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1. Les Récepteurs Couplés aux Protéines G (GPCRs)

1.3. Processus de désensibilisation et resensibilisation des GPCRs

1.3.1. Désensibilisation et diminution d’expression

1.3.1.1.1. Initiation : Phosphorylation et Motif d’internalisation

Figure 11: Schéma des différentes étapes de régulation du trafic des GPCRs. Les principales protéines, motifs et modifications post-traductionnelles impliqués sont affichés sous chacune des étapes (Adapté de Moore et al., 2007).

19 L’élément déclencheur du processus d’internalisation le plus répandu à travers la famille des GPCRs est sans doute la phosphorylation de ce dernier. Cette phosphorylation peut être dépendante d’un agoniste ou non. Dans le premier cas, les kinases couramment engagées dans ce processus sont les GRKs (G protein-coupled Receptor Kinases), et l’on dit qu’elles sont impliquées dans les processus de désensibilisation homologue des GPCRs. Comme l’affiche le Tableau 3, cette famille d’enzymes est constituée de sept membres dont les trois premiers sont associés à la phosphorylation des récepteurs de la rhodopsine (GRK1) et β2AR (GRK2 et GRK3, initialement βARK1 et βARK2). Dans le second cas, les

kinases impliquées sont la PKA et la PKC (Protéine Kinase A/C). Ces dernières agissent suite à l’élévation du niveau intracellulaire de seconds messagers tels l’AMPc, le Ca2+ et le DAG (DiAcylGlycérol), ce qui signifie que ces kinases peuvent également accomplir leur rôle lors de l’activation de récepteurs autres (Ferguson, 2001). Par ces caractéristiques, on dit que la PKA et la PKC sont responsables du processus de désensibilisation hétérologue des GPCRs (Pierce et al., 2002). Qui plus est, il fut démontré, dans le cas du récepteur β2AR, que la phosphorylation faite par la PKA favorisait son couplage avec la sous-unité

Gαi (Daaka et al., 1997) sous-entendant ainsi que la phosphorylation des GPCRs mène non seulement à leur endocytose, mais peut aussi influencer leur signalisation.

La présence de motifs d’internalisation encodés dans la séquence primaire des GPCRs est un deuxième élément promoteur de l’endocytose indépendante d’un agoniste de ces récepteurs. L’internalisation à ce moment est dite constitutive. Les motifs les plus connus sont le dileucine, D/E-X-X-X-L-L/I ou D/E-X-X-L-L/I, et celui à base de tyrosine Y-X-X-ϕ, où ϕ représente un acide aminé hydrophobe (Marchese et al., 2008). Ces motifs sont connus pour promouvoir l’interaction entre le récepteur et généralement la protéine Tableau 3: Principales caractéristiques des GRKs (Adapté de Ferguson, 2001).

20 AP-2 (Adaptor Protein complex 2), l’une des composantes essentielles à la formation de la cage de clathrine (Figure 12) (Moore et al., 2007).

1.3.1.1.2. Terminaison : Recrutement des β-arrestines et Formation de la cage de clathrine

La phosphorylation des GPCRs facilite le recrutement d’un puissant médiateur vers ceux-ci. En effet, plusieurs études répertorient la translocation de la β-arrestine1 et/ou de la β-arrestine2 (ou Arrestine-2 et Arrestine-3) vers les GPCRs activés/phosphorylés. Les arrestines sont connues pour agir en tant que protéines d’échafaudage, signifiant ainsi qu’elles facilitent la formation de complexes protéiques. Dans le processus d’internalisation, elles sont particulièrement connues pour favoriser la formation de la cage de clathrine, et ce en interagissant directement avec la clathrine elle-même ainsi qu’avec la sous-unité β2-adaptine de la protéine AP-2 (Goodman et al., 1996; Laporte et al., 1999). Une fois la vésicule de clathrine formée, celle-ci est clivée par la dynamine, ce qui génère une vésicule enrobée de clathrine (Figure 12). Pour ce qui est de l’endocytose constitutive, il est important de spécifier que l’action des β-arrestines n’est pas essentielle (Dale et al., 2001; Parent et al., 2001). L’implication des β-arrestines dans l’internalisation des GPCRs ne se limite pas seulement aux fonctions énumérées ci-haut. Puisque cela ne touche en aucun point le sujet de recherche de la présente thèse, ces autres fonctions ne seront pas discutées. Toutefois, le tableau 4 présente quelques-unes des ces dernières en plus de celles impliquées dans leur signalisation.

