devoir par le Code civil, l’abandon d’enfant étant

sévèrement réprimé par le Code pénal.

230 « Quoique la puissance paternelle ait sa source dans le droit civil, l’éducation des enfants est

pour les père et mère une obligation qui a sa source dans la nature », Cour d’appel de Lyon, Le comte de S… C. sa femme, 16 mars 1825, (D. II. 570).

81

Section 1

Le culte de l’autocratie

Pour exercer ses prérogatives, le titulaire de la puissance paternelle est doté de certains attributs (§ 1) et notamment d’un gouvernement pour asseoir son autorité (§ 2).

§ 1 - La figure de l’autorité paternelle

Cette autorité paternelle qui appartient, par nature, au père trouve une légitimité certaine en la personne de la mère de famille (A). En ce qui concerne les parents légitimes, c’est au père que revient le droit d’exercer cette puissance paternelle. Cette autorité qui a pour but d’accompagner l’enfant jusqu’à son émancipation lui vient en aide au cours des étapes de son évolution (B).

A - UN SYMBOLE D’ÉGALITÉ

Le Code Napoléon semble adopter un système plus généreux que l’ancien droit puisque l’épouse bénéficie de l’exercice du pouvoir en l’absence du père de famille231. Il va même plus loin car il accorde les mêmes droits que l’on

soit père ou mère d’un enfant naturel légitimement reconnu232. Ainsi,

l’éloignement de cette nouvelle législation est notable par rapport à l’ancienne. Par conséquent, lorsque l’article 372 du Code Napoléon énonce que « l’enfant reste sous leur autorité jusqu’à sa majorité ou son émancipation », il attribue, de fait, cette puissance autant au père de famille qu’à la mère.

231 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome X, p. 487.

82

Par principe, les enfants nés hors mariage sont également tributaires de cette autorité, mais ils ne le sont pas en droit car seul le mariage confère ce pouvoir et la légitimité de son exercice233. Mais les codificateurs ne sont pas

d’accord sur ce point, car ils conçoivent désormais la puissance paternelle comme un pouvoir tout à fait naturel. TRONCHET rappelle que la puissance paternelle appartient au père et à la mère de l’enfant naturel et découle de la naissance et non du mariage234. On peut ainsi remarquer, d’après cet orateur, que le Code

Napoléon est un outil juridique indispensable aux parents d’enfants naturels pour asseoir leur autorité et par conséquent, le respect de ces derniers vis-à-vis d’eux.

Le Code Napoléon consacrerait la pérennité de l’autorité paternelle et rétablirait l’ordre naturel des choses. D’abord, RÉAL prétend que la puissance paternelle est perpétuelle, par nature, et maintenue dans un souci de conservation de l’ordre moral au sein de la société française235. Et FERRAND

affirme qu’elle est indissociable du père de famille, dans le but de garantir la

233 V. PARAISO, Pouvoir paternel et pouvoir politique : réflexion théorique et réponses institutionnelles

du XVIe siècle à 1914, Connaissances et savoirs, Paris, 2005, Tome I, p. 284 : « Le père que le Code

civil investit de la puissance paternelle est le père légitime, qui a eu ses enfants d’un mariage solennel, seul mariage reconnu par le Code civil, qui constitue l’acte fondateur de la famille, cellule de base de la société. Comme sous l’Ancien Régime, le mariage solennel est la seule source de la puissance paternelle ».

234 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome X, p. 497 : « La naissance seule établit des devoirs

entre les pères et les enfants naturels ; ces enfants doivent être sous une direction quelconque : il est juste de les placer sous celles des personnes que la nature oblige à leur donner des soins ».

235 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome X, p. 518 : « L’article 1er est le seul du projet qui

impose à l’enfant un devoir qu’il devra remplir à tout âge ; toutes les autres dispositions de ce titre le supposent dans les liens de la minorité ; et c’est sous cet unique point de vue que la puissance paternelle y est traitée ».

83

continuité de l’ordre236. Or, comme le rappelle BIGOT-PRÉAMENEU, le Code

Napoléon établit une puissance paternelle qui accorde à la mère de famille des droits équivalents à ceux du père, prérogatives issues indubitablement de la nature237. Le Code Napoléon ne fait donc que rétablir la place de la mère au sein

de la famille en évoquant, par conséquent, le principe d’égalité et non le rétablissement de la domination paternelle. Pour asseoir cet argument vis-à-vis de la puissance paternelle, on peut remarquer que la mère de famille exerce la puissance paternelle au sein de la famille, de la naissance de l’enfant jusqu’à sa majorité, par une sorte de délégation de pouvoir intrinsèque238. En effet, si le père

seul, durant le mariage, a autorité sur ses enfants jusqu’à leur majorité ou émancipation239, cette autorité passe à la mère, en cas d’empêchement de ce

dernier. Ce qui démontre son attribut et sa légitimité à exercer la puissance paternelle.

