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Les zones concernées par les impacts à l’échelle du bassin sédimentaire sont les secteurs d’eau douce et/ou les zones où les aquifères confinés touchés par l’injection communiquent le plus directement avec la nappe phréatique. Cette étude doit donc modéliser le fonctionnement du bassin des BTSL à l’échelle globale pour quantifier les impacts hydrogéologiques qui peuvent avoir lieu dans les secteurs sensibles du bassin.

3.2.1 Processus à considérer

Les modélisations menées dans cette étude doivent rendre compte des impacts de l’injection

d’un grand volume de fluide, du CO2 supercritique, à l’échelle du bassin des Basses-Terres

du Saint-Laurent. Comme cela a été évoqué précédemment, il existe deux types d’impacts

hydrogéologiques de l’injection du CO2 à grande échelle. Le premier impact est l’élévation

de la surface libre, qui pourrait également être nommée élévation du niveau de la nappe phréatique. Cet impact potentiel est causé par l’augmentation de la charge hydraulique et peut être modélisé par un modèle d’écoulement en milieu poreux. Le modèle doit être capable de reproduire en 3 dimensions la forme du bassin des BTSL et de reproduire l’effet d’un, ou plusieurs, puits d’injection en régime transitoire. Le deuxième type d’impact est la migration de saumures vers les zones saturées en eau douce. Le modèle doit donc être également capable de simuler le transport advectif, et idéalement dispersif, de matières dissoutes dans l’eau.

3.2.2 Simplifications

Certains processus ayant une influence secondaire eu égard aux objectifs peuvent être ignorés, il s’agit de :

— La modélisation précise des écoulements multiphasiques, en tenant compte de la disso-

lution de chacune des phases, au niveau du panache de CO2

— Le transport de chaleur, le calcul des variations de la densité et de la viscosité de l’eau — La zone non saturée, généralement dans les unités quaternaires qui recouvrent les unités

paléozoïques à la surface

Phénomènes multiphasiques

Dans le cas de la séquestration du CO2 dans un aquifère salin, un grand volume de CO2

est injecté dans un milieu poreux saturé en saumures. La profondeur d’injection choisie doit permettre au CO2 injecté de rester en phase supercritique. Dans cet état, la densité du CO2

est comprise entre 400 et 800 kg · m−3 alors que la densité des saumures est comprise entre

1100 et 1300 kg · m−3. Dans ces conditions, le CO

2 supercritique tend à remonter au sommet

du réservoir par différence de densité, et forme un panache elliptique ayant un rayon maximal

pouvant atteindre plusieurs centaines de mètres. La viscosité faible du CO2 supercritique

facilite la remontée de la phase pure de CO2 vers le toit de l’aquifère. Cette différenciation

tend à diminuer la pression autour de la zone d’injection par rapport à l’injection d’une phase pure de saumures dans un même milieu saturé en saumures.

Un autre phénomène à considérer est la miscibilité des phases entre elles, qui permet no-

tamment la dissolution du CO2 dans les saumures. À terme la dissolution du CO2 abaisse la

pression dans la zone d’injection (Peters et collab.,2015). Ainsi, l’injection de CO2 supercri-

tique dans un milieu saturé en eau produit une pression moindre que l’injection d’un volume équivalent d’eau dans un milieu saturé en eau (Nicot et collab.,2011). Dans l’évaluation des impacts potentiels à l’échelle du bassin, négliger les propriétés diphasiques des écoulements revient à se placer dans un cas conservateur dans lequel l’injection engendre des variations de pression légèrement supérieures à celles attendues. Pour cette raison, et afin de diminuer l’utilisation des ressources de calcul, les écoulements multiphasiques seront négligés dans cette étude.

Variations des propriétés physiques de l’eau

La densité de l’eau est également influencée par la salinité, la température et dans une très faible mesure par la pression. Dans les BTSL, la salinité varie entre celle d’une eau de pluie sans influence sur la densité à une salinité de 315 g/l dans la profondeur (Pinti et collab.,

2011).Adams et Bachu(2002) proposent différents algorithmes, non présentés ici, permettant de calculer les propriétés des saumures dans les conditions de réservoir, basés sur l’observation des salinités de différents bassins sédimentaires. Parmi ces méthodes, les algorithmes proposés par McCain Jr(1991) sont présentés comme les plus performants. Grâce à ces algorithmes il est possible de définir la densité maximale de l’eau dans les conditions de surface en fonction seulement de la salinité ; 1.23·103kg·m−3, la valeur minimale étant 1.00·103kg·m−3. D’autre

part, dans les BTSL, le gradient géothermique est faible (2 à 2.5 K/100 m, Majorowicz et

