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Décomposition des perturbations engendrées par le brouillard

5.4 Définition d’un opérateur fréquentiel de contraste

6.1.2 Décomposition des perturbations engendrées par le brouillard

Le brouillard, ainsi qu’on l’a vu dans le premier chapitre, est une forte concentration de gouttelettes d’eau en suspension dans l’air. Lorsque la lumière visible se propage à travers ce milieu, elle subit principalement le phénomène de diffusion, l’absorption étant négligeable : les gouttelettes dispersent le flux lumineux selon une distribution spatiale qui dépend de leur taille. En perturbant la propagation de la lumière entre les différents éléments de l’environnement et l’observateur, la diffusion induit trois effets majeurs dans le signal visuel : l’extinction, le halo et les voiles.

6.1.2.1 L’effet d’extinction

L’extinction est la principale conséquence du brouillard. Lorsque la lumière parcourt l’es-pace séparant deux points dans le brouillard, une partie du flux lumineux transporté est perdue à cause de la diffusion. Selon la loi d’atténuation exponentielle de Beer-Lambert [Mid52], la

pro-portion de flux transmis est égale à la transmissivité e−Kd, où K est le coefficient d’extinction

e

-Kd1

e

-Kd2

e

-Kd source n°1 source n°2 surface observateur

FIG. 6.2 – L’effet d’extinction agit doublement sur la luminance des zones secondaires du signal

visuel.

L’effet d’extinction intervient sur tous les trajets suivis par la lumière avant d’atteindre l’ob-servateur. Au niveau des zones primaires du signal visuel, il s’en suit une atténuation exponen-tielle de la luminance apparente des surfaces émissives en fonction de leur profondeur dans le brouillard. Au niveau des zones secondaires, l’effet est multiplié, car comme le montre la fi-gure 6.2, l’extinction a lieu une première fois le long des trajets entre les sources lumineuses et les surfaces, atténuant l’éclairement reçu (et proportionnellement la luminance intrinsèque), et une deuxième fois sur le trajet séparant les surfaces de l’observateur, atténuant la luminance apparente.

6.1.2.2 L’effet de halo

On a établi dans le chapitre précédent qu’une partie de la lumière artificielle diffusée par les gouttelettes de brouillard le long des trajets lumineux vers l’observateur était susceptible de contribuer à la formation d’un effet de halo dans le signal visuel (figure 6.3). À l’image atténuée par l’effet d’extinction s’ajoute alors une image défocalisée, filtrée de ses hautes fréquences spatiales, de l’objet observé. La forme du halo dépend de la granulométrie du brouillard : plus la taille des gouttelettes est importante, plus le halo est intense et localisé. Naturellement, cet effet dépend également de la distance d’observation.

6.1. Effets visuels du brouillard

En toute rigueur, ce phénomène doit être pris en compte dans l’ensemble du signal visuel, au niveau des zones primaires et secondaires. En pratique, l’effet de halo est insignifiant au niveau des zones secondaires, même lorsqu’elles correspondent à des surfaces fortement réfléchissantes (marquages, panneaux), car leur luminance est toujours inférieure à celle des zones primaires, et parce qu’elles subissent doublement l’effet d’extinction. De plus, l’importance de l’effet de halo est atténuée par les effets de voile introduits ci-après.

6.1.2.3 Les effets de voile

Le voile atmosphérique

En conditions diurnes, les gouttelettes d’eau en suspension dans l’air contribuent à aug-menter la luminance apparente des éléments de l’environnement en diffusant une partie de la lumière qu’elles reçoivent du soleil et du ciel (diffusion simple), ainsi que des autres gouttelettes (diffusion multiple), dans la direction de l’observateur (figure 6.4). La diffusion de la lumière naturelle par le brouillard génère ainsi un « voile » qui s’interpose entre l’observateur et son environnement, dans lequel se fondent et disparaissent progressivement les objets distants.

La luminance de voile atmosphérique dépend naturellement de la luminance du brouillard, c’est-à-dire de la luminance de voile pour une distance infinie, elle-même dépendante des condi-tions d’illumination, et par conséquent de la position géographique, de la date et de l’heure, ainsi que des conditions météorologiques (ciel clair ou couvert) au moment de l’observation. Les travaux récents de Paulmier [Pau02] montrent que la luminance du brouillard varie non seulement en fonction de la direction d’observation par rapport au soleil comme prévu par Middleton [Mid52], mais également de l’épaisseur optique de la couche de brouillard (produit de la hauteur par le coefficient d’extinction) et de la granulométrie, avec des niveaux compris entre une centaine et plusieurs dizaines de milliers de candelas par mètre carré.

FIG. 6.4 – Les effets de voile sont dus à la diffusion de la lumière du jour et à la rétrodiffusion

Le voile rétrodiffusé

Lorsque l’observateur est un conducteur au volant de son véhicule, le code de la route lui

impose d’allumer ses feux de croisement par temps de brouillard1,2. Le flux lumineux émis

par ces sources interagit avec les gouttelettes de brouillard à l’avant du véhicule, et une partie est rétrodiffusée vers le conducteur (figure 6.4). Les projecteurs du véhicule contribuent ainsi à la formation d’un voile supplémentaire entre l’observateur et la scène routière, voile qui peut s’avérer gênant si les projecteurs sont mal réglés. Mais contrairement à la luminance de voile atmosphérique qui augmente avec la distance des objets observés, la luminance de voile rétro-diffusée peut raisonnablement être considérée comme indépendante de la scène.

Par contre, ce voile dépend à la fois des caractéristiques des projecteurs du véhicule et de la microstructure du brouillard. D’une part, le flux rétrodiffusé est directement proportionnel au flux des projecteurs, ce qui laisse prévoir que les lampes à décharge équipant les véhicules récents créent un voile plus important que les classiques lampes halogènes. D’autre part, les grosses gouttelettes favorisent la diffusion vers l’avant, et par conséquent réduisent le voile rétrodiffusé. Des simulations de mesures photométriques réalisées avec le code de simulation PROF présenté au chapitre 4 ont montré que la luminance maximale dans le voile rétrodiffu-sée ne dépasse pas le candela par mètre carré (figure 6.5) ; Rosenhahn [Ros01], qui a étudié l’influence de la répartition directionnelle du flux émis par les projecteurs sur la luminance rétrodiffusée, présente des ordres de grandeur similaires.

(a) Diamètre de mode inférieur au micron.

(b) Diamètre de mode

10 µm.

(c) Diamètre de mode

20 µm.

FIG. 6.5 – Exemples de distribution de luminance de voile rétrodiffusé obtenues par simulation,

dans une portion de 45° du champ visuel du conducteur d’un véhicule de type Peugeot 205 dont les projecteurs sont allumés en position feux de croisement, pour différents types de brouillard avec une visibilité météorologique de 40 m. Les yeux de l’observateur sont à 1,2 m de hauteur ; les projecteurs à 0,6 m au-dessus du sol, et écartés de 1 m.

1. Article R40 du Code de la Route (Livre Ier, Titre Ier, Paragraphe VIII).

2. Les projecteurs antibrouillard ne sont pas obligatoires, mais sont susceptibles d’accroître la luminance de voile rétrodiffusé lorsqu’ils sont allumés [Ric].