En ce qui concerne les enfants naturels, les dispositions du Code civil ne sont pas toujours explicites vis-à-vis d’eux. Par conséquent, lorsque la garde d’un enfant naturel reconnu est réclamée par le père et la mère, les magistrats doivent se déterminer en prenant pour base légale le plus grand intérêt de l’enfant. Ici, la

236 J. FERRAND, De la magistrature paternelle à la magistrature judiciaire, Presses universitaires du

Septentrion, Paris, 2002, Tome I, p. 308 : « Mais, si les termes de l’article 2 du projet suggèrent une autorité conjointe des père et mère, il va sans dire qu’une autorité concurrente nuirait au prestige de la puissance paternelle et viendrait conséquemment mettre en cause la pérennité de l’ordre social ».

237 Sur ce point v° notamment P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome X, p. 523.

238 E. GLASSON, Eléments du droit français considéré dans ses rapports avec le droit naturel, A. Durand

et Pedone Lauriel, Paris, 1875, Tome I, p. 198.

84

garde n’appartient à aucun d’entre eux par préférence240, les juges peuvent donc

la confier à la mère, jusqu’à un âge déterminé241.

En outre, la cour d’appel de Colmar et celle de Bordeaux lui reconnaissent un attribut de la puissance paternelle en lui accordant le droit d’émanciper librement son enfant mineur, même si elle a déjà convolé en secondes noces242.

Il est à considérer que la puissance paternelle demeure entière243 dans la

personne du parent qui survit à l’autre. Par conséquent la qualité de tuteur n’a aucun effet ici, comme le rappelle la cour d’appel de Grenoble244. Et même si le

parent survivant se remarie, la garde et l’éducation de ses premiers enfants lui reviennent, par préférence. Le statut de mère et de père est, en effet, indifférent dans ce cas245.

Le Code Napoléon est ainsi particulièrement favorable à l’épouse, notamment lorsqu’elle a contracté un second mariage. En effet, la garde et l’éducation de ses enfants lui sont conservées246. Il se démarque donc du droit

240 Cour d’appel d’Agen, Meusac, 16 frimaires an XIV, (S. 1806. II. 49) ; Cour d’appel de Pau,

Lalanne, 13 février 1822, (S. 1823. II. 91).

241 Cour d’appel de Paris, Aff. Mortier, 5 juillet 1853, (D. 1854. II. 67).

242 Cour d’appel de Colmar, Brunn, 17 juin 1807, (S. 1815. II. 164) ; Cour d’appel de Bordeaux,

Billiard, 14 juillet 1838, (S. 1839. II. 73).

243 Article 371 et 372 du Code Napoléon.

244 Cour d’appel de Grenoble, Abry, 11 août 1854, (S. 1854. II. 583).

245 Article 380 du Code Napoléon : « Si le père est marié, il sera tenu, pour faire détenir son enfant

du premier lit, lors même qu’il serait âgé de moins de seize ans, de se conformer à l’article 377 ; et article 386 du même Code : Cette jouissance n’aura pas lieu au profit de celui des père et mère contre lequel le divorce aura été prononcé ; et elle cessera à l’égard de la mère dans le cas d’un second mariage ».

246 Article 372 ; et 374 du Code Napoléon : « L’enfant ne peut quitter la maison paternelle sans la

permission de son père, si ce n’est pour enrôlement volontaire, après l’âge de dix-huit ans révolus ».

85

romain qui n’autorisait pas la veuve à conserver ses attributs en cas de second mariage247. Son pouvoir, au sein de la sphère privée, s’est donc renforcé. Par

exemple, si la mère conserve la tutelle de ses enfants mineurs après la légitimation d’une nouvelle union, le conseil de famille ne peut porter atteinte à son autorité maternelle en lui imposant de souscrire à des valeurs mobilières notamment. Cette obligation porterait atteinte à la libre administration des biens des mineurs. L’autorité judiciaire exclut, par conséquent, toute forme d’ingérence dans l’exercice de son autorité248.

De même, en cas de second mariage, l’autorité maternelle ne doit pas être affectée249. Les engagements pris avec l’aïeul de ses enfants concernant le lieu

d’habitation ou l’instruction à suivre sont donc sans effets. L’aïeul ne peut, dès lors, engager une action en justice ou délivrer une demande de convocation du conseil de famille aux fins de statuer sur le maintien ou non de la tutelle de la mère. Il aurait fallu, au préalable, que les promesses soient validées en assemblée et observées comme des conditions essentielles au maintien de sa tutelle250.

B – LE DROIT D’ÉMANCIPER SON ENFANT

L’exercice de la puissance paternelle ne prend fin, en principe, qu’en cas d’incapacité pour le père de famille d’exercer son autorité ou si son comportement est susceptible d'avoir pour conséquence de porter gravement atteinte à l’ordre public. C’est ce que rappelle DE JACQUEMINOT lors de la

247 Si non vitricum cis induxerit… (L.1 Cod, Ubi pupillus educari) … nisi ad secundas nuptias pervenerit

(Nov.22, ch.8).