Figure 12: Représentation de l’internalisation des GPCRs dépendante des arrestines (Adapté de Pierce and Lefkowitz, 2001).

21 Tableau 4: Signalisation médiée par les arrestines (Adapté de Luttrell and Gesty- Palmer, 2010).

22 Le dernier acteur important dans la régulation de l’internalisation des GPCRs est sans aucun doute la protéine Rab5. En effet, plusieurs études démontrent à l’aide de mutants constitutivement actifs (CA, i-e GTP-lié) et dominants négatifs (DN, i-e GDP-lié) de la protéine Rab5, que ces mutations agissent positivement et négativement sur l’endocytose des GPCRs. Plus précisément, la présence du mutant Rab5-CA augmente l’internalisation des récepteurs tandis que le mutant Rab5-DN la diminue (Moore et al., 1995; Murph et al., 2003; Schmidlin et al., 2001; Seachrist et al., 2000).

1.3.1.2. Dégradation des GPCRs et stabilité de leur ARNm

L’internalisation complétée, les récepteurs sont dirigés vers les endosomes précoces. À partir de ce point, certains GPCRs seront directement dirigés vers la dégradation. Dans ce cas, les principaux compartiments de dégradation sont les lysosomes. Jusqu’à maintenant, on dénombre deux principaux mécanismes d’envoi des GPCRs vers les lysosomes : les voies indépendante et dépendante de l’ubiquitination. Dans le premier cas, l’action des protéines GASP (GPCR Associated Sorting Protein) et SNX1 (Sorting Nexin- 1) a été identifiée originalement pour jouer un rôle dans la dégradation des récepteurs DOR (δ Opoïd Receptor) et β2AR, ainsi que PAR1 (Protease-Activated-Receptor-1)

respectivement (Gullapalli et al., 2006; Wang et al., 2002; Whistler et al., 2002). Pour ce qui a trait au processus de dégradation lysosomale dépendante de l’ubiquitination, ce dernier est un peu plus complexe. En effet, il requiert l’action de plusieurs protéines soit la Hrs (hepatocyte-growthfactor regulated tyrosine kinase substrate) et la machinerie des ESCRT-I, -II et -III (endosomal sorting complex required for transport). De manière plus détaillée, la protéine Hrs, faisant partie du complexe ESCRT-0, reconnaît les récepteurs ubiquitinés, via son domaine UIM (Ubiquitin-Interacting Motif), et les transfère à la Tsg101 (Tumor suppressor gene product 101), composante du complexe ESCRT-I. Par la suite, les complexes ESCTR-II et –III sont recrutés et promeuvent la formation des corps multivésiculaires (MVBs, multivesicular bodies). Pour qu’il y ait formation de vésicules intraluminales et donc de MVBs, les GPCRs sont d’abord déubiquitinés par l’action des DUBs (Deubiquitinases), et la machinerie ESCRT est ensuite désassemblée par la protéine Vps4 (Vacuolar protein sorting 4), une AAA-ATPase catalysant cette réaction (Marchese et

23 al., 2008) (Figure 13). Une fois toutes ces actions accomplies, les MVBs sont formés et peuvent fusionner avec les lysosomes, ce qui provoque la dégradation de leur contenu.

