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Évaluation de la qualité microbiologique des eaux

CHAPITRE 2 REVUE DE LA LITTÉRATURE

2.2 Portrait général de la problématique des déversements des réseaux unitaires et

2.3.1 Évaluation de la qualité microbiologique des eaux

L‘identification de tous les microorganismes pathogènes responsables de maladies d‘origine hydrique est impossible pour les raisons suivantes : (i) la grande variété et diversité de microorganismes pathogènes qui peuvent être présents dans l‘eau contaminée ; (ii) la faible abondance de chaque espèce dans l‘échantillon analysé, ce qui conduit à utiliser des échantillons d‘eau de grand volume pour concentrer les pathogènes et (iii) l‘absence de méthodes standardisées et rapides pour la détection de ces microorganismes pathogènes, malgré le développement de la biotechnologie (Ortega et al., 2009; Stevens et al., 2004).

Les laboratoires de recherches et d‘analyses ont substitué la détection des pathogènes par des indicateurs de contamination fécale car la détection de tous les pathogènes potentiels est très difficile et incertaine. La microflore intestinale compte jusqu'à 100 000 milliards de bactéries, ce qui permet de l‘utiliser comme indicateur de la contamination fécale d‘origine humaine ou animale (Gilpin et al., 2002).

Un indicateur microbiologique idéal devrait répondre à des critères stricts tels que : (i) faire partie de la microflore intestinale ; (ii) être non pathogène ; (iii) sa présence est fortement associée à celle de microorganismes fécaux pathogènes et plus nombreux qu‘eux ; (iv) être au moins aussi résistant aux stress environnementaux et à la désinfection que les pathogènes ; (v) ne sont pas susceptibles de se multiplier dans l‘environnement ; (vi) rapidement détectable et facilement dénombrable à faible coût ; (vii) identifiable sans ambiguïté dans tous les échantillons ; (viii) être distribué de manière aléatoire dans l‘échantillon à analyser et enfin (ix) posséder des caractéristiques de cinétique similaires aux microorganismes pathogènes (Resnick & Levin, 1981).

Les chercheurs ont utilisé des méthodes traditionnelles pour le dénombrement de coliformes totaux, de coliformes fécaux ou Escherichia coli et d‘entérocoques, afin de déterminer la qualité microbiologique de l‘eau et d‘évaluer les risques sanitaires liés à la présence de microorganismes pathogènes d‘origine fécale dans les eaux (Gilpin et al., 2003; Plummer & Long, 2009). Il existe deux grands types de méthodes basées sur la mise en culture : (i) la détermination du nombre le plus probable (NPP) et (ii) la méthode de filtration sur membrane (MF). L‘eau ne devrait pas contenir d'Escherichia coli ni de coliformes totaux dans les systèmes d'approvisionnement en eau potable (Comité fédéral-provincial-territorial sur l'eau potable, 1968). Dans les eaux d‘irrigation, les recommandations canadiennes pour les coliformes fécaux et les coliformes totaux sont respectivement de 100 UFC 100 mL-1 et de 1000 UFC100 mL-1 (Le Conseil Canadien des Ministres de l‘Environnement, 2002). En eaux douces de baignade, le nombre de coliformes fécaux ne doit pas dépasser 200 UFC100 mL-1 avec un maximum de 10% des échantillons supérieurs à 400 UFC100 mL-1 (Ministère de l'Environnement et de la Faune, 1998).

Les méthodes classiques de dénombrement sont limitées par la turbidité élevée de l‘eau, la présence d‘autres microorganismes qui entrent en compétition avec les indicateurs dénombrés et la présence de facteurs inhibiteurs comme les métaux lourds et les phénols (Prescott et al., 2003).

2.3.1.1 Indicateurs microbiologiques classiques

Les indicateurs microbiologiques classiques de la contamination fécale ne permettent pas d‘identifier l‘origine des contaminants dans l‘environnement car ils sont présents à la fois dans les selles humaines et les excrétions des animaux à sang chaud et à sang froid (Field &

Samadpour, 2007). Ils sont sélectionnés pour détecter la présence d‘une pollution fécale, citons entre autres les coliformes totaux, les coliformes fécaux et les entérocoques.

Les coliformes totaux

L‘adoption de coliformes totaux (FT) par le Public Health Service aux États-Unis remonte à 1914 (Bitton, 2005). Ils sont utilisés comme indicateurs de la contamination fécale de l‘eau de surface et permettent d'évaluer l'efficacité d'une filière de traitement. Ils représentent 1% de la flore totale des matières fécales. Ce sont des bactéries en forme de bâtonnet, Gram-négatives, anaérobies facultatives ; non sporulantes, capables de fermenter le lactose avec production d‘acide et de gaz à 35 °C en 48 heures (Prescott et al., 2003). Le Tableau 2.3 présente les différents genres de coliformes qui ont été classifiés selon leurs origines. Des coliformes peuvent exister et proliférer dans les sols et les eaux naturelles (en grand nombre dans les eaux de surface) comme dans le système intestinal (Kampfer et al., 2008; Stevens et al., 2004).

Tableau 2.3. Classifications de coliformes totaux selon leurs origines.

