C. Ontogenèse et mise en place des cellules de Sertoli
2) Développement des cellules de Sertoli
Les cellules de Sertoli jouent un rôle crucial dans la mise en place de la gonade et dans
la différenciation mâle au cours de la vie intra-utérine. Pendant la gestation, les cellules de
Sertoli sont les premières cellules à se différencier au sein de la gonade indifférenciée, ce qui
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permet notamment la mise en place des cordons testiculaires, la prévention de l’entrée en
méiose des cellules germinales, ainsi que la différenciation des cellules de Leydig (Swain and
Lovell-Badge, 1999; Koopman, 2001 and 2005; Brennan and Capel, 2004; Sharpe 2006).
a) Développement embryonnaire et pré-natal
Il y a une première phase de prolifération des cellules de Sertoli durant la vie fœtale et
cette phase est indépendante de la FSH. Les cellules de Sertoli immatures forment alors des
agrégats entre elles et entourent progressivement les cellules germinales primordiales (PGC)
pour former les cordons testiculaires, qui sont les précurseurs des tubes séminifères du
testicule adulte, et qui isolent les PGC du compartiment interstitiel. Les PGC naissent à partir
d’une sous-population de cellules souches embryonnaires dans une zone proche de
l’ectoderme extra-embryonnaire (appelée épiblaste) à un stade précoce du développement
embryonnaire. Elles prolifèrent et migrent ensuite jusqu’au territoire occupé par la future
gonade.
Les cellules de Sertoli synthétisent des facteurs locaux qui d’une part inhibent l’entrée
en méiose des PGC, et d’autre part entraînent la migration de cellules mésenchymateuses qui
se différencieront en cellules péritubulaires ou en cellules de Leydig. Parmi les facteurs
sécrétés par les cellules de Sertoli, le FGF9 (Fibroblast Growth Factor 9), qui est une
molécule de signalisation impliquée dans de nombreux processus du développement, pourrait
jouer un rôle clef. En effet, FGF9 serait impliqué dans la prolifération et la migration des
cellules du mésenchyme au sein du testicule en formation, ainsi que dans la différenciation
des cellules de Sertoli par un processus de régulation autocrine (Colvin et al., 2001). D’autres
facteurs de type IGF, synthétisés par les cellules de Sertoli, joueraient un rôle crucial dans la
différenciation des cellules de Leydig.
Les cellules de Leydig foetales commencent alors à produire la testostérone. La testostérone
va alors induire le développement des canaux de Wolff en épididymes, canaux déférents et
vésicules séminales.
Les cellules de Sertoli synthétisent l’hormone anti-Müllérienne, AMH qui entraîne la
régression des canaux de Müller. Chez la femelle, ce sont ces canaux qui sont à l’origine des
trompes, de l’utérus et de la partie supérieure du vagin. L’AMH est également délétère pour
l’entrée en méiose des cellules germinales (Josso et al., 1998).
Figure 22: Prolifération post-natale des cellules de Sertoli chez la souris (adapté de Joyce et
al., 1993)
La prolifération des cellules de Sertoli débute durant la vie fœtale, il y a une première phase de prolifération avant la naissance. Puis, à la naissance, il y a un pic de prolifération. Les cellules de Sertoli prolifèrent jusqu’à la mise en place de la barrière hémato-testiculaire, vers 12-15 jours post-partum chez la souris. A la puberté, le stock définitif de cellules de Sertoli est constitué. Les cellules se différencient pour donner des cellules de Sertoli matures.
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b) Développement néo-natal et pré-pubertaire
A la naissance, les cellules de Sertoli représentent 80% des cellules du tube séminifère
(Bellve, 1993). Elles sont morphologiquement différentes de celles des souris adulte. En effet,
elles ont des formes irrégulières et leur noyau contient un à deux nucléoles.
La période néonatale est caractérisée par la croissance importante des cordons testiculaires
avec une phase de prolifération des cellules de Sertoli. Cette période est également
caractérisée par l’initiation de la spermatogenèse (différenciation des pro-spermatogonies en
spermatogonies et entrée en méiose de certaines d’entre elles).
La prolifération des cellules de Sertoli est une étape cruciale (Figure 22), puisque de leur
nombre va dépendre la taille du testicule, ainsi que la production spermatique chez l’adulte
(rat: Orth et al., 1988). La durée de prolifération sertolienne est variable selon les espèces.
Une fois le processus de prolifération terminé, le stock de cellules de Sertoli adulte est
constitué de manière définitive. Chez l’homme, les cellules de Sertoli prolifèrent pendant la
période néonatale et péripubertaire (Sharpe et al., 2003). Chez la souris, il y a une phase de
prolifération embryonnaire puis, une autre en post-natale (Sapsford et al., 1967). Au cours des
10-12 premiers jours après la naissance, les cellules de Sertoli se divisent par mitose
(Vergouwen et al., 1993). Cette prolifération atteint un pic juste après la naissance. Puis,
progressivement, la prolifération des cellules de Sertoli est ralentie, et celles-ci commencent
un processus de maturations morphologique et fonctionnelle (Sharpe et al., 2003). Chez la
souris, à l’âge de 10-12 jours, les cellules de Sertoli ont obtenu leur structure définitive. Elles
deviennent alors incapables de proliférer (Clermont and Perey, 1957). Les changements
morphologiques sont bien visibles : leur noyau s’est élargi et le nucléole est devenu plus
visible. Elles se sont allongées et ont émis des ramifications qui forment des zones de jonction
avec les cellules germinales. Les cellules de Sertoli positionnées de manière adjacente mettent
en place des connexions étroites entre elles. Ceci permet la formation d’un compartiment
adluminal à l’intérieur duquel les processus méiotiques et post-méiotiques prendront place. Ce
compartiment isole les cellules germinales de la circulation sanguine, en formant la barrière
hémato-testiculaire, constituée des jonctions serrées.
En se différenciant, la cellule de Sertoli acquiert également un certain nombre de
caractéristiques marquantes. Elle perd l’expression du gène de l’AMH. Elle acquiert les
Figure 23: Niveaux circulants des hormones durant le développemnt post-natal chez la souris
(Adapté de : Jean-Faucher et al., 1983 pour LH et FSH ; Hadj-Sahraoui et al., 2000 pour la T3 et Wu et al., 2010 pour la testostérone).