Le premier cas de GPCR répertorié pour emprunter cette voie de dégradation fut celui du récepteur CXCR4 (Marchese et al., 2003). Toutefois, des cas de dégradation empruntant un chemin ESCRT et ubiquitine-indépendant, mais nécessitant l’action de Hrs et Vps4, en plus de cas ubiquitine-indépendant/ESCRT-dépendant, sont recensés pour le récepteur DOR et le récepteur PAR1 respectivement (Dores et al., 2012; Hislop et al., 2004). En résumé, l’ensemble de ces évidences dévoile non seulement que ces processus de dégradation sont finement régulés, mais démontre clairement que la dégradation des GPCRs varie principalement selon les partenaires d’interaction et les modifications post- traductionnelles présentes sur ces derniers (Figure 14). On peut donc en conclure que la Figure 13: Les quatre complexes ESCRT et leurs sous-unités. Les composantes de la machinerie ESCRT sont recrutées de façon séquentielle à la membrane des endosomes multivésiculaires (MVEs également nommé MVBs). Les domaines de liaison à l’ubiquitine et aux lipides sont indiqués FYVE, UIM, UEV, GLUE). Le complexe ESCRT-III mobilise les DUBs permettant ainsi le recyclage des groupements ubiquitines. La protéine Vps4 dissocie le complexe ESCRT-III (Tiré de Luttrell and Gesty-Palmer, 2010).

24 voie de dégradation empruntée par un GPCR est fonction de sa condition et de ses partenaires d’interaction.

En plus des mécanismes de dégradation des GPCRs, la diminution des niveaux de leur ARNm est une autre stratégie employée par la cellule pour se désensibiliser des signaux extérieurs. En effet, l’élévation des niveaux intracellulaires d’AMPc, suite à une activation prolongée du récepteur β2AR, entraîne une diminution des niveaux de son

ARNm et par le fait même la présence du récepteur à la surface cellulaire (Bouvier et al., 1989; Hadcock et al., 1989). Une seconde étude démontra qu’une courte exposition à l’agoniste, quant à elle, augmentait la synthèse d’ARNm du même récepteur. De plus, la Figure 14: Schéma résumant le trafic intracellulaire des GPCRs menant au système de dégradation lysosomal. Représentation des différents chemins pouvant être empruntés par les récepteurs (A) PAR1 (B) CXCR4 et (C) β2AR (Adapté de Marchese et al., 2008).

25 présence d’une séquence consensus CREs (cAMP response elements) fut démontrée pour être encodée dans la région promotrice du gène du récepteur β2AR. Avec ces informations,

cette même étude démontra l’importance de cette séquence et conclut qu’un mécanisme de rétroactivation expliquerait le phénomène observé. Ainsi l’augmentation d’AMPc activerait les CREs favorisant la transcription du gène (Collins et al., 1989). Toutefois, les éléments régulant la diminution de l’ARNm lors d’une stimulation prolongée ne furent pas détaillés, mais un changement dans la stabilité de l’ARNm plutôt que dans l’inhibition de sa synthèse fut mentionné et confirmé plus tard par une autre étude (Danner et al., 1998).

Pour conclure, les mécanismes de désensibilisation des GPCRs ont pour objectif ultime de réduire les signaux émis par les récepteurs; autrement dit de réduire la sensibilité de la cellule à son environnement. Comme décrit ci-dessus, ce processus débute, ou non, par la phosphorylation de ces GPCRs, ce qui mène à leur internalisation et potentiellement à leur dégradation au niveau des lysosomes. L’élévation des niveaux intracellulaires de seconds messagers peut également déstabiliser les ARNm produits et contribuer à la diminution des niveaux de récepteurs présents à la surface cellulaire. Bref, une réduction des niveaux d’expression de surface des GPCRs couplée à une diminution de leur quantité totale définissent les conséquences des processus de diminution d’expression des GPCRs.

1.3.2. Resensibilisation : Recyclage

Certains contextes physiologiques, comme la contraction musculaire cardiaque, requièrent toutefois une activité continue des cellules et donc un niveau d’activation et d’expression constantes de récepteurs. Pour ce faire, les cellules font appel à des mécanismes de recyclage aidant à conserver une bonne expression de ces derniers à leur surface, et soutenir la réponse aux stimuli. Le recyclage des GPCRs est facilité par la présence de motifs de recyclage. La plus typique de ces séquences conservées est le motif PDZ (postsynaptic density 95/disc large/zonula occludens-1). En effet, ce motif est retrouvé chez une multitude de GPCRs et se subdivise en trois sous-types : type I (X-S/T-X-ϕ), type II (X-ϕ-X-ϕ) et type III (X-D/E-X-ϕ) où ϕ représente un acide aminé hydrophobe (Marchese et al., 2008). D’autres motifs sont également répertoriés, mais peu répandus. Comme l’indique le tableau 5, ces motifs promeuvent l’interaction des GPCRs avec des

