• Aucun résultat trouvé

4.2 Caract´eristiques de la coexistence de phase

4.2.3 D´ependence en temp´erature

Le diagramme des phases complet de la mati`ere nucl´eaire poss`ede trois dimensions. Il peut ˆetre repr´esent´e par la superposition des diagrammes plans obtenus pour diff´erentes valeurs de la temp´erature. C’est ce que montre la figure 4.11 pour l’espace des param`etres intensifs : les diff´erentes lignes de coexistences repr´esent´ees constituent la projection sur le plan (µn, µp) de la surface de coexistence qui forme le diagramme des phases dans l’espace (β, µn, µp).

´

Etudions maintenant la d´ependance en temp´erature de l’´equilibre de phase dans le plan des densit´es. La figure 4.12 pr´esente plusieurs courbes de coexistence isothermes trac´ees dans le plan (Z/A, ρ), afin de souligner le rˆole de l’isospin. L’invariance par ´echange neutrons-protons se tradui- sant par la sym´etrie des courbes par rapport `a l’axe Z/A = 0.5, seule la partie riche en neutrons (Z/A < 0.5) sera discut´ee par la suite.

La r´egion de coexistence la plus ´etendue correspond `a la courbe de temp´erature nulle. Elle est d’ailleurs la seule `a atteindre le bord Z/A = 0, correspondant `a un gaz de neutrons (cette sp´ecificit´e

4.2.3 D´ependence en temp´erature 61

(MeV)

n

µ

-80

-60

-40

-20

0

20

(MeV)

p

µ

-80

-60

-40

-20

0

20

µ

µ

3

Fig. 4.11 – Diagramme de phase en (µn, µp) pour diff´erentes valeurs de T . Trait ´epais : T = 0. En traits pointill´es : T = 4, 6, 8M eV . En traits pleins : T = 10, 10.5, 11, 11.5, 12, 12.5, 13, 13.5, 14M eV . Les points critiques sont marqu´es aux extr´emit´es de chaque ligne de coexistence. Le point critique ultime correspondant `a la mati`ere sym´etrique pour Tu= 14.54M eV est ´egalement indiqu´e.

)

-3

(fm

ρ

0

0.02

0.04

0.06

0.08

0.1

0.12

0.14

0.16

Z/A

0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

1

Fig. 4.12 – R´egions de coexistence dans le plan (ρ, Z/A) obtenues pour differentes temp´eratures. La plus grande r´egion, marqu´ee par le trait ´epais, correspond `a T = 0. En traits pointill´es : T = 4, 6, 8M eV . En traits pleins : T = 10, 10.5, 11, 11.5, 12, 12.5, 13, 13.5, 14M eV . Pour chaque valeur de la temp´erature, les points critiques sont marqu´es. A la temp´erature critique Tu = 14.54M eV , la r´egion de coexistence se termine par un point critique ultime (`a Z/A = 0.5) qui est ´egalement indiqu´e. Les diff´erents points critiques forment une ligne marqu´ee par un trait gris ´epais. La ligne en points-tirets relie les points d’asym´etrie maximale pour chaque r´egion de coexistence.

4.2.3 D´ependence en temp´erature 63 est due `a la singularit´e de la distribution de Fermi-Dirac `a T = 0 qui vient d’ˆetre discut´ee). Quand une temp´erature finie est introduite, le diagramme associ´e concerne des valeurs non nulles de Z/A, ce qui signifie que l’´equilibre a toujours lieu entre des phases contenant chacune les deux types de particules.

La r´egion de coexistence d´ecroˆıt r´eguli`erement avec la temp´erature : son extension en asym´etrie se r´eduit, tandis que les densit´es des branches liquide et gaz se rapprochent. Ce rapprochement se fait `a la fois par une augmentation globale de la densit´e pour la branche gaz, et par une diminution pour la branche liquide. Ainsi, tandis que la temp´erature augmente, chaque courbe de coexistence se situe `a l’int´erieur de la pr´ec´edente. Lorsqu’on atteint la temp´erature critique Tu, la courbe de coexistence se r´eduit `a un point de la mati`ere sym´etrique, qui est le point critique ultime du diagramme des phases.

Les points critiques sont indiqu´es sur chacun des diagrammes isothermes : ils forment ensemble une ligne critique. ´Etant donn´ee la r´eduction de la r´egion de coexistence avec la temp´erature, cette ligne correspond naturellement `a une asym´etrie d´ecroissante entre T = 0 et T = Tu. Il est int´eressant de constater que la densit´e critique diminue ´egalement au cours de cette ´evolution : elle est en cela entraˆın´ee par la baisse globale de la densit´e de la branche liquide, qui ´evolue plus rapidement que la densit´e du gaz.

