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Détermination de la spéciation du chlore dans les sols par spectrométrie

2 Matériel, dispositifs expérimentaux et méthodes d’analyses

2.3 Analyses réalisées sur les sols

2.3.4 Détermination de la spéciation du chlore dans les sols par spectrométrie

2.3.4.1 Principe de la méthode spectrométrique XANES.

La spectroscopie d’absorption des rayons X permet de décrire l’environnement local autour d’un atome donné (quelques Å) et permet d’en déduire son état d’oxydation, sa coordination et la nature, la distribution spatiale des atomes voisins.

Les spectres obtenus décrivent l’évolution du coefficient d’absorption en fonction de l’énergie du faisceau incident sur une gamme d’énergie réduite, de 100 à quelques centaines d’eV avec une résolution spectrale de 0,1 à 2 eV. Le phénomène physique à l’origine de cette évolution ou des variations du coefficient est l’absorption des photons X, suivi de l’éjection d’un électron de cœur de l’atome absorbant, qu’on appelle aussi effet photo-électrique (figure 2. 8).

Figure 2.8. Schéma de l’effet photo-électrique

L’avantage majeur de la technique est que les énergies d’ionisation ou encore les énergies pour lesquelles l’effet photoélectrique se produit sont des valeurs discrètes spécifiques d’une couche électronique donnée d’un atome donné. Ainsi en se plaçant dans une gamme d’énergie avoisinant l’énergie des électrons de cœur des atomes de chlore, on ne mesure que le phénomène d’absorption par les atomes de chlore. Les spectres obtenus sont généralement décrits selon deux ou trois régions, la première région avant seuil qui décrit les transitions électroniques autorisées, la région du seuil pour laquelle les photons incidents sont absorbés et des électrons éjectés de l’atome (ou région XANES, X ray Absorption Near Edge

e

-

Haute Énergie

électron de coeur

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Structure) et la région qui s’étend sur plusieurs centaines d’eV après le seuil d’absorption, est la région dénommée EXAFS (Extended X-ray Absorption Fine Structure (Figure 2. 9).

Figure 2.9. Spectre d’absorption des rayons X au seuil K du Cl.

L’énergie d’ionisation E0 correspond à l’énergie du seuil d’absorption (communément prise comme le maximum de la dérivée première du spectre)

2.3.4.2 Préparation des échantillons pour les mesures de spectroscopie et conditions de mesure

Pour les échantillons de sol, environ 30 mg de sol séché sont broyés finement dans un mortier puis pressés à l’aide d’un pastilleur (2 tonnes) pour former une pastille (6 mm). L’échantillon est fixé sur un portoir en cuivre par du scotch carbone, placé dans la chambre «échantillon » (Figure 2. 10) et mis sous vide (pompe turbo-moléculaire). Le portoir en cuivre est relié par une tresse en cuivre à un réservoir d’azote liquide (température de l’échantillon

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d’environ -100 °C), rempli une fois que la pression dans l’enceinte est suffisamment faible. La faible température a pour objectif de diminuer ou ralentir les dommages liés au rayonnement (volatilisation du chlore, production de radicaux). L’obturateur de la ligne n’est ouvert que lorsque la température et la pression sont stables.

Les échantillons de référence ont été mesurés à l’aide d’un porte–échantillon en boutonnière. Les mesures ont été effectuées sur la ligne de lumière LUCIA du synchrotron SOLEIL. La ligne est installée au niveau d’un élément d’insertion de type onduleur, qui garantit une meilleure brillance du faisceau. L’intensité du courant dans l’anneau était de l’ordre de 400 mA pour nos mesures. Le rayonnement X incident est monochromatisé par un monochromateur à cristaux et focalisé sur l’échantillon par des miroirs de type Kirkpatrick-Baez.

Dans le cas de nos échantillons, les concentrations en chlore nous ont contraints à travailler par mesure de la fluorescence X directement liée à l’absorption des rayons X. La fluorescence constitue un des phénomènes physiques de désexcitation de l’atome.

Figure 2.10. Vue de la chambre-échantillon (Flanck et al. (2006)).

Les spectres ont été enregistrés entre 2800 et 2880 eV (région XANES du spectre) avec un pas en énergie de 0,2 dans la région du seuil (2818-2840 eV) et 0,5 eV après seuil (2840-2860). Le temps d’acquisition est de 1 sec par point. Ce temps d’acquisition par point a été

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choisi afin de pouvoir détecter des modifications de la spéciation du chlore sous le faisceau de rayons X et pour chaque échantillon entre 3 et 5 spectres ont été enregistrés.

