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Les adolescents toxicomanes-délinquants décrivent-ils un profil de consommation particulier? L’analyse transversale des verbatims nous permet d’avoir une meilleure idée du profil de consommation des adolescents toxicomanes-délinquants. Les adolescents, polytoxicomanes, expliquent leur consommation par l’influence des pairs, la curiosité ou, encore, par la peur de s’ennuyer ou de ne pas être acceptés (annexe 3). À un niveau plus personnel, certains adolescents soulèvent les mauvaises relations avec leurs parents ou encore le sentiment de n’avoir plus rien à perdre et l’envie de se sauver de leur propre vie.

« J’ai fumé et c’était parce que les autres voulaient que j’essaye… Moi dans le fond je ne voulais pas essayer parce que j’avais peur que ça reste dans le sang longtemps et je voulais avoir une bonne job plus tard, fac je disais non… mais là un moment donné, à force de me le faire demander, j’ai fini par me dire je vais l’essayer, ça ne doit pas être tant pire. »

« Non, je le savais (que je pouvais mourir) quand j’étais dehors, mais je me disais criss, tant qu’à être dans la rue pis à n’avoir rien à perdre, si je suis pour crever, aussi bien de crever gelé. C’était mes mots à chaque fois que je me faisais une track. »

Lorsqu’on les questionne sur les conséquences qu’ils perçoivent à l’égard de leur consommation, les adolescents mentionnent principalement l’entrée de la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) dans leur vie, le retrait du milieu familial, la perte d’amis positifs, les problèmes au niveau du système scolaire ainsi que la perte d’emploi. Toutefois, lorsqu’on leur demande de parler des facteurs qui auraient pu favoriser une vie sans consommation néfaste, ils donnent quelques pistes, tel que faire de la prévention hâtive à l’école, mais ils s’entendent tous sur un élément central, soit l’impossibilité de prévenir complètement la consommation, car selon eux, c’est une question de personnalité et de parcours de vie.

« Il n’y avait donc rien à faire avec moi, il fallait que je teste mes limites, comme je teste le reste… j’ai grandi de même… moi je pense qu’il faut qu’on se plante par nous-mêmes pour comprendre… »

« Dans le fond, il n’y a pas de trucs, parce que ça dépend de l’enfance, qu’est-ce que la personne a vécue, parce que c’est tout ça inconsciemment qui va l’amener à consommer dans le fond… ça va dépendre des parents, de ce qui se passait à l’école, s’il se faisait rejeter, etc. »

Les adolescents toxicomanes-délinquants décrivent-ils un profil de délinquance particulier?

De la même manière que le profil de consommation, on constate que ces adolescents ont un parcours juridique plutôt lourd (annexe 4). De fait, que ce soit pour avoir fait de l’intimidation, s’être introduit par effraction, pour possession et/ou vente de drogue, en passant par le vandalisme, les voies de fait ou les vols, les adolescents rencontrés ont tous des dizaines de chefs d’accusation qui pèsent sur leurs épaules. Toutefois, le besoin d’avoir de l’argent et l’influence des pairs, tout comme la recherche d’adrénaline et l’envie d’impressionner sont plus fortes que la crainte d’être arrêté.

« … c’est vraiment l’argent. C’est un énorme besoin, c’est le plus grand besoin qu’on peut avoir, surtout quand on consomme, parce que la plupart du temps, on n’a plus de job, on ne va plus à l’école, donc on veut de l’argent, mais le seul moyen c’est illégalement, fac c’est soit que tu vends de la drogue, soit que tu commets des délits. Moi j’ai viré dans les délits, je préférais ça parce que ça me donnait de l’adrénaline aussi. »

« ... avoir envie de faire du cash pis entrer dans un gang de rue… ils te forcent quasiment à faire des délits… ils me l’ont vendu de même. Ils m’ont dit tu vas avoir du cash, tu vas avoir tout ce que tu veux, tu vas avoir de la dope… hey c’était mon rêve d’avoir tout ce que je voulais… c’était la façon facile, mais en même temps difficile. »

De la même manière que la consommation, lorsqu’on les questionne sur les conséquences qu’ils perçoivent à l’égard de leurs délits, les adolescents mentionnent principalement les arrestations et l’entrée en Centre Jeunesse. Cependant, tout comme pour la consommation, lorsqu’on interroge les adolescents sur les facteurs qui auraient favorisé une vie sans délits, ceux-ci mentionnent, outre une meilleure insertion dans des emplois légaux, qu’il est impossible de prévenir totalement les délits puisqu’il s’agit parfois d’un passage obligé.

« ... dans le fond, voler je faisais ça parce que je n’étais pas capable de me trouver une job, sinon j’aurais travaillé légalement… j’aurais fait ben plus d’argent de même qu’à voler… »

« ... c’est moi qui voulais être avec du monde négatif, y’a pas personne qui aurait pu m’en empêcher… Tsé j’envoyais chier mes travailleuses sociales… y’avait rien à faire avec moi… fallait que je passe par là je pense. »

Les adolescents toxicomanes délinquants font-ils un lien entre leur histoire de consommation et leur histoire de délinquance?

Bien que l’on constate des différences entre les discours des adolescents quant à leurs parcours de consommation et de délinquance, un élément est clair pour la quasi-totalité d’entre eux, il existerait un lien entre ces deux parcours (annexe 5). De fait, l’analyse des entrevues permet de comprendre que pour les adolescents, il faut de l’argent pour consommer et il faut consommer pour être en mesure de commettre les délits qui leur permettront, éventuellement, de consommer à nouveau. Qui plus est, pour la totalité des adolescents rencontrés, sauf un qui dit être un marginal aimant l’anarchie, il est clair que sans la consommation, il n’y aurait jamais eu de délits.

« Tu consommes donc ça te prend de l’argent et si tu ne travailles pas légalement, faut que tu fasses de quoi. Ça te prend de la drogue, donc tu te mets à voler, à crosser le monde, peu importe là… Tu trouves le moyen de faire de l’argent… »

« Moi je pense que pour tout le monde, la consommation est reliée aux délits… je ne pense pas qu’il y ait du monde qui font des intros pour le fun, je pense que tout a un lien avec la consommation. »

« Je consomme, je fais mes délits en consommant et pendant mes délits, je pense à la dope que je vais pouvoir reconsommer pour pouvoir continuer à faire mes délits. Je pitch la balle sur les deux bords pour tout le temps avoir ce que je veux en plein milieu. »

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