Coliformes totaux Klebsiella Enterobacter Citrobacter Yersinia Serratia Hafnia Pantoea

Humaine/ Animale X X X X X X X

Environnementale X X X X X X X

Coliformes totaux Escherichia Kluyvera Cedecea Ewingella Moellerella Leclercia Rahnella Yokenella Humaine/ Animale X X

Environnementale X X X X X X X

Les coliformes fécaux ou coliformes thermotolérants

Les coliformes fécaux (FC) sont des coliformes intestinaux provenant d‘animaux homéothermes et capables de se multiplier à la température plus restrictive de 44,5 °C (Prescott et al., 2003). Parmi les coliformes fécaux, Escherichia coli (E. coli) est uniquement capable de produire l‘indole à partir de tryptophane (Garcia-Armisen et al., 2007; Pugsley et al., 1973). Il représente l‘espèce prédominante et est considéré comme l‘indicateur classique le plus spécifique d‘une contamination fécale d‘origine humaine ou animale puisqu‘il n‘existe que rarement dans l‘environnement, citons par exemple l‘eau chaude tropicale (Stevens et al., 2004). En moyenne,

E. coli constituait 77% des coliformes fécaux dans des échantillons d‘eau douce contaminés de

façon différentielle (Garcia-Armisen et al., 2007).

Des milieux spécifiques classiques sont utilisés pour la détermination du NPP ou des UFC, possédant du lactose et un indicateur pour identifier la production d‘acide, comme par exemple le

milieu mTEC. D‘autres milieux spécifiques permettant d‘augmenter la spécificité et diminuer le temps de réponse des méthodes basées sur la mise en culture, possèdent des substrats chromogéniques et fluorogéniques pour la détection d‘une activité enzymatique spécifique (β-D- glucuronidase, enzyme spécifique des E. coli). L‘hydrolyse de ces substrats par l‘enzyme spécifique donne lieu à des produits colorés ou fluorescents détectés sous illumination UV (Manafi, 2000).

E. coli demeurent moins longtemps dans le milieu naturel en comparaison avec les virus et les

protozoaires (Stevens et al., 2004). Cette bactérie est plus sensible à la lumière solaire, la prédation, et la salinité plutôt que le froid (Anderson et al., 2005; Harwood et al., 2005; Muela et al., 2000).

Des expériences in situ et in vitro menées par (Jenkins et al., 2011) ont montré que les souches pathogènes E. coli O157:H7 sont plus persistantes dans les eaux de surface que les indicateurs classiques, E. coli et les entérocoques fécaux. Ces derniers sont affectés par la prédation et la lumière solaire, alors que les souches pathogènes ont montré une forte résistance.

La turbidité et l‘attachement aux sédiments peuvent améliorer la survie d‘E. coli dans l'eau (Craig et al., 2004). Leur décadence est deux fois plus élevée à l‘état libre que lorsqu‘elles sont associées aux particules en suspension (Garcia-Armisen & Servais, 2009).

Les streptocoques ou les entérocoques fécaux

Les entérocoques sont parfois considérés comme plus résistants aux conditions environnementales et aux désinfectants que les autres indicateurs (comme les coliformes) (Anderson et al., 2005; Metcalf, 1978). Le ratio de coliformes fécaux à streptocoques fécaux (FC/FS) a été utilisé pour différencier entre les sources de contamination fécale humaine et animale. Pour un ratio supérieur ou égal à 4, la contamination est considérée d‘origine humaine. La contamination est d‘origine animale avec un ratio inférieur à 0,7 (Edwards et al., 1997). Les concentrations de FC et de FS peuvent être influencées par des variables telles que les saisons et le débit lors de l'échantillonnage (Edwards et al., 1997). Tyagi et al. (2009) ont présenté de nombreuses limites, raisons pour lesquelles APHA (American Public Health Association) n‘a plus recommandé l‘utilisation de ce ratio depuis l‘année 1998 sauf que pour une pollution fécale très récente : (i) le ratio se modifie graduellement avec le temps. Il peut alors

évoluer avec la survie des coliformes et des streptocoques dans l‘environnement ; (ii) il est affecté par la désinfection des eaux usées et par les méthodes de dénombrement de FS ; (iii) le taux de survie est variable entre les différentes espèces de streptocoques fécaux ; (iv) les variations de concentrations des streptocoques en fonction des individus, sont liées aux différents régimes alimentaires et ; (v) les valeurs intermédiaires sont difficilement interprétables.

Atherholt et al. ont montré que la pollution fécale des eaux souterraines a été détectée le plus souvent par le test de FT, suivie par les test de FC, E. coli et d'entérocoques. L‘absence de FC, d‘E. coli et/ou des entérocoques et la présence de FT et/ou des coliphages n‘indiquent pas absolument la présence d‘un risque sanitaire (Atherholt et al., 2003).

Enterococcus faecalis (E. faecalis) et E. faecium sont les deux espèces les plus souvent

identifiées chez l‘humain. Streptococcus bovis (S. bovis), S. equinus, S. gallolyticus et S.

alactolyticus ont été identifiées chez les bétails, les chevaux et les volailles. Parfois, elles peuvent

être présentes chez l‘humain, en particulier S. bovis (Groupe scientifique sur l'eau, 2002).

La diversité de sources de ces indicateurs fait détourner les études vers des indicateurs de plus en plus spécifiques. D‘où l‘utilisation des indicateurs microbiologiques spécifiques, moléculaires et/ou chimiques afin de dépister les sources de contamination fécale dans les eaux (Tyagi et al., 2009).