Le tableau 2. 6 présente les échantillons qui ont été choisis pour ces analyses. Les échantillons ont été choisis afin de tester l’influence de différentes traitements sur la spéciation du chlore : stérilisation par autoclave, stérilisation par irradiation, ré-inoculation, incubation en conditions aérobies et anaérobies, avec ou sans ajout de sels de chlore.

Tableau 2.6. Récapitulatif des échantillons analysés par spectroscopie d’absorption X. Clo = chlore organique, Clin Chlore minéral ou inorganique XANES.

Avant incubation

Echantillon Modalité

MF2013 initial sans traitement stérilisé par autoclave VF2013 initial sans traitement stérilisé par autoclave VF2014 stérilisé par irradiation

Première expérience d’incubations MF2013 ré-inoculé

ré-inoculé ajout de sels de chlore minéral autoclavé ajout de sels de chlore minéral VF2013 ré-inoculé

ré-inoculé ajout de sels de chlore minéral Seconde expérience d’incubations VF2014 ré-inoculé

ré-inoculé ajout de sels de chlore minéral ré-inoculé anaérobie

ré-inoculé ajout de sels de chlore minéral anaérobie irradié

irradié ajout de sels de chlore minéral irradié anaérobie

irradié ajout de sels de chlore minéral anaérobie Solutions Standards

Acide trichloroacétique (ClO) aliphatique TCA Chlorotétracycline (ClO) aromatique CTCH

Chlorure de calcium (Clin) CaCl2

Chlorure d’ammonium (Clin) NH4Cl

Des standards en solution aqueuse de ClO (CTCH et TCA) et Clin (CaCl2 et NH4Cl) ont été analysés. Les composés CTCH et TCA correspondent à des standards organochlorés respectivement aromatique et aliphatique.

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2.3.4.3 Méthode de traitement des spectres

L’analyse des spectres XANES a été effectuée grâce au logiciel Athena (Ravel and Newville., 2005). Tout d’abord, l’ensemble des spectres obtenus pour un même échantillon (ou même pastille) sont moyennés à condition que tous les scans ou tous les spectres soient superposables et qu’aucune évolution de la spéciation du chlore ne soit détectée entre deux spectres successifs. Dans le cas d’une évolution, seul le premier spectre mesuré est retenu.

L’interprétation qualitative des spectres s’est fondée sur la publication de Leri et al. (2007) (Figure 2. 11).

Figure 2.11. Spectres obtenus par spectrométrie XANES dans les travaux de Leri et al., 2007. A, B = tétrachlorophénol, chlorophénol rouge (chlore organique aromatique), C = chlorodécane (chlore organique aliphatique), D, E, F = KCl solide, trizma-HCl solide, glycine-HCl solide (chlore

inorganique).

Les spectres A, B et C ont été obtenus pour trois composés organochlorés, respectivement du tétrachlorophénol (A) du chlorophénol (B) et du chlorodécane (C). Les deux premiers ont une partie organique aromatique, alors que le spectre C a une partie organique aliphatique. D’un point de vue spectral, le caractère aromatique du ligand organique, décale le seuil d’absorption de quelques eV vers les plus hautes énergies (0,2 à 0,4 eV) et la première oscillation (X1) est décalée également vers les plus hautes énergies. Les spectres suivants sont obtenus pour des composés iorganiques ou minéraux, du KCl solide (D), du trizma-HCl solide

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(F), du HCl solide avec ajout de glycine (G) et du HCl aqueux (H) respectivement. Ces spectres montrent que le seuil d’absorption du chlore inorganique est décalé d’environ 2-2,2 eV vers les plus hautes énergies.

Les spectres des échantillons ainsi que les valeurs correspondantes de E0 et X1 ont été comparés à ceux obtenus pour les standards du ClO (CTCH, TCA) ou du Clin (CaCl2, NH4Cl) afin de positionner nos échantillons entre les deux pôles du chlore inorganique et des composés organo-chlorés.

Des combinaisons linéaires (Linear Combination Fitting) ont été effectuées avec le même programme Athena pour tenter de mettre en évidence de manière numérique les évolutions de la spéciation du chlore. Pour ce faire, des spectres de sols, présentant des caractéristiques extrêmes (caractéristiques organiques ou inorganiques) ont été utilisés.