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Chapitre 2. Comorbidités associées à l’obésité sévère

2.4 Dyslipidémie

2.4.1 Définition de la dyslipidémie et de la dyslipidémie de l’obèse

La dyslipidémie est un terme général qui désigne une anomalie du taux de lipides dans le sang. Elle peut décrire un niveau anormal des TG, des LDL, du cholestérol total ou des HDL. Il est à noter que dans les études, l’emploi du terme dyslipidémie désigne toute anomalie du bilan lipidique ce qui amène une hétérogénéité quant aux résultats rapportés. Par exemple, la dyslipidémie peut référer à une hypertriglycéridémie, une hypercholestérolémie ou la combinaison des deux. Seulement 20 % des dyslipidémies sont de cause génétique. Le reste (80 %) est causé par de mauvaises habitudes de vie lesquelles mènent, entre autres, à l’obésité (113). L’obésité est, pour la plupart du temps, associée avec une augmentation des TG alors que la perte de poids est associée à une diminution des TG. L’obésité est également associée à une diminution des HDL. L’augmentation des niveaux de LDL chez le patient avec obésité n’est pas toujours présente, toutefois un changement qualitatif délétère caractérisé par un profil de LDL petits et denses est souvent

associé à l’obésité (114). L’augmentation de l’IMC est associée avec une augmentation des HDL3b et une diminution des HDL2b (115).

Figure 5 : Pathogénèse de la dyslipidémie du patient avec obésité

LDLr : LDL récepteurs

TRL : Lipoprotéine riche en TG LH : Lipase hépatique

AGLN : Acides gras libres non-estérifiés MTP : microsomal TG transfer protein LRP : LDL receptor-related protein SR-BI : Scavenger-receptor BI

CETP : Cholesteryl ester transfer protein LPL : Lipoprotéine lipase

Tableau 2 : Causes et conséquences de la dyslipidémie du patient avec

obésité

Dyslipidémie

de l’obèse Causes Conséquences

TG élevé

- Résistance à l’insuline

- Altération de la fonction de la LPL et d’autres enzymes lipolytiques - Augmentation de la sécrétion

hépatique de VLDL

- Augmentation du substrat d’acide gras libre dû à une augmentation de l’efflux du tissu adipeux dans la circulation et hyperglycémie

- Promotion directe ou indirecte d’autres lipides athérogènes (HDL bas, apo-B augmenté, petits LDL denses)

- Dysfonction endothéliale

- Dysfonction des cellules bêta et altération du métabolisme du glucose - Pancréatite si TG très élevé HDL bas - Augmentation de l’activité de la CETP - Petites particules de HDL

- Transport inverse du cholestérol moins efficace

- Diminution de l’effet anti-

inflammatoire et anti-oxydatif des HDL

- Diminution de la fonction anti- athérogène des HDL

Apo-B augmenté

- Augmentation de la production des apo-B

- Diminution de la dégradation des apo-B - Augmentation du nombre de lipoprotéines athérogènes contenant de l’apo-B - Augmentation de l’athérogénèse Petits LDL denses - Augmentation de l’activité de la CETP

- Altération de la fonction des récepteurs hépatiques des LDL

- Augmentation de la vulnérabilité des LDL à l’oxydation et à la glycation

- Augmentation de la tendance des LDL à pénétrer l’endothélium vasculaire

- Augmentation de l’athérogénèse Source : Traduite et adaptée de Repas T et al. 2011 (116)

La surproduction hépatique de VLDL semble être la première étape cruciale problématique dans l’obésité et dans la résistance à l’insuline (114). Une surproduction hépatique de VLDL initie une séquence d’évènements résultant en une augmentation de la formation de LDL petits et denses à haut potentiel athérogène. Une autre étape clé est la régulation de la sécrétion des VLDL par le taux de dégradation de l’apolipoprotéine B-100 (apoB-100). Chez les individus obèses ou résistants à l’insuline, l’inhabilité à supprimer la dégradation de l’apoB-100 amène un déséquilibre (Figure 5). De plus chez ces patients, il y a une diminution de la clairance des lipoprotéines riches en TG laquelle amène une diminution des HDL par une diminution du transfert des apolipoprotéines, des phospholipides et des lipoprotéines riches en TG vers le compartiment des HDL (114). L’excès de tissu adipeux viscéral, indépendamment de l’IMC, est associé avec une constellation d’anomalies métaboliques telles que la résistance à l’insuline, une augmentation des TG, des LDL et de l’apo-B, des HDL bas et une augmentation de la proportion des LDL petits et denses, tous des éléments de la dyslipidémie athérogène (117, 118).