Minea,2012), la température dans le bassin se situe donc entre 5˚C pour la surface et 95˚C à 4000 m de profondeur. En utilisant les outils proposés parMcCain Jr(1991), il est possible de calculer la densité en tenant compte de ces valeurs de température. Ainsi, pour une pression hydrostatique équivalente à 4000 m d’eau et pour une température de 95˚C, la densité calculée devient 1.20·103 kg·m−3, soit une variation totale de la densité de 20%. Ces résultats indiquent

la forte dépendance de la densité à la salinité et une plus faible dépendance à la température. La salinité des saumures demeure assez mal connue dans le bassin, un modèle conceptuel de ces salinités est présenté en 4.4.1.

Un second paramètre dépendant de la température, de la salinité et de la pression est la viscosité. Une élévation de température entraînera une diminution de la viscosité alors qu’une élévation de pression ou de salinité entraînera une augmentation de la viscosité dans des

proportions comparables. Toujours en utilisant les algorithmes de McCain Jr (1991), il est

possible de déterminer les viscosités aux sommet et à la base du bassin. En surface, la viscosité attendue est celle d’une eau peu minéralisée à une température de 5˚C, soit 1.36 · 10−3P a

· s. En profondeur, dans les conditions citées précédemment (T = 95˚C, p = 40 MPa et un fraction massique de 30 %), la viscosité calculée atteint 1.82 · 10−3 P a· s, soit une augmentation de

33%.

Il est donc possible de conclure que la viscosité et la densité varient significativement dans le bassin, avec dans les deux cas une augmentation en profondeur. Il faut également noter que dans le calcul de la conductivité hydraulique (voir3.1), les variations de viscosité et la densité, qui sont comparables, s’opposent.

K = ρg

µ k (3.1)

Ainsi, en profondeur l’effet de la variation de ces paramètre ne modifie que très peu la conduc- tivité hydraulique. Dans cette équation, c’est la perméabilité qui porte le plus d’incertitude. Dans la modélisation de processus hydrothermaux naturels, où existent de grandes différences de température au sein du système et des gradients hydrauliques relativement faibles, les va- riations de densité sont le principal moteur de l’écoulement. Dans le cas de la modélisation

de l’injection d’une importante masse de CO2 supercritique, les gradients hydrauliques très

importants engendrés ont une influence sur l’écoulement bien supérieure aux différences de densité. En effet, la différence de densité des fluides ne génère pas une différence de charge hydraulique significative par rapport à l’augmentation de charge hydraulique engendrée par l’injection de CO2 à l’échelle industrielle. À l’échelle du bassin, les paramètres hydrodyna-

miques et leur distribution au sein des formations présentent une variabilité ayant beaucoup plus d’incidence sur les conditions d’écoulement que l’effet des variations des propriétés phy- siques des saumures. Ainsi, dans le cas de la séquestration du CO2 dans le bassin de l’Illinois,

Zhou et collab. (2010) etPerson et collab.(2010), qui calculent les variations de salinité dans leurs modèles, arrivent à des conclusions différentes à cause d’un jeu de paramètres hydrodyna- miques différents. Pour ces raisons, les paramètres physiques de l’eau ainsi que la température vont être considérés comme constants dans cette étude.

Surface

L’objectif de cette étude est de déterminer les impacts hydrogéologiques potentiels à l’échelle du bassin. Il est impératif de représenter au mieux le système dans son ensemble et de déter-

miner les secteurs vulnérables vis-à-vis de l’injection d’un important volume de CO2 dans la

région de Bécancour. Le but n’est pas de quantifier les impacts d’une telle activité secteur par secteur et deux obstacles s’opposeraient à une telle réalisation. Premièrement, il n’existe pas de modèle en trois dimensions, à l’échelle des BTSL, des unités quaternaires qui recouvrent une grande partie du bassin et qui sont extrêmement hétérogènes dans l’espace. Représenter ces unités demanderait un travail supplémentaire d’acquisition de données qui n’est pas réa- lisable dans le cadre de cette thèse. De plus, modéliser ces unités réclamerait une importante discrétisation du maillage en surface, ce qui aurait pour effet d’augmenter considérablement le temps de calcul. Ainsi, le but de la modélisation n’étant pas de simuler avec une grande précision les phénomènes de surface, et à cause de la difficulté de représenter ces unités de surface, la modélisation de la zone non saturée ne sera pas envisagée dans cette étude.