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Chapitre I : État de l’art

I- 4-1) Définition d’un tensioactif

Les tensioactifs ou surfactants sont des molécules amphiphiles caractérisées par un comportement double hydrophobe et hydrophile. Ces comportements sont la résultante même de la constitution des surfactants caractérisés par une longue chaîne hydrocarbonée hydrophobe et une tête moléculaire hydrophile (Figure I-2).

Figure I-2 : Structure générale d’une molécule de surfactant

Ce caractère amphiphile confère aux surfactants des propriétés de réduction de l’énergie libre et de tension aux interfaces liquide/liquide, solide/liquide et gaz/liquide. Par exemple, à faible concentration dans une solution, les molécules de surfactants s’organisent à l’interface air/eau, de sorte à garder leur tête moléculaire hydrophile au contact de l’eau et à présenter préférentiellement leur partie hydrophobe vers l’extérieur ce qui engendre in fine une réduction de la tension superficielle.

En augmentant la concentration des molécules de surfactant, il se produit une diminution proportionnelle de la tension jusqu’à atteindre une concentration maximale de surfactant pour laquelle la surface du liquide est saturée, correspondant à une tension de surface constante. Au-delà de cette concentration et associés à leur caractère amphiphile singulier, les surfactants s’auto-assemblent pour former des complexes organiques et des phases de type cristal liquide montrant des propriétés bi-réfringentes.

Tête moléculaire hydrophile

60 Nous définissons alors la concentration micellaire critique (CMC) correspondant à la concentration nécessaire pour former des agrégats colloïdaux aussi appelés micelles. Ces micelles formées par agrégation sont en équilibre thermodynamique avec les monomères présents en solution et en surface et peut modifier, en plus de la tension de surface, les propriétés de conductivité et de diffusion de la lumière (effet Tyndall) dans le milieu aqueux.

Le mécanisme physique conduisant à la micellisation est principalement gouverné par le caractère hydrophobe du surfactant et les forces de Van der Waals. Ainsi, une augmentation de la concentration supérieure à la CMC conduit à une réorganisation des surfactants selon plusieurs formes géométriques ; réorganisation qui est aussi dépendante de plusieurs facteurs notamment de la nature du surfactant considéré et des conditions de température et de concentration en solution. Il est possible de caractériser la forme des agrégats en solution par le paramètre d'empilement 𝑝 défini par l'équation suivante (Éq 1):

𝑝 = 𝑣

𝑎 ∗ 𝑙

où 𝑣 est le volume de la chaîne hydrophobe propre à chaque surfactant, 𝑙 la longueur de la

chaîne et 𝑎 l'aire par tête moléculaire hydrophile à la surface de l’agrégat qui dépend des

conditions de température, de concentration et de force ionique en solution.

Raman et al., (1996) définissent alors des structures attendues selon la valeur 𝑝

obtenues. Des structures en micelle sphérique (L1) pour des valeurs de 𝑝 inférieures à 1/3, des

micelles cylindriques (L1) entre 1/3 et 1/2, des phases lamellaires (Lα) pour 𝑝 compris entre 1/2

et 1 et des micelles inverses (L2) pour des valeurs supérieures à l'unité.

Par ailleurs, des structures supplémentaires peuvent également être caractérisées et certaines sont illustrées dans le diagramme de phase d’un surfactant type (Figure I-3). Nous

distinguons en particulier les phases cubiques (I1) et hexagonales (H1). D’autres, non

représentées sur le diagramme (Figure I-3), possèdent une géométrie plus complexe comme les

phases bicontinues cubiques (V1) et bicontinues en éponge symétrique (L3).

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Figure I-3 : Diagramme de phase type d’un surfactant dans l’eau formant différentes phases cristal liquide en fonction de sa concentration et de la température (Échelle relative de températrure ; Dierking et Al-Zangana, 2017 : Lyotropic liquid

crystal phases, adapté d’après Raman et al., 1996)

Ces différentes phases structurales se forment au-delà de la CMC pour des concentrations et des températures bien définies comme indiquées dans le diagramme. Cependant, il existe une limite de température en dessous de laquelle la solubilité du surfactant est plus faible entrainant une séparation de phase par précipitation. L’équilibre thermodynamique nouvellement formé se fait alors entre les monomères toujours présents en solution et le surfactant précipité. Cette limite est appelée température de krafft et dépend des mêmes paramètres physico-chimiques susceptibles de faire varier la CMC. Nous notons que plus la longueur de la chaîne hydrocarbonée est importante, plus la limite en température est élevée.

Pour certains surfactants, une limite supérieure est observable et correspond au point trouble (cloud point) qui caractérise une transition par séparation de phase à température élevée. Il se produit pour ces surfactants une augmentation du caractère hydrophobe des chaînes hydrocarbonées par désolvatation à mesure que la température augmente. Ceci abaisse la CMC et améliore les processus d’auto-assemblage. La formation de micelle, de plus en plus grande en taille, engendre alors une turbidité de la solution. Pouvant atteindre une taille de l’ordre du micromètre, les micelles subissent naturellement une sédimentation ce qui provoque la séparation de phase.

62 Quelques exemples de valeurs de CMC, de température de krafft et de point trouble sont exposés ci-dessous (Tableau I-5)

Tableau I-5 : Concentration micellaire critique (CMC), température de krafft et point de trouble de trois surfactants. D.m : donnée manquante Surfactants CMC (mM) Température de krafft (°C) Point de trouble (°C) Hexadecyltrimethyl ammonium bromide

(CTAB)

1 24.7 d.m

Trimethyl(tetradecyl) ammonium bromide (TTAB)

4-5 12.7 d.m

Octyl-β-D-glucopyranoside (OGP) 20-25 d.m >100

Les surfactants peuvent également être caractérisés par l’indice HLB pour Hydrophilic-Lipophilic Balance (ou équilibre hydrophile/lipophile). Cet indice repose sur l’équilibre entre parties hydrophiles et hydrophobes du surfactant et est déduit par la taille et la force interactionnelle de ces deux fractions par l’équation 2, donnée ci-après (Davis, 1957). L’échelle déterminée varie entre 0 et 20.

𝐻𝐿𝐵 = ∑(𝐼𝑛𝑑𝑖𝑐𝑒𝑔𝑟𝑜𝑢𝑝𝑒 ℎ𝑦𝑑𝑟𝑜𝑝ℎ𝑖𝑙𝑒) − 𝑛(𝐼𝑛𝑑𝑖𝑐𝑒𝑔𝑟𝑜𝑢𝑝𝑒 ℎ𝑦𝑑𝑟𝑜𝑝ℎ𝑜𝑏𝑒) + 7

où n est le nombre de groupement CH2 constituant la molécule de surfactant et l’indice « groupe

hydrophile » ou « groupe hydrophobe » est une valeur calculée en amont (Griffin, 1949 ; Davis, 1957) qui est attribuée pour différents groupements moléculaires.

Des valeurs comprises dans la gamme de 4 à 6, décrivent un système où le surfactant propose un comportement hydrophobe et donnera plutôt des émulsions type eau/huile. Des valeurs plus élevées, dans la gamme de 8 à 18, caractérisent un comportement plutôt hydrophile et le surfactant donnera des émulsions type huile/eau (Griffin, 1949).

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