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Quels sont les acteurs qui établissent le dialogue entre génome nucléaire et génome

D. Discussion

V. Quels sont les acteurs qui établissent le dialogue entre génome nucléaire et génome

à l’activation par la T3 des récepteurs TRα1 et p43?

Nous avons montré que le récepteur mitochondrial p43 est fonctionnel dans le

testicule. Ce résultat est en accord avec les résultats montrant que la T3 a une action directe

sur cet isoforme, qui est importé dans la mitochondrie pour stimuler la transcription du

génome mitochondrial (Wrutniak et al., 1995; Casas et al., 1999). Wrutniak et ses

collaborateurs (1995) ont en effet montré que la partie N-terminale de p43 sert de facteur de

transcription T3-dépendant initiant la transcription des gènes mitochondriaux. La régulation

directe de la synthèse d’ARNs mitochondriaux par la T3 a été démontrée en 1999 par

Enriquez et ses collaborateurs; ils ont montré que la T3 influence de manière directe la

transcription des gènes mitochondriaux en permettant l’accès des facteurs protéiques requis

pour la transcription.

Nous avons mis en évidence dans nos trois lignées une modification de la morphologie

des mitochondries et une augmentation de la transcription de nombreux gènes

mitochondriaux, impliqués dans les activités mitochondriales, notamment dans le transport et

la translocation de molécules au travers des membranes mitochondriales. L’implication de la

T3 dans le contrôle de la mitochondriogenèse et des activités mitochondriales est démontrée

(Harper and Seifert, 2008; Kim, 2008) mais, les mécanismes responsables sont inconnus

(Cheng et al., 2010). En général, de haut niveau de T3 stimule l’activité respiratoire des

mitochondries alors que l’activité est basse dans le cas d’hypothyroïdie (Garesse et al., 2001).

Les niveaux d’ARNm de plusieurs gènes mitochondriaux codés à la fois par le génome

nucléaire et le génome mitochondrial ont été démontrés comme modifiés drastiquement en

réponse au niveau de T3 dans plusieurs tissus dont le foie et le cerveau (Alvarez-Dolado et

al., 1999; Izquierdo and Cuezva, 1993; Joste et al., 1989; Luciakova and Nelson, 1992;

Vega-Nunez et al., 1995; Wiesner et al., 1992).

Les interactions entre les deux génomes semblent impliquer deux voies (Parikh et al.,

1987 ; Poyton and McEwen, 1996). La première voie implique le fait que le génome nucléaire

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code pour les sous-unités de protéines mitochondriales et cela est important pour la régulation

de la production d’énergie oxydative. Ces sous-unités sont régulées différemment (par les

signaux induits lors du développement) et permettent aux tissus d’ajuster leur production

d’énergie en fonction des demandes. La deuxième voie implique la collaboration des deux

génomes pour la synthèse et l’assemblage des protéines mitochondriales. Cette régulation

requiert des échanges entre noyau et mitochondrie. Les communications noyau vers

mitochondrie se font via les protéines traduites dans le cytosol et importées dans la

mitochondrie. Les communications mitochondrie vers noyau impliquent des signaux

métaboliques et des voies de transduction au travers de la membrane interne de la

mitochondrie (Liu and Butow, 1999; Epstein et al., 2001).

L’équipe de Cabello a comparé les influences respectives des voies d'action nucléaire et

mitochondriale de la T3 (Cabello et al., 2008). Ils ont fait apparaître, selon les effets

considérés, une complémentarité (différenciation des myoblastes, mitochondriogenèse), une

additivité (différenciation des myoblastes) ou des actions opposées (expression des myosines),

induisant ainsi une finesse particulière de la régulation des effets physiologiques de

l'hormone. Nos résultats mettent en évidence une grande finesse de la régulation des effets

physiologiques de la T3 sur le développement post-natal testiculaire, via la complémentarité

des deux voies d’action, nucléaire et mitochondriale.

Nous avons montré que les lignées TRα

AMI

-SC, TRα0 et p43KO présentent un

phénotype similaire. Or, dans la lignée p43KO, c’est la forme mitochondriale qui est affectée

alors que dans la lignée TRα

AMI

-SC elle n’est pas affectée. Le fait qu’on aboutisse au même

phénotype en n’altérant pas les mêmes récepteurs est troublant et, met en évidence un

dialogue entre génome nucléaire et génome mitochondrial pour le contrôle de la prolifération

des cellules de Sertoli. Les études menées initialement sur les mécanismes régulateurs

gouvernant les interactions entre les deux génomes se sont focalisées sur l’expression et

l’import des gènes nucléaires impliqués dans les fonctions mitochondriales (Forsburg and

Guarente 1989). L’expression de ces gènes a été montrée comme répondant au changement de

niveau d’oxygène (Poyton and McEwen, 1996), qui régule les gènes impliqués dans le

transport des électrons mais aussi les enzymes impliquées dans les différentes voies de

biosynthèse. Nous avons montré l’implication de Cdk4 et de ses régulateurs, JunD et c-myc

chez les TRα0 et Trα

AMI

-SC. Chez les p43KO, le fait que l’expression de JunD ne soit pas

modifiée et que celle de c-myc soit augmentée significativement montre l’existence de

plusieurs voies de signalisation. Il a été démontré que l’expression du proto-oncogène c-myc

est respectivement stimulée ou diminuée par une inhibition ou une stimulation de l’activité

mitochondriale. Cette régulation s’effectue en grande partie au niveau de la stabilité du

messager, et au niveau de la localisation cellulaire de la protéine dans les myoblastes. De plus,

la surexpression de c-myc reproduit très exactement les effets d’une inhibition de l’activité

mitochondriale dans le muscle (Seyer et al., 2006). Dans notre étude, l’augmentation

d’expression de c-myc semble être la conséquence de l’augmentation de l’expression des

gènes mitochondriaux. c-myc est connu pour réguler Cdk4 et les fonctions mitochondriales, il

pourrait donc faire le lien entre les deux génomes.

Il nous reste à étudier l’expression de Cdk4, qui régulée à la fois par JunD et c-myc,

pourrait être le pivot de ce dialogue entre les deux génomes ainsi qu’à mettre en évidence les

facteurs mitochondriaux qui activent l’expression de c-myc.

L’implication des ROS nous semble une piste intéressante. En effet, il est connu que les ROS

peuvent agir comme second messagers et, spécifiquement activer certaines voies de

signalisation (Storz, 2005), notamment celles impliquées dans la prolifération (Burdon et al.,

1990; 1995 et 1996). Une étude récente montre qu’il y aurait un lien entre c-myc et la

production des ROS (Dang et al., 2005). Il nous semble donc maintenant important d’évaluer

le niveau des ROS afin de de déterminer s’ils sont impliqués dans la régulation de

l’expression du facteur nucléaire c-myc.

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