Il y a une limite à la taille qu’un adipocyte peut atteindre. S’il y a continuellement une balance énergétique positive, il y aura par conséquent une augmentation des acides gras déversés dans le plasma ce qui fournira un substrat disponible pour la synthèse des TG dans d’autres tissus comme le foie, le muscle squelettique et le myocarde. Cette déposition de gras dans d’autres tissus se nomme la graisse ectopique, laquelle conduit à la résistance à l’insuline et au diabète de type 2 (26). Lorsque l’apport énergétique dépasse les besoins énergétiques et la capacité de stockage en glycogène, les lipides et les glucides alimentaires sont d’abord convertis et emmagasinés sous forme de TGdans le tissu adipeux blanc et, plus tard, dans d’autres tissus comme le foie (119). La grande activité lipolytique du tissu adipeux viscéral contribue a acheminé une plus grande quantité d’acides gras libres non-estérifiés au foie ce qui contribue à la formation de VLDL riches en TG (120). L’obésité viscérale est caractérisée par des HDL bas et des petits LDL et denses (16) lesquels ont une plus grande habileté à infiltrer l’espace sous-endothéliale (121). En plus d’avoir de faible niveau de HDL, ceux-ci sont plus petits et denses, leur effet protecteur pouvant donc être diminué, mais une controverse subsiste quant au lien avec la taille et la fonctionnalité des HDL. Dans l’obésité viscérale, les HDL sont diminués par l’action successive de la CETP et de la LH (120). Comparativement à des sujets de poids normal (IMC 18-25 kg/m2), les patients obèses (IMC

30-45 kg/m2) ont des niveaux augmentés de VLDL, des lipoprotéines de densité

intermédiaire (IDL), de LDL de même qu’une plus grande résistance à l’insuline. Ainsi, il est donc sans équivoque, que l’obésité augmente la concentration d’apoB-100 (114, 118, 122)

puisque les 3 lipoprotéines (VLDL, IDL, LDL) contenant de l’apoB-100 sont augmentées. De plus, la contribution des VLDL larges au VLDL total (118), des petits LDL à la concentration totale de LDL (122) et des petits HDL à la concentration totale de HDL est plus grande chez les personnes obèses que chez les personnes de poids normal (118, 122). Il s’avère donc que, même en l’absence d’anomalie cliniquement significative de l’homéostasie du glucose et des lipides sanguins, l’obésité est associée avec une augmentation de la concentration des lipoprotéines pro-athérogéniques (118). La glycémie à jeun, l’insuline, la concentration de TG, l’intolérance au glucose et la résistance à l’insuline sont des facteurs qui influencent la distribution et la taille des VLDL (118). Dans le métabolisme lipidique, les VLDL sont les précurseurs qui mènent ensuite successivement à la formation des IDL et des LDL. La taille des IDL et des LDL serait elle-même influencée par leur précurseur, soit les VLDL. L’obésité est caractérisée par une surproduction hépatique de VLDL (qui contiennent de l’apoB-100), une diminution du catabolisme des lipoprotéines contenant de l’apoB-100 (VLDL, IDL, LDL) et une augmentation du taux de renouvèlement des apoA-I contenu dans les HDL (118). Chez les patients obèses sévères (IMC  35 kg/m2), le cholestérol total et les TG sont

fréquemment augmentés ce qui est souvent associé avec la résistance à l’insuline (123). La résistance à l’insuline influence négativement le bilan lipidique (124). Pour plus de détails reportez-vous à la section 2.3.3. Étant donné que l’obésité, plus particulièrement le tissu adipeux viscéral, contribue à la résistance à l’insuline, et qu’obésité et diabète co-existent fréquemment, il n’est pas étonnant de constater la similitude entre la dyslipidémie de l’obèse et la dyslipidémie diabétique. Ces changements sont dû à une augmentation des acides gras libres circulants secondaire à la résistance à l’insuline et aggravés par une augmentation des adipokines inflammatoires (122, 125). L’augmentation des acides gras libres favorise la production hépatique de TG, qui en retour stimule la sécrétion d’apo-B et de VLDL. Le VLDL transportant des TG échange son contenu avec les particules de HDL transportant de l’ester de cholestérol via l’action de la CETP. Cet échange amène une augmentation des résidus de VLDL et des HDL appauvris en cholestérol et riche en TG. Ces derniers sont hydrolysés par la LH ou la lipoprotéine lipase (LPL) ce qui permet à l’apoA-I d’être filtré et dégradé par le rein (125).

La dyslipidémie la plus fréquemment rencontrée chez l’obèse est caractérisée par une hypertriglycéridémie, une diminution des HDL et une augmentation des LDL (126-129).

2.4.2 Facteurs influençant le bilan lipidique