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6. Cycle du VIH

6.2. Décapsidation et rétrotranscription

Une fois que la fusion des membranes cellulaire et virale a eu lieu, la capside virale qui contient les deux brins d’ARN viral et de nombreuses protéines virales va se retrouver dans le cytoplasme de la cellule. La capside virale est de forme conique et est formée par un assemblage de pentamères de la protéine virale de capside (p24 pour VIH-1, p26 pour VIH-2). Le désassemblage de la capside virale est indispensable à l’initiation de la rétrotranscription du génome viral.

Un facteur de restriction cellulaire, TRIM5α (“tripartite motif-containing 5α”), peut accélérer la décapsidation en se fixant à la capside virale et en la déstabilisant, exposant les acides nucléiques viraux et stimulant donc l’immunité innée (Stremlau et al., 2004). Cette action antirétrovirale est très limitée pour le VIH-1 mais elle est jusqu’à 9 fois importante pour le VIH-2 et est liée à la séquence de la capside virale (Takeuchi et al., 2013; Ylinen et al., 2005).

La rétrotranscription débute rapidement après la décapsidation, cette étape est orchestrée par la TI virale. La TI est un hétérodimère composé des protéines p66 et p51 (pour le VIH-1). La protéine p66 possède deux sites actifs, l’un en partie N-terminale avec une activité ADN-polymérase ADN- et ARN-dépendante et l’autre en partie C-terminale avec une activité RNAse H lui permettant de dégrader l’ARN des hybrides ARN/ADN produits lors de la rétrotranscription.

La TI vient se fixer sur le brin d’ARN, sur la séquence PBS (Primer Binding Site) située immédiatement en aval de la région LTR 5’ (Figure 9-A) et débute la synthèse d’un ADN de polarité négative (Figure 9-B). Une fois arrivée à la région R du LTR5’, la TI effectue son premier saut et va se fixer sur le LTR en 3’, par hybridation des séquences R, et reprend la synthèse de l’ADN viral (Figure 9-C et D). En parallèle, la TI dégrade l’ARN viral en 5’ via son activité RNAse H (Figure 9-E).

Seules deux séquences ARN riches en purine résistent à cette dégradation, le cPPT (« central PolyPurine Tract ») et le 3’PPT. Ces deux séquences servent alors d’amorces pour la synthèse du brin d’ADN de polarité positive, générant ainsi un ADN complémentaire comprenant la région 3’ unique précédant le LTR 3’, le LTR 3’ complet et une région 5’ unique (celle

29 précédant la séquence PBS) (Figure 9-F). Peu après, la TI dégrade les dernières séquences ARN : les PPT et la séquence PBS (Figure 9-G).

En parallèle, le génome ADN double brin va se circulariser et, grâce à la complémentarité des deux brins sur la région 5’ unique (région précédant la séquence PPBS), la TI peut poursuivre la synthèse du brin d’ADN de polarité positive (Figure 9-H). La synthèse de ce brin de polarité positive s’arrête au niveau de la séquence CTS (Central Termination Sequence) (Figure 9-I). La TI va alors effectuer son deuxième saut pour se fixer sur l’ADN de polarité négative et entamer la synthèse du LTR 5’ (Figure 9-J), permettant d’obtenir deux brins d’ADN complémentaires, sauf sur une courte région proche du CTS où il y a un recouvrement d’environ 100 nucléotides (Figure 9-K) (Charneau et al., 1994).

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Représentation schématique de la rétrotranscription de l’ARN viral en ADN viral double brin par la transcriptase inverse. Les ARN viraux sont représentés en vert, les ARN viraux en bleu. (D’après (Charneau et al., 1994)

Abréviations : ARNt : ARN de transfert ; CTS : « Central Termination Sequence » ; PBS : « Primer Binding Site » ; PPT : « Poly Purine Tract » ; TI : transcriptase inverse.

Deux facteurs de restriction cellulaire de cette étape de rétrotranscription sont décrits : les protéines cellulaires APOBEC3G/F et la protéine SAMHD1. Les protéines APOBEC3G/F sont des protéines cellulaires qui vont être intégrées aux virions nouvellement formés et qui vont induire des mutations G vers A lors de la rétrotranscription, rendant potentiellement les provirus porteurs de ces mutations incapables de se répliquer (Figure 10). C’est donc un facteur de restriction antirétrovirale qui a la particularité d’agir sur le cycle suivant d’infection. La protéine Vif des VIH dégrade les protéines APOBEC3G/F (Sheehy et al., 2002).

FIGURE 10 :DESCRIPTION DU CONTEXTE NUCLEOTIDIQUE DEDITION PAR APOBEC3G/F.

APOBEC3G et 3F sont des protéines cellulaires avec une activité cytidine déaminase. Elles vont agir sur le brin d’ARN viral en transformant une déoxycytidine en déoxyuridine par déamination. Par convention, le contexte APOBEC est regardé sur le brin d’ADN complémentaire, où est visible une mutation G vers A. Ces deux protéines vont préférentiellement induire une transition G vers A sur des guanines suivies d’un R (G ou A) puis d’un D. Les contextes non-APOBEC3G/F sont donc tous les autres environnements nucléotidiques.

Abréviations : A : adénosine, C : cytosine, D : tout nucléotide sauf cytosine, G : guanine, T : thymine et R : guanine ou adénosine.

La protéine SAMHD1 déplète le pool intracellulaire en dNTP qui sont indispensables pour la synthèse des acides nucléiques, limitant voire bloquant la rétrotranscription du génome viral (Hrecka et al., 2011; Laguette et al., 2011). Son action est contrecarrée par la protéine Vpx du VIH-2 qui se fixe à SAMHD1 et à un complexe ubiquitine ligase, entraînant la dégradation de SAMHD1 par le protéasome. Le VIH-1 ne possède pas de protéine Vpx, ce qui expliquerait la difficulté du VIH-1 à se répliquer dans les cellules avec un faible taux intracellulaire de dNTP tels que les macrophages ou les cellules dendritiques (Hrecka et al., 2011). Dans un modèle

32 expérimental de déplétion de SAMHD1 par une protéine Vpx de VIH-2 ou de VISmac, les cellules dendritiques peuvent être infectées par le VIH-1, l’activation immunitaire étant dépendante de l’interaction de la cyclophilline A cellulaire avec la capside virale (Manel et al., 2010). La présence de Vpx dans le génome des VIH-2 ne leur permet néanmoins pas d’infecter efficacement les cellules dendritiques dérivées de monocytes, cela n’étant a priori pas dû à SAMHD1 mais plutôt à un défaut dans le mécanisme d’entrée du virus (Chauveau et al., 2015).