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Chapitre I - introduction

C. L’ATPase calcium du réticulum sarcoplasmique (SERCA1a)

C.3 L’ATPase calcium (SERCA1a) du réticulum sarcoplasmique

C.3.2 La détermination des structures des différents intermédiaires catalytiques de

a) La structure 3D de la forme E2H3VO4 de l’ATPase-Ca2+.

Les premières études structurales ont débuté dans les années 1960, avec l’observation de microsomes de réticulum sarcoplasmique en microscopie électronique en coloration négative. Les groupes de Martonosi et de Ikemoto ont en même temps observés des particules de 40 Å de diamètre à la surface des vésicules de SR [87, 88]. Le dernier groupe remarqua que ces particules étaient distantes de 40 Å de la membrane, et proposa que les particules doivent être reliées à la membrane par une tige trop petite pour être visible [88]. L’analyse de clichés de cryofracture de vésicules de SR a démontré la présence d’un domaine transmembranaire [89]. La formation des premiers cristaux de Ca-ATPase fut décrite par Dux et Martonosi en 1983 [90]. L’incubation de vésicules avec du décavanadate permet la formation d’un réseau cristallin de molécule à la surface des vésicules. Ces cristaux ne peuvent être produits qu’en absence de calcium, l’addition de calcium dans le milieu de cristallogenèse induit leur destruction. La forme E2H3 semble donc être requise pour la formation de ce type de cristal. L’analyse d’images à partir de clichés de cristaux bidimensionnels par microscopie électronique en coloration négative, a permis de générer une carte de projection [91]. Elle indique que la forme E2H3VO4 de l’ATPase cristallise sous forme d’un dimère et présente l’aspect d’une poire avec un domaine central dense qui s’étale pour former un petit lobe. La première reconstruction 3D de l’ATPase calcium sous la forme E2H3VO4, a été réalisée en 1986 avec une résolution de 25 Å [92]. L’utilisation de la coloration négative pour ce type d’étude structurale, ne permet pas de déterminer l’organisation de la partie transmembranaire de la protéine. La mise en place et le développement de la cryomicroscopie électronique, ainsi que la formation de plus grands cristaux en forme de tube, ont rendu possible l’observation de la protéine dans sa totalité avec une meilleure résolution. La cryomicroscopie électronique permet d’observer les tubes cristallins sans colorant et non aplatis. De plus, cette technique de congélation ultrarapide en film mince conserve la conformation native de la protéine dans son milieu, contrairement à la coloration négative qui déshydrate l’échantillon. L’étude des tubes a permis dans un premier temps d’atteindre une résolution de 14 Å (Figure 14, [93]).

A B

C D

cytoplasme

membrane

Figure 14 :

La structure 3D de l’ATPase-Ca2+ dans la conformation E2H3VO4 à 14 Å de résolution – (A) Coupe transversale d’un tube cristallin de l’ATPase-Ca2+ du réticulum

sarcoplasmique. Les deux anneaux concentriques correspondent à deux feuillets de la bicouche lipidique. Les densités supérieures correspondent au dimères d’ATPses. (B) La moitié avant d’un tube qui fait apparaître l’organisation hélicoïdale du cristal. (C) La carte de projection générée à partir d’analyse d’images obtenues par cryomicroscopie électronique [93]. (D) La structure de la Ca-ATPase dans la conformation E2H3VO4 [93].

La reconstruction 3D montre que le domaine cytoplasmique, qui représente près de 70 % de la masse de la protéine, est relié au domaine membranaire par une tige, confirmant les premières observations de Ikemoto en 1968 [88]. La résolution du domaine transmembranaire était insuffisante pour visualiser individuellement les hélices . Cependant, la taille globale de ce domaine concorde avec la présence de dix segments transmembranaires. La partie luminale de l’enzyme, qui ne représente que 5 % de la masse totale de la protéine, est identifiée par une densité majoritaire qui semble correspondre à la boucle entre les segments transmembranaires M7 et M8 [93]. Ces dernières années la cryomicroscopie électronique a vu son champ d’action considérablement s’accroître, notamment pour ce qui est de la résolution maximale. Les récents développements de microscope électronique à émission de champ (FEG) et de traitement des données ont permis de pousser cette résolution en dessous de 10 Å. Ainsi, en 1998 a été publiée la structure 3D de l’ATPase calciumsous la forme E2H3VO4 avec une résolution de 8 Å (Figure 15) [94]. A cette résolution, les hélices transmembranaires peuvent être observées individuellement. Puis en 2002, la résolution atteint 6 Å de résolution, toujours avec les mêmes cristaux tubulaires [95].

b) La structure 3D de la forme E1Ca2 de l’ATPase-Ca2+.