La diminution en asym´etrie et en densit´e des points critiques avec la temp´erature est en accord avec des ´etudes r´ealis´ees auparavant avec diff´erentes interactions effectives [Mul95, Li98, Lee01, Ish03].

Nous nous sommes ´egalement int´eress´es `a une autre ligne de points particuliers, qui est celle des points d’asym´etrie maximale. Pour chaque temp´erature, on rep`ere le point de la courbe de coexistence correspondant au rapport Z/A minimal, que l’on note (Z/A)min(toujours pour d´ecrire la partie riche en neutrons). Ce point ne correspond pas au point critique (qui a une asym´etrie (Z/A)c > (Z/A)min) : on trouve qu’il se situe toujours `a une densit´e inf´erieure `a la densit´e critique, c’est `a dire sur la branche gaz. Consid´erant la ligne des points d’asym´etrie maximale, on voit d’ailleurs que son ´evolution en densit´e est oppos´ee `a celle des points critiques, `a savoir que la densit´e de ces points augmente avec la temp´erature. Les deux lignes se rejoignent n´ecessairement au point critique ultime (pour T = Tu), o`u la courbe de coexistence se r´eduit `a un point.

Le fait que le point d’asym´etrie maximale diff`ere du point critique se traduit par l’existence d’un ph´enom`ene appel´e transition r´etrograde [Hua63]. Ce ph´enom`ene a lieu dans la petite r´egion d’asym´etrie telle que (Z/A)min< Z/A < (Z/A)c. Consid´erons une transformation `a Z/A constant compris dans cet intervalle. La r´egion de coexistence est alors travers´ee. En partant des basses densit´es, l’on rencontre d’abord la branche « gaz » de la courbe de coexistence. La densit´e aug- mentant, il se forme une phase liquide telle que (Z/A)L > Z/A, en ´equilibre avec un gaz tel que (Z/A)G< Z/A. Au cours de l’´evolution dans la r´egion de coexistence, la proportion de liquide aug- mente, puis diminue. Elle s’annule `a la sortie de la coexistence, o`u l’on retrouve comme en entr´ee une phase pure gazeuse (bien que sa densit´e soit plus ´elev´ee qu’au d´epart de la transformation).

Pour un syst`eme trop riche en neutrons (Z/A < (Z/A)min), il ne peut y avoir aucune coexis- tence de phase.

Afin de mieux visualiser la d´ependance en temp´erature du diagramme de phase, les figures 4.13 et 4.14 le pr´esentent sous diff´erents points de vue. Sur la figure 4.13 sont trac´ees diff´erentes coupes `a Z/A constant superpos´ees dans le plan (T, ρ). Chacune forme une arche, qui rassemble les points d’intersection des diff´erentes courbe isothermes avec un plan tel que Z/A est fix´e. La ligne des points critiques et celle des points d’asym´etrie maximale sont ´egalement trac´ees, ce qui fait apparaˆıtre l’´evolution de leur densit´e.

La figure 4.14 repr´esente la d´ependance en Z/A de la zone de coexistence. Pour chaque valeur de Z/A, on y lit deux temp´eratures particuli`eres, l’une correspondant `a la ligne des points critiques, et l’autre `a la ligne des points d’asym´etrie maximale. Dans le premier cas, il s’agit de la temp´erature critique associ´ee au rapport Z/A consid´er´e, Tc(Z/A) : `a savoir la temp´erature pour laquelle le point critique a le rapport isotopique (Z/A)c= Z/A. Dans le second cas, on a la temp´erature maximale Tmax(Z/A) pour laquelle un point d’asym´etrie Z/A peut ˆetre impliqu´e dans une coexistence de phase. Ces deux courbes v´erifient n´ecessairement la relation Tc(Z/A) < Tmax(Z/A). On voit qu’elles pr´esentent toutes deux une allure assez plate (faible d´ependance en Z/A) aux alentours de

)

-3

(fm

ρ

0 0.02 0.04 0.06 0.08 0.1 0.12 0.14 0.16

T (MeV)

0 2 4 6 8 10 12 14

Fig. 4.13 – Coupes de la r´egion de coexistence en fonction de la densit´e totale pour diff´erentes valeurs de Z/A, r´eguli`erement espac´ees entre 0.05 et 0.5 par pas de 0.05. Ligne grise ´epaisse : ligne des points critiques. Ligne en points-tirets : ligne d’asym´etrie maximale.

la mati`ere sym´etrique. Les temp´eratures chutent l’une apr`es l’autre pour des asym´etries ´elev´ees : dans cet intervalle, la diff´erence entre Tc et Tmax peut atteindre plusieurs MeV. C’est une autre fa¸con d’envisager la condensation r´etrograde, signifiant que l’on peut avoir un ´equilibre liquide-gaz `a une temp´erature sur-critique par rapport `a la valeur d’asym´etrie du gaz.