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Chapitre 2. Comorbidités associées à l’obésité sévère

2.4 Dyslipidémie

2.4.2 Facteurs influençant le bilan lipidique

2.4.2.2 Alcool

L’effet de l’alcool sur la mortalité est non-linéaire et il est maintenant reconnu qu’elle suit une courbe en « J » (137). Jusqu’à 2 consommations par jour chez la femme et 4 chez

l’homme serait associées à une plus faible mortalité qu’aucune consommation. Le risque le plus faible serait observé avec ½ consommation par jour. Parmi les mécanismes proposés pour expliquer cette association, on retrouve une augmentation des HDL (138). Lorsqu’on compare les non consommateurs vs. les consommateurs d’alcool, les niveaux de HDL sont plus élevés chez les consommateurs et ce peu importe l’âge ou le sexe (139). Les HDL sont toutefois plus élevés avec une faible consommation d’alcool (< 30g d’éthanol par jour [ce qui correspond à 2 consommations]) (140) que chez ceux ayant une consommation modérée ou élevée (> 30g d’éthanol par jour) (139). La consommation d’alcool augmenterait les HDL par l’augmentation de leur production hépatique, du taux de transport de l’apoA-I et de l’apoA-II, de l’efflux de cholestérol cellulaire, de l’estérification du cholestérol plasmatique et par la diminution de la CETP (141). En ce qui concerne l’effet de l’alcool sur le cholestérol total, une étude observationnelle a montré une différence entre les sexes et l’âge. Chez les hommes, les niveaux de cholestérol total étaient supérieurs chez les consommateurs comparativement au non-consommateurs pour les sujets dans la vingtaine. Toutefois, l’inverse a été observé à partir de la trentaine (139). Chez les femmes, les niveaux de cholestérol total étaient inférieurs chez les consommatrices comparativement au non- consommatrices dans la tranche d’âge entre la vingtaine et la quarantaine (139). Toutefois, l’inverse était rapporté pour la tranche d’âge de la soixantaine (139). Les résultats d’une récente revue de la littérature suggèrent aussi une relation en « J » entre la consommation d’alcool et les TG. La triglycéridémie est inférieure chez les sujets qui boivent entre 10 et 20 g d’alcool par jour (142). À l’inverse, la consommation d’alcool concomitamment à un repas augmente et prolonge la triglycéridémie post-prandiale. L’effet de l’alcool sur les TG serait médié, au moins partiellement, par son effet sur la LPL. La LPL est responsable de l’hydrolyse des TG en lipoprotéines riche en TG et constitue le facteur limitant de l’élimination des TG au niveau plasmatique (142). L’activité de la LPL augmenterait suite à une consommation d’alcool modérée à long terme ce qui expliquerait l’effet hypotriglycéridémiant. D’autre part, la consommation aigüe d’alcool exerce un rétrocontrôle négatif sur l’activité de la LPL (142). Une étude prospective de cohorte a observé qu’une consommation faible à modéré d’alcool (défini comme <210 g d’alcool/semaine chez les hommes et <105 g d’alcool/semaine chez les femmes) augmentait les HDL2 et diminuait les

TG, le cholestérol total, les LDL, l’apo-B et les LDL petits et denses (141). La relation entre la consommation d’alcool et le bilan lipidique n’étant pas linéaire, une consommation d’alcool supérieure ne se traduit pas nécessairement par des bénéfices additionnels. Étant donné que la majorité des études sur le sujet sont observationnelles et considérant les biais

inhérents à l’évaluation de la quantité d’alcool via des questionnaires, plusieurs incertitudes persistent dans la littérature (141). Par exemple une méta-analyse d’études interventionnelles (2011) n’a pas démontré d’impact significatif de l’alcool sur les triglycérides (143).

2.4.2.3 Alimentation

Les fibres solubles, qui incluent notamment le son d’avoine et le psyllium, diminuent modestement les LDL et le cholestérol total selon une méta-analyse (144). L’effet serait plus marqué pour les patients hypercholestérolémiques, mais l’hétérogénéité des études rapportées était élevée. Plusieurs mécanismes sont proposés pour expliquer l’effet des fibres solubles; la liaison aux acides biliaires ou au cholestérol lors de la formation intra- luminale de micelles et l’inhibition de la synthèse d’acide gras hépatique par des produits de fermentation (144). Une méta-analyse plus récente portant sur l’effet de l’avoine bêta- glucan a conclue qu’à une dose de 3 g ou plus par jour, il y avait une diminution des LDL et du cholestérol total de 0,25 mmol/L et 0,30 mmol/L respectivement (145). Une fois encore l’hétérogénéité entre les études est significative. Plusieurs études se sont intéressées à l’effet des oméga-3 sur le bilan lipidique, mais les résultats sont variables principalement en raison du type d’oméga-3, de la dose utilisée et de la valeur initiale des TG. Les polyinsaturés oméga-3 en supplément diminuent les TG (25 à 35 %) et augmentent légèrement les LDL (5 à 10 %) et les HDL (1 à 3 %) (146). Globalement 3 à 4 g d’EPA (acide