L’ATPase calciuma aussi été cristallisée sous sa forme E1Ca2. Les premiers cristaux ont été obtenus 1985, en incubant des vésicules de réticulum sarcoplasmique en présence de calcium, à pH légèrement alcalin (pH8) [96]. Les cristaux 2D sont de type vésiculaire et donc inexploitables. A partir

Figure 15 :

La structure de

cryomicroscopie électronique de l’ATPase-Ca2+ à 8Å de résolution dans la conformation E2H3VO4 [94].

problème posé par ce type de cristallisation, est de trouver un détergent dans lequel la protéine reste active pendant plusieurs jours. De plus, il a été montré que la protéine solubilisée doit être encore associée à des lipides pour garder son activité. Leur présence est indispensable pour la formation des cristaux [97, 98]. Ainsi, le détergent utilisé doit permettre l’extraction de la protéine, sa stabilisation et une délipidation pas trop importante. Une cinquantaine de détergents anioniques, zwittérioniques et neutres ont été testés [97]. Le C12E8 rempli parfaitement toutes ces conditions avec une stœchiométrie protéine:détergent de 1:1 (poids:poids). Le deuxième paramètre physico-chimique important pour la cristallogenèse de l’ATPase sous la forme E1Ca2, est la concentration en calcium. Les conditions de cristallogenèse sont différentes de celles de la forme E2. Les cristaux de la forme E1

ne se forment qu’en présence de calcium. Une concentration inférieure au millimolaire ne permet pas la formation de cristaux. La concentration optimale est de l’ordre de 10-2 M [98].

Les cristaux obtenus sont des multicouches empilées dans lesquelles les molécules d’ATPase sont orientées de façon bidirectionnelle par rapport à la bicouche lipidique [98]. Malheureusement, ces cristaux sont petits et mal ordonnés. Pour agrandir la taille et améliorer la qualité de ces cristaux, une autre approche a été mise au point. La protéine est solubilisée puis purifiée par chromatographie d’affinité sur une colonne agarose-Red 120 [99]. La cristallogenèse est induite par incubation en présence de lipides (phosphatidyl choline), de calcium, de C12E8 et 20 % glycérol. Cette solution de micelles ternaire protéine/lipide/détergent est dialysée contre un milieu qui ne contient pas de détergent. L’élimination du détergent permet la fusion des micelles et de former ainsi de grands cristaux. En 1997, la dialyse est remplacée par l’utilisation de billes hydrophobes qui absorbent les détergents (bio beads). Des études sur la vitesse d’élimination du détergent et sur le rapport lipide/protéine, ont été menées (Figure 16) [100]. L’élimination lente, qui s’effectue en quatre additions successives de bio beads sur deux heures, semble être la meilleure technique pour obtenir de grands cristaux ordonnés et organisés en multicouche. Plusieurs cartes de projection ont été générées à partir du traitement d’images obtenues par cryomicroscopie électronique [99, 101]. Aucune reconstruction 3D de l’ATPase calcium sous sa forme E1Ca2 n’a pas pu être réalisée à partir de ces cristaux multilamélaires. L’interprétation des clichés de diffraction est impossible.

Un troisième type de cristal a été obtenu en présence de calcium et d’ADP. La conformation E1Ca2.ADP forme un cristal 2D en monocouche [100]. Les molécules d’ATPases présentent une

orientation bidirectionnelle par rapport à la membrane. Toutefois, ces cristaux sont de trop petite taille et aucune structure 3D de la forme E1Ca2.ADP n’a pu être déterminée.

Tous ces résultats montrent que la conformation de l’ATPase-Ca2+, c’est à dire l’occupation ou non des sites nucléotidique et de fixation du calcium, influent sur le type de cristal formé et sur la structure 3D de l’ATPase-Ca2+. Ces différences ont été confirmées par l’obtention en 2000 et 2002, des structures atomiques des formes E1Ca2 et E2H3TG (Figure 17) [102, 103]. La première structure 3D déterminée à une résolution de 2,6 Å (Figure 17A), montre la présence de quatre domaines. Le domaine transmembranaire contient dix hélices  (M1 – M10) avec quelques boucles courtes du côté luminal et cytoplasmique. Quatre des hélices transmembranaires (M2 – M5) se prolongent vers le cytoplasme pour former la tige (S2 – S5) ou cou de l’ATPase-Ca2+. Les trois autres domaines qui sont cytoplasmiques, correspondent aux deux grandes boucles cytoplasmiques entre les hélices M2/M3 et M4/M5. La boucle M4/M5 constitue les domaines de fixation du nucléotide (N) et de phosphorylation (P). La boucle M2/M3 avec la région amino-terminale de l’enzyme, constitue le domaine de transduction ou déclencheur (A pour actuator). Ces trois domaines cytoplasmiques se sont rapprochés dans la deuxième structure atomique, ce qui donne un aspect plus compact ou "fermée" de la forme E2H3TG (Figure 17B).

Figure 16 :

La formation de cristaux en multicouche de la forme E1Ca2 par élimination du détergeant par les bio beads – L’élimination rapide s'effectue en 30 minutes avec une seule addition de bio beads. L’élimination lente s’effectue en quatre additions successives de bio beads sur deux heures [100].

Elimination lente Elimination rapide lipide/protéine Elimination lente Elimination rapide lipide/protéine

Finalement, plusieurs structures 3D de différents intermédiaires catalytiques de l’ATPase calcium ont été déterminées. Ces informations structurales permettent de mieux comprendre le mécanisme moléculaire de transport du calcium. Néanmoins, aucune structure 3D ne décrit un dérivé phosphorylé covalent des formes E1 et/ou E2, intermédiaire indispensable dans le cycle catalytique de l’ATPase-Ca2+.

Figure 17 :

Les structures atomiques de l’ATPase-Ca2+ déterminées par diffraction des rayons X – (A) E1Ca2 à 2,6 Å de résolution et (B) E2H3TG, et 3,1 Å de résolution [101, 102]. Les domaines de fixation du nucléotide (N), de phosphorylation (P) et l'actuator (A) sont représentés par les cercles en pointillés.

A A

N N