26 protéines spécifiques. Pour le récepteur β2AR, il est bien établi que son motif PDZ, -DSLL,

facilite son recyclage, et ce par son interaction avec les protéines NHERF (Na+/H+ exchanger regulatory factor)/EBP50 (ezrin-radixin-moesin (ERM)-binding phosphoprotein- 50) et NSF (NEM-sensitive factor). En effet, la mutation de ce motif entraîne dans chacun des cas, la perte de l’interaction entre le récepteur et son partenaire menant de ce fait à une réduction du taux de recyclage de ce dernier (Cao et al., 1999; Cong et al., 2001; Hall et al., 1998; Xiang and Kobilka, 2003).

La protéine Hrs semble également importante pour le recyclage des GPCRs encodant un tel motif. Une hypothèse stipulant que cette protéine pourrait servir d’élément régulateur central discriminant l’envoi des GPCRs vers les compartiments de dégradation et les compartiments de recyclage est née, suite à une étude démontrant son implication dans le recyclage du récepteur β2AR (Hanyaloglu et al., 2005). Dans cette étude, les auteurs

démontrèrent que le domaine VHS, et non pas le domaine UIM, de la protéine Hrs était essentiel pour son effet dans le recyclage du récepteur. Ainsi donc, le domaine d’interaction récepteur/Hrs pourrait diriger en quelque sorte l’envoi du récepteur vers la dégradation ou le recyclage. Quelques années plus tard, le même groupe démontra que la mutation de la Tableau 5: Sommaire des motifs de recyclage identifiés chez les GPCRs et leurs partenaires d’interaction (Tiré de Hanyaloglu and von Zastrow, 2008).

27 séquence EXEXXLL présente dans le C-terminal du récepteur empêchait l’action de la protéine Hrs sans toutefois inhiber le recyclage (Hanyaloglu and von Zastrow, 2007). De ces observations émergèrent les modèles actuels de recyclage, soit le modèle dépendant de Hrs/PDZ (séquences/motifs) (Figure 15A) et celui indépendant de Hrs/PDZ- (constitutif) (Figure 15B).

Outre les motifs de recyclage, l’action des GTPases Rab4 et Rab11 est également importante dans la régulation du processus de recyclage. En effet, ces dernières sont associées respectivement à la régulation du recyclage rapide (des endosomes précoces vers la membrane plasmique) et du recyclage lent (des endosomes de recyclage tardif vers la membrane plasmique) de plusieurs GPCRs. Pour en nommer quelques-uns, le recyclage, rapide et lent, des récepteurs AT1R, D2R, MOR, MC2R et β2AR sont contrôlés par ces

deux GTPases (Li et al., 2008a; Li et al., 2012; Moore et al., 2004; Parent et al., 2009; Roman-Vendrell et al., 2012; Roy et al., 2011; Seachrist et al., 2000). De plus, la protéine Rab11 fut également identifiée pour influencer le recyclage des récepteurs β1AR, TPβ, IP,

SST3R, CXCR2, CB2 et M4R (Fan et al., 2003; Gardner et al., 2011; Grimsey et al., 2011; Hamelin et al., 2005; Kreuzer et al., 2001; Tower-Gilchrist et al., 2011; Volpicelli et al., 2002; Wikstrom et al., 2008).

Figure 15: Représentation des mécanismes de recyclage (A) dépendant de Hrs/PDZ, nécessitant des motifs de recyclage et (B) indépendants de Hrs/PDZ également nommé recyclage constitutif (Adapté de Hanyaloglu and von Zastrow, 2008).

28 Pour récapituler, le processus de resensibilisation des GPCRs peut s’effectuer de façon constitutive ou bien nécessiter la présence de motifs de recyclage facilitant l’association des récepteurs avec certaines protéines (NHERF/EBP50, Hrs et Rab GTPases) et favorisant le retour à la membrane plasmique de ces derniers.

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