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Les déficiences intellectuelles

Sémiologie de l'expression psycho-pathologique de l'enfant

4.2 Les déficiences intellectuelles

L'intelligence se développe régulièrement de la naissance à l'adolescence. On parle de déficit intellectuel lorsqu'on observe de façon persistante le retard dans cette évolution.

Seront envisagés successivement :

- Les ariérations mentales où le déficit intellectuel est au premier plan, avec une origine organique (neuro-biologique) reconnue ou supposée dans la plupart des cas.

- Les autres aspects de la déficience intellectuelle : plusieurs modes

d'expression psycho-pathologique comportent ou peuvent comporter un déficit intellectuel : détériorations secondaires, carences affectives, certains état psychotiques, "pseudo-débilités".

4.2.1 Les arriérations mentales

(Arriération et débilité sont des termes équivalents. Arriération est le terme actuellement utilisé par l'O.M.S. Dans la pratique, débilité désigne plutôt les formes moyennes ou légères, arriération, les formes graves de déficit

intellectuel).

4.2.1.1 Définition

Les arriérations mentales sont des insuffisances du développement de

l'intelligence apparues dès la naissance ou à début très précoce. Leur gravité est très variable allant du grand infirme mental voué à l'asile au débile léger pouvant accéder, dans des conditions favorables, à l'autonomie.

Ceci a conduit à distinguer ces états selon le degré de l'atteinte,

a - Les arriérations mentales profondes et sévères.

L'âge mental ne dépasse pas 2 ou 3 ans. Ce sont de grands infirmes, sans langage, les plus atteints sont grabataires et des troubles végétatifs sont possibles avec, parfois, un risque vital.

b - Les arriérations mentales moyennes.

Quelques acquisitions sont possibles : propreté, début de lecture (mécanique) sans comprendre. Ces sujets peuvent être occupés mais n'ont pas la capacité d'auto-protection, l'assistance d'une tierce personne est nécessaire.

c - Les arriérations mentales légères (débililité légère).

Une autonomie partielle est possible : une éducation spécialisée permet des apprentisssages simples.

d - Niveau limite (intelligence limite).

Une vie autonome est possible avec une adaptation plus ou moins bonne

pendant la période de scolarisation. Le plus souvent à l'âge adulte, il n'y a plus de difficultés d'adaptation.

La terminologie et les limites utilisées dans notre pays en fonction de l'usage, ou des règlements administratifs, peuvent être légèrement différentes.

4.2.1.2 Le diagnostic précoce

Il est indispensable pour adapter un traitement étiologique dans de rares cas (hypothyroïdie, phénylcétonurie,...) et éviter l'aggravation secondaire

consécutive à un trop grand retard de diagnostic (réactions préjudiciables de l'entourage, stimulations insuffisantes, déformations et attitudes vicieuses...) et se pose dans des conditions très variées, selon le degré de l'atteinte, le contexte étiologique plus ou moins évocateur, les troubles associés, etc... Le contexte périnatal peut amener à suspecter le diagnostic dès la naissance, sinon c'est le retard des acquisitions qui fait évoquer cette éventualité.

4.2.1.3 L'étiologie

Elle est parfois évidente, mais, le plus souvent, le problème est difficile. L'enquête est conduite en fonction des données de l'anamnèse et de l'examen clinique, qui permettent d'évoquer une origine anténatale, prénatale,

postnatale ou indéterminée. Les causes sont nombreuses (cf. chapitre Encéphalopathies).

- diagnostic évident : ex. : mongolisme, souffrance néonatale sévère... - diagnostic fait après recours à un spécialiste : maladies et syndromes rares identifiés,

- des examens complémentaires ne sont faits qu'en fonction d'une présomption clinique précise (pour confirmation),

- s'il n'y a pas d'éléments d'orientation, les examens "à l'aveugle" sont le plus souvent inutiles.

Actuellement, pour 30 à 50 % des cas, l'étiologie reste indéterminée.

4.2.1.4 La structure psychologique du déficient intellectuel

Il peut y avoir une inégalité de développement des différentes fonctions. Le retard de langage, ou de la propreté, par exemple peuvent être plus

importants que le retard global. Des capacités paradoxales (mémoire) peuvent être observées.

