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Défaillance environnementale des réseaux d‘assainissement

CHAPITRE 2 REVUE DE LA LITTÉRATURE

2.2 Portrait général de la problématique des déversements des réseaux unitaires et

2.2.3 Défaillance environnementale des réseaux d‘assainissement

La défaillance environnementale la plus remarquable des réseaux d‘assainissement survient par suite de déversement des eaux sanitaires par les collecteurs pluviaux en temps sec, ou des eaux unitaires par les trop-pleins en temps humide (Gibson III et al., 1998; Mulliss et al., 1997; Petersen et al., 2005; Sercu et al., 2009). La fréquence annuelle des déversements (sans traitement) ne doit pas dépasser la valeur prescrite par le Ministère des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire MAMROT (0 rejet et 4 débordements par an par temps sec et humide, respectivement).

Les surverses sont l‘une des principales sources ponctuelles de la pollution du milieu récepteur (Ritter et al., 2002). Les impacts du débordement d‘orage sur le cours d‘eau récepteur dépendent de la dynamique du rejet, donc de l‘événement pluvieux. Leur sévérité est également fonction de la réaction du milieu, ce qui est également le cas pour les déversements en temps sec.

On peut distinguer deux types d‘impacts attribuables aux rejets d‘eaux de débordement : Les impacts immédiats et les impacts différés ou chroniques. Les impacts immédiats sont ceux subis par le milieu pendant une période de temps inférieure à l‘intervalle entre deux événements pluvieux. Le terme chronique fait référence à un impact dont la durée est supérieure au temps de déversement et à l‘intervalle entre deux pluies (CEGEO Technologies inc., 1993). Ils peuvent être classés selon trois catégories : les impacts esthétiques, les impacts physico-chimiques et les impacts microbiens (Chocat et al., 2007).

2.2.3.1 Impacts esthétiques

Les impacts esthétiques sont des signes d‘avertissement qui nous préviennent de la qualité de rejets. Les pollutions visuelles et olfactives sont attribuées à la forte turbidité des eaux, à la présence de débris sanitaires et flottants qui entraînent le plus souvent des odeurs désagréables et incommodantes pour les riverains ou les usagers du milieu. Ces odeurs sont causées, entre autres, par la dégradation de la matière organique contenue dans les sédiments (Chocat et al., 2007).

2.2.3.2 Impacts physico-chimiques

Le régime hydrologique du milieu récepteur est affecté par les débits importants des eaux de débordement qui sont fortement chargées en matières en suspension. Ces particules solides

véhiculées ont des granulométries et des vitesses de sédimentation élevées. D'après (Benoist & Lijklema, 1990), de 30% à 50% des solides contenus dans les débordements de réseaux unitaires sont de nature à sédimenter à proximité des émissaires. Deux conséquences peuvent se produire, dues principalement au caractère irrégulier des précipitations: d‘une part, l‘érosion de la berge et du fond et d‘autre part, l‘augmentation localisée des dépôts solides (Chocat et al., 2007). Les eaux de débordement sont chargées en matière organique biodégradable qui consomme l‘oxygène dissous dans le milieu aquatique. Par conséquent, ce milieu devient sous-oxygéné ou anoxie entraînant alors la mort des espèces aquatiques sensibles (Chocat et al., 2007). De même, la présence de nutriments (11,8.103 tonnes/annéeazote et 2,3.103 tonnes/annéephosphore) dans les eaux de surverses accélère l‘eutrophisation du milieu récepteur (Ritter et al., 2002).

Les micropolluants toxiques minéraux (particulièrement les métaux lourds) et organiques (composés pharmaceutiques, hormones, pesticides, etc.) ont des effets toxiques chroniques (tératogènes et cancérigènes). Ceci se traduit par une perte de biodiversité dans la faune et la flore (Ritter et al., 2002) par l'effondrement d'espèces, citons comme exemple les populations de poissons sauvages étudiées par Kidd et al. dans des lacs expérimentaux en Ontario (Kidd et al., 2007).

2.2.3.3 Impacts microbiens

Les microorganismes pathogènes sont classés au troisième rang après les nutriments et les sédiments parmi les principaux polluants affectant la qualité des eaux de surface aux États-Unis (Baker, 1992). La contamination d‘environ 32% des rivières polluées est attribuée à ce type de polluants (Ritter et al., 2002). Les matières fécales d‘origine humaine et animale sont les principales sources de pollution microbienne (Arnone & Walling, 2007). Les agents pathogènes provoquant des épidémies d‘origine hydrique sont les bactéries (organisme unicellulaire sans noyau ou procaryote et mesure rarement plus de quelques micromètres), les virus (organisme acellulaire formé d‘un assemblage d‘acides nucléiques et de protéines qui protègent ces acides nucléiques et lui donnent son pouvoir infectieux. Il est souvent de l'ordre d‘une dizaine ou d‘une centaine de nanomètres) et les parasites qui peuvent être unicellulaires (les protozoaires) ou multicellulaires (Chocat et al., 2007). Le Tableau 2.2 résume les maladies transmises par des principaux agents bactériens pathogènes, des virus et des protozoaires excrétés dans les fèces.