248 Cour d’appel de Grenoble, Pignard, 21 juin 1854, (S. 1855. II. 407).

249 Cour d’appel de Grenoble, Abry C. Trouvé, 11 août 1854, (S. 1854. II. 583). 250 Cour de cassation, Abry C. Trouvé, 05 mars 1855, (S. 1855. I. 283).

86

présentation du titre sur le mariage251. On peut en déduire, d’après cet orateur,

que seules la majorité ou l’émancipation sont des circonstances qui permettent au fils de famille d’échapper à l’autorité paternelle252. L’enfant devenu majeur

peut donc s’appuyer sur la loi pour se soustraire à cette domination, dès lors que l’une des deux conditions vient à se réaliser253. Si le Code Napoléon permet

l’affranchissement de la puissance paternelle, il ne permet pas de se libérer totalement du joug de cette dernière comme le rappelle la Cour de cassation : « Les lois qui règlent la puissance paternelle ont effet dès l’instant de leur promulgation, soit en ce qui touche l’état personnel de l’enfant, soit en ce qui touche les droits réels du père. En conséquence, la loi du 28 août 1792, qui abolit la puissance paternelle sur les enfants majeurs, ravit aux pères le droit que les lois antérieures leur avaient conféré sur l’usufruit des biens de leurs enfants. Si le fils est mort avant l’âge de 21 ans, les héritiers du fils peuvent faire prononcer l’extinction de l’usufruit à l’époque où le fils aurait eu ce droit lui-même s’il avait survécu254 ».

Le tribun VESIN affirme que la puissance paternelle a, par principe, vocation à porter secours à l’enfant, mais dès lors que ce dernier devient assez

251 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome I, p. 359 : « Ne pourront être nommés tuteurs, et

pourront être destitués des tutelles auxquelles ils auraient été nommés, ceux dont l’inconduite notoire serait d’une dangereuse influence sur les mœurs du mineur, ou dont la mauvaise gestion attesterait l’incapacité. Ces causes d’exclusion ou de destitution sont applicables à tous les tuteurs, même au père et à la mère ».

252 L’enrôlement volontaire aurait un but détourné, permettre à l’enfant qui subit des mauvais

traitements d’abandonner le domicile paternel. Cependant ce n’est, ici, qu’une conséquence pratique car aucune loi ne permet cette dérogation dans un soucis de protéger l’enfant. E., CAMBON, De la protection de la personne de l’enfant contre les abus de la puissance paternelle, Thèse Droit Dijon, Lyon, 1900, p. 25.

253 Article 372 du Code Napoléon : « Il reste sous leur autorité jusqu’à sa majorité ou son

émancipation par mariage ».

254 Cour de cassation, aff. Bardenet, 26 juillet 1810, (S. 1810. I. 348) ; Cour de cassation, aff. Guy, 5

87

autonome pour se gérer lui-même, cette autorité doit enfin cesser255. On constate,

d’après cet orateur, que la possibilité pour l’enfant d’être libéré de cette autorité est conditionnée par l’acceptation du père lui-même. En pratique, l’émancipation peut être réalisée par un père sur ses enfants, pendant le mariage et après son divorce256. Cependant, DELVINCOURT sollicite l’intervention de la mère,

notamment lorsque l’autorité judiciaire lui a confié la garde des enfants257. Et en

cas de convol de la mère, BOILEUX admet également ce principe258, mais pas

DELVINCOURT259.

Le droit d’émanciper un enfant est, en conséquence, un attribut de la puissance paternelle qui peut être limité par l’autorité judiciaire, en cas d’abus, notamment. C’est ce qu’a jugé le tribunal de la Seine, le 6 mars 1862 : « Spécialement, au cas où, à la suite d’une séparation de corps, la garde des enfants a été, par décision de justice, confiée à la mère, celle-ci est fondée à demander la nullité de l’acte d’émancipation consentie par le père en faveur des enfants, et qui n’aurait d’autre but que d’éluder l’effet de la décision qui lui a retiré la garde de ce dernier260 ». L’intervention judiciaire est également admise

en cas d’atteinte grave à l’enfant comme le précise la cour d’appel de Caen : « Le droit d’émancipation dérive de la puissance paternelle, et les tribunaux ne

255 V° P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome X, pp. 524-525.

256 Cour de cassation, la dame de bouvet contre le sieur de Rennel, 1er mai 1813, (S. 1813. I. 230). 257 C. E. DELVINCOURT, Cours de Code civil, op. cit., Tome I, p. 469 : « S’ils ont été confiés à la

mère, ils ne pourront être émancipés qu’avec le concours du père et de la mère ».

258 J. M. BOILEUX, Commentaire sur le Code civil, op. cit., Tome I, p. 322 : « La mère remariée et

même non maintenue dans la tutelle, faute d’avoir, avant le convol, fait convoquer le conseil de

Documents relatifs