• Aucun résultat trouvé

3-2-3 DÉTECTION PAR DISSOCIATION DE DUPLE

mettant à profit l’existence de deux aptamères capables de reconnaitre spécifiquement cette protéine. La liaison de ces aptamères sur la thrombine fait intervenir des sites protéiques distincts ce qui permet une double reconnaissance simultanée sans chevauchement des aptamères. L’un des aptamères a été immobilisé sur un support solide et l’autre a été couplé à un complexe d’europium. La thrombine a été incubée en présence de ces deux entités ce qui a abouti à la formation d’un super-complexe Aptamère/Thrombine/Aptamère. Le complexe d’europium sert de transducteur par phénomène de fluorescence. La sélectivité de ce système a été investiguée et il a été démontré que la présence de fortes concentrations (2000 fois plus) d’immunoglobuline G et d’albumine bovine ne perturbaient pas la détection de la thrombine. La limite de détection a également été déterminée et est de l’ordre du nanomolaire.

II-3-2-3 DÉTECTION PAR DISSOCIATION DE DUPLEX

Ces techniques mettent en application la capacité des aptamères à former des duplex avec une séquence complémentaire par appariement de bases selon les règles de Watson et Crick(21). Cependant la technologie SELEX permet d’obtenir des aptamères

dont l’affinité pour leur cible est plus importante que pour la séquence complémentaire. En conséquence, l’introduction de la cible dans le milieu va provoquer la destruction de la structure duplex. Cette dissociation entraine une modification du signal mesurable.

Kong(52) et ses collaborateurs ont proposé un système de détection de l’adénosine

triphosphate (ATP) et de la thrombine par extinction de fluorescence consécutive à la dissociation d’un duplex aptamère/bras complémentaire. Pour chacune de ces cibles, deux brins d’ADN ont été synthétisé : l’aptamère spécifique de la thrombine ou de l’ATP ainsi que leurs séquences complémentaires respectives. Chaque aptamère a été hybridé avec son bras complémentaire afin de former un duplex stable. Ces duplex ont été incubés en présence de SYBR Green I qui est une sonde fluorescente présentant une forte spécificité pour l’ADN double brin. L’intercalation de cette molécule SYBR Green I au sein de la double hélice d’ADN provoque une émission de fluorescence à 520 nm après excitation à 495 nm. En présence de leurs cibles respectives, les duplex sont été dissociés et la fluorescence a été inhibée (schéma 17A).

Schéma 17 : Représentation de deux systèmes « signal-off » de détection utilisant le principe de dissociation du duplex aptamère/brin complémentaire après addition de la cible. Cette destruction de la structure hélicoïdale provoque un quenching de fluorescence.

Li et Ho(53) ont élaboré un test de détection de l’ATP en mode « signal-off » qui

repose sur un quenching de fluorescence induit par le repliement du bras complémentaire après dissociation de la structure duplex consécutive à l’introduction de la cible. La séquence complémentaire de l’aptamère fixant l’ATP est fonctionnalisée en 3’ par un fluorophore dérivé de la fluorescéine et en 5’ par un inhibiteur de fluorescence. Cet inhibiteur est qualifié de « black quencher » car il a la propriété d’absorber l’émission de fluorescence de la fluorescéine et de dissiper cette énergie sous forme de chaleur et non sous forme d’un rayonnement de fluorescence. Lors de la libération de la séquence complémentaire, celle-ci se replie sur elle-même par appariement de ses extrémités 3’ et 5’ qui sont complémentaires et acquiert une conformation en épingle à cheveux. Cette nouvelle structure tridimensionnelle rapproche le fluorophore de son inhibiteur. Il en résulte une extinction de fluorescence qui est corrélée à la quantité de cible ajoutée dans le milieu (schéma 17B). Cette stratégie de dissociation de duplex a également été mise en application par Li(54) et son équipe pour la détection de l’ATP en utilisant le ferrocène comme système de transduction du signal. La séquence complémentaire de l’aptamère liant l’ATP sert de système d’ancrage à la surface d’une électrode et permet une immobilisation indirecte de l’aptamère après formation du duplex par appariement complémentaire des bases. L’introduction de l’ATP va détruire la structure hélicoïdale et libérer le complexe Aptamère/ATP. Une troisième séquence nucléotidique présentant une complémentarité de base avec le brin immobilisé est alors ajoutée au milieu. Cette séquence est couplée au ferrocène et vient s’hybrider sur le brin immobilisé à la surface de l’électrode. Ce nouveau duplex induit une proximité entre le ferrocène et la surface de l’électrode et génère un signal électrique mesurable par voltamétrie cyclique (schéma 18).

Schéma 18 : Illustration schématisée du système de détection pour la détection de l’ATP par voltamétrie cyclique en utilisant le ferrocène comme agent de transduction du signal. II-3-2-4 DÉTECTION PAR FIXATION COMPÉTITIVE

Ce système met en œuvre la compétition entre un analyte modifié et son homologue natif pour un même et unique site de fixation sur l’aptamère. La quantité de l’analyte natif présent en concentration inconnue dans l’échantillon étudié est corrélée à la dissociation du complexe analyte modifié/aptamère(55). Cet analyte peut être modifié

par un fluorophore, une enzyme ou une espèce électrochimique active. La mesure de la variation du signal entre l’état initial et l’état final permet de déterminer la quantité d’analyte présent dans l’échantillon d’étude.

Une équipe hispano-française(56) a utilisé ce concept pour la détection de

l’ochratoxine A dans le vin. Deux stratégies ont été proposées :

• Une méthode de compétition directe : l’aptamère anti-ochratoxine A, dont l’une des extrémités est couplée à la biotine, est immobilisé sur un support fonctionnalisé par de l’avidine via l’interaction forte biotine/avidine. L’ochratoxine A associée à la peroxydase du raifort (horseradish peroxydase) est additionnée au milieu et se lie à l’aptamère. L’échantillon à analyser contenant de l’ochratoxine A native est alors ajouté. Il y a compétition entre les deux ochratoxines A pour la fixation sur l’aptamère. Après une étape de lavage pour éliminer la fraction non liée d’ochratoxine A, le substrat de l’enzyme est ajouté. Il s’agit d’un dérivé benzidine qui est oxydé sous l’action de la peroxydase. L’apparition de ce dérivé oxydé est mesurée par absorbance à 620 nm (schéma 19A).

• Une méthode de compétition indirecte : l’ochratoxine A couplée à l’albumine sérique bovine (BSA) s’adsorbe à la surface d’un support solide. L’aptamère anti- ochratoxine couplé à la peroxydase du raifort est alors ajouté et se lie sur l’ochratoxine modifiée. L’échantillon à analyser est additionné ce qui provoque le déplacement de l’aptamère depuis l’ochratoxine A immobilisée vers l’ochratoxine A native en solution. Une étape de lavage permet d’éliminer les complexes en solution, le substrat de l’enzyme est ajouté. L’intensité du signal est inversement proportionnelle à la quantité d’ochratoxine A dans l’échantillon (schéma 19B).

Ces méthodes ont permis la détection de l’ochratoxine A présente dans le vin avec une limite de détection de 1 ng/mL pour la procédure directe et de 10 ng/mL pour la procédure indirecte. Ces valeurs sont du même ordre de grandeur que celles obtenues avec la technique ELISA classique. Schéma 19 : Détection de l’ochratoxine A dans le vin par méthode de fixation compétitive A) directe et B) indirecte.