Le débile ne peut être comparé à un enfant de même âge mental, il n'est pas un enfant en réduction, réduit à la diminution du QI. C'est une personne, avec ses sentiments, ses motifs d'intérêt. Le pronostic évolutif n'est pas uniquement sous la dépendance du QI : il est très dépendant aussi du milieu de vie et des troubles associés qui sont fréquents. Ce sont des troubles neurologiques et sensoriels (infirmité motrice, épilepsie, déficits sensoriels...) et les troubles caractériels et affectifs (passivité ou excitation, symptomatologie de type "psychotique" ou "névrotique", délinquance, etc...). La situation d'échec, le rôle de l'entourage, favorisant ces réactions.

On voit donc l'importance d'une prophylaxie de toutes ces complications secondaires dans laquelle le médecin a un rôle à jouer.

4.2.1.5 L'attitude pratique

Le problème de la déficience mentale n'est pas seulement neurobiologique mais aussi social et éducatif. Trop souvent, dans le passé, les déficients mentaux ont été considérés comme un groupe homogène.

Ceci n'est pas vrai. La population déficiente mentale est aussi diverse par ses caractéristiques physiques, socioéconomiques, culturelles, et son

La plupart du temps, il n'y a pas de possibilité de traitement étiologique ; le problème qui se pose au médecin est de définir le degré de déficience mentale et de déterminer le pronostic de développement optimal. Ceci est essentiel pour aider les parents à accepter l'enfant et ses limites afin qu'ils puissent favoriser au mieux le développement de ses capacités.

Les déficients mentaux peuvent être divisés grossièrement en deux groupes : 1. ceux dont les capacités, bien que limitées, leur permettront de répondre favorablement à des programmes pédagogiques adaptés.

2. ceux dont les limites sont si importantes qu'elles exigent des soins de protection permanente.

Tous les efforts doivent être faits pour maintenir les sujets débiles moyens et légers dans leur famille et dans la communauté. On s'efforce de leur fournir dans des écoles spécialisées un programme éducatif correspondant à leurs besoins et à leurs capacités, l'enfant continuant, par ailleurs, de vivre dans la famille. C'est seulement après un essai bien conduit démontrant l'inaptitude à tirer profit d'un tel programme que l'on pourra envisager le placement.

Le placement peut être proposé pour ceux qui sont gravement retardés lorsque les parents apprécient pleinement les limites de leur enfant, et ses possibilités pour l'avenir. Dans cette démarche on tiendra compte de l'analyse éclairée des préoccupations des parents pour l'enfant, de la perspective restreinte d'un changement satisfaisant, de l'influence que la présence de cet enfant peut avoir sur la fratrie, etc...

Le rôle du psychiatre d'enfants est important. Puisque la plupart des parents savent déjà que leur enfant est déficient mental sa première responsabilité est de confirmer leur impression. En outre, il peut être d'un grand secours pour alléger les sentiments de culpabilité et d'anxiété qui existent toujours, sous des formes diverses, en déterminant de façon plus précise le degré du retard, sa cause éventuelle, et la perspective d'un développement optimum de l'enfant. Il peut consacrer le temps nécessaire pour bien faire comprendre aux parents leurs intérêts vis à vis des besoins de l'enfant, ceux des autres enfants, les leurs propres, et les difficultés auxquelles on peut s'attendre à l'avenir.

4.2.2 Les autres aspects de la déficience intellectuelle 4.2.2.1 Détérioration secondaire

(Synonyme de démence dans le terminologie classique).

C'est le cas d'enfants ayant eu préalablement une période de développement psychomoteur normal. Cette distinction entre arriérations et détériorations précoces peut paraître artificielle. Cependant, elle est utile pour la recherche précise d'une étiologie, et aussi parce que le problème se pose différemment, pour les parents, selon que l'enfant a été reconnu d'emblée arriéré ou a d'abord été considéré comme normal.

Ces détériorations sont secondaires à des maladies ou accidents connus : maladies dégénératives du système nerveux central et encéphalopathies progressives, méningites compliquées, encéphalites, traumatismes crâniens, etc... Quelquefois, elles sont en apparence primitives.

4.2.2.2 Carences affectives

SPITZ et d'autres auteurs ont montré à quel point le développement

psychomoteur du jeune enfant est conditionné par les stimuli qu'il reçoit de son milieu, et, en particulier, de sa mère. L'enfant délaissé, l'enfant victime

"d'hospitalisme"*, bien qu'ayant des potentialités intellectuelles normale, deviendront des débile, si l'on intervient pas à temps.