Au cours des cinquante dernières années, plus de la moitié des épidémies d‘origine hydrique aux États-Unis ont été précédées par des périodes de pluies abondantes (Curriero et al., 2001). Également, deux épidémies au Canada ; une à Walkerton en 2000 et une autre à North Battleford en 2001. L‘épidémie à North Battleford avait été provoquée par une inondation qui avait fait déborder des égouts et souillé le réservoir d‘eau potable de la ville, diffusant alors des bactéries pathogènes responsables de maladies hydriques. À Walkerton, l‘épidémie causait la mort de sept personnes et 2300 cas de gastroentérites (Hrudey & Hrudey, 2007), tandis qu‘à North Battleford, 35,8% de la population a été infecté (Wagner et al., 2005).

En milieu urbain, lors des événements pluvieux intenses, une forte charge en microorganismes est entraînée par le ruissellement sur des surfaces imperméables. Ces eaux peuvent contenir jusqu‘à 106,1 UFC d‘E. coli 100 mL-1 (Kim et al., 2005). Cependant, la contamination des eaux de surface par les coliformes fécaux provient majoritairement des réseaux d‘égout unitaires (Ritter et al., 2002). Une comparaison entre les microorganismes en temps humide et en temps sec, montre que les concentrations de ces derniers augmentent de 2 Log en aval du point de rejet de surverse en temps humide (Rechenburg et al., 2006). Quelle que soit la taille des réseaux d‘égout unitaires, la charge annuelle de bactéries et de parasites provenant de ces derniers a été trouvé significativement supérieure à celle de l'effluent traité de l'épuration des eaux usées (Figure 2.6). La durée de l‘événement pluvial joue également un rôle dans la détermination de la qualité de l‘eau réceptrice. Une étude menée par (Wu, Rees, et al., 2011) a démontré que la densité d‘E. coli était plus élevée pendant les événements intenses de courte durée en comparaison avec des événements modérés de longue durée. Dans le même contexte, Wu et al. ont trouvé que les sources contribuant à la contamination fécale de l‘eau en temps sec et humide sont différentes. En temps humide, la contamination fécale d‘origine humaine prédomine (24,43% en temps humide versus 9,09% en temps sec).

Tableau 2.2. Principaux agents pathogènes bactériens, virus et protozoaires présents dans les fèces et les maladies transmises, tiré de (Ritter et al., 2002).

Organisme Maladie Sources primaires

Bac

r

ie

s

Campylobacter Gastro-entérite Matières fécales humaines Salmonella (1700

espèces)

Fièvre typhoïde/salmonellose Matières fécales humaines et animales

Shigella (4 espèces) Dysenterie bacillaire Matières fécales humaines

Vibrio cholerae Choléra Matières fécales humaines

Escherichia coli (souches entéro-pathogènes)

Gastro-entérite Matières fécales humaines Yersinia enterocolitica Gastro-entérite Matières fécales humaines et

animales

V

ir

u

s

Adénovirus Maladies respiratoires et gastro- intestinales

Matières fécales humaines Enterovirus (71 types) Poliomyélite méningite aseptique Matières fécales humaines Hepatitis A Hépatite infectieuse Matières fécales humaines Virus de Norwalk Gastro-entérite Matières fécales humaines Reovirus Maladies respiratoires et gastro-

intestinales

Matières fécales humaines et animales

Rotavirus Gastro-entérite Matières fécales humaines Virus de Coxsackie Méningite aseptique Matières fécales humaines

P r ot oz oa ir e s

Balantidium coli Dysenterie Matières fécales humaines

Cryptosporidium entamoeba histolytica

Dysenterie Matières fécales humaines

Figure 2.6. Comparaison de la charge annuelle des kystes de Giardia dans la rivière provenant des stations d‘épuration et des débordements des égouts unitaires, tirée de (Rechenburg et al., 2006).

2.3 Qualité microbiologique des eaux et discrimination de l’origine

des contaminations fécales

A l‘échelle de la planète, la préoccupation majeure d‘eau potable reste la contamination microbienne ou fécale plutôt que les autres types de pollution (Parajuli et al., 2009; Stevens et al., 2004). Les risques de décès et de maladies hydriques causés par des agents pathogènes dans l'eau non traitée sont respectivement de 100 à 1000 fois et de 10 000 à 1 000 000 fois plus grands que le risque de cancer des sous-produits de chloration de l'eau potable (Regli et al., 1993). Selon l‘OMS, l‘eau contaminée est la première cause de maladie et de mortalité au monde (World Health Organization, 2001). Au Canada, 90 décès et 90 000 cas d‘infections aigües d‘origine hydrique sont enregistrés annuellement (Environnement Canada, 2001, 2009). Une étude récente a estimé 334 966 cas ayant une maladie gastro-intestinale aiguë (AGI) associée à des systèmes d'eau potable municipaux canadiens (Murphy et al., 2015). Une autre étude a démontré une association significative entre les précipitations extrêmes (dans la période de 8 jours suivants) et le taux de visites à l'urgence pour une maladie gastro-intestinale pour tous les âges seulement dans des régions où les sources d'eau potable sont touchées par des surverses (Jagai et al., 2015).