eicosapentaenoique) et de DHA (acide docosahexaenoique) diminuerait les TG de 20 à 50 % dépendamment des valeurs initiales (147, 148). Les polyinsaturés oméga-3 pourraient augmenter la taille des HDL et des LDL (121). Les oméga-3 provenant de poisson ou d’huile

de poisson, diminueraient les TG plasmatiques et la synthèse de VLDL et d’apo-B (149). La consommation régulière de poisson est reliée à une diminution des VLDL de larges et de moyennes tailles. Plus particulièrement, le DHA est associé à de plus faibles niveaux de TG (150). Trois mécanismes sont proposés pour expliquer l’effet des oméga-3 sur les TG : 1) une diminution de la synthèse des acides gras hépatiques, 2) une augmentation de la synthèse des phospholipides et, 3) une diminution de l’activité de la diacylglycéride acyltransférase (DGAT), enzyme responsable de la synthèse des TG (148). L’ampleur de l’effet des oméga-3 sur les TG dépend de la dose quotidienne d’oméga-3 et de la valeur initiale de TG. La taille des particules LDL est influencée par l’apport total en protéine et en gras (150). Une augmentation de l’apport en gras saturé dans l’alimentation conduit à une augmentation du cholestérol total et des LDL. Cette augmentation des LDL pourrait être le résultat d’une régulation à la baisse des récepteurs LDL (151) dû au gras saturé et une

augmentation de la production des petits VLDL, précurseurs des LDL (121). Les acides gras « trans » augmentent les LDL et diminuent les HDL (121). Une alimentation riche en acide gras « trans » et saturé constitue le plus fort déterminant alimentaire responsable de niveaux élevés de LDL (92). Lorsque comparé à une alimentation dépourvue en cholestérol, l’alimentation riche en cholestérol augmenterait le cholestérol plasmatique (151). Il y aurait probablement une valeur cible au-dessus de laquelle une augmentation de l’apport alimentaire en cholestérol n’augmenterait pas davantage le cholestérol total (151). Cette valeur varie possiblement d’un individu à l’autre. Seulement 40 % du cholestérol ingéré est absorbé et le reste est éliminé dans les selles. De plus, le corps possède plusieurs mécanismes de protection contre une trop grande ingestion de cholestérol alimentaire ce qui permet de diminuer son absorption au besoin notament via les gènes ABCG (ATP- Binding cassette transporter class G) (151). Les TG à chaine moyenne sont susceptibles d’aider à gérer les maladies métaboliques via une modification du microbiote intestinale. Il est entre autres possibles qu’un microbiote en « santé » contribue au concept d’obèse métaboliquement sain (119). Une fois absorbé, la majorité des TG à chaine moyenne est transportée par le système porte directement au foie avec une mobilisation minimale des chylomicrons alors que les acides gras à chaines longues doivent être emballés dans les chylomicrons avant de pouvoir être transporté dans le système lymphatique (119). Les aliments à index glycémique élevé augmentent les TG et la concentration de LDL petits et denses et diminuent la concentration des HDL (121). Les aliments à index glycémique élevé auraient un effet hypertriglycéridémiant via une diminution de la clairance des particules contenant de l’apo-B associé avec une diminution de l’activité de la LPL et/ou une diminution de la concentration de l’apo-CIII. L’index glycémique est la mesure de la réponse glycémique post-prandiale suite à l’ingestion de glucides. Plus un aliment a un index glycémique élevé plus sa capacité à faire augmenter la glycémie après son ingestion est élevé (152). À l’inverse selon une méta-analyse regroupant 4 études, les aliments à index glycémique faible diminuerait le cholestérol total et les LDL (152). La synthèse d’acide gras et la sécrétion de TG peuvent être augmentées par une alimentation riche en glucides (121). Or, le fructose n’a aucun effet sur les LDL, non-HDL, apo-B, TG et HDL lorsqu’il remplace d’autres sources de glucides à calorie égale (153), mais augmente les LDL denses et les LDL oxydés (122). Toutefois, lorsque le fructose est consommé dans le cadre d’une alimentation en surplus énergétique, il augmente l’apo-B et les TG, mais cet effet n’est pas différent de celui attendu par une surconsommation de n’importe quel glucide (153). La perte de poids aurait un effet plus puissant sur la dyslipidémie athérogène que l’alimentation

(121). Une récente méta-analyse a conclu que le végétarisme réduit significativement le cholestérol total (0,36 mmol/L), les LDL (0,34 mmol/L), les HDL (0,10 mmol/L) et les non- HDL (0,30 mmol/L), mais n’affecte pas de façon significative les TG. L’IMC moyen des participants variait entre 24 et 35 kg/m2 (154). Le régime végétarien est faible en cholestérol,

en gras total et en acides gras saturés conduisant à une plus faible absorption du cholestérol ce qui pourrait expliquer une partie du mécanisme d’action de ce type d’alimentation. De plus, le végétarisme inclut souvent une plus grande quantité de phytostérols lesquels diminuent l’absorption du cholestérol intestinal. Les analyses de sous-groupes montraient une réduction moins importante du cholestérol total, des LDL et des non-HDL chez les patients obèses (IMC de  30 kg/m2). Quant aux protéines de soya, elles n’auraient pas de

bénéfice sur les HDL, le cholestérol total et les TG (92).