L'importance psycho-sociale de tels faits est considérable.

*Hospitalisme: ce terme désigne, selon SPITZ, l'état de jeunes enfants qui ont souffert de carence affective massive et prolongée. Il associe un retard du développement qui peut aboutir à un déficit intellectuel définitif et des

troubles du comportement semblables à ceux de certains enfant psychotiques. Ce terme est aujourd'hui impropre car il est exceptionnel, que ces états

surviennent à l'hôpital. En revanche, ils peuvent être observés dans les familles ou dans des institutions.

4.2.2.3 Psychoses

Psychoses et arriération mentale furent longtemps confondues, en particulier dans les formes précoces à type d'autisme car un déficit intellectuel apparaît secondaire. En réalité la distinction reste souvent difficile. D'un point de vue clinique, on peut opposer, dans la petite enfance, deux situations relativement bien définites :

a - le comportement psychotique :

- marqué par un trouble de la communication et du contact avec le monde extérieur, de l'adaptation au réel.

- reconnaissable grâce à des symptômes caractéristiques (bizarreries, troubles du langage, stéréotypies...),

On parle de psychose, ou d'état psychotique, lorsque ce syndrome est marqué par sa cohérence, sa gravité, sa tendance à persister ou à s'aggraver.

L'évolution vers un tableau déficitaire (déficit intellectuel) est fréquente mais non constante.

b - L'arriération mentale :

L'atteinte intellectuelle est primitive mais elle favorise le développement de symptômes psychotiques, c'est-à-dire de traits de comportement identiques à ceux des enfants psychotiques, qui coexistent fréquemement, à des degrés divers.

4.2.2.4 Pseudo-débilité mentale

"La notion de pseudo-débilité mentale est fondée sur un principe théorique : l'existence d'un tableau équivalent à celui de la débilité chez des sujets dont le potentiel intellectuel proprement dit est intact, et sur un principe pratique : la possibilité de transformer le tableau par une rééducation ou une thérapeutique adéquats permettant au sujet d'acquérir ou de percevoir les donées qui lui font défaut" (J. de AJURIAGUERRA).

On conçoit l'importance d'une telle notion pour le diagnostic, le pronostic, et les indications thérapeutiques. Cette situation est celle d'enfants qui, du fait d'un handicap particulier (moteur, sensoriel...) ont acquis un retard par rapport

aux enfants de leur âge. Ce retard peut être un simple décalage évolutif aisément curable par un traitement approprié et précoce.

Les principales causes sont les infirmités motrices cérébrales, les troubles sensoriels (amblyopie, surdité), certains troubles du langage, et des troubles d'origine psychique (enfant "instable", notion d'inhibition "névrotique").

Conclusion

Le devenir des sujets déficients mentaux n'est pas inéluctablement fixé par les limites de leurs possibiblités intellectuelles appréciées par le Q.I. Il dépend grandement de la qualité des soins qui seront proposés.

Ces enfants ont des besoins affectifs, pédagogiques, éducatifs, médicaux qui sont différents de ceux d'un enfant normalement doué. Leur famille a aussi besoin d'une aide surtout lorsqu'elle paraît réagir de façon inappropriée à cette épreuve (sollicitude excessive, dépression, hostilité, "rejet", etc...).

Il n'est pas vain d'envisager soigneusement les aspects médicaux du problème, notamment l'étiologie. Mais cette recherche est difficile à la fois au plan technique et psychologique. Elle doit être conduite avec compétence et une prudence particulière.

D'autre part, chez beaucoup d'enfants, la déficience intellectuelle est

l'expression ou l'aboutissement de processus psycho-pathologiques qui doivent être distingués de l'arriération, avec des implications pratiques différentes. Le diagnostic est souvent difficile et les erreurs peuvent être lourdes de

conséquences.

L'ensemble de ces faits justifie que tout enfant suspect de retard de

développement intellectuel fasse l'objet d'investigations médico-psychologiques précoces. Les aspects médicaux (enquête étiologique) sont envisagés en

fonction des données cliniques. Parallèlement, sont abordés les faits psychologiques qui constitueront l'essentiel des soins ultérieurs.