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DE SUBSURFACE EN LIEN AVEC LES HYDRATES DE GAZ

A. Définition du Morphotype D sur le fond de l’eau

Sur le fond de l’eau, la structure en araignée a précédemment été mise en évidence dans le chapitre 3. Elle se compose des morphotypes B et C correspondant respectivement à des pockmarks géants à fond plat et de très faible profondeur et des pockmarks allongés dénotant franchement avec la pente régionale associée au morphotype A (Figure 71).

Un autre morphotype a été défini sur le fond de l’eau : le morphotype D. Il est constitué de petites dépressions allongées de faible profondeur (1 à 3 m) qui mesurent entre 50 et 200 m de long (Figure 71. A)). Ces petites dépressions ne montrent pas d’anomalies d’amplitude particulières mais des anomalies de cohérence systématiques (Figure 71.B)).

Ces petites dépressions allongées sont très rapprochées les unes des autres et ne semblent pas s’organiser selon une orientation particulière. Ce réseau dense de dépressions de tailles et de forme homogènes confère au morphotype D un aspect « grumeleux » très particulier, facilement identifiable sur le fond de l’eau (Figure 71), qui n’a pas été décrit dans la littérature.

171 Figure 71: A) Carte bathymétrique du fond de l’eau des Morphotypes A, B, C et D. B) Carte de

cohérence sur la sismique 3D présentant la signature des 4 morphotypes.

Ces caractéristiques ont permis d’identifier une bande continue de morphotype D, situé à l’ouest de la structure en araignée, mesurant en moyenne environ 1 km de large, (Figure 72).

Figure 72 : Carte interprétée du fond de l'eau (cohérence) sur laquelle sont reportés les morphotypes A, B, C et D.

172 B. Caractéristiques sismiques 3D

Les données de sismique 3D montrent que le morphotype D identifie sur le fond de la mer correspond au drapage d’un niveau très superficiel H1 (Figure 73 & Figure 74) qui est constitué de dépressions allongées d’environ 10 m de profondeur (Figure 73). Ce niveau H1 est situé environ 15 m sous le fond de l’eau bien au-dessus du réseau de failles polygonales (Figure 73).

L’horizon H1 est constitué de pockmarks ayant une forme allongée, mesurant environ 25 m de large et pouvant atteindre jusqu’à 250 m de long (Figure 74). Ils sont caractérisés par des anomalies de faible amplitude (Figure 74), similaires à celles observées sur le fond de l’eau au niveau des pockmarks allongés des structures en araignées et qui ont été interprétés comme des carbonates méthanogènes. De plus, aucun indice de migration de fluide (IMF), ni aucune autres zone de forte amplitude n’ont été observés en-dessous de ce niveau H1, qui pourraient suggérer une quelconque migration verticale de gaz susceptible d’alimenter ces pockmarks.

Figure 73 : A. Carte bathymétrique du fond de l̓eau avec la localisation des profils GH et IJ. B. Profil GH issu de la sismique 3D, illustrant le morphotype D localisé au niveau de H1.

173 C. Caractéristiques sismiques 2D

Les données de sismique 2D mettent en évidence que l’horizon H1 correspond à des dépressions plus incisées (environ 10 m) qui sont ensuite drapées pour se réduire à des dépressions d’environ 2-3 m de profondeur, au niveau du fond de l’eau (Figure 75). La plupart de ces dépressions sont associées à la présence d’une anomalie d’amplitude située en-dessous de la dépression (entre les horizons H1 et H2), au niveau de son apex (Figure 75). De telles anomalies de forte amplitudes sont couramment observées dans les structures d’échappement de fluides, que ce soit dans des pockmarks sur le fond de l’eau (e.g. Moss et al., 2012) ou encore le long de cheminées sismiques (e.g. Ho et al., 2012). Ces anomalies d’amplitude sont similaires à celles observées au cœur des pockmarks allongés des structures en araignée (Figure 45) où les patches de forte amplitude ont été corrélés à la présence de carbonates méthanogènes se mettant en place au cœur des pockmarks (Casenave et al., in press). De telles dépressions allongées en lien avec les migrations de fluides ont déjà été observées dans d’autres bassins comme en mer du Nord (Hovland et al., 1984) ou encore en mer de Chine (Chen et al., 2015), où elles ont été interprétées comme des pockmarks allongés. Les pockmarks correspondent généralement à des dépressions coniques, décrits pour la première fois

par King & MacLean, 1970. Les dépressions allongées du morphotype D semblent ainsi

correspondre à des pockmarks allongés sur l’horizon H1. Les pockmarks allongés décrits dans la littérature sont généralement orientés dans une même direction car ils résultent d’une interaction entre les courants de fond et les fuites de gaz sur le fond de l’eau (Bøe

et al. 1998 ; Pilcher & Argent, 2007). Les pockmarks allongés formant le morphotype D

ne présentent pas une direction particulière, ce qui laisse supposer un autre processus de formation.

Figure 74 : A gauche, carte en temps double de l̓horizon H1superposé à une carte de pendage pour voir le relief de cet horizon. A droite, carte d̓amplitude de cet horizon H1.

174 Figure 75 :A) Carte bathymétrique du fond de l'eau avec la localisation des profils GH et IJ. B)

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2. CARTOGRAPHIE DU MORPHOTYPE D

L’identification du Morphotype D, sur le fond de l’eau ainsi que sa signature sur les données de sismique 2D et 3D ont permis de cartographier sa distribution régionale . Sur la carte de la Figure 76, deux types de morphotypes D ont été différenciés : 1) le morphotype D constitué de pockmarks allongés très denses (en bleu foncé) et 2) le morphotype D constitué de pockmarks allongés plus épars (en bleu clair). Au sein du morphotype D, les dépressions denses sont situées en amont tandis que les dépressions plus éparses sont situées dans la partie ouest de la zone d’étude (Figure 76).

Figure 76 : Carte interprétative des indices de migrations de fluides (IMF) présents sur le fond de la mer sur laquelle sont reportées les courbes bathymétriques.

176 Sur le fond de l’eau, dans la partie sud, le morphotype D forme une bande de forme homogène d’environ 1 km de large (Figure 76). Dans la partie médiane et dans la partie nord de la zone, cette bande est beaucoup plus irrégulière, avec une largeur moyenne de 1 km pouvant atteindre localement des largeurs plus importantes (Figure 76).

Le morphotype D se situe à des profondeurs d’eau comprises entre 650 m et 950 m, qui correspond à une amplitude bathymétrique de 300 m. Cependant, si on considère la largeur moyenne du morphotype D, il semblerait que cette bande suive globalement les lignes bathymétriques actuelles, avec toutefois une forme légèrement plus incurvée (Figure 76). Sultan et al., 2004a ont observé une bande d’anomalie d’amplitude d’environ 1 km dans la zone d’étude, aux alentours de l’isobathe 550 m, et ils l’ont interprétée comme la limite proximale des hydrates de gaz, i.e. le biseau des hydrates. La bande d’anomalies d’amplitudes formant le morphotype D, localisé sur l’horizon H1 pourrait ainsi être interprétée comme étant un biseau des hydrates plus ancien (paléo-biseau des hydrates), dont l’âge correspondrait à celui de l’horizon H1.

3. INTERPRETATION ET DISCUSSION